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18/02/2019 | FRANCE | N°17NT02012

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 18 février 2019, 17NT02012


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Beauce Plant a demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos le 30 juin 2009.

Par un jugement n° 1600999 du 25 avril 2017, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 3 juillet 2017, la SARL Beauce Plant, représentée par

MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de faire droit à sa demande ;

3°) de me...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Beauce Plant a demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos le 30 juin 2009.

Par un jugement n° 1600999 du 25 avril 2017, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 3 juillet 2017, la SARL Beauce Plant, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la procédure d'imposition est entachée d'irrégularité en raison d'un débat oral et contradictoire altéré dès lors que la rectification portant sur la provision pour créance douteuse n'a été évoquée que lors de la réunion de synthèse du 11 juillet 2012, que la proposition de rectification a été transmise de manière très rapprochée par rapport à la date de cette réunion et qu'il n'était pas possible de saisir l'inspecteur ou ses supérieurs hiérarchiques ;

- la provision pour créance douteuse a été constituée au cours de l'exercice 2001, soit antérieurement à l'entrée en vigueur de la restriction apportée à la règle de l'intangibilité du bilan d'ouverture du premier exercice non prescrit par l'article 43 de la loi de finances rectificative pour 2004 consistant à exclure du " droit à l'oubli " les erreurs de même type reproduites à l'identique d'exercice en exercice ;

- les instructions administratives BOI 4A-10-06 et BOI-ANNX-00114 prévoient l'absence d'application du principe de l'intangibilité du bilan d'ouverture dans le cas de provisions régulièrement constituées à l'origine mais devenues sans objet si elles ont été dotées plus de sept ans avant la date d'ouverture du premier exercice non prescrit ;

- la provision était justifiée dès lors que la perte de la créance revêtait un caractère probable.

Par un mémoire, enregistré le 25 janvier 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la loi n° 2004-1485 du 30 décembre 2004 ;

- la décision n° 2010-78 QPC du 10 décembre 2010 du Conseil constitutionnel ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Malingue,

- les conclusions de M. Jouno, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société à responsabilité limitée (SARL) Beauce Plant, qui exerce une activité de production et vente de pommes de terre à usage de plants, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er juillet 2008 au 30 juin 2011 à l'issue de laquelle l'administration fiscale a remis en cause la déductibilité d'une provision pour créance douteuse d'un montant de 210 889 euros. Après procédure contradictoire et saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires qui a examiné le litige en sa séance du 15 mai 2013, la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés résultant de ce contrôle a été mise en recouvrement le 23 septembre 2013 pour un montant, en droits et pénalités, de 79 575 euros. Après le rejet, par décision du 25 janvier 2016, de ses deux réclamations préalables, la SARL Beauce Plant a sollicité auprès du tribunal administratif d'Orléans la décharge de cette imposition. Elle relève appel du jugement du 25 avril 2017 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Si la SARL Beauce Plant soutient que la rectification portant sur la provision pour créance douteuse n'a été évoquée que tardivement et que la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet est irrégulière dès lors que le débat oral et contradictoire a été altéré, elle ne l'établit pas alors qu'elle reconnaît elle-même que cette question a été abordée au moins une fois avec le vérificateur lors de la réunion de synthèse du 11 juillet 2012 et que le fait même que des pièces relatives à cette provision ait été remises au vérificateur le 2 juillet 2012 révèle que ce point avait été abordé dès avant. Les circonstances que la proposition de rectification du 20 juillet 2012 lui a été transmise peu de temps après la réunion de synthèse et, à la supposer établie, qu'il ne lui aurait pas été possible d'avoir des échanges avec le vérificateur ou ses supérieurs hiérarchiques postérieurement à l'envoi de la proposition de rectification sont sans influence sur la garantie du débat oral et contradictoire lors des opérations de contrôle. Par suite, le moyen doit être écarté.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

3. L'administration fiscale a réintégré dans le résultat imposable de la SARL Beauce Plant une somme de 210 889 euros inscrite en provision dans les écritures de l'exercice clos le 30 juin 2009 qui correspond, selon la société, à des créances douteuses sur la société Greenvale AP. Cette provision a été initialement comptabilisée pour un montant de 82 374 euros au titre de l'exercice clos en 2001 puis portée à 210 882 euros au bilan de l'exercice clos le 30 juin 2002.

4. En premier lieu, le paragraphe 1 de l'article 39 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable, dispose que le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges dont " 5° les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables ". Il résulte de ces dispositions qu'une entreprise ne peut valablement porter en provision et déduire des bénéfices imposables d'un exercice des sommes correspondant à des pertes ou charges qui ne seront supportées qu'ultérieurement par elle qu'à la condition, notamment, que ces pertes ou charges apparaissent comme probables eu égard aux circonstances constatées à la date de la clôture de l'exercice.

5. Il résulte de l'instruction que la SARL Beauce Plant a conclu, en février et mars 2000, deux contrats de production de pommes de terre avec la société britannique Greenvale AP et que cette production n'a été que partiellement prise en charge en novembre 2000 et avril 2011 par cette société, l'excédent ayant été détruit le 16 juin 2001. La SARL Beauce Plant a transmis le 30 juin 2001 à la société Greenvale VP les factures du 28 juin 2001 correspondant à cette marchandise non chargée ainsi que des frais de stockage pour un montant total de 205 934,83 euros. En l'absence de paiement, elle a procédé à une relance le 24 septembre 2001 puis, le 20 décembre 2001, à la résiliation des contrats. Eu égard aux dates d'émission et de transmission des factures ainsi que de la relance de demande de paiement, la société requérante ne justifiait pas, au 30 juin 2001, date de clôture de l'exercice, de la probabilité de la perte de créance pour un montant de 82 374 euros. Par ailleurs, s'agissant des exercices ultérieurs, en admettant même que la provision n'eût pas perdu son objet, l'unique relance à laquelle la société a procédé avant la résiliation des contrats conclus avec la société Greenvale AP, dont aucun élément n'établit qu'elle eût été dans une situation financière difficile, n'est pas de nature à justifier de diligences de recouvrement permettant de conclure au caractère douteux de cette créance et donc à justifier la constitution par la SARL Beauce Plant d'une provision à hauteur de 210 882 euros. Enfin, si la société requérante se prévaut de l'absence de remise en cause de cette provision à l'occasion de la précédente vérification de sa comptabilité, elle ne justifie d'aucune prise de position formelle invocable sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales. Il s'ensuit que ces provisions ne sont pas justifiées.

6. En second lieu, l'article 38 du code général des impôts prévoit que : " (...) 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés. (...) 4 bis. Pour l'application des dispositions du 2, pour le calcul de la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de l'exercice, l'actif net d'ouverture du premier exercice non prescrit déterminé, sauf dispositions particulières, conformément aux premier et deuxième alinéas de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales ne peut être corrigé des omissions ou erreurs entraînant une sous-estimation ou surestimation de celui-ci. / Les dispositions du premier alinéa ne s'appliquent pas lorsque l'entreprise apporte la preuve que ces omissions ou erreurs sont intervenues plus de sept ans avant l'ouverture du premier exercice non prescrit.(...) ".

7. D'une part, en vertu des II et III de l'article 43 de la loi du 30 décembre 2004 de finances rectificative pour 2004, dans sa rédaction applicable au litige compte tenu de la décision n° 2010-78 QPC du 10 décembre 2010 du Conseil constitutionnel, les dispositions du 4 bis de l'article 38 du code général des impôts dans leur rédaction rappelée au point 6 du présent arrêt, s'appliquent aux exercices clos à compter du 1er janvier 2005 et aux impositions établies à compter du 1er janvier 2005. Il en résulte que, si ces dispositions ne sont pas applicables, s'agissant des exercices clos avant le 1er janvier 2005, aux impositions établies avant cette date, elles le sont, en revanche, à l'ensemble des impositions qui sont susceptibles d'être établies, après cette date, au titre des mêmes exercices. L'imposition en cause, qui remet en cause une provision initialement constituée lors de l'exercice clos en 2001 et augmentée en 2002, a été établie en 2013 au titre de l'exercice clos en 2009. Par conséquent, la SARL Beauce Plant n'est pas fondée à soutenir que les dispositions du 4 bis de l'article 38 du code général des impôts rappelées au point précédent du présent arrêt ne sont pas applicables.

8. D'autre part, l'inscription non justifiée en provision d'une somme pendant plusieurs exercices successifs, même si les montants sont identiques, constitue la répétition d'une erreur. Cette erreur, même lorsqu'elle a été commise pour la première fois au cours d'un exercice clos plus de sept ans avant l'ouverture du premier des exercices non prescrits, ne peut être corrigée dans le bilan d'ouverture du premier de ces exercices. Par conséquent, la SARL Beauce Plant ne peut utilement se prévaloir des dispositions du deuxième alinéa du 4 bis de l'article 38 du code général des impôts, dès lors que l'erreur tenant à la déduction de la provision litigieuse, si elle est intervenue la première fois plus de sept ans avant l'ouverture du premier exercice non prescrit, a été répétée à la clôture de tous les exercices suivants.

9. En troisième lieu, la SARL Beauce Plant n'est pas fondée à se prévaloir de l'instruction BOI-4A-10-06 du 29 juin 2006 dans les prévisions de laquelle elle n'entre pas dès lors qu'elle n'a pas estimé que la provision en litige était devenue sans objet. Elle ne peut davantage se prévaloir de l'instruction BOI-ANNX-00114-20141013 du 13 octobre 2014 qui a été publiée postérieurement à la mise en recouvrement de l'imposition.

10. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Beauce Plant n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande. Sa requête, y compris ses conclusions relatives aux frais liés au litige, doit donc être rejetée.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Beauce Plant est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée Beauce Plant et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 31 janvier 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- M. Geffray, président-assesseur,

- Mme Malingue, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 février 2019.

Le rapporteur,

F. MalingueLe président,

F. Bataille

Le greffier,

A. Rivoal

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N°17NT02012

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17NT02012
Date de la décision : 18/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: Mme Fanny MALINGUE
Rapporteur public ?: M. JOUNO
Avocat(s) : CABINET FIDAL (CHARTRES)

Origine de la décision
Date de l'import : 26/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-02-18;17nt02012 ?
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