Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 9 juillet 2019 par lequel le président du conseil départemental d'Ille-et-Vilaine a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident de travail déclaré le 16 avril 2018 ou, à titre subsidiaire d'ordonner avant dire droit une expertise aux fins de reconnaître l'imputabilité au service de cet accident.
Par un jugement n° 1904552 du 14 octobre 2022, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 7 décembre 2022 et 16 juin 2023, Mme B..., représentée par Me Boulais, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 14 octobre 2022 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 9 juillet 2019 du président du conseil départemental d'Ille-et-Vilaine ;
3°) d'enjoindre au président du conseil départemental d'Ille-et-Vilaine de prendre une décision reconnaissant l'imputabilité au service de sa pathologie à compter du 18 avril 2018, dans le délai d'un mois de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre la somme de 2 000 euros à la charge du département d'Ille-et-Vilaine sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la participation du médecin spécialiste au vote de la commission de réforme a vicié la procédure dès lors qu'elle a été susceptible d'avoir exercé une influence sur le sens de l'avis rendu ;
- l'examen de sa situation sous le seul prisme d'un accident de service sans examiner l'existence d'une maladie professionnelle est entaché d'erreur de droit ;
- le refus de reconnaissance de l'imputabilité au service de son accident du 16 avril 2018 est entaché d'erreur d'appréciation.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 18 avril et 30 juin 2023, le département d'Ille-et-Vilaine, représenté par la SARL Pequignot avocat, conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés dans la requête sont infondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Marion,
- les conclusions de M. Catroux, rapporteur public,
- et les observations de Me Houdyer, représentant le département du Finistère.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... a été recrutée, le 1er janvier 2010, par un contrat passé en application de la loi du 11 février 2005 en faveur des travailleurs handicapés, par le département d'Ille-et-Vilaine puis titularisée en qualité d'adjointe administrative à compter du 1er janvier 2011. Du 4 décembre 2017 au 15 avril 2018, elle a été placée en congé de maladie ordinaire pour dépression nerveuse. Le 16 avril 2018, elle a repris ses fonctions à la direction C.... Le 18 avril 2018, elle a été placée de nouveau en arrêt de travail jusqu'au 13 mai 2018. En décembre 2018, son médecin traitant a établi un formulaire de déclaration d'accident de service relatif à une " agression verbale " et à " plusieurs situations de maltraitance professionnelle " qu'aurait subies Mme B... lors de sa journée de reprise d'activité professionnelle du 16 avril 2018. Suite à l'avis de la commission de réforme du 4 juillet 2019, le président du conseil départemental a, par un arrêté du 9 juillet 2019, refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident du 16 avril 2018. Mme B... relève appel du jugement du 14 octobre 2022 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 9 juillet 2019.
2. En premier lieu, aux termes de l'article 3 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et hospitalière : " ... / Cette commission comprend : 1. Deux praticiens de médecine générale, auxquels est adjoint, s'il y a lieu, pour l'examen des cas relevant de sa compétence, un médecin spécialiste qui participe aux débats mais ne prend pas part aux votes ; 2. Deux représentants de l'administration ; 3. Deux représentants du personnel. (....) ".
3. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou s'il a privé les intéressés d'une garantie.
4. Il ressort des pièces du dossier que la commission de réforme réunie le 4 juillet 2019 était composée de deux médecins généralistes, de deux représentants du personnel, d'un seul représentant de l'administration et d'un médecin spécialiste qui a pris part au vote en raison de l'absence du deuxième représentant de l'administration. Si la participation au vote du médecin spécialiste méconnaît les dispositions précitées de l'article 3 de l'arrêté du 4 août 2004, cette circonstance n'a pas été de nature à avoir exercé une influence sur le sens de la décision dès lors que la commission de réforme s'est prononcée en défaveur de cette reconnaissance par une majorité de quatre voix contre deux. Par ailleurs, ainsi que l'a jugé le tribunal, Mme B... ne saurait utilement invoquer la circonstance que la présence du médecin spécialiste a été de nature à exercer une influence sur l'avis de la commission de réforme dès lors que la participation du médecin spécialiste aux débats de la commission de réforme est expressément prévue par les dispositions précitées. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que la participation du médecin spécialiste au vote de la commission de réforme a vicié la procédure doit être écarté.
5. En deuxième lieu, il ressort du dossier de première instance que Mme B... s'est bornée à demander l'annulation de la décision du 9 juillet 2019 par lequel le président du conseil départemental d'Ille-et-Vilaine a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident de travail qu'elle a déclaré avoir subi le 16 avril 2018. En l'absence de demande de Mme B... tendant à ce que le président du conseil départemental reconnaisse l'imputabilité au service de la maladie dont elle souffre et qui a donné lieu à des arrêts de travail à compter du 18 avril 2018, le président du conseil départemental n'était pas tenu d'examiner d'office si la maladie dont était atteinte la requérante et qui avait donné lieu aux arrêts de travail postérieurs au 18 avril 2018 était imputable au service. Par suite,
Mme B... n'est pas fondée à soutenir que le président du conseil départemental
d'Ille-et-Vilaine aurait commis une erreur de droit en s'abstenant de se prononcer sur le caractère de maladie professionnelle des affections dont elle souffre depuis le 18 avril 2018.
6. En dernier lieu, aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa rédaction applicable à la date de la décision en litige : "(...), si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...) Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) ".
7. Constitue un accident de service, pour l'application des dispositions précitées, un évènement survenu à une date certaine, par le fait ou à l'occasion du service, dont il est résulté une lésion, quelle que soit la date d'apparition de celle-ci. Sauf à ce qu'il soit établi qu'il aurait donné lieu à des injonctions ou à des propos excédant l'exercice normal du pouvoir hiérarchique, lequel peut conduire le supérieur hiérarchique à adresser aux agents des recommandations, remarques, reproches, le comportement d'un supérieur hiérarchique ne saurait être regardé comme constituant un événement soudain et violent susceptible d'être qualifié d'accident de service, quels que soient les effets qu'il a pu produire sur l'agent.
8. Mme B... expose qu'elle a été reçue le 16 avril 2018 à 8 h50 par sa supérieure hiérarchique, qui lui aurait reproché une heure d'arrivée tardive et lui aurait demandé de préparer une réunion ayant lieu le jour même en fin d'après-midi. Afin de préparer cette réunion, Mme B... devait se faire expliquer la procédure par l'assistante de son cadre hiérarchique, qui aurait tardé à lui remettre le document source nécessaire à la préparation de la réunion, empêchant ainsi Mme B... de mener à bien sa mission. Lors de la réunion en cause, cette cadre aurait, en outre, reproché à Mme B... de ne pas saluer ses collègues et de ne pas avoir compris les consignes de préparation de ladite réunion, ce qui la conduisait à lui confier à l'avenir des missions plus simples. La requérante soutient que les reproches formulés par sa supérieure hiérarchique et les conditions de travail qui lui ont ainsi été réservées lors de sa première journée de reprise d'activité après son congé de maladie relèvent d'actes de violence verbale et psychologique, qui sont constitutifs d'une maltraitance professionnelle. Toutefois, ces circonstances, à les supposer exactes, ne suffisent pas à établir l'existence d'un évènement soudain et violent susceptible d'être qualifié d'accident de service alors que les reproches et consignes professionnelles formulées par la supérieure hiérarchique de Mme B... n'excèdent pas l'exercice normal du pouvoir hiérarchique et que le retard supposé de l'assistante de la responsable de service à remettre le document nécessaire à l'accomplissement de la mission confiée à Mme B... n'apparaît pas constituer un acte prémédité et fait dans le seul but de nuire à cette dernière. Par suite, c'est sans erreur d'appréciation que le président du conseil départemental d'Ille-et-Vilaine a rejeté la demande de reconnaissance d'un accident de service présentée par Mme B....
9. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Rennes a, par le jugement du
14 octobre 2022, rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au département d'Ille-et-Vilaine.
Délibéré après l'audience du 5 septembre 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Brisson, présidente de chambre,
- M. Vergne, président-assesseur,
- Mme Marion, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 septembre 2024.
La rapporteure,
I. MARION
La présidente,
C. BRISSON
Le greffier,
R. MAGEAU
La République mande et ordonne au préfet d'Ille-et-Vilaine en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°22NT03794