La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/02/2022 | FRANCE | N°21NT02749

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 04 février 2022, 21NT02749


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... B... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 1er février 2021 du préfet du Calvados portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant son pays de renvoi.

Par un jugement n° 2100457 du 13 avril 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 1er octobre 2021, M. B..., représenté par Me Bar

a Carré, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du magistrat désigné par le président du ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... B... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 1er février 2021 du préfet du Calvados portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant son pays de renvoi.

Par un jugement n° 2100457 du 13 avril 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 1er octobre 2021, M. B..., représenté par Me Bara Carré, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Caen du 13 avril 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 1er février 2021 du préfet du Calvados portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant son pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet du Calvados, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour ou, subsidiairement, une autorisation provisoire de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le même délai de quinze jours ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 800 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier, le tribunal administratif n'ayant pas examiné le moyen tiré de la méconnaissance par la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le jugement attaqué est irrégulier, le tribunal ayant commis une erreur manifeste d'appréciation en examinant les éléments justificatifs qu'il a versés au débat au soutien de sa situation personnelle et de sa vie familiale en France ; les premiers juges n'ont pas démontré en particulier, en dépit des éléments de preuve contraire qu'il a fournis, son défaut de contribution à l'entretien et à l'éducation de ses enfants ;

- il est irrégulier, en raison de ce que le moyen tiré de la méconnaissance de la convention internationale relative aux droits de l'enfant n'a pas été examiné, le tribunal l'ayant écarté sans motivation et sans le viser ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations des articles 3 et 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, le préfet ayant porté une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale en raison de l'illégalité de la décision d'éloignement.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 août 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Guéguen, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Monsieur B..., ressortissant angolais né le 20 mai 1970, a déclaré être entré en France le 17 novembre 2019. Il a présenté une demande d'asile sur le fondement de l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté par une décision du 2 septembre 2020. Cette décision a été confirmée le 27 janvier 2021 par la Cour nationale du droit d'asile. Par un arrêté du 1er février 2021, le préfet du Calvados a fait obligation à M. B... de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai. M. B... relève appel du jugement du 13 avril 2021 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. L'article R. 741-1 du code de justice administrative dispose que la décision " contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ". Il est constant que le mémoire en réplique produit pour M. B... le 29 mars 2021 n'est pas visé dans la minute du jugement attaqué du magistrat désigné du tribunal administratif de Caen et que, dans ces conditions, son contenu n'a pas été analysé alors qu'il produisait, au soutien des moyens soulevés dans la demande introductive d'instance, de nouvelles pièces qui n'étaient pas nécessairement dénuées d'utilité au regard de ces moyens. Par suite, M. B... est fondé à demander l'annulation du jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Caen du 13 avril 2021, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres irrégularités invoquées à l'encontre de ce jugement.

3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Caen.

Sur la légalité de l'arrêté du préfet du Calvados du 1er février 2021 :

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

4. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. ". Il ressort des pièces du dossier que M. B... n'est entré en France que le 17 novembre 2019, à l'âge de quarante-neuf ans, et qu'il a vécu en Angola, son pays d'origine, jusqu'à cet âge. Si l'intéressé, qui est célibataire, fait valoir que la mère de ses enfants et deux de ses derniers enfants résident en France, il ne démontre contribuer régulièrement à leur entretien et à leur éducation que depuis une période récente, et notamment pas antérieurement au 2 septembre 2020, date de la décision de rejet de sa demande d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides. Il est constant par ailleurs que M. B... et sa compagne, Mme C..., sont tous deux de nationalité angolaise, que le fils aîné à charge de la compagne du requérant, âgé de 10 ans, est de nationalité angolaise et que rien ne s'oppose à la reconstitution de la cellule familiale hors du territoire français, alors même que Mme C... est par ailleurs mère d'une fille née en France en 2013, âgée de sept ans à la date de la décision contestée, mais dont l'effectivité et l'intensité des liens avec son père ressortissant ivoirien ne sont aucunement établies, alors surtout que ne sont justifiés ni l'existence de tels liens ni même la présence en France de ce père. Dans ces conditions, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ne peuvent qu'être écartés. L'article 9 de cette dernière convention, qui ne crée des obligations qu'entre les Etats signataires, ne peut être utilement invoqué.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

5. La décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas illégale, le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de cette décision, soulevé à l'encontre de la décision fixant le pays de destination, doit être écarté.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

7. Le présent arrêt, qui rejette la requête de M. B...(/nom)(ano)X(/ano), n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions de l'intéressé tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet du Calvados de lui délivrer un titre de séjour ou une autorisation de séjour temporaire ou, à défaut, de réexaminer sa situation, doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui pour l'essentiel n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que le conseil de M. B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Caen n° 2100457 du 13 avril 2021 est annulé.

Article 2 : Le surplus de la requête d'appel de M. B... et sa demande devant le tribunal administratif de Caen sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... B..., à Me Bara Carré et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera transmise au préfet du Calvados.

Délibéré après l'audience du 18 janvier 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- M. Rivas, président-assesseur,

- M. Guéguen, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 février 2022.

Le rapporteur,

J.-Y. GUÉGUEN

Le président,

L. LAINÉ

La greffière,

S. LEVANT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21NT02749


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT02749
Date de la décision : 04/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Jean-Yves GUEGUEN
Rapporteur public ?: M. PONS
Avocat(s) : BARA CARRE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-02-04;21nt02749 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award