Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 23 février et
10 mars 2015, présentés par le préfet de police ; le préfet de police demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1420667/2-1 du 20 janvier 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris, faisant droit à la demande de M. D...A..., a annulé l'arrêté du
25 août 2014 refusant la délivrance d'un titre de séjour à celui-ci, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant son pays de destination, lui a enjoint de réexaminer la situation administrative de M. A...dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement et a mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif ;
Il soutient que :
- il n'a pas entaché son arrêté d'un vice de procédure en ne saisissant pas la commission du titre de séjour, dès lors que :
- l'intéressé n'apporte pas la preuve de la date réelle de son arrivée en France ;
- l'intéressé ne justifie pas d'une résidence habituelle en France de dix ans, ayant lui-même reconnu, dans le cadre de ses relations avec l'administration, avoir séjourné au Mali entre 2008 et 2010 ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 6 août 2015, présenté pour M. D...A..., par MeE... ; M. A...demande à la Cour de rejeter la requête présentée par le préfet de police et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que, contrairement à ce que prétend le préfet de police, c'est à bon droit que le tribunal administratif a estimé qu'il justifiait de sa présence habituelle en France depuis dix ans ;
Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 novembre 2015 :
- le rapport de Mme Appèche, rapporteur,
1. Considérant que M. A..., ressortissant malien, né le 25 décembre 1967 à Bamako (Mali), entré en France, selon ses déclarations, en 1989, a sollicité son admission au séjour dans le cadre des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 25 août 2014, le préfet de police a opposé un refus à cette demande, lui a enjoint de quitter le territoire français dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêté et a fixé le pays de sa destination en cas d'exécution d'office de la mesure d'éloignement passé ce délai ; que le préfet de police relève régulièrement appel du jugement n° 1420667/2-1 du 20 janvier 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris, faisant droit à la demande de M.A..., a annulé l'arrêté susmentionné et lui a enjoint de réexaminer sa situation administrative ;
Sur les conclusions du préfet de police :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) " ;
3. Considérant qu'il ressort du jugement attaqué que, pour annuler l'arrêté du préfet de police refusant un titre de séjour à M.A..., les premiers juges ont estimé que le préfet de police avait entaché son arrêté d'un vice de procédure en ne saisissant pas la commission du titre de séjour, dès lors que M. A...justifiait, selon eux, d'une résidence habituelle de plus de dix ans sur le territoire français, ce que conteste le préfet de police dans ses écritures d'appel ;
4. Considérant que, si M. A...soutient être entré en France en 2002 et y résider depuis de manière habituelle, il n'apporte pas la preuve de la date réelle de son arrivée en France ; que, comme le relève le préfet de police, les documents versés au dossier concernant l'année 2004 comportent des incohérences, puisque notamment, le numéro d'assuré social figurant sur l'attestation de carte vitale de juillet 2004 diffère de celui mentionné sur les bulletins de paye à l'entête de la société Manpower établis au nom de M.A..., alors qu'aucun contrat de travail, ni relevé de compte bancaire n'ont été produits qui auraient permis d'attester de la perception effective desdits salaires par M.A... ; que, par ailleurs, M. A...n'apporte aucune précision ni justificatifs concernant les dates de ses différentes entrées et sorties du territoire français durant la période de dix ans précédant le 25 août 2014, date de l'arrêté contesté, alors qu'il est constant qu'il a eu en juin 2008 et en août 2010 un troisième et un quatrième enfant, qui sont nés au Mali, où résident également leur mère et leurs aînés ; que les justificatifs produits par M. A...ne sont, concernant notamment le second semestre des années 2007 et 2009, ni suffisamment nombreux ni suffisamment probants pour démontrer la présence sur le territoire français de l'intéressé ; qu'ainsi, le requérant n'établit pas que sa présence en France avait eu et conservé un caractère habituel entre 2004 et 2014 ; qu'il suit de là que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que M. A...justifiait de dix années de résidence habituelle en France, et que le défaut de saisine de la commission du titre de séjour sur le cas de l'intéressé devait entraîner l'annulation de l'arrêté préfectoral pris à son encontre;
5. Considérant qu'il y a lieu pour la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A...tant en première instance que devant elle ;
Sur les autres moyens invoqués par M.A... :
6. Considérant, en premier lieu, que, par un arrêté n° 2013-00003 du 4 janvier 2013, régulièrement publié le 11 janvier suivant au bulletin municipal officiel de la ville de Paris, le préfet de police a donné délégation à M. B...C..., attaché principal d'administration, adjoint au chef du 9ème bureau de la sous-direction de l'administration des étrangers, à l'effet de signer tous actes dans la limite de ses attributions, au titre desquelles figurent les décisions en litige ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire des décisions contestées ne peut qu'être écarté comme manquant en fait ;
7. Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté contesté énonce de manière suffisamment précise les considérations de droit et de fait sur lesquelles s'est fondé son auteur tant en ce qu'il porte refus de titre de séjour qu'obligation de quitter le territoire français, la motivation de cette obligation se déduisant de celle dudit refus ; que le préfet de police, qui vise dans son arrêté le code de l'entrée et du séjour des étranger et du droit d'asile et notamment son article L. 511-1 et précise que l'intéressé est de nationalité malienne, a suffisamment motivé également la décision fixant le pays à destination duquel M. A...pourrait être reconduit d'office passé le délai de trente jours qui lui a été imparti pour procéder à un départ volontaire du territoire français ;
8. Considérant, en troisième lieu, que pour contester le refus de titre de séjour qui lui a été opposé, M. A...se prévaut de la durée de sa présence en France ; que la présence en France depuis plus de dix ans d'un étranger, qui y réside irrégulièrement, ne saurait suffire à lui ouvrir droit à un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 susénoncé ; que M.A..., ne justifie pas, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, d'une telle durée de présence habituelle sur le territoire français ; que son épouse et ses enfants résidant au Mali, il est dépourvu d'attaches familiales en France et ne démontre ni y avoir tissé des liens personnels spécialement étroits, ni s'y être particulièrement bien intégré ; que d'ailleurs, le préfet de police relève, sans être contredit, que M. A...a été condamné, le 26 février 2013, par le Tribunal correctionnel de Paris en comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité à cinq mois d'emprisonnement avec sursis ; que par suite, en estimant qu'aucune considération humanitaire ou motif exceptionnel ne justifiait la délivrance d'un titre de séjour à M.A..., le préfet de police n'a commis ni erreur de droit, ni erreur manifeste d'appréciation dans l'application, au cas de l'intéressé, des dispositions susénoncées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
9. Considérant, qu'eu égard à la situation personnelle et familiale de M. A...décrite ci-dessus, l'autorité préfectorale n'a pas davantage commis d'erreur manifeste d'appréciation en assortissant son refus de titre de séjour d'une obligation de quitter le territoire français et a pu légalement impartir à l'intéressé, qui n'a fait état d'aucune impossibilité ou contrainte particulière, un délai de trente jours pour se soumettre volontairement à cette obligation ;
10. Considérant qu'il suit de là que M. A...n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté pris à son encontre le 25 août 2014 par le préfet de police ; que ses conclusions à fin d'injonction sous astreintes ne peuvent, en conséquence, qu'être également rejetées ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à obtenir l'annulation du jugement n° 1420667/2-1 du 20 janvier 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 25 août 2014, lui a enjoint de réexaminer la situation administrative de M. A...après avoir consulté la commission du titre de séjour et a mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative ; que les conclusions présentées par M.A..., tant devant le Tribunal administratif de Paris que devant la Cour, doivent être rejetées y compris celles fondées sur l'article L. 761-1 du code justice administrative et l'article 37 de la loi susvisée du 10 juillet 1991, l'Etat n'ayant pas, dans la présente instance la qualité de partie perdante ;
DÉCIDE
Article 1er : Le jugement n° 1420667/2-1 du 20 janvier 2015 du Tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. A...devant le Tribunal administratif de Paris et ses conclusions devant la Cour sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. D...A....
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 18 novembre 2015 à laquelle siégeaient :
- Mme Brotons, président,
- Mme Appèche , président assesseur,
- M. Legeai, premier conseiller,
Lu en audience publique le 2 décembre 2015.
Le rapporteur,
S. APPECHE
Le président,
I. BROTONS
Le greffier,
P. LIMMOIS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14PA00833