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04/07/2013 | FRANCE | N°12PA00694

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre, 04 juillet 2013, 12PA00694


Vu la requête, enregistrée le 8 février 2012, présentée pour Mlle G...I..., demeurant..., et M. A... et Mme F... I..., agissant en leur nom propre et en celui de leurs enfants mineurs, C...et B...I..., demeurant..., par Me L... ; les consorts I... demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0817285, 0817286/6-3 du 8 décembre 2011 du Tribunal administratif de Paris en toutes ses dispositions, à l'exception de son article 2 qui met à la charge de

l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) les frais d'expertise de l'instance ;

2°) de condamner l'AP-

HP dans la limite de la part de responsabilité de 60% lui incombant, à les in...

Vu la requête, enregistrée le 8 février 2012, présentée pour Mlle G...I..., demeurant..., et M. A... et Mme F... I..., agissant en leur nom propre et en celui de leurs enfants mineurs, C...et B...I..., demeurant..., par Me L... ; les consorts I... demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0817285, 0817286/6-3 du 8 décembre 2011 du Tribunal administratif de Paris en toutes ses dispositions, à l'exception de son article 2 qui met à la charge de

l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) les frais d'expertise de l'instance ;

2°) de condamner l'AP-HP dans la limite de la part de responsabilité de 60% lui incombant, à les indemniser de l'ensemble des préjudices ayant résulté pour eux du décès de leur mère, belle-mère et grand-mère, Mme J...E..., au prorata du taux de 95% de perte de chance de survie, soit 4 275 euros au titre des frais d'obsèques, 1 459 euros au titre du préjudice patrimonial de Mlle G... I...lié à la part de loyer à la charge de Mme E...avant son décès, 8 850 euros au titre des souffrances physiques endurées par MmeE..., 45 600 euros au titre du préjudice moral subi par Mme E...du fait d'avoir vu sa vie abrégée, 10 260 euros au titre du préjudice moral de Mlle G...I..., 7 410 euros au titre du préjudice moral de

M. A... I..., 11 400 euros au titre du préjudice des deux enfants mineurs de ce dernier, C...et Karla, 5 700 euros au titre du préjudice d'affection de Mme F...I..., sommes assorties des intérêts au taux légal à compter du 30 octobre 2008 et de la capitalisation desdits intérêts ;

3°) de mettre à la charge de l'AP-HP une somme de 4 000 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative ;

........................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 juin 2013 :

- le rapport de Mme Julliard, rapporteur,

- les conclusions de Mme Merloz, rapporteur public,

- et les observations de MeK..., pour les consortsI..., et de MeD..., pour l'AP-HP ;

Et connaissance prise de la note en délibéré enregistrée le 17 juin 2013, présentée pour les consortsI..., par MeK... ;

1. Considérant que le 13 novembre 2006, Mme J...E..., alors âgée de 45 ans et souffrant de douleurs abdominales, a été adressée par son médecin traitant au service des urgences de l'hôpital Cochin où un diagnostic erroné d'infection urinaire avec pyélonéphrite a été retenu ; que dans les mois qui ont suivi, l'état de la patiente s'étant détérioré, elle a été adressée à l'Institut Gustave Roussy en vue de l'exérèse d'une masse abdomino-pelvienne d'origine ovarienne effectuée le 23 février 2007, à la suite de laquelle elle est décédée des suites d'une embolie pulmonaire ; qu'après avoir saisi l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) dont relève l'hôpital Cochin d'une réclamation préalable rejetée le 11 septembre 2008, la famille de Mme J...E...a saisi le 30 octobre 2008 le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à ce que l'AP-HP soit reconnue responsable du décès de leur mère, grand-mère et belle-mère et condamnée à les indemniser des préjudices résultant de ce décès ; que, par un jugement du 7 avril 2011 au vu d'un premier rapport d'expertise du docteur Paule déposé le 9 juillet 2009, le tribunal a considéré que les erreurs de diagnostic clinique et radiologique et la négligence à faire effectuer un scanner à la suite de l'admission de Mme E...au service des urgences de l'hôpital Cochin le 13 novembre 2006 constituaient des fautes médicales qui présentaient un lien de causalité avec le décès de la patiente et que la part de responsabilité incombant à l'AP-HP dans la survenue de ce décès devait être fixée à 60% ; qu'en ce qui concernait l'évaluation des préjudices, estimant que les erreurs de diagnostic commises à l'hôpital Cochin avaient seulement privé Mme E...de chances de survie et qu'il n'était pas en mesure de fixer cette perte de chances, le tribunal a ordonné un supplément d'expertise ; que, par le jugement attaqué du 8 décembre 2011, le Tribunal administratif de Paris a considéré qu'il résultait de l'instruction, notamment du second rapport d'expertise du docteur Paule déposé au greffe du tribunal le 1er août 2011, que les fautes imputables à l'AP-HP avaient privé Mme E...de 61% de chances de survie ; que Mlle G...I..., M. A... I...et Mme F...I...née H...relèvent appel dudit jugement en ce qu'il fixe à 61% ledit taux et limite à telle hauteur l'indemnisation de leurs préjudices ;

Sur la perte de chance :

2. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'entre les mois de novembre 2006 et février 2007, la tumeur ovarienne de stade 1A de grade 1 de Mme E...n'a pas connu d'évolution significative et que le retard de trois mois dans le diagnostic de ce cancer n'en a pas modifié le pronostic, mais, qu'ainsi que l'indique l'avis de la CRCI du 30 juin 2009, " la découverte de la masse ovarienne en novembre 2006 aurait permis une prise en charge plus précoce, une stase veineuse moins importante et aurait ainsi significativement diminué les risques d'embolie pulmonaire " ; que, toutefois, et contrairement à ce que soutiennent les requérants, il ne saurait être tenu pour établi que la perte de chance d'échapper à la réalisation du risque thrombo-embolique fréquemment associé à cette maladie serait égale au taux de survie à 5 ans d'un cancer de l'ovaire de stade IA, soit 95%, dès lors que s'il est constant que la détection d'un cancer aurait dû conduire à administrer à Mme E...un traitement anticoagulant préventif, il résulte également de l'instruction, en particulier du dire du Professeur Chigot, annexé au second rapport d'expertise, que quelle qu'ait été la date de l'intervention finalement réalisée le 23 février 2007 à l'Institut Gustave Roussy " le risque d'embolie pulmonaire eut été important, d'autant que dans la chirurgie des tumeurs ovariennes l'incidence des thromboses iliaques est de 10 à 30%, celle des embolies pulmonaires de 1 à 5% dont 1% d'embolies fatales ", le risque étant aggravé après 40 ans et par le tabagisme, comme en l'espèce ; que, par suite et sans qu'il soit besoin d'établir la date d'apparition de la thrombose veineuse dès lors qu'il n'est pas reproché aux services des urgences de l'hôpital Cochin de ne pas avoir diagnostiqué cette complication, il n'est pas établi que si le cancer dont souffrait Mme E...avait été diagnostiqué dès novembre 2006 par le service des urgences de cet hôpital, elle avait, comme le prétendent les requérants, 95% de chances de survie ; qu'il y a lieu, en conséquence, de confirmer le taux de 61% de perte de chance retenu par le tribunal, qui s'est fondé sur les conclusions de l'expert, et d'indemniser à telle hauteur les préjudices subis par les consortsI..., dans la limite de la part propre de responsabilité reconnue à l'AP-HP et non contestée, fixée à 60% de ces dommages ;

Sur les préjudices :

En ce qui concerne les préjudices personnels de Mme J...E... :

3. Considérant, d'une part, que c'est par une juste appréciation des souffrances physiques endurées par Mme E...et évaluées à 4 sur 7 par l'expert, que le tribunal a alloué à ses héritiers au titre de ce préjudice et après application des taux de partage de responsabilité et de perte de chance, une somme de 6 720 euros ; qu'il y a lieu de confirmer cette évaluation non contestée en défense par l'AP-HP ;

4. Considérant, d'autre part, que si les consorts I...demandent en appel réparation du préjudice résultant pour Mme E...de la douleur morale qu'elle aurait éprouvée du fait de la conscience d'une espérance de vie réduite, ils n'en établissent pas la réalité ;

En ce qui concerne les préjudices des victimes indirectes :

5. Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction qu'une somme de 7 500 euros au titre des frais d'obsèques est restée à la charge des ayants droit de Mme E...; qu'il y a lieu, compte tenu de la part de responsabilité de 60% reconnue à l'AP-HP et du taux retenu ci-dessus de 61% de pertes de chances, d'allouer la somme de 2 745 euros en réparation de ce préjudice ;

6. Considérant, d'autre part, que si Mlle G...I...soutient qu'elle a dû assumer l'intégralité du loyer qu'elle partageait avec sa mère avant le décès de cette dernière et qu'elle doit être indemnisée des montants restés à sa charge jusqu'à son relogement dans un logement social pour une personne en novembre 2007, les pièces qu'elle produit au dossier ne permettent pas d'établir que le loyer de l'appartement qu'elle occupait avec sa mère aurait été partagé entre elles et dans quelle proportion ; que la réalité de ce préjudice n'est donc pas établie ;

7. Considérant que le tribunal a alloué à Mlle G...I...et M. A... I..., fille et fils de la victime, au titre de leur préjudice moral et après application des taux de partage de responsabilité et de perte de chance, respectivement une somme de 6 600 euros et de 1 500 euros ; qu'il y a lieu, en l'espèce, d'accorder à M. A... I...une réparation de son préjudice moral égale à celle octroyée à sa soeur et de porter cette indemnisation à la somme de 6 600 euros ;

8. Considérant que c'est par une juste appréciation du préjudice moral de

Mme F... I...néeH..., épouse de M. A... I..., et de chacun des deux

petits-enfants de la victime, C...et KarlaI..., que le tribunal leur a alloué après application des taux de partage de responsabilité et de perte de chance, une somme de 900 euros chacun, qu'il y a lieu de confirmer ;

Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :

9. Considérant que les consorts I...ont droit à ce que les sommes qui leur sont accordées par le présent arrêt soient majorées des intérêts de droit, à compter de la réception de leur demande préalable du 28 décembre 2007 ; qu'ils ont demandé la capitalisation des intérêts par un mémoire enregistré au greffe du Tribunal administratif de Paris le 14 février 2011 ; qu'il y a lieu de faire droit à cette demande à compter du 14 février 2011, dès lors qu'à cette date, les intérêts étaient dus pour au moins une année entière, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant, qu'en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il y a lieu de mettre à la charge de l'AP-HP une somme de 2 000 euros à verser aux consortsI..., au titre des frais exposés dans l'instance et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La somme que l'AP-HP est condamnée à verser à M. A...I..., en son nom personnel, est portée à 6 600 euros.

Article 2 : Les sommes que l'AP-HP est condamnée à verser aux consorts I...porteront intérêts au taux légal à compter de la réception de leur demande préalable du 28 décembre 2007. Les intérêts échus à la date du 14 février 2011, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date, seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 3 : Le jugement du Tribunal administratif de Paris du 8 décembre 2011 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : L'AP-HP versera aux consorts I...une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête des consorts I...est rejeté.

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N° 10PA03855

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N° 12PA00694


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3 ème chambre
Numéro d'arrêt : 12PA00694
Date de la décision : 04/07/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Prés MOREAU
Rapporteur ?: Mme Marianne JULLIARD
Rapporteur public ?: Mme MERLOZ
Avocat(s) : BERNE-GRAVE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2013-07-04;12pa00694 ?
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