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22/11/2024 | FRANCE | N°23NT00833

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 2ème chambre, 22 novembre 2024, 23NT00833


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. C... A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 8 septembre 2022 par laquelle le ministre de l'intérieur a ajourné à un an sa demande de naturalisation.



Par une ordonnance n° 2213047 du 20 janvier 2023, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête et un mémoire, enregistrés les 24 mars 2

023 et 28 février 2024, M. A... B..., représenté par Me Fall, demande à la cour :



1°) d'annuler cette ordonnance d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 8 septembre 2022 par laquelle le ministre de l'intérieur a ajourné à un an sa demande de naturalisation.

Par une ordonnance n° 2213047 du 20 janvier 2023, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 24 mars 2023 et 28 février 2024, M. A... B..., représenté par Me Fall, demande à la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance du président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler la décision du 8 septembre 2022 du ministre de l'intérieur ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de faire droit à sa demande de naturalisation dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision d'ajournement contestée est insuffisamment motivée ;

- elle entachée d'erreur de droit, en ce que l'article 21-16 du code civil n'impose pas qu'il ait fixé durablement en France le centre de ses intérêts familiaux ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 janvier 2024, le ministre de l'intérieur et des outre-mer conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Mas a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation de la décision du 8 septembre 2022 par laquelle le ministre de l'intérieur, saisi du recours administratif préalable obligatoire formé, conformément à l'article 45 du décret du 30 décembre 1993, à l'encontre de la décision du préfet de Seine-et-Marne du 7 février 2022 rejetant sa demande de naturalisation, a substitué à cette décision de rejet une décision d'ajournement à un an, jusqu'au 7 février 2023, de sa demande de naturalisation. Par une ordonnance du 20 janvier 2023 prise sur le fondement du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, le président de la troisième chambre du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. M. A... B... relève appel de cette ordonnance.

Sur le bien-fondé de l'ordonnance attaquée :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 49 du décret du 30 décembre 1993 : " Toute décision déclarant irrecevable, ajournant ou rejetant une demande de naturalisation ou de réintégration dans la nationalité française prise en application du présent décret est motivée conformément à l'article 27 de la loi n° 98-170 du 16 mars 1998 relative à la nationalité. ".

3. La décision contestée du ministre de l'intérieur du 8 septembre 2022 mentionne les articles 45 et 48 du décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 sur lesquels elle se fonde et indique qu'elle est motivée par la circonstance que la concubine et mère de l'enfant de M. A... B... résidant temporairement sur le territoire français, sous couvert d'une attestation de demandeur d'asile, il ne peut être regardé comme ayant fixé durablement le centre de ses intérêts familiaux en France. Elle indique ainsi avec suffisamment de précision les motifs de droit et de fait qui la fondent. Le moyen tiré de ce que cette décision est insuffisamment motivée doit, dès lors, être écarté.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 21-16 du code civil : " Nul ne peut être naturalisé s'il n'a en France sa résidence au moment de la signature du décret de naturalisation ". Ces dispositions imposent à tout candidat à l'acquisition de la nationalité française de résider en France et d'y avoir fixé durablement le centre de ses intérêts familiaux et matériels à la date à laquelle il est statué sur sa demande. Pour apprécier si cette dernière condition est remplie, l'administration peut notamment se fonder, sous le contrôle du juge, sur la durée de la présence du demandeur sur le territoire français, sur sa situation familiale, ainsi que sur le caractère suffisant et durable des ressources qui lui permettent de demeurer en France. Le ministre, auquel il appartient de porter une appréciation sur l'opportunité d'accorder la nationalité française à l'étranger qui la sollicite peut légalement, dans le cadre de cet examen d'opportunité, tenir compte de toutes les circonstances de l'affaire, y compris de celles qui ont été examinées pour statuer sur la recevabilité de la demande.

5. La décision du 8 septembre 2022 contestée, portant ajournement de la demande de naturalisation de M. A... B..., n'étant pas fondée sur les dispositions précitées de l'article 21-16 du code civil, qui régissent la recevabilité d'une telle demande, le moyen tiré de ce que le ministre de l'intérieur aurait commis une erreur de droit dans l'interprétation de cet article ne peut qu'être écarté comme inopérant.

6. En dernier lieu, il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision contestée, la concubine de M. A... B... et mère de l'un de ses deux enfants résidait en France sous couvert d'une attestation de demande d'asile valable du 2 septembre 2022 au 1er mars 2023. Compte tenu du caractère précaire du droit au séjour de celle-ci, le ministre de l'intérieur a pu, sans entacher sa décision d'erreur manifeste d'appréciation, ajourner à un an la demande de naturalisation de M. A... B.... La circonstance, postérieure tant à la décision contestée du 8 septembre 2022 qu'à l'expiration de la durée d'ajournement fixée par cette décision, que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a accordé à la concubine de M. A... B... le bénéfice de la protection subsidiaire par une décision du 23 février 2023, est sans incidence sur la légalité de cette décision. Si M. A... B... soutient qu'il maîtrise la langue française, est intégré, travaille et a des amis en France, ces circonstances, à les supposer établies, sont, eu égard aux motifs de la décision contestée, également sans incidence sur sa légalité.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. A... B..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par ce dernier doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme demandée par M. A... B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... B... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 5 novembre 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Montes-Derouet, présidente,

- M. Dias, premier conseiller,

- M. Mas, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 novembre 2024.

Le rapporteur,

B. MASLa présidente,

I. MONTES-DEROUET

La greffière,

M. D...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23NT00833


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NT00833
Date de la décision : 22/11/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MONTES-DEROUET
Rapporteur ?: M. Benoît MAS
Rapporteur public ?: M. LE BRUN
Avocat(s) : FALL

Origine de la décision
Date de l'import : 24/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-11-22;23nt00833 ?
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