Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 2013, 2014 et 2015 à la suite de la vérification de comptabilité de son entreprise.
Par un jugement n° 1803359 du 1er juillet 2020, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 27 août 2020 M. A..., représenté par Me Berthelot, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge sollicitée ;
3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la procédure d'imposition est irrégulière dès lors que la demande d'option de traitement informatique qui lui a été adressée ne lui permettait pas de produire une réponse éclairée sur le fondement de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales ;
- elle est également irrégulière en ce que l'administration a exploité des éléments provenant d'une autre procédure de vérification le concernant ;
- les irrégularités comptables relevées par le service ne permettaient pas de rejeter la comptabilité ;
- la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires est radicalement viciée ;
- l'application de la majoration de 100 % prévue à l'article 1732 du code général des impôts n'est pas justifiée.
Par un mémoire en défense enregistré le 25 février 2021 le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués par M. A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Picquet,
- et les conclusions de Mme Chollet, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A... exploite, dans le cadre de l'entreprise individuelle " La Pergola ", deux établissements de restauration à Cour-Cheverny et à Lamotte-Beuvron.
Cette entreprise a fait l'objet d'une vérification de comptabilité du 9 septembre 2016 au
16 février 2017, portant sur la période correspondant aux exercices clos les 31 mars 2013, 2014 et 2015. Par une proposition de rectification du 28 juillet 2017, M. A... a été informé des rehaussements en matière d'impôt sur les revenus et contributions sociales et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée consécutifs à cette vérification. M. A... a demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les revenus auxquels il a été ainsi assujetti au titre des années 2013, 2014 et 2015. Par un jugement du 1er juillet 2020, le tribunal a rejeté sa demande. M. A... fait appel de ce jugement.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. En premier lieu, aux termes du II de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales : " II.-En présence d'une comptabilité tenue au moyen de systèmes informatisés et lorsqu'ils envisagent des traitements informatiques, les agents de l'administration fiscale indiquent par écrit au contribuable la nature des investigations souhaitées. (...) c) Le contribuable peut également demander que le contrôle ne soit pas effectué sur le matériel de l'entreprise. Il met alors à la disposition de l'administration, dans les quinze jours suivant la formalisation par écrit de son choix, les copies des documents, données et traitements soumis à contrôle. (...) Le contribuable est informé des noms et adresses administratives des agents par qui ou sous le contrôle desquels les opérations sont réalisées. (...) ". Il résulte de ces dispositions que le vérificateur qui envisage un traitement informatique sur une comptabilité tenue au moyen de systèmes informatisés est tenu d'indiquer au contribuable, au plus tard au moment où il décide de procéder au traitement, par écrit et de manière suffisamment précise, la nature des investigations qu'il souhaite effectuer, c'est-à-dire les données sur lesquelles il entend faire porter ses recherches ainsi que l'objet de ces investigations, afin de permettre au contribuable de choisir en toute connaissance de cause entre les trois options offertes par ces dispositions.
3. Par un courriel du 26 octobre 2016, l'administration a demandé à M. A... de lui fournir les logiciels informatisés ayant sauvegardé les justificatifs de recettes, afin qu'elle puisse mettre en œuvre, conformément aux dispositions du II de l'article 47 A du livre des procédures fiscales, " le traitement visant à valider les recettes déclarées par l'entreprise " La Pergola " ainsi que la taxe sur la valeur ajoutée collectée, sur la période vérifiée allant du
1er avril 2012 au 31 mars 2015 ". Ce faisant, le vérificateur a indiqué de manière suffisamment précise la nature des investigations qu'il souhaitait effectuer. Enfin, la lettre du 26 octobre 2016, adressée également à M. A..., mentionnait le nom et l'adresse administrative de l'agent chargée de réaliser ce contrôle. Par conséquent, le moyen tiré de la méconnaissance du II de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales doit être écarté.
4. En second lieu, aux termes de l'article L. 74 du livre des procédures fiscales : " Les bases d'imposition sont évaluées d'office lorsque le contrôle fiscal ne peut avoir lieu du fait du contribuable ou de tiers (...) ".
5. Lors du rendez-vous du 7 novembre 2016, M. A... a indiqué à l'administration ne pas pouvoir fournir dans l'immédiat les données natives du logiciel des caisses enregistreuses mais qu'une opération de récupération de ces données était en cours auprès d'un prestataire informatique. Si l'intéressé soutient désormais que la récupération des données informatiques s'est avérée techniquement impossible, d'une part, l'existence d'une intervention du prestataire destinée à permettre cette récupération n'est pas établie et, d'autre part, les données natives sollicitées étant stockées dans un espace numérique sécurisé (" cloud ") ainsi qu'il l'a lui-même indiqué à l'administration fiscale, aucun élément ne permet d'établir que M. A... ne pouvait pas ou plus y avoir accès. Il résulte de l'ensemble des faits ainsi exposés que l'attitude persistante de M. A... et son inertie volontaire quant à la communication des fichiers demandés à plusieurs reprises par l'administration, alors qu'il avait indiqué ne disposer d'aucun justificatif de recettes sous forme papier, a conduit à ne donner au vérificateur que des informations parcellaires et difficilement exploitables, ce qui était de nature à faire obstacle au bon déroulement de la vérification de comptabilité et caractérise, dès lors, de la part de M. A..., une opposition au contrôle fiscal au sens de l'article L. 74 du livre des procédures fiscales.
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne le rejet de la comptabilité de l'entreprise " La Pergola " :
6. Comme il a été dit au point 5, M. A... n'a pas fourni à l'administration les données natives du logiciel des caisses enregistreuses. Il a seulement remis, le 7 novembre 2016, les états mensuels des recettes édités par le logiciel des caisses enregistreuses sur un fichier excel, qui étaient conformes aux chiffres déclarés par l'entreprise pour son résultat comptable, puis son résultat fiscal déclaré. Toutefois, ces éléments, provenant de fichiers modifiables et non sécurisés, ne peuvent être regardés comme tenant lieu des pièces justificatives des recettes dès lors qu'ils ne permettent pas de dénombrer le nombre et la nature des plats et liquides servis quotidiennement, qu'ils ne permettent pas d'assurer la permanence du chemin de révision comptable, que les données initiales n'ont pas été conservées, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 102 B du livre des procédures fiscales, et que M. A... a indiqué ne disposer d'aucun justificatif de recettes sous format papier (doubles de notes remises aux clients, brouillard de caisse...) pour la période vérifiée. Ainsi, c'est à bon droit que l'administration a pu, pour ce seul motif, regarder la comptabilité de l'entreprise " La Pergola " comme dépourvue de valeur probante. Dès lors, la circonstance que, dans la réponse aux observations du contribuable, l'administration a également mentionné des apports inexpliqués d'espèces sur des comptes de M. A... mis à jour par la procédure d'examen de situation fiscale personnelle menée parallèlement, qui n'a eu aucune influence sur la reconstitution du chiffre d'affaires de l'entreprise, est sans incidence sur le bien-fondé des impositions contestées.
En ce qui concerne la reconstitution du chiffre d'affaires de l'entreprise " La Pergola " :
7. Aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition. ".
8. Le chiffre d'affaires de l'activité de restauration au titre des exercices clos en 2014 et en 2015 a été reconstitué par la méthode dite " des vins ". Le ratio du chiffre d'affaires des vins sur le chiffre d'affaires total a été déterminé à partir d'un échantillon de notes clients émises au cours de la période du 23 novembre 2016 au 15 janvier 2017. M. A... soutient que la méthode retenue par l'administration est radicalement viciée dans son principe dès lors qu'elle ne prend pas en compte l'existence de menus " vin compris ". Toutefois, s'il produit des photographies de la devanture de son restaurant mentionnant un menu " boisson comprise ", celles-ci ne sont pas datées et les autres photographies produites, dont le requérant affirme qu'elles ont été prises le 24 avril 2015, ne font apparaître qu'un tableau en ardoise illisible. En outre, le menu " vin compris " ne figure pas sur les cartes des deux restaurants. Les quelques attestations de clients, aux termes peu précis, en particulier quant à la date de mise en place d'un tel menu, et une facture du 16 juin 2015 mentionnant la pose de plaques transparentes et postérieure à la période vérifiée ne suffisent pas davantage à confirmer les allégations de M. A.... Enfin, la circonstance que la copie de l'ensemble des notes de caisse pour la période du 23 novembre 2016 au 15 janvier 2017 mentionne 127 " formules repas Pergola " à Cour-Cheverny et 20 à Lamotte-Beuvron, dès lors qu'il ne s'agit pas de la période vérifiée et que le taux de taxe sur la valeur ajoutée appliquée à la catégorie " formule repas Pergola " ne correspond pas à celui des boissons alcoolisées, ne constitue pas une preuve utile. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'établit pas que la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires de l'entreprise " La Pergola " suivie par l'administration serait excessivement sommaire ou radicalement viciée.
Sur la majoration prévue à l'article 1732 du code général des impôts :
9. Il résulte de l'instruction que l'administration a assorti les rehaussements en litige de la majoration de 100 %, prévue à l'article 1732 du code général des impôts dans le cas où la procédure d'évaluation d'office prévue à l'article L. 74 du livre des procédures fiscales a été mise en œuvre dans une situation dans laquelle le contrôle n'a pu avoir lieu du fait du contribuable ou de tiers.
10. Pour les motifs indiqués au point 5, M. A... n'est pas fondé à soutenir que l'application de la majoration de 100 % prévue à l'article 1732 du code général des impôts n'est pas justifiée.
11. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande de décharge. Par voie de conséquence, les conclusions du requérant présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me Lavallart en sa qualité de liquidateur judiciaire de l'entreprise " La Pergola ", et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Délibéré après l'audience du 27 janvier 2022, à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot, présidente de chambre,
- M. Brasnu, premier conseiller,
- Mme Picquet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 février 2022.
La rapporteure
P. PicquetLa présidente
I. Perrot
La greffière
A. Marchais
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20NT02686
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