Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... D... a demandé au tribunal des pensions militaires d'invalidité de Maine-et-Loire d'annuler la décision du 11 avril 2016 par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande tendant à l'obtention d'une pension militaire d'invalidité.
Par un jugement n° 16/00003 du 7 juin 2019, le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Maine-et-Loire a fait droit à sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 14 août 2019 au greffe de la cour régionale des pensions d'Angers, puis le 18 juin et 20 novembre 2020 sous le n° 19NT03864 devant la présente cour, laquelle est devenue compétente pour statuer sur ce type de litige à compter du 1er novembre 2019 en vertu de la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018, la ministre des armées demande à la cour d'annuler le jugement du tribunal des pensions militaires d'invalidité de Maine-et-Loire du 7 juin 2019 et de rejeter la demande présentée par M. D... devant cette juridiction.
Elle soutient que :
- les premiers juges se sont appuyés sur des hypothèses et ont pris en considération des éléments qui relèvent des conditions générales de service ;
- il n'existe aucun fait précis, aucun accident de tir dûment identifié permettant de considérer que " l'hypoacousie de perception bilatérale (...) " dont souffre M. D..., trouve sa cause dans l'exécution du service ;
- le livret médical militaire ne comporte aucune trace d'une quelconque consultation relatant un problème auditif en 1985.
Par un mémoire en défense, enregistré le 1er septembre 2020, M. D... conclut au rejet de la requête et à ce que les dépens soient mis à la charge de l'Etat.
Il soutient que les moyens soulevés par la ministre des armées ne sont pas fondés.
M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 septembre 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A... ;
- et les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. D..., engagé dans l'armée de terre le 1er octobre 1985, a été admis dans le corps des sous-officiers de carrière le 1er janvier 2004. Il a sollicité, le 29 janvier 2014 et le 18 février 2014, le bénéfice d'une pension militaire d'invalidité en raison de " séquelles de traumatisme de l'épaule gauche (...) et d'une " hypoacousie de perception bilatérale ". Sa demande a été rejetée par une décision de la ministre des armées du 11 avril 2016. Par une requête enregistrée le 6 juin 2016, M. D... a contesté cette décision devant le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Maine-et-Loire. Par un jugement du 7 juin 2019, cette juridiction a fait droit à la demande de M. D.... La ministre des armées relève appel de ce jugement.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L.2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, alors en vigueur : " Ouvrent droit à pension : 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; 3° L'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service ; 4° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'accidents éprouvés entre le début et la fin d'une mission opérationnelle, y compris les opérations d'expertise ou d'essai, ou d'entraînement ou en escale, sauf faute de la victime détachable du service. ". Aux termes de l'article L.3 du même code : " Lorsqu'il n'est pas possible d'administrer ni la preuve que l'infirmité ou l'aggravation résulte d'une des causes prévues à l'article L. 2, ni la preuve contraire, la présomption d'imputabilité au service bénéficie à l'intéressé à condition : 1° S'il s'agit de blessure, qu'elle ait été constatée avant le renvoi du militaire dans ses foyers ; 2° S'il s'agit d'une maladie, qu'elle n'ait été constatée qu'après le quatre-vingt-dixième jour de service effectif et avant le soixantième jour suivant le retour du militaire dans ses foyers ; 3° En tout état de cause, que soit établie, médicalement, la filiation entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée. (...)". Aux termes de l'article L.4 du même code : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 %. (...) ".
3. Il résulte de ces dispositions que, s'il ne peut prétendre au bénéfice de la présomption légale d'imputabilité, le demandeur d'une pension doit rapporter la preuve de l'existence d'un fait précis ou de circonstances particulières de service à l'origine de l'affection qu'il invoque. Cette preuve ne saurait résulter de la seule circonstance que l'infirmité soit apparue durant le service, ni d'une hypothèse médicale, ni d'une vraisemblance, ni d'une probabilité, aussi forte soit-elle.
4. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que dans le cadre de l'instruction de sa demande de pension, M. D... a été ausculté par le Dr Noca, expert près de la cour d'appel d'Angers, le 31 octobre 2018. Cet expert relève alors que : " M. D... présente manifestement des troubles de l'audition compatibles avec des séquelles de traumatismes sonores aigus. L'origine de ces traumatismes sonores aigus est parfaitement en cohérence avec son activité professionnelle de fantassin en unité de combat. Néanmoins, aucune preuve objective de traumatismes sonores aigus n'est rapportée dans le dossier médical ". Lors de ses évaluations auditives, retranscrites dans son dossier médical, l'intéressé est noté 1 au SIGYCOP à la date de son incorporation en 1985, ainsi qu'au terme des 90 premiers jours de présence en milieu militaire, en 1986. Ce n'est qu'à partir de 2005, soit 20 ans après son incorporation, que la baisse d'audition de M. D... est constatée, l'acuité auditive est alors notée 3 au SIGYCOP. Lors de cette visite, le médecin relève en substance : " TSA (traumatismes sonores aigus) anciens non documentés ". Aucun élément médical attestant d'un TSA de 1985 à la date de la demande de pension, ni aucune preuve administrative telle qu'un rapport circonstancié ou un extrait du registre des constatations, n'apparaît au dossier médical de M. D.... L'attestation du 21 février 2014 de l'adjudant-chef Guillemain produite et les pièces médicales émises entre 2005 et 2014, qui indiquent notamment " qu'il s'est constitué progressivement une surdité prédominant à gauche, ayant motivé un avis ORL en 2005 ", ne sont pas de nature à remettre en cause ces différentes constatations. Dans ces conditions, aucun élément du dossier ne permet de rattacher " l'hypoacousie de perception bilatérale " dont souffre l'intéressé à l'exécution du service. La seule circonstance que cette infirmité soit apparue pendant le service ne saurait suffire pour établir, en l'absence de fait précis ou de circonstances particulières de service à l'origine de cette affection lesquelles font défaut au cas d'espèce, le lien de causalité entre la maladie en cause et le service. Par suite, la ministre des armées est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Maine-et-Loire a annulé la décision du ministre de la défense du 11 avril 2016 et à demander, pour ce motif, l'annulation du jugement attaqué.
Sur les dépens :
5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne permettent pas d'en faire bénéficier la partie perdante ou tenue aux dépens. Les conclusions présentées à ce titre par M. D... ne peuvent dès lors qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 7 juin 2019 du tribunal des pensions militaires d'invalidité de Maine-et-Loire est annulé.
Article 2 : La demande de M. D... présentée devant le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Maine-et-Loire est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la ministre des armées et à M. C... D....
Délibéré après l'audience du 25 juin 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Coiffet, président,
- Mme B..., première conseillère,
- M. A..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 juillet 2021.
Le rapporteur,
F. A...Le président,
O. COIFFET
La greffière,
P. CHAVEROUX
La République mande et ordonne à la ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19NT03864