Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 2 juillet 2018 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande d'acquisition de la nationalité française par naturalisation, ainsi que la décision du 27 novembre 2018 par laquelle la même autorité a rejeté son recours gracieux formé contre cette décision.
Par un jugement n° 1902792 du 7 juillet 2022, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 1er septembre 2022 et 2 février 2023, M. A... C..., représenté par Me Potier, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes ;
2°) d'annuler les décisions des 2 juillet 2018 et 27 novembre 2018 du ministre de l'intérieur ;
3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui accorder la nationalité française, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;
- sa demande de naturalisation est recevable ;
- les décisions contestées sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation au regard de ses liens avec la France.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 octobre 2022, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Mas,
- et les observations de Me Potier, pour M. A... C....
Considérant ce qui suit :
1. M. A... C..., ressortissant tunisien né le 13 janvier 1982, a sollicité sa naturalisation. Par une décision du 2 juillet 2018, le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande. Il a demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation de cette décision, ainsi que de la décision du 27 novembre 2018 rejetant son recours gracieux. Il relève appel du jugement du 7 juillet 2022 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ". Les premiers juges ont indiqué, de façon suffisante, dans leur jugement, les motifs de droit et de fait pour lesquels ils ont écarté le moyen tiré de ce que la décision du ministre de l'intérieur contestée serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation des liens de M. A... C... avec la France, tant dans son activité professionnelle que dans sa vie privée. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de ce jugement doit dès lors être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. Il résulte des dispositions du code civil relatives à la naturalisation que nul ne peut être naturalisé s'il ne remplit les conditions fixées aux articles 21-16 à 21-24 de ce code. Si ces conditions ne sont pas remplies, le ministre est tenu de refuser la naturalisation, la demande étant déclarée irrecevable. Si elles le sont, il n'est cependant pas tenu de prononcer la naturalisation. Il lui appartient, lorsqu'il exerce le pouvoir dont il dispose pour apprécier l'opportunité d'accorder ou non la naturalisation sollicitée, de tenir compte de toutes les circonstances de l'affaire, y compris de celles qui ont été examinées pour statuer sur la recevabilité de la demande.
4. Aux termes de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 susvisé : " (...) Lorsque les conditions requises par la loi sont remplies, le ministre chargé des naturalisations propose (...) la naturalisation (...). Lorsque ces conditions ne sont pas remplies, il déclare la demande irrecevable. / Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation (...), il prononce le rejet de la demande. (...). ". Ces dispositions confèrent au ministre de l'intérieur un large pouvoir d'appréciation de l'intérêt d'accorder la nationalité française à un ressortissant étranger. Il lui appartient, lorsqu'il exerce ce pouvoir, de tenir compte de tous les éléments de la situation du postulant. Au nombre de ces éléments figure l'existence de liens particuliers avec la France.
5. Pour rejeter la demande de naturalisation présentée par M. A... C..., le ministre de l'intérieur s'est fondé sur le motif tiré de l'absence de justification de liens particuliers avec la France en dehors de son activité professionnelle.
6. M. A... C... fait valoir qu'il travaille, depuis l'année 2006, au sein d'une société française pour laquelle il était expatrié en Turquie, lorsqu'il a formé sa demande de naturalisation, et en Arabie Saoudite, à la date de la décision contestée, qu'il maîtrise la langue française et qu'il a résidé en France où est né l'aîné de ses quatre enfants, entre 2009 et 2011. Il se prévaut de son adhésion aux principes et valeurs essentiels de la République, ainsi que de son intégration dans la communauté des expatriés français en Arabie Saoudite. Il établit s'être rendu en France à plusieurs reprises, dont au moins une fois avec sa famille en août 2022, postérieurement à la décision contestée, et avoir ouvert un compte dans une banque française. Il allègue avoir l'intention d'acheter un bien immobilier en France.
7. Toutefois, ainsi que le relève le ministre de l'intérieur, M. A... C..., qui n'a résidé en France que deux ans, ne justifie pas d'attaches familiales et personnelles durables en France, nonobstant la présence sur le territoire d'une cousine et de deux cousins de son épouse, alors que ses parents et sa fratrie résident en Tunisie. Il ne possède pas de bien immobilier en France et n'allègue pas avoir un projet d'installation immédiat en France avec sa famille. Dans ces conditions, le ministre de l'intérieur a pu, sans entacher sa décision d'erreur manifeste d'appréciation, se fonder sur l'absence de liens particuliers de M. A... C... avec la France, en dehors de son activité professionnelle.
8. Il résulte de ce qui précède que M. A... C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
9. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. A... C..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par M. A... C... doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme demandée par M. A... C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Délibéré après l'audience du 2 septembre 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Buffet, présidente de chambre,
- Mme Montes-Derouet, présidente-assesseure,
- M. Mas, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 septembre 2024.
Le rapporteur,
B. MASLa présidente,
C. BUFFET
La greffière,
M. D...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22NT02869