Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A...C...a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2008, 2009 et 2010, ainsi que des pénalités y afférentes.
Par un jugement n° 1407202 du 10 novembre 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 8 janvier 2015, Mme C..., représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1407202 du 10 novembre 2014 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) de prononcer la décharge sollicitée ;
Elle soutient que :
- les sacs achetés par la société MSJH étaient destinés à être démontés ou analysés dans le cadre de l'activité de styliste et étaient ensuite soit restitués à la société Balenciaga, soit adressés aux façonniers, soit détruits ou encore conservés par la société MSJH ; ces sacs constituaient des ressources documentaires et n'étaient pas achetés pour son usage personnel ;
- les dépenses engagées au titre de missions et de réceptions étaient nécessitées par l'activité de la société MSJH et le milieu dans lequel celle-ci exerce son activité ;
- les relations conflictuelles existant entre la société MSJH et son expert comptable ne lui ont pas permis de fournir les justificatifs afférents aux dépenses en cause .
Par un mémoire en défense enregistré le 28 avril 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que si Mme C...a entendu, en mentionnant la requête introduite par la société MSJH, reprendre le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la proposition de rectification, ce moyen n'est pas fondé et que les autres moyens présentés par Mme C...ne le sont pas davantage.
Par ordonnance du 20 octobre 2015, la clôture de l'instruction a été fixée au
3 novembre 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Appèche
- les conclusions de M. Egloff, rapporteur public.
1. Considérant qu'à la suite de la vérification de comptabilité de l'EURL MSJH, qui exerçait, avant sa liquidation judiciaire, une activité de stylisme et création de modèles dans le domaine de la maroquinerie de luxe et dont Mme C...était associée-gérante, le service a réintégré au résultat imposable de l'entreprise diverses sommes, selon lui indûment déduites, au titre de charges des exercices clos en 2008, 2009 et 2010 ; que l'administration a estimé que les sommes ainsi réintégrées constituaient des revenus distribués entre les mains de la requérante, imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers au titre des trois années précitées ; qu'ayant demandé en vain au Tribunal administratif de Paris de la décharger des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été, en conséquence, assujettie au titre des années 2008, 2009 et 2010, ainsi que des pénalités y afférentes, Mme C...relève appel du jugement de ce tribunal rejetant sa demande ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. Considérant, qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales :
" L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation " ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile ; qu'en revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ses motifs ;
3. Considérant que la proposition de rectification du 19 décembre 2011 adressée à
Mme C...précise qu'elle concerne l'impôt sur le revenu des années 2008, 2009 et 2010 et que les redressements envisagés, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, ont trait à des sommes considérées, sur le fondement d'une part, du c de l'article 111 du code général des impôts et d'autre part du 2° de l'article 109-1 dudit code comme des distributions opérées à son profit par la société MSJH ; que le vérificateur précise que les sommes en cause correspondent à des charges selon lui non déductibles supportées par la société MSJH et à la disparition de valeurs, à savoir des sacs de luxe achetés par la société et non revendus et non stockés par elle ; qu'à cette proposition de rectification était jointe celle, en date du 29 septembre 2011, adressée à l'EURL MSJH ; qu'ainsi, et si la requérante a entendu contester le caractère suffisant de la motivation des redressements qui lui ont été notifiés, ce moyen doit être écarté comme non fondé, dès lors que ladite motivation répondait aux exigences posées par les dispositions susénoncées et permettait à l'intéressée de formuler ses observations de manière entièrement utile ;
Sur la charge de la preuve :
4. Considérant qu'aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales :
" Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré (...) " ;
5. Considérant que la charge de la preuve quant à l'appréhension des sommes réputées distribuées par la personne morale dépend de la procédure d'imposition ; qu'en cas d'acceptation des rectifications par le contribuable, il appartient à ce dernier d'apporter la preuve de l'absence d'appréhension par ses soins desdites sommes ; que par proposition de rectification du
19 décembre 2011, le service a informé Mme C...qu'il la regardait comme la bénéficiaire des diverses sommes réintégrées au résultat imposable de l'EURL MSJH au titre des trois années en litige, et imposables à ce titre à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ; que la requérante, qui n'a pas présenté d'observations en réponse à cette proposition de rectification dans le délai imparti, est réputée avoir accepté les rectifications contestées ; qu'elle ne peut dès lors obtenir la décharge ou la réduction des impositions litigieuses que dans la mesure où elle apporterait la preuve de leur caractère mal-fondé ou exagéré ;
Sur le bien-fondé des impositions :
6. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : (...) 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés (...) " ; qu'aux termes de l'article 111 du même code : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) c) Les rémunérations et avantages occultes (...) " ;
7. Considérant, en premier lieu, que l'EURL MSJH a exposé, au cours des exercices clos en 2008, 2009 et 2010, des dépenses respectives de 50 000 euros, 50 000 euros et 28 924 euros correspondant à des achats de sacs à main de marques ; que le vérificateur, estimant que ces achats avaient été effectués au profit de MmeC..., à proportion de 80%, a réintégré, dans cette mesure, les sommes correspondantes dans les revenus de l'intéressée dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers sur le fondement des dispositions précitées du code général des impôts ;
8. Considérant que la requérante soutient que les dépenses litigieuses répondaient aux besoins de l'activité de la société MSJH, dès lors que les sacs en cause étaient achetés dans le seul but d'examiner leur fabrication et le savoir-faire de leurs créateurs et étaient démontés pour être analysés et pour lui permettre la réalisation de ses propres patrons avant d'être adressés au maroquinier en charge de la fabrication du produit et que ces sacs étaient ensuite soit confiés aux façonniers, soit conservés dans les locaux de la société MSJH ou restitués à la société Balenciaga avec laquelle elle travaillait ou encore détruits ; que, toutefois, la seule production d'une note rédigée par Mme C...aux fins d'explication de son métier et d'un extrait de contrat conclu par l'EURL MSJH avec la société Balenciaga concernant une période postérieure aux années en litige ne saurait constituer une justification probante du caractère professionnel des dépenses en cause ;
9. Considérant, en second lieu, que le service a considéré comme exposés au profit de
MmeC..., à hauteur de 136 567 euros, 158 880 euros et 16 505 euros au titre des exercices clos en 2008, 2009 et 2010, soit 50% des montants initialement comptabilisés, diverses dépenses correspondant à des loyers afférents à l'appartement personnel de la requérante ainsi qu'à divers frais de mission et de représentation ; que Mme C...soutient devant la Cour, comme elle le faisait en première instance, que compte tenu du domaine d'activité dans lequel elle évolue, elle se devait, comme gérante de la société MSJH, d'engager des dépenses de mission et réception avec des personnalités de la mode ou de la presse, et qu'elle avait d'ores et déjà, pour rester en conformité avec ses obligations fiscales, considéré comme privatives une quote-part de 30% desdites dépenses ; que toutefois, en l'absence de justificatifs précis et probants, Mme C...ne démontre pas que les dépenses en cause étaient, au-delà de la proportion de 50 % admise par l'administration, nécessaires à l'activité de l'entreprise et engagées dans l'intérêt de son activité et non dans son propre intérêt ; que, concernant ces sommes, la requérante ne saurait davantage utilement justifier le caractère lacunaire des justificatifs produits par les difficultés rencontrées par la société avec son comptable ; qu'ainsi, en l'absence de production de tout justificatif probant, Mme C...ne démontre pas que les sommes en cause n'auraient pas été mises à sa disposition et auraient été considérées à tort par le service comme des distributions faites à son profit par cette dernière et imposables entre ses mains ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que les conclusions de la requête tendant à l'annulation du jugement et à la décharge des impositions litigieuses doivent, par suite, être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C...et au ministre des finances et des comptes publics.
Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.
Délibéré après l'audience du 2 décembre 2015, où siégeaient :
- Mme Brotons, président de chambre,
- Mme Appèche, président assesseur,
- M. Magnard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 16 décembre 2015.
Le rapporteur,
S. APPECHELe président,
I. BROTONS
Le greffier,
S. DALL'AVA
La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15PA00086