Vu I, sous le n° 07PA02623, la requête enregistrée le 18 juillet 2007, présentée pour la société DALKIA FRANCE, dont le siège est 37 avenue de Lattre de Tassigny BP 38 à Saint André Cedex (59875), par Me Grousset ; la société DALKIA FRANCE demande à la cour :
1°) de réformer le jugement du Tribunal administratif de Paris n° 0115605 et 0115616/1-2 du 22 mai 2007 en tant qu'il a omis de statuer sur sa demande en décharge des suppléments de droits de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période couvrant les exercices clos le 30 septembre 1992, le 30 juin 1993 et le 30 juin 1994 ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu, II, sous le n° 07PA03648, le recours enregistré le 18 septembre 2007 par fax et régularisé le 20 septembre 2007 par la production de l'original, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE, ledit recours tendant :
1°) à l'annulation de l'article 2 du jugement n° 0115605 et 0115616/1-2 du 22 mai 2007 par lequel le Tribunal administratif de Paris a déchargé la société Dalkia France, venant aux droits de la société Esys Montenay, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle avait été assujettie au titre des exercices clos le 30 septembre 1992, ainsi que les 30 juin 1993 et 1994 ;
2°) à la remise à la charge de la société Dalkia France des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés dont il a été à tort donné décharge par le tribunal ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 octobre 2009 :
- le rapport de M. Vincelet, rapporteur,
- et les conclusions de M. Gouès, rapporteur public ;
Considérant que la société Esys Montenay, qui avait pour activité la gestion, la maintenance et l'exploitation d'installations thermiques des collectivités locales, a déduit, d'une part de ses résultats imposables à l'impôt sur les sociétés, les honoraires versés à des bureaux d'études en rémunération de leur intermédiation pour l'obtention de marchés publics, d'autre part de la taxe sur la valeur ajoutée dont elle était redevable à raison de ses propres opérations, le montant de la taxe grevant ces honoraires ; que dans le cadre de deux vérifications de comptabilité de cette société ayant porté respectivement sur l'exercice ouvert le 1er octobre 1991 et clos le 30 septembre 1992 ainsi que sur les exercices clos les 30 juin 1993 et 30 juin 1994, le vérificateur a remis en cause ces déductions et a en conséquence assujetti la société Esys Montenay, au titre de ces exercices et de la période correspondante, à des rappels d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée ; que la société DALKIA FRANCE, qui vient aux droits de la société Esys Montenay, demande la réformation du jugement du Tribunal administratif de Paris du 22 mai 2007 en tant que ce jugement a omis de statuer sur sa demande en décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée assignés à la société Esys Montenay ; que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE demande l'annulation de l'article 2 de ce même jugement qui a déchargé la requérante des suppléments d'impôt sur les sociétés auxquelles avait été assujettie la société Esys Montenay ;
Sur la jonction :
Considérant que la requête de la société DALKIA FRANCE et le recours du MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE sont dirigées contre le même jugement et ont trait aux mêmes impositions ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt ;
Sur l'étendue du litige :
Considérant que par une décision en date du 2 octobre 2007 postérieure à l'enregistrement de la requête de la société DALKIA FRANCE, le directeur des services fiscaux des Hauts de Seine a prononcé, au profit de cette dernière, un dégrèvement de 31 374,92 euros correspondant aux intérêts de retard afférents aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige ; que les conclusions de la requête de la société DALKIA FRANCE sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;
Sur les impositions demeurant en litige :
En ce qui concerne l'impôt sur les sociétés :
Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts, applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (...) ; que si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; que le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ;
Considérant qu'en vertu de ces principes, lorsqu'une entreprise a déduit en charges une dépense réellement supportée, conformément à une facture régulière relative à un achat de prestations ou de biens dont la déductibilité par nature n'est pas contestée par l'administration, celle-ci peut demander à l'entreprise qu'elle lui fournisse tous éléments d'information en sa possession susceptibles de justifier la réalité et la valeur des prestations ou biens ainsi acquis ; que la seule circonstance que l'entreprise n'aurait pas suffisamment répondu à ces demandes d'explication ne saurait suffire à fonder en droit la réintégration de la dépense litigieuse, l'administration devant alors fournir devant le juge tous éléments de nature à étayer sa contestation du caractère déductible de la dépense ; que le juge de l'impôt doit apprécier la valeur des explications qui lui sont respectivement fournies par le contribuable et par l'administration ;
Considérant que la société Esys Maintenay, a produit au cours du contrôle les factures régulièrement émises par les SARL Berim, Bretagne Loire Equipement, Normandie collectivité, Inefco et Frendom, et honorées par elle, correspondant aux charges inscrites en comptabilité ; que, pour regarder les prestations ainsi facturées comme inexistantes, l'administration relève, d'une part, que la société Esys Montenay n'a pas précisé la consistance réelle des services rendus par les bureaux d'études et n'a présenté que des conventions évoquant en termes très généraux des missions d'assistance à la conclusion des marchés et d'aide administrative et commerciale en vue du suivi de ces marchés, et se réfère d'autre part aux contraintes légales encadrant la procédure de passation des marchés publics ainsi qu'à la qualité de professionnel averti de la société Esys Montenay, éléments qui selon elle suffiraient à rendre inutile l'intervention de bureaux d'études ; qu'eu égard notamment au caractère immatériel des prestations en cause et à la vraisemblance des pratiques alléguées, dont la société affirmait qu'elles lui avaient permis d'obtenir des marchés, tout en se refusant à les identifier précisément, l'administration ne peut en l'espèce être regardée comme ayant produit des éléments suffisants, tirés par exemple de la collusion qui aurait existé entre l'entreprise et les auteurs des factures litigieuses, susceptibles d'étayer son soupçon que les versements constituaient de pures libéralités consenties dans un intérêt autre que celui de l'entreprise ; qu'ainsi, les honoraires litigieux étaient déductibles de ses résultats imposables à l'impôt sur les sociétés ;
En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée :
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que le jugement attaqué, après avoir joint les deux demandes en décharge respectivement présentées en matière d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée devant lui par la société DALKIA FRANCE, s'est uniquement prononcé sur la demande relative à l'impôt sur les sociétés ; que la société DALKIA FRANCE est fondée à soutenir que le jugement attaqué est irrégulier en tant qu'il a omis de se prononcer sur sa demande relative à taxe sur la valeur ajoutée et qu'il doit être annulé ; qu'il y a lieu pour la cour de statuer immédiatement par voie d'évocation sur cette demande ;
Sur le bien-fondé de la demande et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens invoqués :
Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles 271, 272 et 283 du code général des impôts et de l'article 230 de l'annexe II à ce code, un contribuable n'est pas en droit de déduire de la taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable à raison de ses propres opérations la taxe mentionnée sur une facture établie à son nom par une personne qui ne lui a fourni aucun bien ou aucune prestation de services ; que dans le cas où l'auteur de la facture était régulièrement inscrit au registre du commerce et des sociétés et assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée, il appartient à l'administration, si elle entend refuser à celui qui a reçu la facture le droit de déduire la taxe qui y était mentionnée, d'établir qu'il s'agissait d'une facture fictive ou d'une facture de complaisance ; que si l' administration apporte des éléments suffisants permettant de penser que la facture ne correspond pas à une opération réelle, il appartient alors au contribuable d'apporter toutes justifications utiles sur la réalité de cette opération ;
Considérant que la société Esys Montenay a acquitté les factures émises par les cinq sociétés susmentionnées, dont il n'est pas contesté qu'elles étaient régulièrement inscrites au registre du commerce et des sociétés et assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée ; qu'ainsi qu'il a été dit ci dessus l'administration n'établit ni que la société aurait eu une intention libérale en s'acquittant de ces factures, ni qu'elle n'aurait retiré aucune contrepartie de ces paiements, ni que les factures ne correspondraient à aucune opération réelle ; que, par suite, la société était en droit de déduire de la taxe sur la valeur ajoutée dont elle était redevable à raison de ses propres opérations celle qui figurait sur ces factures ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, d'une part, que la société DALKIA FRANCE est fondée à obtenir la décharge des suppléments de droits de taxe sur la valeur ajoutée qui ont été réclamés à la société Esys Maintenay au titre de la période correspondant aux exercices clos les 30 septembre 1992, 30 juin 1993 et 30 juin 1994, à raison des honoraires payés par cette société aux SARL Berim, Bretagne Loire Equipement, Normandie Collectivité, Inefco et Frendom, d'autre part, que le recours du MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE doit être rejeté ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros que demande la société DALKIA FRANCE au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : A concurrence de la somme de 31 374,92 euros en ce qui concerne les droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui ont été réclamés au titre de la période relative aux exercices clos les 30 septembre 1992, les 30 juin 1993 et 1994, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la société DALKIA FRANCE.
Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Paris n° 0115605 et 0115616/1-2 du 22 mai 2007 est annulé en tant qu'il a omis de statuer sur la demande présentée par la société DALKIA FRANCE en matière de taxe sur la valeur ajoutée.
Article 3 : La société DALKIA FRANCE est déchargée des suppléments restant en litige de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de la société Esys Maintenay au titre de la période correspondant aux exercices clos les 30 septembre 1992, 30 juin 1993 et 30 juin 1994.
Article 4 : Le recours du MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE est rejeté.
Article 5 : L'Etat versera à la société DALKIA FRANCE une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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N°s 07PA02623, 07PA03648
Classement CNIJ :
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