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21/12/2012 | FRANCE | N°11PA02118

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 21 décembre 2012, 11PA02118


Vu la requête, enregistrée le 3 mai 2011, présentée pour la société de Négoce de Métaux Industriels, dont le siège social est 22 rue Condorcet à Paris (75009), par Me Sieraczek ; la société de Négoce de Métaux Industriels demande à la Cour ;

1°) d'annuler le jugement n° 0809779 du 8 mars 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période comprise entre le 1er octobre 2003 et le 30 septembre 2005, ainsi que des pénalités y affére

ntes et de l'amende pour paiement en espèces au titre de la période comprise entre...

Vu la requête, enregistrée le 3 mai 2011, présentée pour la société de Négoce de Métaux Industriels, dont le siège social est 22 rue Condorcet à Paris (75009), par Me Sieraczek ; la société de Négoce de Métaux Industriels demande à la Cour ;

1°) d'annuler le jugement n° 0809779 du 8 mars 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période comprise entre le 1er octobre 2003 et le 30 septembre 2005, ainsi que des pénalités y afférentes et de l'amende pour paiement en espèces au titre de la période comprise entre le 1er octobre 2003 et le 30 septembre 2004 ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;

Vu la directive du 12 octobre 1998 ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 décembre 2012 :

- le rapport de M. Magnard, rapporteur,

- et les conclusions de M. Egloff, rapporteur public ;

1. Considérant que la société de Négoce de Métaux Industriels fait appel du jugement

n° 0809779 du 8 mars 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période comprise entre le 1er octobre 2003 et le 30 septembre 2005, ainsi que des pénalités y afférentes et de l'amende pour paiement en espèces au titre de la période comprise entre le

1er octobre 2003 et le 30 septembre 2004 ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant, en premier lieu, que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments soulevés par la société de Négoce de Métaux Industriels à l'appui de ses moyens, ont répondu au moyen qui leur était soumis, tiré de la mise en oeuvre par le service, après l'achèvement de la vérification de comptabilité, de la procédure de demande d'assistance internationale ; que la société de Négoce de Métaux Industriels ne saurait utilement soutenir que le jugement serait insuffisamment motivé sur ce point ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'en indiquant que la remise en cause de l'exonération n'était pas " contraire aux objectifs de la directive du 12 octobre 1998 alors en vigueur qui prévoyait que les Etats membres pouvaient arrêter des obligations plus strictes, notamment concernant la tenue de registres particuliers ou des exigences comptables spéciales ", les premiers juges, qui n'ont pas statué au-delà des conclusions qui leur étaient soumises par les parties, qui n'ont pas justifié le bien-fondé du redressement par un autre motif que celui invoqué par le service et qui se sont d'ailleurs bornés à répondre à cet égard à un argument soulevé par la société de Négoces de Métaux Industriels page 9 de sa demande introductive d'instance, ne sauraient être regardés comme ayant statué ultra petita ;

4. Considérant, enfin, que, contrairement à ce qui est soutenu, les premiers juges n'ont pas examiné la conformité de l'article L. 112-6 du code monétaire à la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, mais se sont bornés à faire application des dispositions de cet article, qui prévoit l'application d'un taux maximum de 5 %, en constatant qu'en l'espèce, le taux appliqué par l'administration n'était pas disproportionné aux infractions commises ; qu'il suit de là que le moyen tiré de ce que les premiers juges auraient excédé leur compétence en statuant sur une question relevant du Conseil constitutionnel ne peut qu'être écarté ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

5. Considérant, en premier lieu, que, s'il incombe à l'administration d'informer le contribuable de la teneur des renseignements qu'elle a pu recueillir dans l'exercice de son droit de communication afin que l'intéressé soit mis à même de demander, avant la mise en recouvrement des impositions, que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition, elle n'est tenue à cette obligation qu'en ce qui concerne ceux de ces renseignements qu'elle a effectivement utilisés pour procéder aux redressements ; qu'il ne résulte pas de l'examen des pièces de procédure que le service ait fondé les redressements litigieux sur les informations obtenues des autorités britanniques ; que la société requérante ne saurait par suite invoquer à cet égard la méconnaissance des droits de la défense ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'eu égard aux garanties dont le livre des procédures fiscales entoure la mise en oeuvre d'une vérification de comptabilité, l'administration est tenue, lorsque, faisant usage de son droit de communication, elle consulte dans le cadre d'une vérification des pièces comptables recueillies auprès de tiers, de soumettre l'examen de ces pièces à un débat oral et contradictoire avec le contribuable ; qu'à défaut, les impositions découlant de l'examen de ces pièces sont entachées d'irrégularité ; que, toutefois, il ne résulte en tout état de cause pas de l'instruction que les informations que l'administration a reçues de l'administration britannique en réponse à sa demande d'assistance internationale soient constitutives de pièces comptables ; qu'en outre, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, il ne résulte pas de l'examen des pièces de procédure que le service ait fondé les redressements litigieux sur les informations obtenues des autorités britanniques ; qu'il suit de là que le moyen tiré de ce que les éléments en cause n'ont pas été soumis à un débat oral et contradictoire dans le cadre de la vérification de comptabilité et de ce qu'en conséquence, le service aurait méconnu les dispositions de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée sur les ventes d'or d'investissement :

7. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 1er de la directive du

12 octobre 1998 susvisée alors en vigueur, repris à l'article 346 de la directive du 28 novembre 2006 : " Les États membres exonèrent de la taxe sur la valeur ajoutée la livraison, l'acquisition intracommunautaire et l'importation d'or d'investissement, y compris l'or d'investissement représenté par des certificats pour l'or alloué ou non alloué, ou négocié sur des comptes-or et y compris, notamment, les prêts et les swaps sur l'or qui comportent un droit de propriété ou de créance sur l'or d'investissement, ainsi que les opérations sur l'or d'investissement consistant en des contrats "futurs" ou des contrats "forward" donnant lieu à une transmission du droit de propriété ou de créance sur l'or d'investissement " ; qu'aux termes de ce même article 1er repris à l'article 356 de la directive du 28 novembre 2006 : " 1. Les États membres veillent à ce que les négociants en or d'investissement tiennent au minimum une comptabilité de toutes les opérations importantes effectuées sur l'or d'investissement et conservent les documents permettant d'identifier les clients de ces opérations./ Les négociants conservent les informations visées au premier alinéa pendant une période d'au moins cinq ans. 2. Les États membres peuvent accepter des obligations équivalentes au titre de mesures adoptées en application d'une autre législation communautaire, telle que la directive 2005/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 octobre 2005 relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme, pour se conformer aux exigences du paragraphe 1. 3. Les États membres peuvent arrêter des obligations plus strictes, notamment en ce qui concerne la tenue de registres particuliers ou des exigences comptables spéciales " ;

8. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 298 sexdecies A du code général des impôts : " 1. Sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée : a. Les livraisons, les acquisitions intracommunautaires et les importations d'or d'investissement, y compris lorsque l'or d'investissement est négocié sur des comptes or ou sous la forme de certificats ou de contrats qui confèrent à l'acquéreur un droit de propriété ou de créance sur cet or (...) " ; qu'aux termes de l'article 298 sexdecies E du même code : " 1. Les assujettis qui achètent et revendent de l'or d'investissement tel que défini au 2 de l'article 298 sexdecies A doivent conserver pendant six ans à l'appui de leur comptabilité les documents permettant d'identifier leurs clients pour toutes les opérations d' un montant égal ou supérieur à 15 000 euros. 2. Lorsqu'ils sont astreints aux obligations de l'article 537, les assujettis peuvent répondre à l'obligation mentionnée au 1 par la production du registre prévu à cet article. 3. Les assujettis comptabilisent distinctement les opérations portant sur l'or d'investissement en les distinguant selon qu'elles sont exonérées ou ont fait l'objet de l'option " ;

9. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à l'occasion de la vérification de comptabilité dont a fait l'objet la société de Négoce de Métaux Industriels au titre de la période comprise entre le 1er octobre 2003 et le 30 septembre 2004, le service a estimé que la société avait méconnu les dispositions précitées de l'article 298 sexdecies E du code général des impôts, ses ventes d'or ayant été fractionnées lingot par lingot pour demeurer en-dessous du seuil de

15 000 euros prévu par cet article et la société n'ayant pas présenté à l'appui de sa comptabilité les documents permettant d'identifier ses clients ; que, s'agissant de la période comprise entre le 1er octobre 2004 et le 30 septembre 2005, la société de Négoce de Métaux Industriels n'a pas tenu, contrairement à ce que prévoient les dispositions précitées de l'article 298 sexdecies E du code général des impôts, une comptabilité distincte des opérations portant sur l'or d'investissement, qui ont été confondues avec les opérations portant sur le platine ; que ces faits ne sont pas contestés par la société requérante ; que, contrairement à ce que soutient cette dernière, il résulte des dispositions précitées de l'article 238 sexdecies E du code général des impôts que le bénéfice de l'exonération est conditionné au respect des obligations de présentation et de comptabilisation distincte susmentionnées ; qu'il suit de là que la société requérante ne saurait utilement faire valoir, ni que l'article 298 sexdecies A pose un principe général d'exonération, ni que l'article 537 du code général des impôts ne prévoirait aucune remise en cause de cette exonération en cas de non respect de ses dispositions, la méconnaissance de cet article n'étant, en tout état de cause, pas à l'origine du redressement en cause ; que, contrairement à ce qui est également soutenu, l'interprétation qui précède n'est pas contraire aux objectifs de la directive du 12 octobre 1998 alors en vigueur, qui prévoyait que les Etats membres pouvaient arrêter des obligations plus strictes, notamment concernant la tenue de registres particuliers ou des exigences comptables spéciales ; que les dispositions de la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006, postérieures aux années d'imposition, sont, en tout état de cause, inapplicables à l'espèce ;

En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée sur les ventes de platine :

10. Considérant qu'aux termes du I de l'article 262 ter du code général des impôts :

" Sont exonérés de taxe sur la valeur ajoutée : 1° Les livraisons de biens expédiés ou transportés sur le territoire d'un autre Etat membre de la Communauté européenne à destination d'un autre assujetti ou d'une personne morale non assujettie (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que l'exonération de la taxe sur la valeur ajoutée des livraisons intracommunautaires de biens est notamment subordonnée à la condition, d'une part, que l'acquéreur de ces biens soit assujetti à cette taxe ou ait la qualité de personne morale non assujettie et ne bénéficiant pas dans l'Etat membre dans lequel elle est établie d'un régime dérogatoire l'autorisant à ne pas soumettre à la taxe sur la valeur ajoutée ses acquisitions intracommunautaires et, d'autre part, que le bien ait été expédié ou transporté hors de France par le vendeur, par l'acquéreur ou par un tiers pour leur compte, à destination d'un autre Etat membre ; que, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve au contribuable, il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle, d'apprécier si la situation du contribuable entre dans le champ de l'assujettissement à l'impôt ou, le cas échéant, s'il remplit les conditions légales d'une exonération ; que, s'agissant de la réalité de la livraison d'une marchandise sur le territoire d'un autre Etat membre de la Communauté européenne, pour l'application des dispositions précitées de l'article 262 ter du code général des impôts, seul le redevable de la taxe sur la valeur ajoutée est en mesure de produire les documents relatifs au transport de la marchandise, lorsqu'il l'a lui-même assuré, ou tout document de nature à justifier la livraison effective de la marchandise, lorsque le transport a été assuré par l'acquéreur ;

11. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le service a remis en cause l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée dont la société requérante se prévalait, au motif que la réalité de l'expédition ou du transport hors de France des biens concernés n'était pas établie ; qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que l'intéressée ne saurait valablement soutenir que, s'agissant d'une livraison "départ", la production d'éléments permettant d'établir la réalité du transport n'est pas nécessaire ; qu'ainsi, et alors même que le poids des marchandises n'aurait pas excédé quinze kilogrammes, c'est à bon droit que le service a remis en cause l'exonération dont d'agit ;

Sur les majorations de mauvaise foi :

12. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : " 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 p. 100 si la mauvaise foi de l'intéressé est établie (...) " ;

13. Considérant qu'en invoquant non seulement l'importance des redressements, mais aussi l'existence de paiements en espèces quasi-systématiques, le contournement des règles d'identification des clients et la présentation successive de deux comptabilités avec deux séries de factures différentes pour un même exercice, l'administration fiscale doit être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombe, de la mauvaise foi de la société de Négoce de Métaux Industriels ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement à la société requérante de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société de Négoce de Métaux Industriels est rejetée.

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N° 08PA04258

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N° 11PA02118


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 11PA02118
Date de la décision : 21/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme TANDONNET-TUROT
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: M. EGLOFF
Avocat(s) : SIERACZEK

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2012-12-21;11pa02118 ?
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