Vu la requête, enregistrée le 19 mai 2011, présentée pour la société Traiteur de Paris Distribution venant aux droits de la société Cuisine Partner, dont le siège est Avenue Jean York, Parc d'activité des Hautes Falaises à Epreville (76400), par Me Rudeau ; la société Traiteur de Paris distribution demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0809791/2 du 15 mars 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2003 et 2004 et de rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er avril 2002 au 31 décembre 2005 ;
2°) de lui accorder la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 mars 2013 :
- le rapport de M. Lercher,
- et les conclusions de Mme Bernard, rapporteur public ;
1. Considérant que la société Cuisine Partner a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle des suppléments d'impôt sur les sociétés lui ont été notifiés au titre des exercices clos en 2003 et 2004 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er avril 2002 au 30 novembre 2005 ; que la société Traiteur de Paris Distribution, venant aux droits de la société Cuisine Partner, fait appel du jugement du 15 mars 2011 du Tribunal administratif de Paris rejetant sa demande tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu mis à sa charge au titre des années 2004 et 2005 ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er avril 2002 au 31 décembre 2005 ;
Sur l'impôt sur les sociétés :
En ce qui concerne les déficits reportables des exercices clos en 2000 et 2001 :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 209 du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur : " I - (...) Sous réserve de l'option prévue à l'article 220 quinquies, en cas de déficit subi pendant un exercice, ce déficit est considéré comme une charge de l'exercice suivant et déduit du bénéfice réalisé pendant ledit exercice. Si ce bénéfice n'est pas suffisant pour que la déduction puisse être intégralement opérée, l'excédent du déficit est reporté successivement sur les exercices suivants jusqu'au cinquième exercice qui suit l'exercice déficitaire (...) " ;
3. Considérant qu'il appartenait à la société Cuisine Partner, dans le cadre de la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet, de justifier de la réalité des déficits dont elle demande le report sur le résultat des exercices clos en 2003 et 2004 ; que, pour expliquer l'absence de pièces comptables justificatives, la société requérante invoque la destruction d'une partie de ses documents comptables lors d'un incendie, et fait valoir que cette situation revêt un caractère de force majeure ; que le service lui ayant laissé la faculté d'apporter tous éléments, comptables ou extracomptables, de nature à justifier la réalité des déficits en cause, il n'y a pas lieu, en l'espèce, de se prononcer sur le caractère de force majeure invoqué ; que la société requérante a reconstitué sa comptabilité à partir de ses relevés bancaires ; que, toutefois, s'agissant de chacun des deux exercices clos les 31 mars 2000 et 2001, le Tribunal administratif a relevé des discordances importantes entre la reconstitution opérée par la société requérante et ses propres déclarations des exercices en cause, que les explications fournies en appel ne permettent pas d'infirmer ; que, dans ces conditions, la société Traiteurs de Paris Distribution, venant aux droits de la société Cuisine Partner, n'apporte pas la preuve de la réalité des déficits constatés au titre des exercices clos en 2000 et 2001 dont elle demande l'imputation ; que la circonstance que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ait émis un avis différent est sans incidence sur le bien-fondé du redressement litigieux ;
En ce qui concerne le changement d'activité en 2003 :
4. Considérant qu'aux termes du 5 de l'article 221 du code général des impôt, applicable aux exercices en litige : " Le changement de l'objet social ou de l'activité réelle d'une société emporte cessation d'entreprise (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions combinées avec celles de l'article 209 du même code, que la mise en oeuvre du droit au report déficitaire est subordonnée notamment à la condition qu'une société n'ait pas subi, dans son activité, des transformations telles qu'elle n'est plus, en réalité, la même ;
5. Considérant que pour contester le droit de la société requérante au report de déficits antérieurs non encore imputés à concurrence de la somme de 48 552 euros, l'administration fait valoir qu'elle a changé d'activité réelle au cours de l'année 2003 ; qu'il résulte de l'instruction que la société " Le Temps des Tartines ", qui exerçait une activité de commerce de détail de produits alimentaires, vente à emporter ou à consommer sur place, dans trois boutiques situées à Paris, a cédé cette activité à la société ALCS le 24 mars 2003 ; que cette dernière n'a pas repris immédiatement l'activité cédée et a exercé, à compter du 29 mars 2004, sous la nouvelle dénomination de " Cuisine Partner ", une activité de commerce de gros et de négoce de produits alimentaires surgelés, orientée vers le développement à l'export ; que les moyens d'exploitation de la société " Le Temps des Tartines " n'ont pas été conservés et le personnel réduit à une seule personne ; qu'ainsi, la reprise des actifs de la société " Le Temps des Tartines " par la société ALCS, devenue " Cuisine Partner " a eu pour effet une modification substantielle de son activité réelle et un changement complet du type de la clientèle ciblée, assimilable à une cessation suivie d'une reprise d'entreprise, nonobstant le fait qu'il s'agisse, dans les deux cas, de négoce dans le secteur de l'alimentation ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration a remis en cause le droit au report des déficits antérieurs au changement d'activité et non encore imputés ;
En ce qui concerne les charges de l'exercice clos en 2003 :
6. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts, rendu applicable à l'impôt sur les sociétés par l'article 209 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (...) " ; que si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; que le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que, dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ; qu'en vertu de ces principes, lorsqu'une entreprise a déduit en charges une dépense réellement supportée, conformément à une facture régulière relative à un achat de prestations ou de biens dont la déductibilité par nature n'est pas contestée par l'administration, celle-ci peut demander à l'entreprise qu'elle lui fournisse tous éléments d'information en sa possession susceptibles de justifier la réalité et la valeur des prestations ou biens ainsi acquis ;
7. Considérant qu'à la suite de la vérification de comptabilité dont la société Cuisine Partner a fait l'objet, le service a constaté que celle-ci avait porté en charges une série de factures émises au nom des sociétés WebTraiteur et LPG et concernant des biens livrés à Chevilly-Larue, commune où la contribuable ne disposait pas de local ; que pour contester la remise en cause par l'administration de la déduction en charges de factures libellées au nom de ces deux sociétés tierces, la société Traiteur de Paris Distribution fait valoir qu'elle a utilisé des locaux de stockage appartenant à ces deux sociétés et que la prise en charge des factures susmentionnées correspond à des biens qui lui étaient destinés et non livrés à ces dernières ; qu'elle n'apporte, toutefois, à l'appui de ses allégations, aucune justification ; que, par suite, les charges correspondantes aux factures en litige ne pouvaient pas être déduites des bénéfices de la société requérante au titre de l'exercice clos en 2003 ;
Sur la taxe sur la valeur ajoutée :
8. Considérant qu'aux termes de l'article 262 ter du code général des impôts : " I. Sont exonérés de taxe sur la valeur ajoutée : / 1° Les livraisons de biens expédiés ou transportés sur le territoire d'un autre Etat membre de la Communauté européenne à destination d'un autre assujetti ou d'une personne morale non assujettie (...) " ; que, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve au contribuable, il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si la situation du contribuable entre dans le champ de l'assujettissement à l'impôt ou, le cas échéant, s'il remplit les conditions légales d'une exonération ; que, s'agissant de la réalité de la livraison d'une marchandise sur le territoire d'un autre Etat membre de la Communauté européenne, pour l'application des dispositions précitées de l'article 262 ter du code général des impôts, seul le redevable de la taxe sur la valeur ajoutée est en mesure de produire les documents afférents au transport de la marchandise, lorsqu'il l'a lui-même assuré, ou tout document de nature à justifier la livraison effective de la marchandise, lorsque le transport a été assuré par l'acquéreur ;
9. Considérant que l'administration a remis en cause comme non établie, la réalité de livraisons intracommunautaires déclarées par la société Cuisine Partner en 2004 et 2005 et l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée qui en résulte ; que, pour l'année 2004, la société requérante soutient que la production des factures avec des avoirs pour un total de 108 965,97 euros, renvoyant aux factures initiales avec la mention " produits non conformes ", suffit à établir la réalité de la sortie du territoire ; que si ces avoirs permettent d'établir que le transport des marchandises qu'elles visent hors de France a été effectué, ils ne font, par eux-mêmes, que doubler les factures initiales auxquelles ils se réfèrent et dont la contribuable n'établit pas qu'elles n'auraient pas donné lieu à l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée ; que l'administration soutient, sans être contredite, que le montant des livraisons intra-communautaires déclaré au titre de l'exercice 2004 tient compte de ces factures ; que, pour l'année 2005, la société requérante produit une attestation établie par le dirigeant de la société de droit britannique Cuisine Partner Limited, associée majoritaire de la contribuable du 29 mars 2004 au 31 mai 2005 ; qu'une telle attestation, rédigée le 4 octobre 2006, postérieurement au rehaussement notifié par l'administration et par l'associé majoritaire de la société contrôlée, ne peut être retenue pour établir la réalité des livraisons intracommunautaires concernées ; que la circonstance que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ait émis un avis favorable à la société requérante sur ce chef de redressement est sans incidence sur la charge de la preuve et sur le bien-fondé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, la société Traiteurs de Paris Distribution, venant aux droits de la société Cuisine Partner, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la société Traiteurs de Paris Distribution, venant aux droits de la société Cuisine Partner, est rejetée.
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N° 11PA02369