Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société par actions simplifiée (SAS) Philocolor Peintures a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler la décision du 14 juin 2017, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2008, 2009 et 2010 et de prononcer le remboursement de la somme de 230 671 euros correspondant au bénéfice du crédit d'impôt pour dépenses de recherche au titre de ces années.
Par un jugement n° 1702860 du 19 juin 2018, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 9 août 2018 et 11 avril 2019, la SAS Philocolor Peintures, représentée par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler la décision du 14 juin 2017 ;
3°) de prononcer ce remboursement, assorti des intérêts moratoires ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle a développé différents projets de recherche et de développement sur les thématiques de la réduction des solvants dans les peintures et le développement de nouvelles peintures pour des supports spécifiques, ouvrant droit au bénéfice du crédit d'impôt recherche au titre des opérations de développement expérimental ;
- elle dispose d'un laboratoire composé de chimistes et de responsables techniques chargé de développer des solutions techniques innovantes.
Par deux mémoires, enregistrés les 11 février 2019 et 31 juillet 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 14 juin 2017 sont irrecevables dès lors que cette décision n'est pas détachable de la procédure d'imposition ;
- à titre principal, les dépenses engagées ne se rattachent pas à des opérations de recherche et développement ;
- à titre subsidiaire, à supposer que les projets soient éligibles au crédit d'impôt, les dépenses de rémunération présentées ne pourraient être prises en compte dans leur totalité.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- et les conclusions de Mme Chollet, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. A l'issue de la vérification de comptabilité de la société par actions simplifiée (SAS) Philocolor Peintures, qui exerce une activité de fabrication de peintures et de vernis pour les métaux indusriels, l'administration fiscale a, par proposition de rectification du 28 novembre 2012, rejeté la demande de crédit d'impôt pour dépenses de recherche présentée au titre des années 2009, 2010 et 2011. Les impositions supplémentaires à l'impôt sur les sociétés concernant les exercices clos en 2009, 2010 et 2011 en résultant ont été mises en recouvrement le 14 février 2014, pour un montant total de 230 671 euros. Après le rejet, par décisions des 7 octobre 2015, 27 avril 2016 et 14 juin 2017, de ses réclamations préalables, la société a sollicité auprès du tribunal administratif d'Orléans la décharge de ces impositions. Elle relève appel du jugement du 19 juin 2018 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande.
2. Aux termes de l'article 244 quater B du code général des impôts : " I. Les entreprises industrielles et commerciales (...) peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année (...) ". Aux termes de l'article 49 septies F de l'annexe III à ce code : " Pour l'application des dispositions de l'article 244 quater B du code général des impôts, sont considérées comme opérations de recherche scientifique ou technique : / (...) c. Les activités ayant le caractère d'opérations de développement expérimental effectuées, au moyen de prototypes ou d'installations pilotes, dans le but de réunir toutes les informations nécessaires pour fournir les éléments techniques des décisions, en vue de la production de nouveaux matériaux, dispositifs, produits, procédés, systèmes, services ou en vue de leur amélioration substantielle. Par amélioration substantielle, on entend les modifications qui ne découlent pas d'une simple utilisation de l'état des techniques existantes et qui présentent un caractère de nouveauté ". Ne peuvent être prises en compte pour le bénéfice du crédit d'impôt recherche que les dépenses exposées pour le développement ou l'amélioration substantielle de matériaux, dispositifs, produits, procédés, systèmes, services, dont la conception ne pouvait être envisagée, eu égard à l'état des connaissances techniques à l'époque considérée, par un professionnel averti, par simple développement ou adaptation de ces techniques.
3. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve au contribuable, il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si les opérations réalisées par le contribuable entrent dans le champ d'application du crédit d'impôt recherche eu égard aux conditions dans lesquelles sont effectuées ces opérations, et, notamment, d'examiner si les opérations de développement expérimental en cause présentent un caractère de nouveauté au sens de l'article 49 septies F de l'annexe III au code général des impôts.
4. Il résulte de l'instruction que la SAS Philocolor Peintures a initialement déposé, à l'appui de ses demandes de crédit d'impôt en faveur de la recherche, deux dossiers techniques portant sur les deux thématiques qu'étaient la réduction de solvants dans les peintures et le développement de nouvelles peintures pour supports spécifiques et relatifs à 19 sous-projets. Saisi de ces dossiers, l'expert diligenté par la délégation régionale à la recherche et à la technologie a, dans son rapport du 17 octobre 2012, relevé que les dossiers ne comportaient pas d'état de l'art, que les verrous et incertitudes scientifiques rencontrés ne sont pas justifiés et que les projets développés par la société Philocolor Peintures constituaient une simple utilisation de l'état des connaissances existantes dans la mesure où ces projets consistent en l'utilisation de matières premières ayant des caractéristiques spécifiques connues, créées par des fournisseurs, et leur intégration dans des formulations en remplacement d'un composé à éliminer tout en gardant des propriétés spécifiques. La société requérante produit en appel un nouveau dossier technique, établi en 2015, qui réorganise la présentation de 18 sous-projets en cinq projets principaux que sont le développement de nouvelles peintures en vue de réduire la quantité de produits nocifs, la résolution de problématiques inhérentes à l'utilisation de peintures hydro-diluables, la recherche de solutions techniques permettant le blocage du phénomène de remontée des tanins dans le cadre de l'application d'une peinture sur bois, la recherche de solutions techniques permettant l'application de peintures en condition d'humidité et de température non contrôlées et la recherche de solutions techniques permettant l'amélioration substantielle de l'aspect visuel des peintures, et qui apporte, selon elle, des éclaircissements nouveaux sur les verrous rencontrés et les travaux expérimentaux menés. Toutefois ce nouveau dossier ne permet pas à lui seul et en lui-même d'établir que les opérations procèdent autrement que par simple utilisation et combinaison de l'état de techniques existantes ou de révéler un caractère de nouveauté scientifique ou technologique caractérisant un nouveau produit, distinctement d'une nouvelle variété commerciale. Par suite, ces projets ne portent pas sur des améliorations substantielles, ni ne présentent un caractère de nouveauté, au sens et pour l'application des dispositions de l'article 49 septies F de l'annexe III au code général des impôts. Dès lors, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration n'a pas admis le caractère éligible des dépenses engagées pour mener à bien ces projets.
5. Il résulte de ce qui précède que la société Philocolor Peintures n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande. Par suite, sa requête, y compris ses conclusions aux fins d'annulation de la décision du 14 juin 2017, irrecevables dès lors que cette décision n'est pas détachable de la procédure d'imposition ainsi que le fait valoir le ministre en défense et l'ont jugé à bon droit les premiers juges, et ses conclusions relatives aux frais liés au litige, doit être rejetée.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SAS Philocolor Peintures est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée Philocolor Peintures et au ministre des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 10 septembre 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- M. Geffray, président assesseur,
- Mme B..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 24 septembre 2020.
Le rapporteur,
F. B...Le président,
F. BatailleLa greffière,
E. Haubois
La République mande et ordonne au ministre des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
No 18NT031132