Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... B...a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler les arrêtés du 27 février 2018 par lesquels la préfète d'Eure-et-Loir, d'une part, a ordonné sa remise aux autorités néerlandaises et, d'autre part, l'a assigné à résidence dans le département d'Eure-et-Loir pour une durée de quarante-cinq jours.
Par un jugement n° 1800776 du 6 mars 2018, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif d'Orléans a rejeté ses demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 4 avril 2018 et le 5 avril 2018, M.B..., représenté par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 6 mars 2018 de la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif d'Orléans ;
2°) d'annuler les arrêtés du 27 février 2018 de la préfète d'Eure-et-Loir ;
3°) de condamner l'Etat au versement des frais irrépétibles sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
En ce qui concerne l'arrêté portant remise aux autorités néerlandaises :
- il n'a pas été informé, par écrit, dans une langue qu'il comprend, des délais et des procédures applicables en matière de compétence des Etats concernant les demandes d'asile ;
- la France étant le premier pays dans lequel il a déposé une demande d'asile, c'est la France qui doit être déclarée responsable et non pas les Pays-Bas ;
- la France est responsable de sa demande d'asile au regard des dispositions du paragraphe 2 de l'article 3 du règlement n° 2003/343 du Conseil du 18 février 2003.
En ce qui concerne l'arrêté portant assignation à résidence :
- il est privé de base légale en raison de l'illégalité de l'arrêté de réadmission ;
- les obligations qui accompagnent l'assignation à résidence sont trop restrictives en ce qu'elles l'empêchent de subir des examens nécessaires pour pratiquer un don d'organe, prévu en faveur de son frère.
Par un mémoire en défense, enregistré le 17 septembre 2018, la préfète d'Eure-et-Loir conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés et informe la cour de ce que le requérant a pris la fuite.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 mai 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le règlement (UE) n° 2003/343 du Conseil du 18 février 2003 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Francfort, président assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M.B..., ressortissant algérien, né le 9 mars 1984, déclare être entré en France le 25 août 2017, sous couvert d'un visa délivré par les autorités néerlandaises valable du 18 août 2017 au 1er décembre 2017. Le 25 septembre 2017, il a déposé une demande d'admission au séjour au titre de l'asile auprès des services de la préfecture d'Eure-et-Loir. La consultation de la base de données Visabio ayant révélé que les autorités néerlandaises avaient délivré un visa à M.B..., la préfète d'Eure-et-Loir a sollicité le 20 novembre 2017 la reprise en charge de M. B... par les autorités néerlandaises sur le fondement des dispositions du 2 de l'article 12 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013. Ces autorités ont accepté, le 10 janvier 2018, cette reprise en charge. Par deux arrêtés du 27 février 2018, la préfète d'Eure-et-Loir a décidé de transférer M. B...aux autorités néerlandaises et de l'assigner à résidence pour une durée de quarante-cinq jours. M. B...relève appel du jugement du 6 mars 2018 par lequel la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif d'Orléans a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des arrêtés du 27 février 2018.
En ce qui concerne l'arrêté de transfert :
2. En premier lieu, le requérant, qui soutient qu'il n'a pas été informé par écrit, dans une langue qu'il comprend, des délais et des procédures applicables en matière de compétence des Etats, doit être regardé comme invoquant la méconnaissance des dispositions de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 qui prévoit un droit à l'information complète sur le dispositif dit " Dublin III ".
3. Il ressort des pièces du dossier que M.B..., qui comprend l'arabe, s'est vu remettre le 25 septembre 2017, lors de son dépôt de demande d'asile auprès des services de la préfecture, les brochures dites A et B ainsi que le " guide du demandeur d'asile ", en langue arabe. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 sera écarté.
4. En deuxième lieu, aux termes des dispositions du 2 de l'article 12 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " Si le demandeur est titulaire d'un visa en cours de validité, l'Etat membre qui l'a délivré est responsable de sa demande de protection internationale (...) ".
5. Il ressort des pièces du dossier que M. B...s'est vu délivrer un visa le 7 août 2017 par les autorités néerlandaises, valable du 18 août 2017 au 1er décembre 2017. Par suite, à la date de sa demande d'asile, le requérant était titulaire d'un visa en cours de validité. Dans ces conditions, la circonstance que le France soit le premier pays dans lequel il ait demandé l'asile est sans incidence sur la détermination de l'Etat responsable de l'examen de sa demande.
6. En troisième lieu, le requérant doit être regardé comme invoquant la méconnaissance des dispositions du 2 de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, aux termes duquel " L'Etat membre dans lequel une demande de protection internationale est présentée et qui procède à la détermination de l'Etat membre responsable, ou l'Etat membre responsable, peut à tout moment, avant qu'une première décision soit prise sur le fond, demander à un autre Etat membre de prendre un demandeur en charge pour rapprocher tout parent pour des raisons humanitaires fondées, notamment, sur des motifs familiaux ou culturels, même si cet autre Etat membre n'est pas responsable au titre des critères définis aux articles 8 à 11 et 16. (....) ".
7. Si M.B..., qui est entré récemment en France le 25 août 2017 avec son épouse et ses enfants, depuis scolarisés, se prévaut de la présence de sa mère et de son frère sur le territoire français. Toutefois il ressort des pièces du dossier que son épouse a également fait l'objet d'un arrêté de transfert. Par ailleurs aucun justificatif n'est apporté quant à la présence de sa mère ou de son frère sur le territoire. Il n'établit ni même n'allègue l'existence d'obstacle à la reconstitution de la cellule familiale en dehors du territoire français. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 sera écarté.
En ce qui concerne l'arrêté d'assignation à résidence :
8. En premier lieu l'illégalité de la décision ordonnant le transfert aux autorités néerlandaises n'étant pas établie, le moyen tiré de son illégalité soulevée à l'encontre de la décision portant assignation à résidence sera écarté.
9. En second lieu le requérant soutient que l'assignation à résidence comporte des obligations restrictives, l'empêchant d'effectuer les examens nécessaires à la greffe de rein qu'il aurait prévu d'effectuer en faveur de son frère. Si le requérant apporte une ordonnance du 19 mars 2018 pour une échographie rénale, un scanner abdomino-pelvien ainsi qu'un bilan prégreffe, tous documents postérieurs aux décisions en litige, il ne démontre pas que l'interdiction de sortir du département l'aurait empêché de subir ces examens. Dans ces conditions, ce moyen sera écarté.
Sur les frais liés au litige :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'a pas dans la présente instance la qualité de partie perdante, la somme que demande M. B...au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B...et au ministre de l'intérieur. Une copie sera transmise à la préfète d'Eure-et-Loir.
Délibéré après l'audience du 29 mars 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. Francfort, président assesseur,
- Mme Gélard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 23 avril 2019.
Le rapporteur,
J. FRANCFORTLe président,
H. LENOIR
La greffière,
E. HAUBOIS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18NT01361