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16/07/2021 | FRANCE | N°21NT00207

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 16 juillet 2021, 21NT00207


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B..., agissant en son nom propre et en qualité de représentante légale de ses enfants mineurs, G... et Ussac Nkutu Mbaki, a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision de l'ambassade de France en République Démocratique du Congo du 21 octobre 2019 rejetant la demande de visa de long séjour présentée pour son compte et pour le compte de ses deux enfants en qualité de membres de famille de réfugié.

Par un jugement n° 2002453 du 11 janvier 2021, le tribunal administr

atif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B..., agissant en son nom propre et en qualité de représentante légale de ses enfants mineurs, G... et Ussac Nkutu Mbaki, a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision de l'ambassade de France en République Démocratique du Congo du 21 octobre 2019 rejetant la demande de visa de long séjour présentée pour son compte et pour le compte de ses deux enfants en qualité de membres de famille de réfugié.

Par un jugement n° 2002453 du 11 janvier 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 25 janvier 2021, Mme D... B..., agissant en son nom propre et en qualité de représentante légale de ses enfants mineurs, G... et Ussac Nkutu Mbaki, représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 11 janvier 2021 ;

2°) d'annuler la décision du 21 octobre 2019 des autorités consulaires françaises en République démocratique du Congo ;

3°) d'enjoindre, sous astreinte, aux autorités consulaires de délivrer les visas de long séjour sollicités ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision des autorités consulaires est illégale pour être insuffisamment motivée ;

- la décision contestée a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour être constitutive d'une atteinte disproportionnée à leurs droits à mener une vie familiale en France ;

- elle est entachée d'une erreur d'appréciation dès lors que les relations conservées entre le regroupant, qui a la qualité de réfugié, et les demandeurs sont attestées par les pièces produites dans la présente instance.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 avril 2021, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu

­ la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

­ le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

­ le code civil ;

­ le code des relations entre le public et l'administration ;

­ le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. A...'hirondel a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. F..., né le 3 avril 1980, de nationalité congolaise (République démocratique du Congo), est entré le 10 décembre 2011 en France où il s'est vu reconnaître la qualité de réfugié par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 3 octobre 2013. Le 20 mars 2019, Mme D... B..., qui se présente comme son épouse, a sollicité, auprès des autorités consulaires françaises à Kinshasa, pour elle-même et pour les deux enfants mineurs, G... et Ussac Nkutu Mbaki, nés tous les deux en octobre 2004 et qu'elle allègue être issus de son union avec M. F..., la délivrance de visas pour établissement familial. Le 17 octobre 2019, les autorités consulaires opposent un refus à ces demandes de visa. Un recours contre cette décision a été formé devant la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France qui l'a enregistré le 2 décembre 2019. Une décision implicite de rejet est née en l'absence de réponse à ce recours le 2 février 2020. Mme B... relève appel du jugement du 11 janvier 2021 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision des autorités consulaires que le tribunal a interprétée comme étant dirigée contre la décision implicite de rejet de la commission de recours.

Sur conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la décision des autorités consulaires :

2. Aux termes de l'article D. 211-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " Une commission placée auprès du ministre des affaires étrangères et du ministre chargé de l'immigration est chargée d'examiner les recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France prises par les autorités diplomatiques ou consulaires. La saisine de cette commission est un préalable obligatoire à l'exercice d'un recours contentieux, à peine d'irrecevabilité de ce dernier. ".

3. En vertu de ces dispositions, le refus implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France s'est substitué à la décision du 17 octobre 2019 par laquelle les autorités consulaires françaises à Kinshasa ont refusé de délivrer le visa sollicité. Par suite, les conclusions de Mme B... dirigées contre la décision des autorités consulaires, qu'elles renouvellent en appel sans contester l'irrecevabilité opposée sur ce point par les premiers juges, doivent être rejetées.

En ce qui concerne la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France :

4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 232-4 du code des relations entre le public et l'administration : " Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. / Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande (...) ".

5. Il est constant que Mme B... n'a pas demandé que lui soient communiqués les motifs de la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France. Si Mme B... allègue que la décision des autorités consulaires serait insuffisamment motivée, ce moyen est inopérant pour contester la légalité de la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France qui, ainsi qu'il a été dit au point 3, s'est substituée à la décision initiale des autorités consulaires.

6. En deuxième lieu, il ressort des écritures du ministre en défense que la décision litigieuse est motivée, d'une part, par le fait que Mme B... ne peut prétendre à bénéficier de la réunification familiale dès lors que son mariage avec le réfugié est postérieur à la demande d'asile de ce dernier et d'autre part, par l'absence de maintien de liens effectifs entre M. F... et ses enfants et leur mère.

7. La délivrance des visas d'entrée en France aux membres de la famille d'un réfugié est notamment régie par les dispositions de l'article L. 752-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi rédigées dans leur rédaction alors applicable : " I. - Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, le ressortissant étranger qui s'est vu reconnaître la qualité de réfugié ou qui a obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre de la réunification familiale : / 1° Par son conjoint ou le partenaire avec lequel il est lié par une union civile, âgé d'au moins dix-huit ans, si le mariage ou l'union civile est antérieur à la date d'introduction de sa demande d'asile ; / 2° Par son concubin, âgé d'au moins dix-huit ans, avec lequel il avait, avant la date d'introduction de sa demande d'asile, une vie commune suffisamment stable et continue ; / 3° Par les enfants non mariés du couple, âgés au plus de dix-neuf ans. (...) ".

8. Il résulte de ces dispositions que le conjoint, comme au demeurant le concubin, ne peuvent prétendre à rejoindre le ressortissant étranger qui s'est vu reconnaître la qualité de réfugié, selon la procédure qu'elles instituent, que si le mariage ou le concubinage est antérieur à la date d'introduction de la demande d'asile, sous réserve, en cas de concubinage, de justifier, en sus, d'une vie commune suffisamment stable et continue.

9. Il suit de là que Mme B... ne saurait utilement se prévaloir de son mariage avec M. F... dès lors, et ainsi qu'il ressort des pièces du dossier, notamment du jugement supplétif d'acte de mariage rendu par le tribunal de Paix de Kinshasa / Assossa le 3 septembre 2018, que les intéressés ont contracté mariage le 20 mars 2015, soit postérieurement à la date d'introduction de la demande d'asile.

10. Si, par ailleurs, M. F... a déclaré, lors de sa demande d'asile, Mme B... comme sa concubine, la requérante n'apporte aucun élément de nature à établir une vie commune suffisamment stable et continue au sens des dispositions de l'article L. 752-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En particulier, la naissance des enfants en octobre 2004, soit sept ans avant l'arrivée en France de M. F..., ne saurait, à elle seule, établir que le couple avait conservé une vie commune suffisamment stable et continue à la date d'introduction de la demande d'asile.

11. En tout état de cause, si Mme B... soutient que M. F... a gardé des liens effectifs avec elle et ses enfants, il ressort des pièces du dossier, et alors que le regroupant est entré en France en 2011, que les seuls justificatifs de transfert d'argent par M. F... au profit de Mme B... sont récents dès lors qu'ils ne commencent qu'à compter de l'année 2018, d'autres étant, en outre, postérieurs à la décision contestée. Il en est, de même, s'agissant de l'achat d'un véhicule réalisé en 2020 et expédié à Kinshasa. Les justificatifs de transfert effectués en 2012, 2013 et 2015, qui au surplus sont rares, l'ont été au profit de tiers sans qu'il soit établi qu'ils étaient destinés à Mme D... B... ou aux enfants. Enfin, les attestations, qui ne sont assorties d'aucune justification, ne sont pas de nature à établir la réalité du maintien de liens effectifs.

12. En dernier lieu, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales par adoption des motifs retenus par les premiers juges au point 8 de leur jugement.

13. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction présentées par la requérante ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 6 juillet 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président,

- Mme Douet, présidente-assesseure,

- M. A...'hirondel, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juillet 2021.

Le rapporteur,

M. E...Le président,

A. PEREZ

La greffière,

A. LEMEE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

1

2

N° 21NT00207


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT00207
Date de la décision : 16/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-005-01 Étrangers. Entrée en France. Visas.


Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Michel LHIRONDEL
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : TAMBA MBUMBA SALAMBONGO MICHEL

Origine de la décision
Date de l'import : 27/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-07-16;21nt00207 ?
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