Vu la requête, enregistrée le 14 novembre 2001, présentée pour M. et Mme Noël X, élisant domicile ..., par Me Gorsse ; M. et Mme X demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 965853 en date du 28 juin 2001 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et à la contribution sociale généralisée auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 1992 ;
2°) de prononcer la décharge sollicitée ;
3°) de condamner l'Etat à leur payer la somme de 11 960 F, soit 1 823,29 euros, au titre de l'article L 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
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Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'article 4 de la loi du 6 fructidor an II ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 janvier 2005 :
- le rapport de M. Pailleret, rapporteur,
- et les conclusions de M. Adrot, commissaire du gouvernement ;
Considérant que la SARL Aux Délices de Saint Arnoult a versé à son gérant et associé M. X, au titre de l'année 1992, une prime d'un montant net de 619 049 F ; que l'administration a estimé que cette prime constituait un revenu distribué imposable à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, en application de l'article 109-1-2° du code général des impôts ; que M. et Mme X relèvent appel du jugement en date du 28 juin 2001 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et à la contribution sociale généralisée mises à leur charge au titre de l'année 1992 à raison de ce chef de redressement ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant que la notification de redressement adressée à M. et Mme X le 28 août 1995 indiquait clairement la nature et le montant du redressement envisagé et comportait des indications suffisantes sur ses motifs pour mettre les intéressés en mesure de présenter leurs observations ainsi qu'ils l'ont d'ailleurs fait par une lettre du 22 septembre 1995 ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'obligeait l'administration à mentionner les articles du code général des impôts sur lesquels le redressement était fondé ; qu'ainsi les requérants, qui ne sauraient utilement se prévaloir du non respect par le service des formalités non substantielles prévues par l'article 4 de loi du 6 fructidor an II, ne sont pas fondés à soutenir que l'administration a méconnu les dispositions de l'article L 57 du livre des procédures fiscales ; que si M. et Mme X soutiennent que l'administration aurait, postérieurement à la mise en recouvrement de l'imposition contestée, procédé à un changement de motif ou à une substitution de base légale par rapport à la notification de redressement, cet argument ne repose, en tout état de cause, sur aucun fondement juridique, l'administration pouvant, après la mise en recouvrement de l'impôt, et à tout moment de la procédure contentieuse, changer de fondement et de motif des rehaussements pour maintenir une imposition légale et régulière sur les mêmes éléments de revenu, à condition de ne priver le redevable d'aucune garantie, ce qui est le cas en l'espèce, dès lors que le service a, dès l'origine, suivi la procédure contradictoire de redressement ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts : Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprennent, sous réserve des dispositions du 5, notamment : 1... les dépenses de personnel...Toutefois, les rémunérations ne sont admises en déduction des résultats que dans la mesure où elles correspondent à un travail effectif et ne sont pas excessives eu égard à l'importance du service rendu ; qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : 1. Sont considérés comme revenus distribués...2° toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices ;
Considérant que la SARL Aux Délices de Saint Arnoult, qui exploite en location gérance, depuis le 1er janvier 1991, un fonds de commerce de boulangerie-pâtisserie appartenant à son gérant et précédemment exploité par celui-ci à titre individuel, a comptabilisé dans ses frais de personnel, au titre de l'exercice clos le 30 août 1992, une somme de 2 068 464 F, comprenant outre les salaires des ouvriers et du gérant, une somme de 619 049 F représentant, selon elle, une prime exceptionnelle allouée à son gérant et associé par une décision de son assemblée générale du 17 août 1992 ; qu'il résulte des constatations effectuées par le service lors de la vérification de comptabilité de la société, et non contredites par les requérants, que le salaire du gérant avait été fixé à 15 000 F brut mensuel pendant toute la période vérifiée, soit jusqu'en 1995 ; que la prime en cause a été constatée en compte courant du gérant par différentes écritures qui ont permis de solder deux comptes courants débiteurs à la suite de plusieurs prélèvements effectués au cours de l'exercice ; qu'elle n'a donné lieu à aucune feuille de paie et n'a pas été portée sur la déclaration annuelle de salaires (DAS) ; que cette prime allouée au seul gérant représentait 10 % du chiffre d'affaires de la société et était hors de proportion avec l'augmentation du chiffre d'affaires laquelle, outre le fait qu'elle était peu significative, était davantage imputable à un différé des charges d'exploitation qu'à l'action personnelle de son gérant qui a poursuivi dans des conditions d'exploitation identiques l'activité précédemment exercée à titre individuel ; que dans ces conditions, l'administration qui n'était pas tenue de se référer à des éléments de comparaison pris dans des entreprises similaires établit que la somme de 619 049 F qui représente 206 % du salaire de l'exercice en cause excède la rétribution normale correspondant aux services rendus par son gérant à l'entreprise et constitue, ainsi, non un complément de salaires mais un revenu distribué à M. X ; que c'est, par suite, à bon droit que l'administration a taxé ladite somme dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers au titre de l'année 1992 ;
Sur les pénalités :
Considérant que les droits litigieux ont été assortis de la majoration prévue à l'article 1729 du code général des impôts qui dispose : I - Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 % si la mauvaise foi de l'intéressé est établie ... ;
Considérant que compte tenu , d'une part, de ce que le versement de la prime en cause a permis de solder les comptes courants d'associés de M. X qui étaient débiteurs à la suite des nombreux prélèvements effectués au cours de l'exercice, qu'elle n'a donné lieu à l'établissement d'aucune feuille de paie et n'a pas été portée sur la déclaration annuelle des salaires, ce que M. X en sa qualité de gérant ne pouvait ignorer, et d'autre part de ce que, contrairement à la qualification revendiquée par les requérants, ladite prime n'a pas été déclarée par eux dans la catégorie des traitements et salaires, l'administration établit que la bonne foi de M. X en tant que bénéficiaire de la distribution non déclarée, laquelle représente une part importante des revenus imposables à l'impôt sur le revenu du foyer fiscal, ne peut être admise ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article l'article L.761-1 du code de justice administrative, le tribunal ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par M. et Mme X doivent, dès lors, être rejetées ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. et Mme X est rejetée.
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N° 01PA03796