Vu la requête, enregistrée le 24 janvier 2013, présentée pour M. A... D..., demeurant..., par Maître B...C... ; M. D...demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1217235/2-1 du 24 décembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 août 2012 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français, et a fixé son pays de destination ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté susvisé ;
3°) d'enjoindre, sous astreinte, au préfet de police de lui délivrer une carte de résident ou un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou à défaut, de réexaminer sa situation en le munissant d'une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 octobre 2013 :
- le rapport de M. Privesse, premier conseiller,
- et les observations de MeC... ;
1. Considérant que M.D..., de nationalité camerounaise, né le 1er octobre 1961 à Douala, est entré en France le 3 novembre 2001, muni d'un visa Schengen de court séjour ; qu'il a sollicité le 2 avril 2012, la régularisation de sa situation administrative sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté en date du 27 août 2012, le préfet de police a opposé un refus à cette demande, et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français, en fixant le pays de destination d'une mesure d'éloignement ; que M. D...relève appel du jugement en date du 24 décembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté attaqué :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 312-2 du même code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 (...) " ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. [...] L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans " ; qu'il résulte de ces dispositions que le préfet n'est tenu de saisir ladite commission que du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions permettant d'obtenir de plein droit un titre de séjour et auxquels il envisage de refuser le titre de séjour demandé, et non de celui de tous les étrangers qui sollicitent un tel titre ;
3. Considérant qu'à l'appui de sa demande présentée devant le Tribunal administratif de Paris, M.D..., de nationalité camerounaise, né le 1er octobre 1961, a soutenu qu'il résidait de façon habituelle et continue sur le territoire français depuis le 3 novembre 2001, soit depuis plus de dix ans à la date de la décision attaquée, en produisant différentes pièces à l'appui de cette affirmation, et qu'ainsi le préfet de police aurait dû saisir la commission du titre de séjour avant de prendre une décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ; que notamment, M. D...produit des attestations d'admission à l'aide médicale d'État pour les années 2002 à 2012, des avis d'imposition sur les revenus perçus en 2003, 2004, 2005, 2006, 2007, de non-imposition sur les revenus de 2008 et 2009, des ordonnances médicales en date du 14 mai, 1er et 9 août, et 27 novembre 2002, des résultats d'analyses médicales en date du
27 octobre 2003, ainsi qu'une facture du 28 juin 2003, un reçu nominatif de la SNCF en date du 27 janvier 2004, des résultats d'analyse médicale en date du 9 août 2004, une ordonnance du
7 octobre 2005 et un devis d'optique en date du 7 décembre 2005, trois ordonnances des 7 et
17 novembre et 19 décembre 2006, trois ordonnances médicales des 26 avril, 24 mai et
14 décembre 2007, une ordonnance du 7 octobre 2008, un document bancaire attestant d'un dépôt effectué le 15 mai 2008, et un courrier daté du 13 juin 2008 de la direction générale des finances publiques, deux factures nominatives datées de mars 2009 dont une établie par l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris ; que par ailleurs, les pièces produites en nombre au dossier de M. D...pour les années 2010 à 2012, complètent de façon probante les précédentes, et constituent avec elles un ensemble cohérent, ces documents étant généralement établis à une même adresse, permettant d'établir la réalité et la continuité de la résidence habituelle de l'intéressé en France depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté attaqué ; qu'il y a lieu dès lors, d'accueillir le moyen tiré du vice de procédure constitué par l'omission de la consultation de la commission du titre de séjour par le préfet de police ; qu'il suit de là que la décision contestée du 27 août 2012 a été prise en méconnaissance des dispositions précitées des articles L. 312-1, L. 312-2 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens de la requête, que M. D...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ; qu'aux termes de l'article
L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé " ;
6. Considérant qu'eu égard aux motifs du présent arrêt, il y a lieu d'enjoindre au préfet de police de réexaminer la demande de M. D...et de saisir à cette fin la commission du titre de séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, en munissant l'intéressé d'une autorisation provisoire de séjour durant ce réexamen ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'État la somme de 800 euros au titre des frais exposés par M. D...et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1217235/2-1 du 24 décembre 2012 du Tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : L'arrêté du préfet de police du 27 août 2012, rejetant la demande de M. D...aux fins de délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et fixant son pays de destination, est annulé.
Article 3 : Il est enjoint au préfet de police de réexaminer la demande de M. D...dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, en saisissant la commission du titre de séjour du cas de l'intéressé et en munissant celui-ci d'une autorisation provisoire de séjour pour la durée de cet examen.
Article 4 : L'État versera à M. D...une somme de 800 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
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N° 13PA00325