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25/04/2025 | FRANCE | N°24NT03107

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 3ème chambre, 25 avril 2025, 24NT03107


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 18 septembre 2024 par lequel le préfet du Finistère lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retourner sur le territoire français pendant un an ainsi que l'arrêté du même jour l'assignant à résidence à Morlaix pendant une durée de 45 jours ;



Par un jugement n°2405719 du 9 octobre 20

24, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 18 septembre 2024 par lequel le préfet du Finistère lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retourner sur le territoire français pendant un an ainsi que l'arrêté du même jour l'assignant à résidence à Morlaix pendant une durée de 45 jours ;

Par un jugement n°2405719 du 9 octobre 2024, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 6 novembre 2024 et 12 mars 2025, M. C..., représenté par Me Landolsi, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 9 octobre 2024 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Finistère du 18 septembre 2024 portant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de renvoi et lui interdisant de retourner pendant un an sur le territoire français ;

3°) d'annuler l'arrêté du préfet du Finistère du 18 septembre 2024 l'assignant à résidence à Morlaix pendant 45 jours ;

4°) d'enjoindre à l'Etat de procéder à l'effacement du signalement du requérant dans le système d'information Schengen et d'enjoindre au préfet du Finistère de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 200 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé et entaché d'erreur de fait et de droit, méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant et a été pris en méconnaissance des articles L. 423-7 et L. 423-8, L. 731-1 et L. 732-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- les décisions ont été prises en méconnaissance des articles L. 423-7 et L. 423-8, L. 731-1 et L. 732-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision d'obligation de quitter le territoire français du préfet du Finistère a été prise en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés et de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- la décision d'assignation à résidence méconnaît l'article L. 731-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur d'appréciation ;

- la décision d'interdiction de retour sur le territoire français pendant un an méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 mars 2025, le préfet du Finistère, conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Marion a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., de nationalité tunisienne, né le 20 septembre 2001 à Haffouz (Tunisie), est entré en France irrégulièrement, le 1er février 2023 selon ses déclarations. Le 30 août 2024, il a été entendu sur sa situation administrative, dans le cadre d'un contrôle inopiné sur la règlementation du code du travail alors qu'il travaillait sans être déclaré dans un salon de coiffure à Morlaix (Finistère). Par un arrêté du 18 septembre 2024, le préfet du Finistère a pris à son encontre, sur le fondement du 1° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, une décision d'obligation de quitter le territoire français, a fixé le pays de destination et lui a interdit de retourner sur le territoire français pendant un an. Par un arrêté du même jour, le préfet du Finistère l'a assigné à résidence à Morlaix pendant 45 jours. M. C... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler ces deux arrêtés. Par la présente requête, il relève appel du jugement du 9 octobre 2024 du tribunal administratif de Rennes rejetant sa demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, eu égard à l'office du juge d'appel, qui est appelé à statuer, d'une part, sur la régularité de la décision des premiers juges et, d'autre part, sur le litige qui a été porté devant eux, les moyens tirés de ce que le tribunal administratif aurait commis des erreurs de fait et de droit et méconnu les articles L. 423-7, L. 423-8, L. 731-1 et L. 732-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant sont inopérants.

3. En second lieu, il résulte des motifs mêmes du jugement que le tribunal administratif de Rennes a expressément répondu aux moyens contenus dans le mémoire produit par le requérant. En particulier, et contrairement aux affirmations du requérant, le tribunal administratif n'a pas omis d'examiner la situation personnelle de M. C... alors qu'il a mentionné que ce dernier vit en concubinage avec une Française depuis avril 2023 mais qu'il n'établissait pas l'ancienneté de sa relation et qu'il avait reconnu l'enfant à naître de cette dernière. Par suite, M. C... n'est pas fondé à soutenir que le jugement serait entaché d'irrégularité.

Sur les conclusions dirigées contre la décision d'obligation de quitter le territoire français :

4. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision d'obligation de quitter le territoire français, Mme D... A..., ressortissante française mineure, était enceinte d'un enfant conçu avec M. C.... Par suite, le requérant ne peut soutenir qu'il était en droit de bénéficier de plein droit d'un titre de séjour en sa qualité de père d'un enfant français mineur résidant en France dès lors qu'il ne pouvait satisfaire à la condition d'avoir contribué effectivement à son entretien et à son éducation depuis la naissance de l'enfant en application des articles L. 423-7 et L. 423-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que ce dernier n'est né que le 28 février 2025, soit postérieurement à la décision d'obligation de quitter le territoire français.

5. En deuxième lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ".

6. Il ressort des pièces du dossier que M. C..., est entré irrégulièrement en France alors qu'il était âgé de 21 ans et y séjourne depuis seulement le début de l'année 2023. Il vit en concubinage avec une ressortissante française depuis avril 2023 et a reconnu le 31 août 2024 l'enfant à naître de cette relation. Il a par ailleurs travaillé sans être déclaré dans des salons de coiffure, dont en dernier lieu celui d'un compatriote installé à Morlaix. L'établissement de sa vie privée et familiale sur le territoire français d'une durée de moins de deux ans est donc récent et précaire et ne saurait être déterminant alors que M. C... n'établit pas ne plus avoir de liens dans son pays d'origine où il a résidé l'essentiel de sa vie. Dans ces conditions, le préfet du Finistère n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a pris la décision en litige. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

7. En troisième lieu, aux termes des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".

8. Si le requérant fait valoir que la décision d'éloignement a pour effet de le priver de la possibilité d'assister à la naissance de son enfant et de participer à l'entretien et à l'éducation de ce dernier durant les premières années de vie de l'enfant, il n'établit pas ne pas pouvoir retourner vivre en Tunisie et y établir son foyer avec sa compagne française dont il est constant qu'elle n'exerce aucune activité professionnelle. Par suite, la décision en litige ne porte pas atteinte aux droits de l'enfant à naître au regard des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

Sur les conclusions dirigées contre la décision d'assignation à résidence :

9. Aux termes de l'article L. 731-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut assigner à résidence l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, dans les cas suivants : 1° L'étranger fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, prise moins de trois ans auparavant, pour laquelle le délai de départ volontaire est expiré ou n'a pas été accordé ; (...) ".

10. Il résulte des termes de l'arrêté en litige que le préfet du Finistère n'a pas assorti sa décision d'obligation de quitter le territoire français d'un délai de départ volontaire. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait commis une erreur de droit en se fondant sur les dispositions précitées pour édicter la décision d'assignation à résidence alors que l'éloignement de M. C... constituait une perspective raisonnable.

Sur les conclusions dirigées contre la décision d'interdiction de retour sur le territoire français :

11. En premier lieu, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté par adoption des motifs exposés au point 6 du présent arrêt.

12. En second lieu, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant doit être écarté par adoption des motifs exposés au point 8 du présent arrêt.

13. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'annulation doivent être rejetées ainsi que ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Finistère.

Délibéré après l'audience du 3 avril 2025, à laquelle siégeaient :

- Mme Brisson, présidente de chambre,

- M. Vergne, président assesseur,

- Mme Marion, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 avril2025.

La rapporteure,

I. MARION

La présidente,

C. BRISSON

Le greffier,

Y. MARQUIS

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 24NT03107


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 24NT03107
Date de la décision : 25/04/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. BRISSON
Rapporteur ?: Mme Isabelle MARION
Rapporteur public ?: M. CATROUX
Avocat(s) : LANDOLSI

Origine de la décision
Date de l'import : 04/05/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-25;24nt03107 ?
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