Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 1er août 2017 par laquelle le ministre de l'intérieur a ajourné à deux ans sa demande de naturalisation.
Par un jugement n° 1709510 du 4 juin 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 2 août 2020, M. B... C..., représenté par Me Lajili, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes ;
2°) d'annuler la décision du 1er août 2017 par laquelle le ministre de l'intérieur a ajourné à deux ans sa demande de naturalisation ;
3°) de lui accorder la nationalité française ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il n'est pas établi que la décision du 21 mars 2017 par laquelle la sous-préfète de l'Haÿ-les-Roses a ajourné à deux ans sa demande de naturalisation ait été prise par une autorité compétente ;
- il n'est pas établi que la décision contestée du 1er août 2017 par laquelle le ministre de l'intérieur a ajourné à deux ans sa demande de naturalisation ait été prise par une autorité compétente ;
- la décision contestée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 14 août 2020, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens invoqués par M. C... n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;
- le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Ody a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par un jugement du 4 juin 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande de M. C... tendant à l'annulation de la décision du 1er août 2017 par laquelle le ministre de l'intérieur a ajourné à deux ans sa demande de naturalisation. M. C... relève appel de ce jugement.
2. Prise sur recours préalable obligatoire, la décision du ministre de l'intérieur du 1er août 2017 s'est substituée à la décision préfectorale du 21 mars 2017, qui a ainsi disparu de l'ordonnancement juridique. Par suite et en tout état de cause, le requérant ne peut utilement soutenir, à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du ministre de l'intérieur, que la décision préfectorale n'aurait pas été prise par une autorité compétente. Le moyen doit dès lors être écarté.
Sur la légalité externe de la décision contestée :
3. Aux termes de l'article 1er du décret du 27 juillet 2005 susvisé : " A compter du jour suivant la publication au Journal officiel de la République française de l'acte les nommant dans leurs fonctions ou à compter du jour où cet acte prend effet, si ce jour est postérieur, peuvent signer, au nom du ministre ou du secrétaire d'Etat et par délégation, l'ensemble des actes, à l'exception des décrets, relatifs aux affaires des services placés sous leur autorité : / 1° Les secrétaires généraux des ministères, les directeurs d'administration centrale (...) . ". Aux termes de l'article 3 de ce même décret : " Les personnes mentionnées aux 1° et 3° de l'article 1er peuvent donner délégation pour signer tous actes relatifs aux affaires pour lesquelles elles ont elles-mêmes reçu délégation : / 1° Aux magistrats, aux fonctionnaires de catégorie A et aux agents contractuels chargés de fonctions d'un niveau équivalent, qui n'en disposent pas au titre de l'article 1er ; (...) ".
4. Il ressort des pièces du dossier que la décision contestée du 1er août 2017 a été signée par M. D... F.... Par une décision du 11 octobre 2016, régulièrement publiée au journal officiel de la République française du 12 octobre suivant, Mme A... E..., nommée par un décret du 28 septembre 2016 dans les fonctions de directrice de l'accueil, de l'accompagnement des étrangers et de la nationalité au sein de la direction générale des étrangers en France à l'administration centrale du ministère de l'intérieur, a donné délégation à M. D... F..., attaché d'administration de l'Etat, à l'effet de signer, au nom du ministre de l'intérieur, tous actes, arrêtés et décisions relevant de ses attributions au sein du bureau des naturalisations. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte doit être écarté.
Sur la légalité interne :
5. Aux termes de l'article 21-15 du code civil : " (...) l'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger ". Aux termes de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 susvisé : " (...) Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions. Ce délai une fois expiré ou ces conditions réalisées, il appartient à l'intéressé, s'il le juge opportun, de déposer une nouvelle demande ". L'autorité administrative dispose, en matière de naturalisation ou de réintégration dans la nationalité française, d'un large pouvoir d'appréciation. Elle peut, dans l'exercice de ce pouvoir, prendre en considération notamment, pour apprécier l'intérêt que présenterait l'octroi de la nationalité française, les renseignements défavorables recueillis sur le comportement du postulant.
6. Pour ajourner à deux ans, par la décision du 1er août 2017, la demande de naturalisation présentée par M. C..., le ministre de l'intérieur s'est fondé sur ce que l'intéressé avait fait l'objet d'une procédure pénale pour agression sexuelle sur mineur de moins de quinze ans, le 19 juin 2007, qui a donné lieu à un rappel à la loi.
7. Il ressort des pièces du dossier que M. C..., ressortissant libanais né en 1994, a fait l'objet d'un rappel à la loi, en 2007, pour des faits d'agression sexuelle sur mineure de moins quinze ans. Contrairement à ce que soutient le requérant, il ressort des procès-verbaux de la procédure pénale diligentée à son encontre que M. C... a participé directement à l'agression sexuelle. Ces faits présentent une gravité certaine et un caractère relativement récent à la date de la décision attaquée. Eu égard au large pouvoir d'appréciation dont il dispose pour accorder la nationalité française à l'étranger qui la sollicite, le ministre chargé des naturalisations a pu, sans entacher sa décision d'erreur manifeste d'appréciation, ajourner à deux ans la demande de naturalisation de M. C....
8. Eu égard au motif de la décision attaquée, le requérant ne peut utilement soutenir qu'il est bien intégré en France et qu'il ne parvient pas à déposer une nouvelle demande de naturalisation auprès des services préfectoraux, lesquels seraient saturés.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Il suit de là que ses conclusions à fin d'annulation doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 10 septembre 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Francfort, président de chambre,
- Mme Buffet, présidente assesseure,
- Mme Ody, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 septembre 2021.
La rapporteure,
C. ODY
Le président,
J. FRANCFORT Le greffier,
C. GOY
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20NT02448