Vu la requête, enregistrée le 12 juin 2006, présentée pour M. B...D...demeurant..., par la SCP Rappaport-C... -Schor ; M. D...demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0105975/6-2 du 28 mars 2006 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à l'indemniser des conséquences de l'erreur médicale qu'aurait commise le centre d'expertise médicale du personnel navigant de la compagnie Air France en prononçant son aptitude au service le 8 juillet 1996 et à ce qu'une expertise soit ordonnée aux fins d'évaluation de son préjudice ;
2°) d'ordonner une nouvelle expertise par un collège de trois experts oto-rhino-laryngologistes ;
Il soutient que c'est à tort que le tribunal a refusé de faire droit à sa demande de contre expertise ; qu'en effet, les conclusions de l'expert judiciaire désigné par le jugement avant-dire droit du Tribunal administratif de Paris du 9 mars 2004 sont contraires aux connaissances actuelles dans le domaine de l'oto-rhino-laryngologie et notamment aux études du docteur Kossowski publiées en 2003 ; que contrairement à ce qu'a soutenu l'expert, il est constant et admis tant par la juridiction administrative que par l'administration de l'aviation civile que le requérant a fait l'objet de cinq otites consécutivement à la reprise de son activité en 1996 ; qu'ainsi l'état de santé de M. D...n'est pas comme l'a à tort qualifié l'expert une maladie dégénérative des oreilles internes mais bien le résultats d'otites barotraumatiques ; que les conclusions de l'expert sont également en contradiction avec celles de cinq autres médecins ; que le centre d'expertise médicale du personnel navigant de la compagnie Air France (CEPMN) a commis une faute en déclarant le 8 juillet 1996 M. D... apte à exercer ses fonctions contre l'avis de deux certificats médicaux produits par le requérant alors que le principe de précaution imposait une suspension temporaire de fonctions pour ouvrir une période d'observation de l'état auditif de M.D... ; qu'il y a lieu en conséquence pour la cour d'ordonner une nouvelle expertise aux fins de déterminer si les difficultés auditives du requérant devaient justifier qu'il cesse provisoirement d'exercer ses fonctions le 8 juillet 1996, d'indiquer si cette suspension lui aurait permis d'éviter les cinq otites dont il a été victime et d'échapper ainsi à l'aggravation de son état de santé auditif, de fournir tous les éléments sur l'origine de son état dépressif anxieux, de préciser si son état de santé est consolidé et d'indiquer son taux d'invalidité ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu la mise en demeure adressée le 20 septembre 2006 à la caisse primaire d'assurance maladie d'Ile-de-France en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, et l'avis de réception de cette mise en demeure ;
Vu la mise en demeure adressée le 20 septembre 2006 à la caisse régionale d'assurance maladie de Midi-Pyrénées, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, et l'avis de réception de cette mise en demeure ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 6 octobre 2006, présenté par le ministre d'Etat, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables ; le ministre conclut au rejet de la requête ; il soutient que M. D...n'a connu qu'un seul incident d'otite barotraumatique entre son embauche en décembre 1989 et la visite médicale effectuée au CEPMN le 8 juillet 1996 et que cet incident remontait au mois de février précédent soit près de six mois avant la visite médicale ; que l'audiogramme effectué à l'occasion de cette visite n'a pas permis de déceler d'anomalies particulières justifiant de le déclarer inapte ; que les certificats médicaux présentés à cette occasion par M. D...émanaient de deux médecins ORL mais sans compétence dans le domaine de la médecine aéronautique et n'étaient pas de nature à conduire le médecin du CEPMN à prendre immédiatement une décision d'inaptitude ; qu'en ne renouvelant l'aptitude du requérant que pour une durée de six mois, le médecin du CEPMN a concilié l'intérêt médical et l'intérêt professionnel de l'agent lequel n'avait pas demandé son inaptitude mais bien le renouvellement de son aptitude ; qu'en outre, le CEPMN n'a pas été informé des épisodes barotraumatiques postérieurs à cette visite qui aurait pu le conduire à réviser sa position sur l'aptitude du requérant à exercer ses fonctions ; qu'il appartenait à ce dernier ou à son employeur de demander une décision d'inaptitude eu égard aux évènements survenus postérieurement au 8 juillet 1996 ; qu'il n'y a donc pas de lien de causalité entre l'aggravation de l'état de santé du requérant et la décision du CEPMN et qu'à supposer que la cour retienne la responsabilité de l'administration, elle devra être largement atténuée par les comportements fautivement passifs de l'exposant et de son employeur ; que la demande de contre expertise ne présente pas de caractère utile dès lors que le requérant fonde son argumentation sur des connaissances postérieures à la date de la décision du CEPMN ; qu'en tout état de cause, les différents médecins consultés par le requérant n'apportent pas d'éléments concrets permettant de qualifier la cause des douleurs en vol de M. D...ni même la preuve d'accidents barotraumatiques ; que l'expert ne s'est pas fondé sur la seule mise en cause d'otites barotraumatiques mais également sur les éléments médicaux du dossier de M. D...qui permettent d'écarter la thèse du dysbarisme et de constater l'existence d'une maladie dégénérative des oreilles internes affectant le requérant ;
Vu le mémoire enregistré le 30 octobre 2006, présenté pour la caisse de retraite du personnel navigant professionnel de l'aéronautique civile par Me A...qui conclut à ce qu'il soit donné acte de ce qu'elle s'en rapporte à justice et de la réserve de ses droits et actions et recours ultérieurs ; elle soutient qu'en cas de faute commise par le CEMPN elle pourrait engager un recours contre l'Etat pour obtenir le remboursement des sommes qu'elle a versées à M. D... ;
Vu le mémoire enregistré le 23 novembre 2007, présenté pour M. D...tendant aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'aviation civile ;
Vu l'arrêté du 2 décembre 1988 relatif à l'aptitude physique et mentale du personnel navigant technique de l'aviation civile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 novembre 2007 :
- le rapport de M. Marino, rapporteur,
- les observations de Me C...de la Scp Rappaport-C... -Schor pour M. D...,
- et les conclusions de M. Coiffet, commissaire du gouvernement ;
- connaissance prise de la note en délibéré enregistrée le 29 novembre 2007, présentée pour M.D... ;
Considérant que M. D...a été engagé le 1er décembre 1989 par la compagnie Air France en qualité de steward ; que le 8 février 1996, il a bénéficié d'un arrêt de travail pour une durée de huit jours en raison d'une otite barotraumatique contractée au cours d'un vol ; que le 8 juillet suivant, M. D...s'est présenté devant le médecin du centre d'expertise médicale du personnel navigant de la compagnie Air France qui l'a reconnu apte à la poursuite de ses fonctions pendant une nouvelle période de six mois ; que M. D... ayant ressenti à nouveau de fortes douleurs aux oreilles au cours de cinq vols effectués entre les mois de juillet et de novembre 1996, a été déclaré définitivement inapte à l'exercice des fonctions de steward par une décision du conseil médical de l'aéronautique civile du 13 mars 1997 ; que cette inaptitude a été reconnue imputable au service aérien par une décision du ministre chargé de l'aviation civile en date du 16 novembre 1999 ; que M. D...a perçu à ce titre une indemnité d'invalidité et une pension civile de retraite ; que le requérant estimant cependant que cette inaptitude définitive résultait de l'erreur commise par le médecin du centre d'expertise médicale qui aurait dû le déclarer provisoirement inapte, a saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à ce que l'Etat soit déclaré responsable du préjudice lié à son inaptitude définitive ; que, par le jugement du 28 mars 2006 dont M. D... fait appel, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Considérant en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise judiciaire qu'il avait été constaté dès les examens audio métriques pratiqués en 1988 et en 1989 préalablement à son embauche, que M. D...présentait une baisse d'audition bilatérale sur les fréquences aiguës ; que les seuils relevés lors de l'audiogramme réalisé au cours de la visite médicale du 8 juillet 1996 ne différaient que très peu de ceux-ci, ne révélant qu'une très faible aggravation du déficit auditif originel de M.D... ; qu'à cette date le requérant n'avait connu qu'un seul épisode barotraumatique depuis son entrée en fonction près de sept années auparavant ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, et nonobstant les deux certificats établis par les médecins traitants de M. D...faisant état de sa fragilité cochléaire et déconseillant tout risque barotraumatique, le médecin du centre d'expertise médicale du personnel navigant d'Air France ne s'est pas livré, à la date à laquelle il s'est prononcé, à une appréciation erronée de l'état de santé de M.D... en proposant le renouvellement de sa licence ; que M. D...ne saurait utilement se prévaloir des avancées médicales sur la connaissance des dysbarismes pour contester le bien-fondé de cette appréciation ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin de faire droit aux conclusions de la requête tendant à l'organisation d'une nouvelle expertise, c'est à juste titre que le Tribunal administratif de Paris a estimé que le service médical susmentionné en ne prononçant pas l'inaptitude provisoire de M.D..., n'avait commis aucune faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat à l'égard du requérant ;
Considérant en second lieu, que si M. D...soutient que le syndrome dépressif anxieux dont il est atteint serait en relation avec les conflits professionnels liés à ses problèmes d'audition, il n'établit pas ce qu'il allègue ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. D...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...D...et au ministre d'Etat, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables.
2
N° 06PA02114