VU la requête, enregistrée au greffe de la cour le 19 février 1999, présentée pour la COMMUNE DE BOURAIL, représentée par son maire en exercice, par Me Y... et la SCP ROUX-LANG-CHEYMOL-CANIZARES, avocats ; la COMMUNE DE BOURAIL demande à la cour :
1° d'annuler le jugement n° 9800220 du 10 décembre 1998 par lequel le tribunal administratif de Nouméa a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat et du territoire de Nouvelle-Calédonie à lui verser la somme de 31 151 691 francs C.F.P., assortie des intérêts de droit, correspondant à la perte de recettes subie à raison d'une minoration de l'assiette du fonds intercommunal de péréquation de l'année 1996 ;
2°) de prononcer la condamnation demandée, augmentée des intérêts de droit à compter de la demande préalable et de la capitalisation de ces intérêts en application de l'article 1154 du code civil ;
Classement CNIJ : 54-01-07-05
C
3°) et de condamner l'Etat et le territoire de Nouvelle-Calédonie à lui verser la somme de 20 000 F au titre des frais irrépétibles ainsi que les entiers dépens, y compris le droit de timbre et le droit de plaidoirie ;
........................................................................................................
VU les autres pièces du dossier ;
VU la loi organique n°99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie ;
VU la loi n°69-5 du 3 janvier 1969 modifiée relative à la création et à l'organisation des communes dans le territoire de la Nouvelle-Calédonie et dépendances, et notamment son article 9-1 ;
VU le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique, ensemble le décret n° 92-163 du 26 février 1992 ;
VU le décret n° 96-443 du 21 mai 1996 fixant la quote-part pour l'année 1996 des ressources du budget du territoire de la Nouvelle-Calédonie destinée à alimenter le fonds intercommunal de péréquation pour le fonctionnement des communes ;
VU le décret n° 99-129 du 23 février 1999 fixant la majoration de la quote-part pour l'année 1996 des recettes du budget du territoire de la Nouvelle-Calédonie destinée à alimenter le fonds intercommunal de péréquation pour le fonctionnement des communes ;
VU le code territorial des impôts ;
VU le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 mai 2003 :
-le rapport de Mme ESCAUT, premier conseiller,
-les observations de Me X..., avocat, pour la Nouvelle-Calédonie ,
-et les conclusions de M. BATAILLE, commissaire du Gouvernement ;
Considérant que la COMMUNE DE BOURAIL fait appel du jugement, en date du 10 décembre 1998, par lequel le tribunal administratif de Nouméa a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat et du territoire de la Nouvelle-Calédonie à lui verser la somme de 31 151 691 F CFP, en réparation du préjudice financier étant résulté pour elle de la perte de recettes subie, au titre de l'année 1996, du fait d'une minoration de l'assiette du fonds intercommunal de péréquation ; que si le secrétaire d'Etat à l'outre-mer a présenté des conclusions qu'il dit tendre à la réformation du jugement attaqué par la voie du recours incident, ces conclusions, dirigées contre un jugement dont le dispositif de rejet ne peut être regardé que comme lui donnant pleine satisfaction, tendent en réalité, dans le cadre de la détermination de l'assiette du fonds intercommunal de péréquation à laquelle il convient de procéder pour l'appréciation du mérite de la demande de la COMMUNE DE BOURAIL, à en exclure certaines recettes ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant, en premier lieu, que si la COMMUNE DE BOURAIL n'a reçu que quelques jours avant l'audience le mémoire en défense déposé par le haut-commissaire de la République devant le tribunal administratif de Nouméa, il résulte de l'instruction que ce mémoire ne comportait aucun moyen différent de ceux déjà invoqués dans le mémoire en défense du territoire de la Nouvelle-Calédonie et dont elle avait eu communication auparavant ; que si ce mémoire comporte des éléments financiers nouveaux, le jugement attaqué ne se fonde que sur les éléments financiers déjà produits par le territoire de la Nouvelle-Calédonie ; qu'enfin, les conclusions à fin d'appel en garantie formulées par le haut-commissaire de la République dans son mémoire en défense, sur lesquelles, au demeurant, le tribunal n'avait pas à statuer compte tenu de la solution qu'il a adoptée, ne concernaient pas la commune mais uniquement le territoire de la Nouvelle-Calédonie ; que, par suite, la commune n'est pas fondée à invoquer une méconnaissance de la procédure contradictoire devant le tribunal ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort de l'examen de la minute du jugement attaqué que celle-ci comporte dans ses visas l'analyse de l'ensemble des conclusions et moyens présentés devant le tribunal ; que la circonstance que l'expédition du jugement notifié à la commune ne comporte que des visas incomplets est sans influence sur la régularité du jugement ;
Considérant, en troisième lieu, que, contrairement à ce que soutient la commune, le jugement attaqué donne une définition de la notion d' impôts, droits et taxes et se prononce sur la nature des recettes de la régie des tabacs ; qu'ainsi le moyen tiré de ce que le tribunal n'aurait pas statué sur les moyens de la commune relatifs d'une part à la définition de la notion d' impôts, droits et taxes et d'autre part à la nature fiscale des recettes de la régie des tabacs manque en fait ; que, par ailleurs, si la commune fait valoir que le tribunal n'a pas statué sur le moyen concernant la carence de l'Etat à prendre le décret d'application de la loi n°69-5 du 3 janvier 1969 ainsi que le décret majorant la quote-part de l'assiette du fonds intercommunal de péréquation au titre de l'année 1996, ce moyen n'était pas soulevé devant le tribunal ;
Considérant, en dernier lieu, que le tribunal, en écartant les arguments présentés par la commune a suffisamment justifié la qualification juridique qu'il a donnée aux recettes de la régie des tabacs ; que le moyen tiré d'une insuffisante motivation du jugement sur ce point manque donc en fait ;
Sur la recevabilité des conclusions indemnitaires :
Considérant, en premier lieu, que le décret du 21 mai 1996 fixant la quote-part pour l'année 1996 des ressources du budget du territoire de la Nouvelle-Calédonie destinée à alimenter le fonds intercommunal de péréquation pour le fonctionnement des communes a été publié au Journal Officiel de la République française le 25 mai 1996, et l'arrêté du haut-commissaire de la République du 18 juin 1996 portant répartition des crédits du fonds intercommunal de péréquation pour le fonctionnement des communes au titre de l'année 1996 a été publié au Journal Officiel de la Nouvelle-Calédonie le 9 juillet 1996 ; que la COMMUNE DE BOURAIL n'a pas contesté, dans le délai de recours contentieux, ces décisions en tant qu'elles auraient fixé une quote-part insuffisante du budget territorial à verser au fonds intercommunal de péréquation au regard des règles prévues par l'article 9-1 de la loi du 3 janvier 1969 modifiée ; qu'ainsi, ces décisions, qui avaient un objet exclusivement pécuniaire, sont devenues définitives avec toutes les conséquences pécuniaires qui en sont inséparables ; que, par suite, la demande susrappelée présentée par la COMMUNE DE BOURAIL le 1er juillet 1998 devant le tribunal administratif de Nouméa n'était pas recevable ;
Considérant, en second lieu, que la COMMUNE DE BOURAIL soutient, d'une part, que la responsabilité de l'Etat serait engagée à son égard pour n'avoir pas, dans des délais raisonnables après la clôture de l'exercice, majoré par décret la quote-part affectée au titre de l'année 1996 au fonds intercommunal de péréquation, ainsi qu'il est prévu au deuxième alinéa de l'article 9-1 de la loi du 3 janvier 1969 modifiée et, d'autre part, que la responsabilité de la Nouvelle-Calédonie le serait également pour ne pas avoir fait de suffisantes diligences sur ce point ; qu'il est toutefois constant que la requérante s'était bornée en première instance à demander la condamnation de l'Etat et du territoire à la réparation du préjudice résultant des inexactitudes entachant, selon elle, la détermination de l'assiette du fonds intercommunal de péréquation ; qu'ainsi, en tant qu'elles ont pour fondement le manquement susmentionné, les conclusions indemnitaires que la commune dirige tant contre l'Etat que contre la Nouvelle-Calédonie présentent le caractère d'une demande nouvelle en appel qui ne peut, dès lors, qu'être rejetée comme irrecevable ; qu'en tout état de cause, il en est de même des conclusions indemnitaires présentées par la COMMUNE DE BOURAIL en tant qu'elles ont pour fondement la faute qui résulterait selon elle de l'absence d'édiction du décret d'application prévu par l'article 9-1 de la loi du 3 janvier 1969 ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les conclusions de la COMMUNE DE BOURAIL tendant à ce que l'Etat et la Nouvelle-Calédonie soient condamnés à lui verser une somme de 31 151 691 F CFP, correspondant à un manque à gagner pour l'exercice 1996, doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat et la Nouvelle-Calédonie, qui ne sont pas parties perdantes, soient condamnés à verser une somme à la COMMUNE DE BOURAIL au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Considérant, d'autre part, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de condamner la COMMUNE DE BOURAIL à payer à la Nouvelle-Calédonie une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par celle-ci et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la COMMUNE DE BOURAIL est rejetée.
Article 2 : La COMMUNE DE BOURAIL versera à la Nouvelle-Calédonie une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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N° 99PA00433