Vu la requête, enregistrée le 7 mars 2006 en télécopie et 9 mars 2006 en original, présentée pour Mme Y... épouse demeurant ... par Me X... de la Rochere ; Mme demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0419273/8 du 7 février 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 août 2004 par lequel le préfet de police a décidé sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour fixant le pays de destination ;
2°) d'annuler cette décision pour excès de pouvoir ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée, alors en vigueur ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du 2 janvier 2006 par laquelle le président de la cour a délégué les pouvoirs qui lui sont attribués par les articles L. 776-1 et R. 222-3 du code de justice administrative à M. Pailleret ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 juillet 2006 :
- le rapport de M. Pailleret, magistrat délégué,
- les observations de Me X... de la Rochere pour Mme épouse ,
- et les conclusions de M. Adrot, commissaire du gouvernement ;
Sur l'arrêté de reconduite à la frontière :
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;
Considérant qu'il ressort des pièces que Mme , de nationalité russe, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 11 juin 2004, de la décision du même jour du préfet de police lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'elle entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;
Considérant que, par un arrêté du 26 décembre 2003, régulièrement publié au bulletin municipal officiel de la ville de Paris, le préfet de police, a donné à M. Bruno Z..., chargé de mission auprès du directeur de la police générale, délégation pour signer notamment les arrêtés de reconduite à la frontière des étrangers en situation irrégulière ; que, par suite, le moyen tiré de ce que M. Bruno Z... n'aurait pas été compétent faute d'être titulaire d'une délégation régulière pour signer l'arrêté attaqué manque en fait ;
Considérant que le moyen invoqué par la requérante et tiré des risques encourus en cas de retour dans son pays d'origine est inopérant à l'encontre de l'arrêté de reconduite à la frontière qui ne fixe pas le pays de destination de la reconduite ;
Sur la légalité de la décision désignant le pays de destination :
Considérant qu'aux termes de l'article 27 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : (…) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ; que ce dernier texte énonce que : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ;
Considérant que ces dispositions combinées font obstacle à ce que puisse être légalement désigné comme pays de destination d'un étranger faisant l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière un Etat pour lequel il existe des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé s'y trouverait exposé à un risque réel pour sa personne soit du fait des autorités de cet Etat, soit même du fait de personnes ou de groupe de personnes ne relevant pas des autorités publiques, dès lors que, dans ce dernier cas, les autorités de l'Etat de destination ne sont pas en mesure de parer à un tel risque par une protection appropriée ;
Considérant que Mme , de nationalité russe mais ayant vécu en Moldavie, ancienne république soviétique indépendante depuis 1991, dans la province de Transnistrie, soutient qu'elle a fait l'objet de mauvais traitements de la part de « milices pro-russes » en raison de son engagement en faveur de la cause moldave contre l'auto proclamation de l'indépendance de la province de Transnistrie majoritairement russe ; que, toutefois, Mme doit être reconduite en Russie, pays dont elle a la nationalité ; que, par suite, le moyen tiré des risques auxquels elle serait exposée personnellement en cas de retour en Transnistrie, dont la réalité n'est au demeurant pas établie, est inopérant à l'encontre de la décision fixant la Russie comme pays de destination de la reconduite à la frontière ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué qui n'est entaché d'aucune contradiction dans ses motifs, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
Considérant que la présente décision, qui rejette la requête de Mme , n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions aux fins d'injonction présentées par Mme doivent être également rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la somme de 1 500 euros que demande Mme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme est rejetée.
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N° 06PA00884