Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 29 mars 1991 présentée par la société Saint-Gobain-Emballage, dont le siège social est ... (Hauts-de-Seine), représentée par son président en exercice ; la société Saint-Gobain-Emballage demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 13 février 1991 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des années 1981, 1982 et 1983 dans les rôles de la commune de Courbevoie ;
2°) de prononcer la réduction de ces impo-sitions ; Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu la loi n° 68-1 du 2 janvier 1968 sur les brevets d'invention ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 30 juin 1992 :
- le rapport de M. Mendras, conseiller,
- et les conclusions de Mme de Segonzac, commissaire du Gouvernement ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : "2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés" ; qu'il résulte de ces dispositions que les dépenses qui ont pour résultat l'entrée d'un nouvel élément dans l'actif immobilisé de l'entreprise ne font pas partie de ses frais généraux et ne sont imputables sur les résultats que par la voie de l'amortissement ;
Considérant que si à l'appui de son recours la société Saint-Gobain-Emballage soutient que le dépôt d'un brevet ne garantit pas nécessairement de pouvoir bénéficier durablement d'une source régulière de profits, il résulte néanmoins des dispositions de la loi du 2 janvier 1968 qu'il confère au titulaire du brevet ou à ses ayants cause un droit exclusif d'exploitation de l'invention pendant une durée de vingt années ; que ce droit, quelles que soient par ailleurs les limites de la protection légale résultant de la délivrance du brevet, est de nature à exercer sur plusieurs exercices une influence bénéfique sur les résultats de l'entreprise ; que par suite les brevets qui sont déposés par l'entreprise en vue d'une utilisation durable pour les besoins de son exploitation constituent un élément incorporel de l'actif immobilisé ; que les frais qu'a exposés la société requérante en 1981, 1982 et 1983 qui étaient nécessaires à la délivrance des brevets constituent la contrepartie de l'acquisition d'un élément de l'actif immobilisé et ne pouvaient donc être déduits des résultats au titre de ces années ; que si la société requérante soutient que ces frais peuvent être assimilés à d'autres dépenses telles que les frais d'acquisition d'immobilisations, les frais d'inscription au registre du commerce, les frais d'actes et droits de succession ou donation dont l'administration admet la déduction en vertu de l'instruction 4 G-6-84 du 17 décembre 1984, celle-ci est néanmoins muette sur les frais de dépôt des brevets ; que par suite, et en tout état de cause, la société requérante n'est pas fondée à se prévaloir de cette instruction sur le fondement de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 38 quater de l'annexe III au code général des impôts "les inscriptions aux différents postes figurant aux comptes, au bilan et aux tableaux dont les modèles sont établis conformément à l'article 38 bis, doivent respecter les définitions édictées par le plan comptable général, dans la mesure où ces définitions ne sont pas incompatibles avec les règles applicables pour l'assiette de l'impôt" ; qu'il résulte des termes mêmes de cette disposition que la société requérante ne peut s'en prévaloir pour opposer aux règles ci-dessus rappelées les définitions du plan comptable ;
Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article 236 du code général des impôts dans sa rédaction applicable à l'espèce : "Le montant des dépenses de fonctionnement exposées dans les opérations de recherche scientifique ou technique est déductible, pour l'établissement de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés, des bénéfices de l'année ou de l'exercice au cours duquel ces dépenses ont été exposées" ; que ces dispositions ne concernent pas les frais exposés auprès de l'Institut national de la propriété industrielle pour déposer des brevets ; que l'instruction de la direction générale des impôts du 17 octobre 1983 n'a eu pour objet que de commenter les dispositions de l'article 67 de la loi du 29 décembre 1982 instituant un crédit d'impôt au bénéfice des entreprises industrielles et commerciales qui accroissent leur effort de recherche et ne peut être regardée comme comportant une interprétation des dispositions précitées de l'article 236 du code général des impôts ; que la société requérante n'est donc pas fondée à s'en prévaloir sur le fondement de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Saint-Gobain-Emballage n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, lequel était suffisamment motivé dès lors qu'il n'avait à répondre qu'aux moyens présentés par la société et non aux simples arguments, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Article 1er : La requête de la société Saint-Gobain-Emballage est rejetée.