Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 17 septembre 2019 par lequel le préfet des Côtes d'Armor lui a ordonné de se dessaisir de ses armes et munitions dans le délai de trois mois et lui a interdit d'acquérir ou de détenir des armes de toute catégorie.
Par un jugement n° 1905681 du 15 septembre 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 3 novembre 2021, M. A..., représenté par Me Boisset, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 15 septembre 2021 du tribunal administratif de Rennes ;
2°) d'annuler l'arrêté du 17 septembre 2019 du préfet des Côtes-d'Armor ;
3°) d'enjoindre au préfet des Côtes-d'Armor, à titre principal, de lever l'interdiction d'acquérir ou de détenir des armes et munitions de toute catégorie, ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande en limitant cette interdiction à certaines armes et munitions, dans un délai de quinze jours à compter du jugement à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative la somme de 2 500 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est entaché d'une erreur de droit sur la compétence liée du préfet, tant sur la décision ordonnant le dessaisissement de ses armes et munitions que sur celle lui faisant interdiction d'acquérir ou de détenir des armes ;
- l'arrêté contesté est entaché d'un vice de procédure, dans la mesure où il n'a pas été mis à même de présenter ses observations orales alors même qu'il a demandé un rendez-vous au préfet par courriel du 10 février 2019 ;
- il méconnaît les dispositions de l'article L. 312-11 du code de la sécurité intérieure, dans la mesure où il détient des armes depuis 1996, n'a commis depuis lors aucune infraction impliquant une arme et où les seuls délits d'atteinte aux personnes mentionnés par le préfet concernent sa conjointe et sont déjà anciens ;
- le préfet n'était pas en situation de compétence liée ;
- la décision d'interdiction de détenir ou d'acquérir une arme est entachée d'une erreur d'appréciation, ayant un caractère illimité dans le temps et concernant toute arme de toute catégorie.
Par un mémoire en défense enregistré le 18 novembre 2021, le préfet des Côtes- d'Armor conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. A... n'est fondé.
L'aide juridictionnelle totale a été accordée à M. A... par une décision du 19 janvier 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code pénal ;
- le code de la sécurité intérieure ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Guéguen, premier conseiller,
- les conclusions de M. Pons, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A... a déclaré à la préfecture des Côtes-d'Armor le 5 octobre 2018 avoir acquis un fusil superposé de calibre 12, arme de catégorie C. Les vérifications réalisées à la suite de cette déclaration ont révélé l'inscription de plusieurs condamnations pénales au bulletin n° 2 du casier judiciaire de l'intéressé. Par un courrier du 22 janvier 2019, M. A... a été informé de l'intention du préfet de mettre en œuvre la procédure de dessaisissement prévue à l'article L. 312-11 du code de la sécurité intérieure. L'intéressé a présenté ses observations écrites par courriel du 10 février 2019. Par un arrêté du 17 septembre 2019, le préfet des Côtes-d'Armor lui a ordonné de se dessaisir des armes et munitions en sa possession dans un délai de trois mois et lui a fait interdiction d'acquérir ou de détenir des armes de toute catégorie. M. A... relève appel du jugement du 15 septembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Côtes-d'Armor du 17 septembre 2019.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Si le requérant soutient que le tribunal a commis une erreur de droit, cette erreur, à la supposer établie, n'affecte que le bien-fondé du jugement et non sa régularité. Par suite, à supposer que l'appelant ait entendu ainsi invoquer un moyen tiré de l'irrégularité du jugement, ce moyen ne saurait être accueilli.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. Aux termes de l'article L. 312-3 du code de la sécurité intérieure : " Sont interdites d'acquisition et de détention d'armes, de munitions et de leurs éléments des catégories A, B et C : 1° Les personnes dont le bulletin n° 2 du casier judiciaire comporte une mention de condamnation pour l'une des infractions suivantes : - meurtre, assassinat ou empoisonnement prévus aux articles 221-1 et suivants du code pénal ; (...) - harcèlement moral prévu aux articles 222-33-2 et 222-33-2-1 du même code ; (...). ". En vertu de l'article R. 312-67 de ce code : " Le préfet ordonne la remise ou le dessaisissement de l'arme ou de ses éléments dans les conditions prévues aux articles L. 312-7 ou L. 312-11 lorsque : (...) 2° Le demandeur ou le déclarant a été condamné pour l'une des infractions mentionnées au 1° de l'article L. 312-3 figurant au bulletin n° 2 de son casier judiciaire. (...) ".
4. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que M. A... a été condamné le 28 juin 2018 par la chambre des appels correctionnels de la cour d'appel de Rennes à six mois d'emprisonnement, avec placement sous surveillance électronique et suspension de permis de conduire pendant six mois, pour des faits de harcèlement d'une personne étant ou ayant été conjoint, concubin ou partenaire lié par un pacte civil de solidarité, sans incapacité et dégradation des conditions de vie entraînant une altération de santé. La mention de cette condamnation a été portée au bulletin n° 2 du casier judiciaire de l'intéressé. Dès lors, par application des dispositions de l'article L. 312-3 du code de sécurité intérieure citées au point 3, M. A... ne pouvait ni faire l'acquisition d'une arme de catégorie C ni en détenir une. Il s'ensuit qu'en application des dispositions du 2° de l'article R. 312-67, également citées au point 3, le préfet des Côtes-d'Armor était tenu, sur ce seul fondement et pour ce seul motif, d'ordonner le dessaisissement des armes et munitions de catégorie C détenues par l'intéressé et de lui interdire d'acquérir de nouvelles armes, qu'elle qu'en soit la catégorie.
5. Il résulte de ce qui précède que tous les moyens qui n'ont pas pour objet de remettre en cause la compétence liée du préfet sont inopérants. Dans ces conditions, M. A... ne peut utilement soutenir ni que la décision contestée serait insuffisamment motivée, ni qu'elle serait entachée d'un vice de procédure tiré de la violation du principe du contradictoire, ni qu'elle serait entachée d'erreur de droit et d'erreur d'appréciation.
6. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 septembre 2019 par lequel le préfet des Côtes-d'Armor lui a ordonné de se dessaisir de ses armes et munitions de catégorie C et lui a interdit d'acquérir ou de détenir des armes de toute catégorie.
Sur les conclusions à fin d'injonction, sous astreinte :
7. Le présent arrêt, qui rejette la requête de M. A..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions de l'intéressé tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet des Côtes-d'Armor de lever l'interdiction d'acquérir ou de détenir des armes de toute catégorie, ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
8. Les dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans le présent litige, le versement d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les conclusions présentées à ce titre par M. A... ne peuvent dès lors être accueillies.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me Boisset et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera transmise au préfet des Côtes d'Armor.
Délibéré après l'audience du 4 janvier 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- M. Rivas, président-assesseur,
- M. Guéguen, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 janvier 2022.
Le rapporteur,
J.-Y. GUEGUEN
Le président,
L. LAINÉ
Le greffier,
V. DESBOUILLONS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21NT03079