Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A...F..., épouseE..., a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 4 juillet 2011 par laquelle le directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a mis fin à ses fonctions de chef de bureau, d'enjoindre à cette même autorité de la réaffecter à compter du 25 octobre 2006, dans un emploi équivalent à celui occupé avant son congé de maternité et, enfin, de condamner l'office à l'indemniser du préjudice causé par cette décision.
Par un jugement n°s 1106564 et 1109197 du 16 juillet 2013, le tribunal a annulé la décision du 4 juillet 2011, fait droit à la demande d'injonction, renvoyé Mme E...devant l'OFPRA pour la liquidation des indemnités correspondant à son préjudice économique et condamné ce dernier à payer à Mme E...la somme de 2 000 euros au titre de son préjudice moral.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée par télécopie le 16 septembre 2013, régularisée le 18 septembre 2013 par la production de l'original, l'OFPRA, représenté par la SELARL Cornet Vincent Segurel, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Melun du 16 juillet 2013 ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme E...devant le Tribunal administratif de Melun ;
3°) de mettre à la charge de Mme E...le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier au regard des dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative, faute pour la minute de comporter la signature de président, du rapporteur et du greffier ;
- si le 5° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 prévoit qu'à l'issue de son congé maternité, le fonctionnaire est réaffecté de plein droit sur son ancien poste ou, dans le cas où celui-ci ne peut lui être proposé, dans un emploi équivalent, il ne peut faire obstacle au pouvoir de mutation dont dispose 1'administration en vertu de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 ; c'est implicitement mais nécessairement ce qu'a jugé le Tribunal administratif de Melun dans son jugement du 20 décembre 2010 en annulant la décision au motif de l'absence de consultation de la commission administrative paritaire ; ainsi, par le jugement attaqué, les premiers juges ont méconnu la chose jugée ;
- en admettant même qu'il appartenait à I'OFPRA d'affecter l'intimée sur un emploi équivalent à celui qu'elle occupait avant son congé maternité, l'office ne pouvait l'affecter sur un autre emploi que celui d'officier de protection instructeur dès lors que le poste de chef de bureau qu'elle occupait avant son congé maternité avait disparu en raison de la réorganisation des services et que, l'OFPRA étant une petite structure, il ne pouvait lui proposer un poste similaire ;
- les emplois d'officier de protection instructeur et de chef de bureau de la division protection sont, en tout état de cause, équivalents ;
- c'est à tort que les premiers juges ont condamné l'OFPRA à réparer les préjudices subis par Mme E...alors qu'aucune illégalité fautive n'a été commise ;
- contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, l'intimée a continué à bénéficier de l'indemnité de fonction, seule l'indemnité de direction ayant cessé de lui être versée ; ainsi, aucune indemnité de fonction complémentaire n'est due ;
- c'est à tort que les premiers juges ont estimé qu'il appartenait à l'OFPRA de prouver qu'il avait versé une prime de fonctions et de résultats alors que c'était sur Mme E...que pesait la charge de la preuve qu'elle n'avait pas perçu ces sommes ;
- c'est à tort que les premiers juges ont considéré que Mme E...avait subi un préjudice moral alors qu'elle n'établit pas celui-ci.
Par deux mémoires en défense, enregistrés par télécopie le 9 décembre 2013 et le 22 janvier 2014, régularisés le 13 décembre 2013 et le 24 janvier 2014 par la production des originaux, MmeE..., représentée par MeD..., demande à la Cour :
1°) de rejeter la requête ;
2°) par la voie de l'appel incident, de condamner l'OFPRA à lui verser la somme de 14 100 euros en réparation du préjudice économique et la somme de 20 000 euros au titre du préjudice moral, dans un délai d'un mois à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 10 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de l'OFPRA le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les moyens soulevés par l'OFPRA ne sont pas fondés ;
- la question soumise à la commission administrative paritaire réunie le 16 juin 2011 orientait manifestement la réponse des votants ; la commission a adopté le procès verbal de la séance du 16 juin 2011, le 13 décembre 2011, postérieurement à la décision en litige ;
- cette décision méconnait les dispositions de l'article 1er du décret du 26 août 2010 ;
- elle méconnaît l'autorité de chose jugée qui s'attache au jugement du Tribunal administratif de Melun du 20 décembre 2010 ;
- le préjudice économique résultant de la perte de l'indemnité de direction et des différentes primes trimestrielles et semestrielles s'élève à la somme de 14 100 euros ;
- elle est, en outre, fondée à solliciter la somme de 20 000 euros au titre du préjudice moral.
Par un mémoire en réplique enregistré par télécopie le 12 mai 2014, régularisé le 14 mai 2014 par la production de l'original, l'OFPRA conclut aux mêmes fins que la requête, par les mêmes moyens, et au rejet de l'appel incident.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme E...au soutien de ses conclusions d'appel incident ne sont pas fondés.
Par un nouveau mémoire en défense, enregistré le 4 septembre 2014, Mme E...conclut aux mêmes fins mais limite à 13 140 euros ses conclusions présentées au titre du préjudice économique.
Par un arrêt n° 13PA03552 du 31 décembre 2014, la Cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par l'OFPRA contre le jugement du Tribunal administratif de Melun du 16 juillet 2013.
Par un arrêt n° 388519 du 14 septembre 2016, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt de la Cour administrative d'appel de Paris du 31 décembre 2014 et a renvoyé l'affaire à la Cour.
Par deux nouveaux mémoires, enregistrés le 12 octobre et le 10 novembre 2016, Mme E...conclut aux mêmes fins, et à ce que soit mis à la charge de l'OFPRA le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un nouveau mémoire enregistré le 26 octobre 2016, l'OFPRA conclut aux mêmes fins que la requête, par les mêmes moyens, et à ce que soit mis à la charge de Mme E...le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient en outre que Mme E...a été nommée le 6 octobre 2015 au poste nouvellement créé de chef du bureau des affaires courantes et intermédiaires.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 82-451 du 28 mai 1982 relatif aux commissions administratives paritaires ;
- le décret n° 93-34 du 11 janvier 1993 portant statut particulier des corps de fonctionnaires de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ;
- le décret n° 97-553 du 28 mai 1997 relatif aux indemnités spécifiques des agents de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) ;
- le décret n° 2010-997 du 26 août 2010 relatif au régime de maintien des primes et indemnités des agents publics de l'Etat et des magistrats de l'ordre judiciaire dans certaines situations de congés ;
- l'arrêté du 20 janvier 1995 portant création d'une commission administrative paritaire d'officiers de protection à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Niollet,
- les conclusions de M. Baffray, rapporteur public,
- les observations de MeB..., pour l'OFPRA,
- et les observations de MeC..., pour MmeE....
1. Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme A...F..., épouseE..., officier de protection titulaire, a été nommée le 25 février 2004 en qualité de chef du bureau du maintien de la protection au sein de la division de la protection de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ; qu'en août 2006, alors que Mme E...était en congé de maternité, une réorganisation de la division de la protection a conduit à ce que les quatre bureaux qui la composaient soient remplacés par quatre sections ; que Mme E...n'a pas été retenue pour occuper les fonctions de chef de section ; que, par une décision du 31 août 2006, le directeur de l'office a mis fin, à compter du 1er septembre 2006, à ses fonctions de chef de bureau et l'a affectée en qualité d'officier de protection instructeur au sein de la division Asie ; que par un premier jugement du 20 décembre 2010, le Tribunal administratif de Melun a annulé cette décision au motif que la commission administrative paritaire n'avait pas été consultée ; que le directeur de l'office a alors, le 4 juillet 2011, pris une nouvelle décision de portée identique à celle du 1er septembre 2006 ; que l'OFPRA fait appel du jugement du 16 juillet 2013 par lequel le Tribunal administratif de Melun a annulé sa décision du 4 juillet 2011, lui a fait injonction de réintégrer Mme E...dans un emploi équivalent à celui occupé avant son congé de maternité et l'a condamné à réparer les préjudices subis par elle du fait de l'illégalité de la décision changeant son affectation ; que Mme E...demande à la Cour, par la voie de l'appel incident, de condamner l'OFPRA à lui verser la somme de 13 140 euros en réparation du préjudice économique et la somme de 20 000 euros en réparation du préjudice moral qu'elle soutient avoir subis ;
Sur la requête de l'OFPRA :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience " ; qu'il ressort des pièces du dossier que la minute du jugement attaqué est signée conformément aux dispositions précitées par le président, le rapporteur et le greffier d'audience ; qu'il suit de là que l'OFPRA n'est pas fondé à soutenir que le jugement est irrégulier ;
3. Considérant, en second lieu, que le 5° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 dispose qu'à l'expiration d'un congé pour maternité ou pour adoption, " le fonctionnaire est réaffecté de plein droit dans son ancien emploi. Dans le cas où celui-ci ne peut lui être proposé, le fonctionnaire est affecté dans un emploi équivalent, le plus proche de son dernier lieu de travail " ;
4. Considérant que, pour annuler la décision du 4 juillet 2011 de l'OFPRA, le tribunal administratif a considéré que l'OFPRA justifiait de la suppression du bureau du maintien et de la protection en raison de la restructuration complète de la division mais a estimé qu'il n'établissait pas, alors que la preuve lui en incombait, avoir été dans l'impossibilité d'affecter Mme E...dans un emploi équivalent à celui de chef de bureau ;
5. Considérant qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que l'ancien bureau du maintien de la protection comportait, outre son responsable, trois agents de catégorie B et C et que la nouvelle section du maintien de la protection créée par la réorganisation comprend, outre le responsable de ce service, douze autres agents dont deux agents de catégorie A, les responsabilités d'encadrement à assumer étant substantiellement accrues ; que l'emploi de chef de la nouvelle section du maintien de la protection ne peut donc, contrairement à ce que soutient MmeE..., être regardé comme comportant des missions équivalentes à celles de chef de l'ancien bureau du maintien de la protection ; que Mme E...ne fait état d'aucun autre poste disponible, équivalent à celui de chef de l'ancien bureau du maintien de la protection, sur lequel il aurait été possible de la réintégrer à son retour de congés de maternité ; que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de sa requête, l'OFPRA est donc fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur les motifs rappelés ci-dessus pour annuler sa décision du 4 juillet 2011 et pour le condamner à réparer les préjudices subis par Mme E... ;
6. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés en première instance et en appel par Mme E...;
Sur les autres moyens de MmeE... :
7. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces produites par l'OFPRA que la commission administrative paritaire qui s'est réunie le 16 juin 2011 était, contrairement à ce que Mme E...a soutenu devant le tribunal administratif, sans d'ailleurs assortir ce moyen d'aucune précision, composée conformément aux dispositions de l'arrêté du 20 janvier 1995 portant création d'une commission administrative paritaire d'officiers de protection à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ;
8. Considérant, en deuxième lieu, que, contrairement à ce que soutient MmeE..., la circonstance que le Président de la commission administrative paritaire a, lors de la réunion du 16 juin 2011, précisé qu'elle n'était pas appelée à donner son avis sur " l'affectation actuelle " de Mme E...qui avait été réaffectée le 20 décembre 2007 à la division de l'asile aux frontières, mais sur sa réaffectation à la suite de la réorganisation opérée en 2006, et précisé que " cette consultation est tout à fait formelle ", n'a pu exercer une influence sur le sens de l'avis de la commission et de la décision du 4 juillet 2011 ;
9. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 29 du décret du 28 mai 1982, visé ci-dessus : " (...) Un procès-verbal est établi après chaque séance. Il est signé par le président et contresigné par le secrétaire et le secrétaire adjoint et transmis, dans le délai d'un mois, aux membres de la commission. Ce procès-verbal est soumis à l'approbation des membres de la commission lors de la séance suivante " ; que la circonstance que la commission administrative paritaire a adopté le procès verbal de la séance du 16 juin 2011, le 13 décembre 2011, postérieurement à la décision en litige est sans incidence sur la légalité de cette décision ; que, contrairement à ce que soutient MmeE..., ce procès-verbal est sans ambigüité sur le sens de l'avis de la commission ;
10. Considérant, en quatrième lieu, que Mme E...ne saurait utilement invoquer les dispositions du décret du 1er juillet 2010 visé ci-dessus pour contester la décision du 4 juillet 2011 en ce qu'elle a pour effet de la priver de l'indemnité de direction à compter du 1er septembre 2006 et jusqu'à la fin de son congé pour maternité, le 25 octobre 2006 ;
11. Considérant, en cinquième lieu, que le jugement du 20 décembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Melun a annulé la décision de l'OFPRA du 31 août 2006 en raison de l'absence de consultation de la commission administrative paritaire et a enjoint à l'OFPRA de réexaminer sa situation n'impliquait pas qu'elle soit réaffectée dans ses anciennes fonctions de chef de bureau ; que Mme E...n'est donc pas fondée à invoquer l'autorité de chose jugée qui s'attache à ce jugement ;
12. Considérant, en sixième lieu, que, compte tenu de l'annulation par le jugement du Tribunal administratif de Melun du 20 décembre 2010, de la décision de l'OFPRA du 31 août 2006, l'affectant en qualité d'officier de protection instructeur au sein de la division Asie, Mme E...n'est pas fondée à soutenir que la décision du 4 juillet 2011 serait entachée de rétroactivité illégale ;
13. Considérant enfin que si le poste d'officier de protection instructeur au sein de la division Asie où elle a été affectée, ne comporte pas de fonctions d'encadrement contrairement au poste de chef du bureau du maintien de la protection qu'elle occupait avant d'être placée en congé de maternité, elle pouvait cependant à son retour, être affectée à ce poste dès lors que, compte tenu de ce qui a été dit au point 5, aucun poste de chef de bureau n'était disponible et qu'il correspond à son grade ;
14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'OFPRA est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a annulé sa décision du 4 juillet 2011 lui a enjoint de réaffecter Mme E...dans un emploi équivalent à celui occupé avant son congé de maternité et l'a condamné à indemniser les préjudices subis du fait de cette décision ;
Sur l'appel incident de MmeE... :
15. Considérant que l'appel incident de Mme E...ne peut, compte tenu de ce qui a été dit ci-dessus, qu'être rejeté ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative :
16. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'OFPRA, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que Mme E...demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme E...la somme que l'OFPRA demande sur le fondement des mêmes dispositions ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n°s 1106564 et 1109197 du Tribunal administratif de Melun du 16 juillet 2013 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme E...devant le Tribunal administratif de Melun et ses conclusions présentées devant la Cour sont rejetées.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de l'OFPRA est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et à Mme A...E....
Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 15 novembre 2016, à laquelle siégeaient :
- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,
- M. Niollet, président-assesseur,
- Mme Petit, premier conseiller.
Lu en audience publique le 29 novembre 2016.
Le rapporteur,
J-C. NIOLLETLe président,
O. FUCHS TAUGOURDEAU
Le greffier,
A-L. CHICHKOVSKY-PASSUELLO
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16PA02989