Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. H...a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 17 novembre 2015 par lequel le maire d'Orléans a décidé l'euthanasie dans les plus brefs délais du chien de type berger malinois dénommé " Santino " et d'enjoindre au maire d'Orléans de lui restituer l'animal dans un délai de sept jours à compter du jugement à intervenir.
Par un jugement n° 1503931 du 12 décembre 2017, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa requête.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 26 février 2018, M. H..., représenté par Me G..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 12 décembre 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté du maire d'Orléans du 17 novembre 2015 ;
3°) de mettre à la charge de la commune d'Orléans le versement au profit de son conseil d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
M. H... soutient que :
- l'arrêté a été pris par une autorité incompétente ;
- l'arrêté n'est pas suffisamment motivé en droit ;
- l'arrêté est intervenu à l'issue d'une procédure irrégulière faute d'avoir été précédé de la procédure contradictoire prévue à l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 désormais repris à l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ;
- l'arrêté est entaché d'une erreur d'appréciation du danger, qui ne présentait pas un caractère grave et immédiat, représenté par l'animal.
Par un mémoire en défense, enregistré le 18 mai 2018, la commune d'Orléans, représentée par Me C...et associés, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. H...une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La commune soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. H...n'est fondé.
M. H...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 1er juin 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code rural et de la pêche maritime ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Besse, rapporteur ;
- et les conclusions de M. Bréchot, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Le 6 mars 2015, le chien dénommé " Santino ", de race malinois et âgé de 8 ans, a mordu deux personnes sur la voie publique à Orléans. A la suite de cet incident, le maire d'Orléans a, par un arrêté du même jour pris en application des dispositions de l'article L. 211-14-2 du code rural et de la pêche maritime, mis en demeure M.A..., alors propriétaire du chien, de procéder dans les 24 heures à la première des trois visites vétérinaires prévues, en cas de morsure d'une personne, par l'article L. 223-10 du même code, et de faire procéder dans un délai de huit jours à l'évaluation comportementale de l'animal prévue par l'article L. 211-14-1, sous peine de son placement dans un lieu de dépôt adapté à son accueil et à sa garde. Si M. A...a bien soumis son chien à trois visites vétérinaires les 12, 19 et 30 mars 2015, aucune évaluation comportementale de l'animal n'a en revanche été réalisée pendant la même période. Le chien " Santino " a de nouveau mordu les 10 avril et 24 septembre 2015, toujours sur la voie publique à Orléans. Constatant alors l'absence de réalisation de l'évaluation comportementale, le maire d'Orléans a décidé, par arrêté du 25 septembre 2015, de placer l'animal au refuge de la SPA de Chilleurs-aux-Bois. Dans ce cadre, le chien a été examiné le 5 octobre 2015 par un premier vétérinaire, qui a constaté qu'il était " ingérable " et qu'il présentait un danger pour la sécurité des personnels du refuge et des soignants. Une évaluation comportementale a ensuite été réalisée le 30 octobre 2015 par le docteur Leseur, vétérinaire habilité à cette fin par arrêté préfectoral, qui a conclu au classement de l'animal au niveau quatre de risque de dangerosité, niveau maximal prévu par l'article D. 211-3-2 du code rural et de la pêche maritime, et a préconisé une euthanasie dans les plus brefs délais. Par arrêté du 17 novembre 2015 pris en application du dernier alinéa de l'article L. 211-14-2 du code rural et de la pêche maritime, le maire d'Orléans a ordonné qu'il soit procédé à l'euthanasie du chien " Santino ". M.H..., devenu propriétaire du chien à compter du 4 octobre 2015, relève appel du jugement du 12 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 novembre 2015.
2. Aux termes de l'article L. 211-11 du code rural et de la pêche maritime : " (...) II. - En cas de danger grave et immédiat pour les personnes ou les animaux domestiques, le maire ou à défaut le préfet peut ordonner par arrêté que l'animal soit placé dans un lieu de dépôt adapté à la garde de celui-ci et, le cas échéant, faire procéder à son euthanasie (...) / L'euthanasie peut intervenir sans délai, après avis d'un vétérinaire désigné par le préfet. Cet avis doit être donné au plus tard quarante-huit heures après le placement de l'animal. A défaut, l'avis est réputé favorable à l'euthanasie (...) ". L'article L. 211-14-2 du même code dispose par ailleurs : " Tout fait de morsure d'une personne par un chien est déclaré par son propriétaire ou son détenteur ou par tout professionnel en ayant connaissance dans l'exercice de ses fonctions à la mairie de la commune de résidence du propriétaire ou du détenteur de l'animal. / Le propriétaire ou le détenteur du chien est en outre tenu de le soumettre, pendant la période de surveillance définie en application du premier alinéa de l'article L. 223-10, à l'évaluation comportementale mentionnée à l'article L. 211-14-1, qui est communiquée au maire. / A la suite de cette évaluation, le maire ou, à défaut, le préfet peut imposer au propriétaire ou au détenteur du chien de suivre la formation et d'obtenir l'attestation d'aptitude mentionnée à l'article L. 211-13-1. / Faute pour l'intéressé de s'être soumis à ces obligations, le maire ou, à défaut, le préfet peut ordonner par arrêté que l'animal soit placé dans un lieu de dépôt adapté à la garde de celui-ci. Il peut, en cas de danger grave et immédiat et après avis d'un vétérinaire désigné par le préfet, faire procéder à son euthanasie ". Enfin, aux termes de l'article D. 211-3-1 de ce code, dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté litigieux : " L'évaluation comportementale prévue à l'article L. 211-14-1 du présent code est réalisée dans le cadre d'une consultation vétérinaire. Elle a pour objet d'apprécier le danger potentiel que peut représenter un chien. L'évaluation comportementale est effectuée, sur des chiens préalablement identifiés conformément aux dispositions de l'article L. 212-10, par un vétérinaire inscrit sur une liste départementale établie par le représentant de l'Etat dans le département (...) ".
3. En premier lieu, l'arrêté du 17 novembre 2015 par lequel le maire d'Orléans a ordonné qu'il soit procédé à l'euthanasie du chien " Santino " a été signé par M. D...F..., 6ème maire-adjoint, qui disposait d'une délégation régulièrement consentie par le maire par un arrêté du 7 juillet 2015 à l'effet de signer, notamment, les arrêtés en matière de sécurité et tranquillité publiques. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté en litige doit être écarté.
4. En deuxième lieu, l'arrêté du 17 novembre 2015 vise les textes sur lesquels le maire d'Orléans s'est fondé pour l'édicter, notamment les articles L. 211-11 et suivants du code rural et de la pêche maritime. Par suite, alors même qu'il ne vise pas expressément l'article L. 211-14-2 de ce code, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation en droit de l'arrêté, qui comporte par ailleurs un exposé détaillé des considérations de fait qui lui servent de fondement, doit être écarté.
5. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du maire d'Orléans a eu pour objet de mettre fin à un danger grave et immédiat pour les personnes ou les animaux domestiques en application des dispositions précitées de l'article L. 211-14-2 et du II de l'article L. 211-11 du code rural et de la pêche maritime, qui ne prévoient aucune formalité préalable au placement et à l'euthanasie d'un animal dès lors que la situation de danger grave et immédiat est caractérisée. Dès lors, le maire d'Orléans n'était pas tenu, compte tenu de l'urgence, de permettre à M. H...de présenter ses observations avant de prendre sa décision en application de l'article 24 de la loi susvisée du 12 avril 2000. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté litigieux aurait été pris au terme d'une procédure irrégulière doit être écarté.
6. En quatrième et dernier lieu, s'il résulte des dispositions précitées du code rural et de la pêche maritime que l'autorité chargée de la police municipale ne saurait prescrire la mise à mort sans condition ni délai d'un animal qu'en vue de parer un danger grave et immédiat, il ressort des dispositions de l'article L. 211-14-2 du même code, éclairées par les travaux parlementaire préalables à l'adoption de l'article 7 de la loi du 20 juin 2008 renforçant les mesures de prévention et de protection des personnes contre les chiens dangereux dont elles sont issues, qu'elles s'appliquent à l'ensemble des chiens ayant mordu une personne et non uniquement aux types de chiens, réputés dangereux, visés à l'article L. 211-12 du même code et inclus dans la liste de l'arrêté du 27 avril 1999 pris pour son application, au nombre desquels ne figurent pas les malinois.
7. Il est vrai qu'il ressort du compte-rendu rédigé par le docteur vétérinaire ayant procédé, sur demande du maire, à l'évaluation comportementale de l'animal, que celle-ci s'est déroulée après plus d'un mois de captivité, sans contact direct avec l'animal et en l'absence de son précédent maître, auquel il était lié par un attachement qualifié " d'exceptionnel " par un jugement du 9 octobre 2015 du tribunal de grande instance d'Orléans statuant en matière correctionnelle. De telles conditions d'évaluation, qui ont au demeurant résulté de la carence de M. A...à y pourvoir antérieurement de sa propre initiative, ainsi qu'il en avait l'obligation légale, ont pu conduire à surestimer la dangerosité de l'animal, alors qu'il résulte de l'instruction qu'il n'a mordu, dans un but exclusivement défensif, que des personnes qui ont eu des gestes agressifs à l'égard de son propriétaire sans jamais se montrer menaçant pour de simples passants sur la voie publique. Par ailleurs, n'a pas été pris en compte le fait que le chien " Santino " a été cédé au cours du mois d'octobre 2015 par M. A...à M.H..., lequel réside dans une ferme en Saône-et-Loire, ni par suite étudiée la possibilité pour l'animal de résider chez son nouveau propriétaire dans cet environnement rural, sans présenter de danger pour l'ordre public. Toutefois, dans les circonstances de l'espèce, ces éléments apparaissent insuffisants, au regard notamment de la réitération des cas de morsure et des appréciations portées successivement par deux docteurs vétérinaires sur la dangerosité de l'animal, pour considérer qu'en décidant de procéder à l'euthanasie de l'animal, le maire d'Orléans aurait entaché sa décision d'une erreur d'appréciation au vu du danger grave et immédiat que représentait le comportement du chien " Santino ", et que cette décision aurait présenté un caractère disproportionné au regard des nécessités de sauvegarde de l'ordre public. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision aurait procédé d'une erreur d'appréciation doit être écarté.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. H...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune d'Orléans, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. H...au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. En outre, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la commune d'Orléans sur le même fondement.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. H...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune d'Orléans sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. H...et à la commune d'Orléans.
Délibéré après l'audience du 18 décembre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller,
- M. Besse, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 4 janvier 2019.
Le rapporteur,
P. BesseLe président,
L. Lainé
Le greffier,
M. B...
La République mande et ordonne au préfet du Loiret en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18NT00839