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21/12/2021 | FRANCE | N°20NT02100

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 21 décembre 2021, 20NT02100


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner La Poste à lui verser la somme globale de 160 000 euros en réparation de ses préjudices résultant de son absence de reclassement avant sa mise à la retraite pour invalidité.

Par un jugement n° 1703260 du 31 mars 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 17 juillet 2020, Mme A..., représentée par Me Salquain, demande à la cour :>
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 31 mars 2020 ;

2°) de condamne...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner La Poste à lui verser la somme globale de 160 000 euros en réparation de ses préjudices résultant de son absence de reclassement avant sa mise à la retraite pour invalidité.

Par un jugement n° 1703260 du 31 mars 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 17 juillet 2020, Mme A..., représentée par Me Salquain, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 31 mars 2020 ;

2°) de condamner La Poste à lui verser la somme de 160 000 euros ;

3°) de mettre à la charge de La Poste le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal administratif a omis de se prononcer sur le moyen tiré du défaut de recherche de reclassement sur un emploi relevant d'un autre corps ou cadre d'emploi d'une autre administration ;

- la Poste a commis une faute en ne recherchant pas un poste de reclassement dans un service de l'Etat ;

- la Poste a méconnu la liberté de travail reconnue tant par le décret des 2 et 17 mars 1791 que par l'article 5 du préambule de la Constitution de 1946 ;

- elle a droit à une indemnisation qui ne pourra être inférieure au salaire qu'elle aurait dû percevoir sur la base du barème de la fonction publique jusqu'à l'âge légal de départ à la retraite ainsi qu'une indemnisation de la perte de ses droits à pension ;

- son préjudice moral sera évalué à la somme de 10 000 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 juillet 2021, La Poste, représentée par Me Bellanger, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le point 5 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ;

- l'ordonnance n° 2020-1447 du 25 novembre 2020 ;

- la loi du 17 mars 1791 ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 ;

- le décret des 2 et 17 mars 1791 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Gélard,

- les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public,

- et les observations de Me Cortes, substituant Me Bellanger, représentant La Poste.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., agent technique et de gestion à La Poste, a été victime le 10 septembre 1999, d'un braquage au bureau de poste d'Orly Les Saules où elle exerçait les fonctions de guichetière. L'intéressée, qui a développé un syndrome post-traumatique sévère reconnu imputable au service, a bénéficié de plusieurs mutations sans amélioration de son état de santé avant d'être placée en congé de longue maladie. Par une décision du 6 juillet 2012, Mme A... a été mise à la retraite pour invalidité avec un taux de 20%, laquelle a pris effet au 1er mai 2013. Après le rejet de sa réclamation préalable présentée le 14 décembre 2016, l'intéressée a saisi le tribunal administratif de Nantes d'une demande tendant à la condamnation de La Poste à lui verser la somme globale de 160 000 euros en réparation de ses préjudices résultant de son absence de reclassement avant sa mise à la retraite pour invalidité. Elle relève appel du jugement du 31 mars 2020 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Si Mme A... soutient que le tribunal administratif a omis de se prononcer sur le moyen tiré du défaut de recherche de reclassement au sein d'une autre administration, les premiers juges ont indiqué au point 3 du jugement attaqué que l'obligation de son employeur était circonscrite au " groupe La Poste ". Par suite, le moyen manque en fait et ne peut qu'être écarté.

Sur la responsabilité de La Poste :

3. D'une part, aux termes de l'article 29 de la loi du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et à France Télécom : " Les personnels de La Poste (...) sont régis par des statuts particuliers, pris en application de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 (...) et de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 (...) ".

4. D'autre part, aux termes de l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, dans sa rédaction alors applicable : " Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladie contractées ou aggravées (...) en service (...) et qui n'a pu être reclassé dans un autre corps en application de l'article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée peut être radié des cadres par anticipation soit sur sa demande, soit d'office à l'expiration d'un délai de douze mois à compter de sa mise en congé si cette dernière a été prononcée en application des 2° et 3° de l'article 34 de la même loi ou à la fin du congé qui lui a été accordé en application du 4° du même article. ". Aux termes de l'article 63 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, dans sa rédaction antérieure notamment à l'ordonnance du 25 novembre 2020 : " Lorsque les fonctionnaires sont reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions, le poste de travail auquel ils sont affectés est adapté à leur état physique. Lorsque l'adaptation du poste de travail n'est pas possible, ces fonctionnaires peuvent être reclassés dans des emplois d'un autre corps s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes (...) ".

5. Il résulte d'un principe général du droit, dont s'inspirent tant les dispositions du code du travail relatives à la situation des salariés qui, pour des raisons médicales, ne peuvent plus occuper leur emploi que les règles statutaires applicables dans ce cas aux fonctionnaires, que lorsqu'il a été médicalement constaté qu'un salarié se trouve de manière définitive atteint d'une inaptitude physique à occuper son emploi, il appartient à l'employeur de le reclasser dans un autre emploi et, en cas d'impossibilité, de prononcer, dans les conditions prévues pour l'intéressé, son licenciement ou sa mise à la retraite pour invalidité.

6. Il résulte de l'instruction que dans son rapport du 13 février 2012, le docteur D... désigné en qualité d'expert a estimé que Mme A... présentait depuis plus de dix ans une symptomatologie post-traumatique extrêmement sévère avec une atteinte de l'humeur, évoluant vers une sinistrose revendicatrice et un sentiment de colère constant envers son employeur. Il a ajouté que cet état était la conséquence certaine, exclusive et directe de l'accident de service dont elle avait été victime et qu'il la rendait inapte de façon définitive à tout emploi à la Poste. Dans son avis du 7 juin 2012 la commission de reclassement a confirmé l'impossibilité de tout reclassement de l'intéressée.

Le docteur B..., médecin du travail à la Poste, a émis le 1er juin 2012 un avis concordant à l'attention des membres de la commission de réforme en indiquant que tout emploi de l'intéressée à La Poste apparaissait définitivement préjudiciable à l'équilibre de son état de santé. S'il a ajouté qu'afin de préserver l'avenir professionnel de l'intéressée, qui était alors âgée de 45 ans, il lui semblait important que " la Poste puisse tout mettre en œuvre pour l'accompagner dans ses souhaits professionnels ", à cette date, aucune disposition n'imposait à l'employeur d'aider au reclassement professionnel de son agent en dehors de son administration d'origine. Les dispositions de l'article 63 de la loi du 11 janvier 1984 dans leur rédaction issue de l'article 10 de l'ordonnance du 25 novembre 2020 portant diverses mesures en matière de santé et de famille dans la fonction publique, qui prévoit qu'un fonctionnaire inapte à ses fonctions peut être reclassé dans toute administration ou établissement public lorsqu'aucun poste n'est disponible dans son administration d'origine, ne sont en effet entrées en vigueur que le 27 novembre 2020, soit plus de 7 ans après l'admission à la retraite de Mme A.... En outre, la requérante indique elle-même qu'elle a été mutée en févier 2000 au centre de transbordement d'Orly-Siena où elle a présenté un syndrome post-agression puis dans la région Bretagne sans amélioration et que le 31 juillet 2014, elle a été hospitalisée aux urgences du service médico-psychologique du centre hospitalier universitaire de Nantes, à la suite d'un entretien avec son employeur, dans le cadre d'une tentative de médiation. Il suit de là que Mme A... était définitivement inapte à tout emploi à la Poste. Par suite, l'intéressée n'est pas fondée à soutenir que son employeur n'aurait pas respecté son obligation de recherche de reclassement.

7. Enfin, Mme A... entend rechercher la responsabilité de la Poste en invoquant la violation de la liberté de travailler protégée par le décret des 2 et 17 mars 1791 et le Préambule de la Constitution de 1946. Toutefois, la circonstance qu'elle a été placée à la retraite d'office pour invalidité, ne fait pas obstacle à ce qu'elle exerce certaines activités professionnelles rémunérées qui seraient compatibles avec son état de santé. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions ne peut dès lors, et en tout état de cause, qu'être écarté.

8. Il résulte de tout ce qui précède, que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de La Poste, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à Mme A... E... la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de Mme A... le versement à La Poste de la somme qu'elle sollicite au titre des mêmes frais.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de La Poste tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... et à La Poste.

Délibéré après l'audience du 3 décembre 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Coiffet, président,

- Mme Gélard, première conseillère,

- Mme Malingue, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 21 décembre 2021.

La rapporteure,

V. GELARDLe président,

O. COIFFET

La greffière,

I. PETTON

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

5

N° 20NT02100


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT02100
Date de la décision : 21/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. COIFFET
Rapporteur ?: Mme Valérie GELARD
Rapporteur public ?: M. LEMOINE
Avocat(s) : SELARL ATLANTIQUE AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 28/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-12-21;20nt02100 ?
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