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16/12/2010 | FRANCE | N°09PA00125,09PA00187

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 16 décembre 2010, 09PA00125,09PA00187


Vu I°), sous le n° 09PA00125, la requête, enregistrée le 9 janvier 2009, présentée pour M. D... A..., demeurant au..., par le cabinet d'avocats CMS Bureau Francis Lefebvre ; M. A...demande à la Cour, en tant que débiteur solidaire d'une partie des impositions auxquelles la SOCIETE FELICIA SILHOUETTE PARISIENNE a été assujettie au titre de l'exercice clos en 1998 :

1°) d'annuler le jugement n°s 0313561 et 0313568 en date du 10 novembre 2008, par lequel le Tribunal administratif de Paris n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant à la décharge des suppléments d'

impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle de 10 % à cet...

Vu I°), sous le n° 09PA00125, la requête, enregistrée le 9 janvier 2009, présentée pour M. D... A..., demeurant au..., par le cabinet d'avocats CMS Bureau Francis Lefebvre ; M. A...demande à la Cour, en tant que débiteur solidaire d'une partie des impositions auxquelles la SOCIETE FELICIA SILHOUETTE PARISIENNE a été assujettie au titre de l'exercice clos en 1998 :

1°) d'annuler le jugement n°s 0313561 et 0313568 en date du 10 novembre 2008, par lequel le Tribunal administratif de Paris n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle de 10 % à cet impôt auxquels la SOCIETE FELICIA SILHOUETTE PARISIENNE a été assujettie au titre de l'exercice clos en 1998, ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de décharger la SOCIETE FELICIA SILHOUETTE PARISIENNE des suppléments d'imposition contestés ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

........................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 décembre 2010 :

- le rapport de M. Blanc, rapporteur,

- les conclusions de Mme Larere, rapporteur public,

- et les observations de M.C..., représentant le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat ;

Considérant qu'à la suite d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 1996 au 31 décembre 1998, des suppléments d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle de 10 % à cet impôt, ainsi que des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée, assortis d'intérêts de retard et de pénalités, ont été mis à la charge de la société anonyme FELICIA SILHOUETTE PARISIENNE, dont M. A... était le président directeur général ; que, par un arrêt du 4 mai 2004, la Cour d'appel de Paris a déclaré, en application de l'article 1745 du code général des impôts, M. A... codébiteur solidaire des suppléments d'impôt sur les sociétés et des pénalités y afférentes mises à la charge de la société au titre de l'exercice clos en 1998 ; que la SOCIETE FELICIA SILHOUETTE PARISIENNE et M. A... relèvent appel du jugement du 10 novembre 2008, par lequel le Tribunal administratif de Paris n'a que partiellement fait droit à leurs demandes tendant à la décharge des impositions et pénalités litigieuses ;

Considérant que les requêtes n° 09PA00125 et n° 09PA00187, présentées respectivement par M. A... et par la SOCIETE FELICIA SILHOUETTE PARISIENNE, sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que par une décision du 9 décembre 2010, postérieure à l'enregistrement des requêtes, le directeur des services fiscaux de Paris-centre a accordé à la SOCIETE FELICIA SILHOUETTE PARISIENNE un dégrèvement partiel des pénalités mises à sa charge au titre des années 1996, 1997 et 1998, à hauteur respectivement des sommes de 4 444 euros, 23 116 euros et 619 euros ; que les conclusions des requêtes de la SOCIETE FELICIA SILHOUETTE PARISIENNE et de M. A...sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier de première instance qu'au soutien de sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée litigieux, la SOCIETE FELICIA SILHOUETTE PARISIENNE a fait valoir qu'à défaut de comporter l'indication, pour chaque livraison intracommunautaire, des raisons pour lesquelles le service lui a refusé le bénéfice de l'exonération prévue par l'article 262 ter du code général des impôts, les notifications de redressement du 3 août 1999 n'avaient pas été suffisamment motivées ; que le Tribunal ne s'est pas prononcé sur ce moyen, qui n'était pas inopérant ; que le jugement est irrégulier sur ce point et doit donc être annulé dans cette mesure ; qu'il y a lieu de statuer, par la voie de l'évocation sur les conclusions présentées devant le Tribunal administratif de Paris par la société requérante à fin de décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée afférents aux livraisons intracommunautaires et, par l'effet dévolutif de l'appel, sur les autres conclusions de sa requête ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales : " (...) une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. " ; qu'il est constant que l'avis de vérification mentionnant l'année 1998, adressé à la SOCIETE FELICIA SILHOUETTE PARISIENNE le 3 mai 1999, a été reçu par celle-ci le 4 mai 1999, soit postérieurement à l'expiration, intervenue la veille, du délai de déclaration des résultats réalisés au cours de l'exercice clos en 1998 ; qu'ainsi, ladite société ayant été informée de l'engagement de la procédure de vérification de sa comptabilité après la date limite de dépôt des déclarations, le moyen tiré par M. A...de ce que cette procédure serait entachée d'irrégularité en raison de la date d'envoi de l'avis de vérification doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en oeuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers, qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour permettre à l'intéressé, notamment, de discuter utilement leur provenance ou de demander que les documents qui, le cas échéant, contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent ; que, dans ce dernier cas, la demande du contribuable peut porter sur tout document utilisé par l'administration pour établir les impositions et notamment sur ceux dont elle s'est prévalue au cours de la procédure de redressement, y compris dans la réponse aux observations du contribuable ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration a justifié le caractère fictif des factures adressées par la SOCIETE FELICIA SILHOUETTE PARISIENNE à Mme B...et à la société Ilconnex en se fondant sur les circonstances, d'une part, que les prix de vente consentis pour les articles en cause étaient très inférieurs à leur prix d'achat, d'autre part, qu'aucune pièce justificative de ces exportations ne figurait dans la comptabilité de l'entreprise, et, enfin, que l'essentiel du montant des factures avait été réglé en espèces ; qu'il n'est pas contesté que ces constats ont été faits lors des opérations de contrôle sur place ; qu'ainsi, l'administration n'a pas eu recours, ni fait référence au cours de la procédure de redressement, pour justifier la réintégration du montant des factures litigieuses dans les bases d'imposition de la société, à des renseignements obtenus auprès de tiers ; que la circonstance que l'administration fiscale ait fait mention d'informations qui lui ont été communiquées par des autorités étrangères dans le cadre d'une procédure d'assistance administrative, postérieurement à la date de mise en recouvrement des suppléments d'imposition, est sans incidence sur la régularité de la procédure suivie à l'encontre de la SOCIETE FELICIA SILHOUETTE PARISIENNE ; qu'il suit de là que M. A...n'est pas fondé à soutenir que la procédure de redressement contradictoire qui a été menée à l'encontre de cette société aurait été irrégulière, faute pour l'administration fiscale d'avoir indiqué à celle-ci l'origine et la teneur des informations obtenues dans le cadre de la procédure d'assistance administrative et faute de lui avoir communiqué ces informations ;

Considérant, en troisième lieu, que contrairement à ce que soutient la société requérante, les notifications de redressement du 3 août 1999 comportaient, dans les annexes n° 29 et 14 auxquelles elles faisaient référence et qui leur étaient jointes, l'indication, pour chaque transaction, des raisons pour lesquelles l'administration a refusé le bénéfice de l'exonération prévue par l'article 262 ter du code général des impôts pour les livraisons de biens expédiés ou transportés sur le territoire d'un autre Etat membre de la Communauté européenne à destination d'un autre assujetti ou d'une personne morale non assujettie ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation des notifications de redressement sur ce point manque en fait ;

Considérant, en quatrième et dernier lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales : " L'avis de mise en recouvrement prévu à l'article L. 256 indique pour chaque impôt ou taxe le montant global des droits, des pénalités et des intérêts de retard qui font l'objet de cet avis. / Lorsque l'avis de mise en recouvrement est consécutif à une procédure de redressement contradictoire, il fait référence soit à la notification prévue à l'article

L. 57 et, le cas échéant, aux différentes pièces de procédure adressées par le service informant le contribuable d'une modification des rehaussements, soit au document adressé au contribuable qui comporte l'information prévue au premier alinéa de l'article L. 48. " ; que si, par une simple erreur matérielle, l'avis de mise en recouvrement en date du 30 avril 2002 adressé à la société requérante, concernant les rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui sont réclamés pour la période allant de 1996 à 1998, se référait à une seule notification de redressement du 3 août 1999 alors que deux notifications lui avaient été adressées le même jour pour l'ensemble de la période, une telle erreur n'a pas entaché l'avis de mise en recouvrement d'irrégularité ; que cet avis comportait au surplus une référence au document adressé au contribuable comportant l'information prévue au premier alinéa de l'article L. 48 ; que la société requérante n'est, des lors, pas fondée à soutenir que cet avis était irrégulier ;

Sur la charge de la preuve :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : "La charge de la preuve appartient au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission" ;

Considérant qu'il n'est pas contesté que la comptabilité de la SOCIETE FELICIA SILHOUETTE PARISIENNE présentait, pour les années vérifiées, de graves irrégularités ; qu'ainsi l'administration a pu rejeter à bon droit la comptabilité de la société ; qu'il résulte de l'instruction que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires a été saisie du désaccord entre l'administration et la société requérante et qu'aux termes de son avis du

9 octobre 2000, cette commission s'est prononcée en faveur du maintien des redressements opérés par le service à la suite du contrôle sur place, tant en matière d'impôt sur les sociétés qu'en matière de taxes sur le chiffre d'affaires ; que cet avis ayant été suivi par l'administration, la charge de la preuve de l'exagération des bases d'imposition incombe aux requérants ;

Sur le bien-fondé des suppléments d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés :

En ce qui concerne les reconstitutions de recettes :

S'agissant des exercices clos en 1996 et 1997 :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les recettes des exercices clos en 1996 et 1997 ont été évaluées par l'administration à partir des pièces comptables de la société requérante présentées au titre de l'année 1998, en retenant des taux de marge de 20 %, sur les ventes en gros, et de 40 %, sur les ventes au détail ; qu'après pondération, les taux de marge moyens pour l'ensemble des ventes utilisés par le service ont été de 21, 9 % pour l'année 1996 et de 23, 7 % pour l'année 1997 ; que, si ces taux de marge pondérés ont été déterminés à tort à partir de la part des ventes au détail dans l'ensemble des ventes, le calcul de ces taux à partir des achats aurait dû conduire le service à retenir des taux de 21, 4 %, en 1996, et de 22, 8 %, en 1997 ; que cette méthode, dont se prévaut la société requérante, ne fait ainsi apparaitre qu'une différence de 0,5 % en 1996 et de

0, 9 % en 1997 par rapport aux taux de marge pondérés utilisés par le service ; qu'il n'est pas contesté, par ailleurs, que les taux de marge de 20 % pour les ventes en gros, et de 40 % pour les ventes au détail, retenus par le service, correspondent à des taux minimum au regard de ceux constatés pour 1998, dès lors que les marges réalisées au cours de cet exercice ont atteint, s'agissant des ventes en gros, 25 % pour plus de trois quarts des achats et, s'agissant des ventes au détail, 45 % pour la moitié des achats ; qu'ainsi, l'erreur commise par l'administration sur l'un des termes du calcul du taux de marge pondéré a été compensée par la sous-évaluation des taux de marge retenus pour chaque catégorie de ventes ; que, dans ces conditions, il n'apparaît ni que la méthode utilisée par l'administration aboutisse à une réelle exagération des bases d'imposition, ni que la méthode proposée par la société requérante permettrait de reconstituer le montant des recettes avec une précision meilleure que celle résultant de la méthode utilisée par l'administration ;

Considérant que l'évaluation des recettes a tenu compte, contrairement à ce que soutient la SOCIETE FELICIA SILHOUETTE PARISIENNE, des remises habituellement consenties à ses clients, dès lors que les taux de marge retenus par le service résultent, ainsi qu'il a été dit, des pièces comptables présentées pour l'exercice 1998 et qu'il n'est pas établi que les remises faites en 1996 et en 1997 auraient été plus importantes que celles consenties lors de l'exercice clos en 1998 ;

Considérant, enfin, que la société requérante prétend que les montants des recettes reconstituées par l'administration pour les exercices 1996 et 1997 seraient incohérents avec les conditions d'exploitation de l'entreprise, par rapport tant au nombre de personnes employées que de la surface de vente dont dispose la société ; que les opérations de contrôle sur place ont toutefois révélé que la société réalisait principalement des ventes en gros et que le client de détail ne bénéficiait que d'un service réduit, qui n'était pas comparable à celui d'un véritable magasin de détail ; que, selon le mode de fonctionnement du magasin, le client devait faire son choix parmi les articles sur cintres ou dans des bacs, sans être servi par une vendeuse, et effectuait en général, même pour les ventes au détail qui ont été comptabilisées, des achats en grande quantité ; que, s'agissant de la surface de vente, il n'est pas contesté que la superficie disponible variait en fonction de l'importance des quantités de marchandises stockées en magasin ; que les hypothèses dont la société requérante se prévaut, qui ne correspondent pas aux constatations faites sur place, ne permettent pas d'établir l'inexactitude, ni l'exagération de l'évaluation des recettes faite par l'administration pour la période litigieuse ;

S'agissant de l'exercice clos en 1998 :

Considérant qu'il ressort des motifs du jugement rendu en matière correctionnelle par le Tribunal de grande instance de Paris, le 18 décembre 2003, qui a reconnu M.A..., alors dirigeant de la SOCIETE FELICIA SILHOUETTE PARISIENNE, coupable de fraude fiscale et d'omission d'écritures comptables, que, d'une part, le nombre d'articles figurant sur les factures de vente établies par la société a été artificiellement majoré " du 19 mai 1998 au 21 décembre 1998, dissimulant la vente de 7 207 articles et les recettes correspondantes ", et que, d'autre part, les factures des 23 septembre 1998 et 18 décembre 1998 correspondant à des ventes faites à

Mme B...et à la société Ilconnex " étaient dépourvues de réalité économique et avaient pour seul objet de permettre de faire sortir du stock 10 455 articles dont les recettes issues de leur vente avaient ainsi pu être dissimulées " ; que ces constatations de fait sont le support nécessaire des dispositions pénales du jugement, qui sont devenues définitives en l'absence d'appel intervenu sur ce point ; qu'ainsi revêtues de l'autorité absolue de la chose jugée, elles s'imposent au juge administratif et, contrairement à ce que soutient la société requérante, lui sont opposables dans l'instance fiscale qui la concerne ; que, pour évaluer les recettes réalisées de manière occulte dans les conditions précédemment décrites, le service a appliqué à la quantité d'articles dont la vente a été dissimulée un prix unitaire de 150 francs hors taxe, déterminé en fonction des prix moyens de vente, tels qu'ils ressortaient de la comptabilité de la société requérante et en tenant compte du fait que son activité consistait essentiellement dans la vente en gros ; que la société requérante ne propose pas, pour la reconstitution desdites bases, de méthode plus précise que celle qui a été utilisée par l'administration ;

Considérant que M. A...reproche à l'administration d'avoir procédé, en application de la méthode précitée, à une évaluation forfaitaire des recettes provenant de la vente dissimulée de 7 207 articles en 1998, sans tenir compte du lien existant entre ces ventes et les sommes créditées sur le compte de la société cliente Ever au cours du même exercice à hauteur de 448 300 francs, provenant d'encaissements multiples par cartes bancaires et en espèces ; qu'il ressort toutefois des termes du jugement du 18 décembre 2003 précédemment rappelés, que la dissimulation de la vente de 7 207 articles et des recettes correspondantes a eu lieu du 19 mai 1998 au 21 décembre 1998, alors que M. A...fait valoir que le compte de la société Ever a été crédité de nombreux encaissements par carte bancaire et en espèces " entre le 9 janvier et le 25 juin 1998 " ; qu'ainsi, le requérant, qui n'établit pas la corrélation dont il se prévaut, n'est pas fondé à soutenir que les recettes correspondant à la dissimulation de la vente de 7 207 articles au cours de l'exercice 1998 auraient dû être fixées à 448 300 francs et non évaluées sur la base d'un prix unitaire de 150 francs hors taxe ainsi qu'a procédé l'administration ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants n'apportent pas la preuve qui leur incombe que l'administration a fait une évaluation exagérée des bases des impositions en litige ;

Considérant, enfin, que si M. A...fait valoir que, si elle n'avait pas majoré artificiellement son chiffre d'affaires de l'année 1997 d'un montant de 448 300 francs, correspondant à une vente fictive à la société Ever, la SOCIETE FELICIA SILHOUETTE PARISIENNE aurait pu se prévaloir d'un déficit fiscal en 1997 et l'imputer sur son résultat de l'année 1998, cette circonstance est sans incidence sur le bien-fondé des impositions en litige ;

En ce qui concerne les créances de tiers, charges et amortissements dont la déduction n'a pas été admise par l'administration :

Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts : "Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (...)" ; que si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; que le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ;

Considérant, en premier lieu, que la SOCIETE FELICIA SILHOUETTE PARISIENNE soutient qu'elle a consenti des avoirs aux sociétés Kentucky et Bourgeois, qui sont ses clientes, pour des retours de marchandises ou en raison de l'annulation d'une vente ; qu'elle n'a toutefois pas été en mesure de justifier que les marchandises en cause lui avaient été retournées, ni n'a été en mesure d'expliquer les raisons ou les circonstances de l'annulation de la commande passée par la société Bourgeois ; que, pour justifier, par ailleurs, des avoirs portant la mention " remise unitaire forfaitaire " consentis à la société Kentucky sur un très grand nombre de factures à compter du

14 février 1996, la société requérante n'a produit qu'une attestation du dirigeant de la société bénéficiaire, établie postérieurement à la procédure de vérification, qui se borne à indiquer qu'elle est " en relation commerciale " avec la SOCIETE FELICIA SILHOUETTE PARISIENNE ; que les opérations de contrôle sur place ont révélé que les chèques établis par la société requérante pour le remboursement de ces avoirs ont été déposés sur un compte bancaire en France, dont les relevés lui étaient adressés et pour lequel elle donnait des instructions de placement ; qu'ainsi, la société requérante, qui n'a pas justifié, dans leur principe comme dans leur montant, de l'exactitude des écritures portant sur les avoirs litigieux, n'est pas fondée à contester la réintégration des montants correspondants dans ses bases d'impositions ; que la remise en cause du caractère déductible de ces avoirs n'a pas entrainé de double imposition ;

Considérant, en deuxième lieu, que si la société requérante soutient que les frais de déplacement qu'elle a déduits de son bénéfice imposable se rapportaient à des voyages réalisés par M. A...dans l'intérêt de l'entreprise, elle se borne à produire à l'appui de ses allégations des attestations établies postérieurement à la procédure de vérification par des entreprises étrangères, indiquant seulement qu'une rencontre à caractère professionnel aurait eu lieu avec le dirigeant de la société requérante ; que ces pièces, imprécises et non probantes, ne peuvent être regardées comme un commencement de justification de ce que les déplacements en cause auraient été effectués dans l'intérêt de la société ; que, par suite, c'est à bon droit que le montant de ces frais a été rapporté aux résultats imposables des exercices correspondants ;

Considérant, en troisième lieu, que les attestations produites par la société requérante pour justifier des frais de cadeaux inscrits en charges ne sont pas de nature à établir que ces dépenses ont été engagées dans l'intérêt de l'exploitation, dès lors que ces attestations, établies postérieurement à la vérification de sa comptabilité et aux constatations faites par le service, sont, de ce fait, dépourvues de valeur probante ;

Considérant, en quatrième lieu, que la société requérante se borne à affirmer qu'elle a fait l'acquisition d'un magnétoscope pour la diffusion de cassettes de présentation de mode, sans prouver la réalité de cette dépense, ni justifier l'utilisation d'un tel matériel pour les besoins de l'activité de l'entreprise ;

Considérant, en cinquième et dernier lieu, qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) / 2° ( ...) les amortissements réellement effectués par l'entreprise, dans la limite de ceux qui sont généralement admis d'après les usages de chaque nature d'industrie, de commerce ou d'exploitation (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que les amortissements qu'une entreprise est en droit de pratiquer chaque année à raison d'une immobilisation sont ceux qui, pour cette immobilisation, résultent des usages constatés dans la profession à laquelle appartient l'entreprise ; que par usages, il y a lieu d'entendre, sous le contrôle du juge de l'impôt, les pratiques qui, en raison notamment de leur ancienneté, de leur fréquence ou de leur généralité, sont regardées comme normales, dans chaque nature d'industrie, de commerce ou d'exploitation, pour le bien à amortir, à la date d'acquisition de celui-ci par l'entreprise ; qu'il appartient à l'administration de s'assurer, d'une part, que les amortissements pratiqués par une entreprise sont conformes à ceux qui sont généralement admis pour l'élément d'actif dont il s'agit dans le secteur professionnel auquel appartient l'entreprise et, d'autre part, que les caractéristiques particulières du bien à amortir n'appellent pas une dérogation au taux d'amortissement résultant des usages ;

Considérant que si la SOCIETE FELICIA SILHOUETTE PARISIENNE reproche à l'administration d'avoir remis en cause le taux de 12,5 % qu'elle avait appliqué à l'amortissement des travaux d'aménagement intérieur de sa surface de vente, il résulte de l'instruction que, pour des installations fixes ou semi-mobiles des magasins de détail, la durée d'amortissement habituellement admise est de dix ans, soit un taux linéaire de 10 % ; que la société requérante ne prouve pas, par ailleurs, l'existence de circonstances particulières qui justifieraient, par dérogation à cet usage, un taux d'amortissement supérieur à celui qui a été retenu par l'administration ; que par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que le service aurait réduit, à tort, les dotations aux amortissements comptabilisées dans ses charges ;

Sur le bien fondé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 256 du code général des impôts : "I- Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens meubles et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel (...) " ; que la SOCIETE FELICIA SILHOUETTE PARISIENNE conteste les rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période d'imposition litigieuse, qui résultent de la reconstitution de ses recettes, en se prévalant des mêmes moyens que ceux développés pour demander la décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie ; qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, la société requérante ne rapporte pas la preuve de l'exagération des recettes reconstituées par le service ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration a estimé que le produit des ventes de la société requérante, tel qu'elle l'avait estimé après reconstitution des recettes, devait être soumis à la taxe sur la valeur ajoutée ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 262 du code général des impôts : " I. Sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée : 1° les livraisons de biens expédiées ou transportées par le vendeur pour son compte, en dehors de la Communauté européenne ainsi que les prestations directement liées à l'exportation ; (...) " ; qu'il appartient au contribuable d'établir pour les marchandises pour lesquelles il entend se prévaloir l'exonération prévue par ces dispositions, que lesdites marchandises étaient destinées à l'exportation et ont été effectivement exportées ; que, si la société requérante fait valoir que cette preuve peut être apportée par tout moyen, les bordereaux de vente dont elle se prévaut, au demeurant non produits, ne sont pas de nature à établir que les marchandises, objet des transactions, ont été effectivement exportées ;

Sur les pénalités :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales : " Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, quand un document ou une décision adressés au plus tard lors de la notification du titre exécutoire ou de son extrait en a porté la motivation à la connaissance du contribuable (...) " ; que ces dispositions imposent à l'administration d'énoncer les considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision d'infliger une sanction fiscale ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la motivation des pénalités appliquées à la SOCIETE FELICIA SILHOUETTE PARISIENNE figurant dans les notifications de redressement du 3 août 1999 a été complétée par l'administration aux termes de deux notifications rectificatives adressées à la société requérante le 12 août 1999 ; que ces documents indiquaient, pour chaque chef de redressement opéré par le service, qu'il s'agisse des recettes non comptabilisées ou des dépenses non engagées dans l'intérêt de l'entreprise, qu'il sera fait application de la majoration prévue à l'article 1729 du code général des impôts, dont ils rappellent les termes et le taux, en précisant également les circonstances sur lesquelles le service s'est fondé pour estimer que les conditions prévues par la loi étaient remplies ; que, parmi les faits reprochés à la société, il est notamment relevé le caractère délibéré de la minoration des recettes et de la déduction de dépenses personnelles, de la facturation de ventes en exonération de taxe sur la valeur ajoutée pour des marchandises dont la réalité de l'expédition hors de France n'est pas établie ainsi que l'intention manifeste d'éluder l'impôt ; qu'ainsi, l'administration doit être regardée comme ayant régulièrement porté à la connaissance du contribuable les considérations de droit et de fait justifiant l'application des pénalités retenues au sens des dispositions de l'article L. 80 D précité du livre des procédures fiscales ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, d'une part, la SOCIETE FELICIA SILHOUETTE PARISIENNE n'est pas fondée à demander la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de livraisons intracommunautaires et, d'autre part, ladite société et M. A...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a partiellement rejeté leurs demandes ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans l'instance qui l'oppose à M.A..., la qualité de partie perdante, verse à celui-ci la somme qu'il réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : A concurrence des sommes de 4 444 euros, 23 116 euros et 619 euros, en ce qui concerne les pénalités appliquées à la SOCIETE FELICIA SILHOUETTE PARISIENNE au titre des exercices clos en 1996, 1997 et 1998, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions des requêtes de ladite société et de M.A....

Article 2 : L'article 3 du jugement n°s 0313561 et 0313568 du Tribunal administratif de Paris en date du 10 novembre 2008 est annulé en tant qu'il rejette les conclusions de la SOCIETE FELICIA SILHOUETTE PARISIENNE tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de livraisons intracommunautaires non justifiées.

Article 3 : La demande de la SOCIETE FELICIA SILHOUETTE PARISIENNE devant le Tribunal administratif de Paris tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de livraisons intracommunautaires, le surplus des conclusions de sa requête devant la Cour ainsi que la requête de M. A...sont rejetés.

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N°s 09PA00125, 09PA00187


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 09PA00125,09PA00187
Date de la décision : 16/12/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-03-01-02-04 Contributions et taxes. Généralités. Règles générales d'établissement de l'impôt. Contrôle fiscal. Vérification de comptabilité. Procédure.


Composition du Tribunal
Président : M. COUVERT-CASTERA
Rapporteur ?: M. Philippe BLANC
Rapporteur public ?: Mme LARERE
Avocat(s) : CMS BUREAU FRANCIS LEFEBVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 22/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2010-12-16;09pa00125.09pa00187 ?
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