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31/07/2014 | FRANCE | N°13PA01942

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 31 juillet 2014, 13PA01942


Vu la requête, enregistrée le 21 mai 2013, présentée pour M. B...C..., demeurant..., par la Selarl LVI avocats associés ; M. C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100664 du 24 janvier 2013 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 juin 2010 accordant au nom de la commune de Chelles un permis de construire pour la réalisation de 73 logements à l'établissement public d'habitat " Marne et Chantereine habitat " sur un terrain situé 10/18 rue Sainte-Bathilde ;

2°) d'annuler cet arrêté ;



3°) de mettre à la charge de la commune de Chelles une somme de 2 500 euros ...

Vu la requête, enregistrée le 21 mai 2013, présentée pour M. B...C..., demeurant..., par la Selarl LVI avocats associés ; M. C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100664 du 24 janvier 2013 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 juin 2010 accordant au nom de la commune de Chelles un permis de construire pour la réalisation de 73 logements à l'établissement public d'habitat " Marne et Chantereine habitat " sur un terrain situé 10/18 rue Sainte-Bathilde ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Chelles une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 juin 2014 :

- le rapport de Mme Terrasse, président assesseur,

- les conclusions de Mme Bonneau-Mathelot, rapporteur public,

- et les observations de MeD..., pour M.C..., de MeE..., pour la commune de Chelles et de Me A...pour l'établissement public Marne et Chantereine habitat ;

1. Considérant que, par arrêté du 29 juin 2010, le maire de Chelles a accordé à l'office public d'habitat " Marne et Chantereine habitat " un permis de construire en vue de l'édification d'un immeuble de 73 logements sur un terrain sis 10/18 rue Sainte-Bathilde à Chelles ; que, par arrêté du 25 mai 2011, a été délivré un permis de construire modificatif en vue du déplacement de l'implantation du projet par rapport à l'axe de la voie principale et de la modification du passage de la Grange Neuve ; que M. C...relève appel du jugement du 24 janvier 2013 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 juin 2010 ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir soulevée par le titulaire du permis de construire ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que M. C...soutient que le tribunal a omis de statuer sur le moyen tiré de l'insuffisante précision de la délégation accordée par le maire à M. Le Bescond, conseiller municipal signataire de l'arrêté litigieux ; qu'il ressort des termes du jugement contesté que si les premiers juges ont, pour conclure à la compétence de M. Le Bescond, vérifié que tous les adjoints bénéficiaient de délégations de fonctions, ils ont omis de se prononcer sur le moyen tiré de ce que la délégation consentie à ce dernier était insuffisamment précise ; que M. C...est fondé à demander l'annulation de ce jugement ;

3. Considérant qu'il y lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. C...devant le Tribunal administratif de Melun ;

Au fond :

4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction en vigueur à compter du 17 août 2004 : " Le maire est seul chargé de l'administration, mais il peut, sous sa surveillance et sa responsabilité, déléguer par arrêté une partie de ses fonctions à un ou plusieurs de ses adjoints et, en l'absence ou en cas d'empêchement des adjoints ou dès lors que ceux-ci sont tous titulaires d'une délégation, à des membres du conseil municipal (...) " ; que, d'une part, il est constant qu'il a été justifié devant le tribunal administratif que tous les adjoints étaient titulaires d'une délégation ; que, par suite, une délégation pouvait être régulièrement consentie à M. Le Bescond, conseiller municipal ; que, d'autre part, la délégation accordée le 21 mars 2008 à M. Le Bescond par le maire de Chelles précise qu'elle porte sur les questions ayant trait à l'aménagement et l'urbanisme ; que ses limites sont ainsi déterminées avec une précision suffisante ; que le moyen tiré de ce que le permis serait signé d'une autorité incompétente faute de délégation régulière doit donc être écarté ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que lorsqu'un permis de construire a été délivré en méconnaissance des dispositions législatives ou réglementaires relatives à l'utilisation du sol ou sans que soient respectées des formes ou formalités préalables à la délivrance des permis de construire, l'illégalité qui en résulte peut être régularisée par la délivrance d'un permis modificatif dès lors que celui-ci assure les respect des règles de fond applicables au projet en cause, répond aux exigences de forme ou a été précédé de l'exécution régulière de la ou des formalités qui avaient été omises ; que les irrégularités ainsi régularisées ne peuvent plus être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre le permis initial ;

6. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend une notice précisant : / 1° L'état initial du terrain et de ses abords indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants ; / 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : (...) b) L'implantation, l'organisation, la composition et le volume des constructions nouvelles, notamment par rapport aux constructions ou paysages avoisinants ; (...) " ; que si la régularité de la procédure d'instruction d'un permis de construire requiert la production par le pétitionnaire de l'ensemble des documents exigés notamment par les dispositions de l'article R. 431-18 sus-rappelées, le caractère insuffisant du contenu de l'un de ces documents au regard desdites dispositions ne constitue pas nécessairement une irrégularité de nature à entacher la légalité de l'autorisation si l'autorité compétente est en mesure, grâce aux autres pièces produites, d'apprécier l'ensemble des critères énumérés par les dispositions précitées ; que M. C...soutient que la notice du projet ne justifiait pas de ses modalités d'insertion dans le paysage existant ; que, toutefois, le dossier de permis initial comprenait des nombreux documents graphiques et photographiques permettant à l'administration d'apprécier exactement l'insertion du projet dans son environnement ; que la notice elle-même comportait une analyse du site et de ses abords et des indications relatives à la volumétrie du bâtiment compte tenu de la forme du terrain d'assiette, impliquant une construction en pointe de flèche, et aux différences de hauteur allant de R+3 à R+5 pour assurer une continuité avec les édifices existants ; qu'au surplus, la notice annexée à la demande de permis modificatif apportait des compléments, notamment s'agissant du choix des couleurs et des caractéristiques des constructions environnantes ; qu'ainsi le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme sera écarté ;

7. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article UA 3.2) du règlement du plan local d'urbanisme relatif à la voirie, autre que cheminement piétonnier et voie à vocation principalement piétonne : " (...) a) La création de voies publiques ou privées ouvertes à la circulation publique est soumise aux conditions suivantes : (...) - si la longueur est supérieure à 50 m : largeur minimale d'emprise 8,00 m avec une chaussée aménagée pour le passage de deux files (...) " ; que le 3) du même article dispose que les cheminements exclusivement piétonniers doivent être aménagés pour empêcher toute autre utilisation, notamment par les véhicules motorisés, et être adapté à leur fonction ; que si le requérant faisait valoir, dans son mémoire introductif devant le tribunal administratif que l'aménagement prévu du passage de la Grange neuve était contraire aux dispositions précitées en ce qu'il ne respectait pas les dimensions exigées pour une voie ouverte à la circulation publique, il ressort des pièces du dossier que le permis modificatif a supprimé cette irrégularité en requalifiant ce passage par un aménagement interdisant la circulation publique ; que le requérant en a d'ailleurs pris acte dans ses écritures ; que le moyen doit donc être écarté ;

8. Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article UA 6 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune relatif à l'implantation des constructions par rapport aux voies et emprises publiques : " 6.1) Dans les secteurs UAa et UAb : (...) En cas d'emprise de voirie inférieure à 16m, les constructions devront s'implanter à une distance de 8 mètres par rapport à l'axe de la voie (...) " ; que M. C...soutient que l'implantation du projet est irrégulière en ce qui concerne sa façade sur la rue Sainte-Bathilde ; que, toutefois, cette irrégularité du permis initial, qui procédait d'un tracé erroné de l'axe de la rue, a été rectifiée par la délivrance du permis modificatif déplaçant l'implantation du projet pour le rendre conforme aux dispositions précitées ; que, pour les mêmes motifs que précédemment le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article UA 6 doit être écarté ;

9. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article UA 11 du règlement du plan local d'urbanisme : " Les constructions doivent présenter un aspect compatible avec le caractère ou l'intérêt des lieux avoisinants du site et des paysages. / Les constructions (...) doivent s'intégrer à leur environnement par : / la simplicité et les proportions de leur volumes, / la qualité des matériaux, / l'harmonie des couleurs, / leur tenue générale et hauteur. / Dans ce cadre, des principes architecturaux, de volumétrie, d'implantation, de hauteur et de toiture pourront être imposés afin de tenir compte du bâti environnant et de la nécessaire intégration des projets de constructions dans leur environnement proche. (...) " ;

10. Considérant que si les premiers juges ont commis une erreur de plume en mentionnant une surface hors oeuvre nette de 3 628 m2, chiffre qui correspond en réalité à la superficie du terrain d'assiette du projet alors que celui-ci créait 5 962 m2 de surface hors oeuvre nette, cette erreur est sans incidence sur l'appréciation qu'ils ont portée sur l'insertion du projet dans son environnement proche dès lors qu'ils ont pris en compte la volumétrie d'ensemble du bâtiment ;

11. Considérant que M. C...soutient que le projet, dont la hauteur varie de R+3 à R+5, qui comporte une façade sur rue de 50 m et une profondeur de 56 m ne s'insère pas dans le bâti existant, lequel doit être apprécié au niveau de l'îlot délimité par les rues Adolphe Besson, Sainte Bathilde et Duchesne ; que toutefois, cet îlot ne constitue pas un ensemble distinct mais est en totalité inscrit dans la zone du centre ville à proximité immédiate de la mairie et environné de plusieurs ensembles de logements collectifs ; que la notion de " lieux avoisinants " à laquelle se réfèrent les dispositions précitées du PLU ne se limite pas à cet îlot mais doit être appréciée plus largement à l'échelon du quartier ; que si le requérant fait valoir que l'îlot lui-même est occupé par des constructions individuelles peu élevées et de type traditionnel, il ressort des pièces du dossier que cet îlot comporte déjà deux bâtiments récents R+5, dont l'un se situera en continuité du projet, et que l'édification de l'ensemble de ces constructions neuves, qui s'inscrit dans l'évolution souhaitée de ce secteur de la ville pour lequel au moins un autre permis de construire un immeuble de logements collectifs a été délivré, a abouti à la disparition de la plupart des maisons individuelles préexistantes ; que si ces deux bâtiments sont d'un volume moindre que le projet envisagé, il apparait que de l'autre côté de la rue Sainte-Bathilde se trouve un important ensemble collectif R+8 et à proximité de l'îlot en cause une tour de dix-huit étages, également visible depuis cette même rue, l'un et l'autre étant d'un volume largement supérieur à celui de l'immeuble projeté ; que si le projet est d'une architecture résolument moderne, il se situe en face d'une école R+3 et à proximité d'une crèche l'une et l'autre également d'architecture moderne ; que la couleur orangé choisie pour l'enveloppe du bâtiment se retrouve dans plusieurs constructions avoisinantes ainsi que cela ressort notamment de la page 17 de la notice architecturale du permis modificatif ; qu'il suit de là que le requérant n'est pas fondé à soutenir que les premiers juges auraient fait une appréciation erronée de l'insertion du projet dans les lieux avoisinants ;

12. Considérant, en quatrième lieu, que l'article UA 11.1 b) du règlement du plan local d'urbanisme limite l'usage de bacs acier aux toitures des annexes des habitations et aux bâtiments d'activités ; que le requérant soutient que le matériau " Alucobond " prévu pour la toiture du projet est assimilable à une toiture réalisée en bacs acier ; que, toutefois, il ressort à la fois des documents techniques et des illustrations du projet que ce matériau innovant est un panneau composite alliant des plaques d'aluminium, dont l'extérieur est laqué en orangé, enfermant une âme isolante, ayant l'aspect un large ruban lisse courant sur le dessus et les pignons de l'immeuble ainsi que sur le sol au niveau de son entrée, constituant à la fois une " peau " enveloppant le bâti et un élément décoratif ; que ni par sa composition ni par son aspect ce matériau ne saurait être assimilé à des bacs aciers prohibés par le règlement du PLU s'agissant de la couverture d'un bâtiment d'habitation ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Considérant, en premier lieu, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Chelles, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que M. C...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

15. Considérant, en second lieu, que dans les circonstances de l'espèce il y a lieu de mettre à la charge de M. C...une somme de 1 000 euros chacun au titre des frais exposés d'une part par la commune de Chelles, et d'autre part par l'établissement public " Marne et Chantereine habitat ", et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Melun du 24 janvier 2013 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. C...devant le Tribunal administratif de Melun est rejetée.

Article 3 : M. C...versera à la commune de Chelles et à l'établissement public " Marne et Chantereine habitat " une somme de 1 000 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 13PA01942


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 13PA01942
Date de la décision : 31/07/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme VETTRAINO
Rapporteur ?: Mme Marianne TERRASSE
Rapporteur public ?: Mme BONNEAU-MATHELOT
Avocat(s) : LAMORLETTE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2014-07-31;13pa01942 ?
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