Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Showband a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er octobre 2008 au 30 septembre 2011 et des intérêts de retard y afférents.
Par un jugement n° 1410821 du 3 novembre 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 4 janvier 2016, la société Showband, représentée par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler partiellement le jugement n° 1410821 du 3 novembre 2015 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) de prononcer la réduction des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er octobre 2008 au 30 septembre 2011 et des intérêts de retard y afférents ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La société Showband soutient que :
- l'avis de mise en recouvrement n'a pas été régulièrement notifié à son mandataire ;
- les prestations en litige ont été réalisées hors de France et relèvent ainsi du régime visé au a) du 5° de l'article 259 A du code général des impôts.
Par un mémoire en défense enregistré le 28 juin 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Le ministre soutient que les moyens invoqués par la société Showband ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Platillero ;
- et les conclusions de M. Lemaire, rapporteur public.
1. Considérant que la société Showband, qui exerce l'activité d'organisation d'événements dans le secteur des arts du spectacle vivant, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité, à l'issue de laquelle une proposition de rectification du 7 septembre 2012 lui a été adressée ; qu'au terme de la procédure, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée ont été mis à sa charge au titre de la période du 1er octobre 2008 au 30 septembre 2011, assortis d'intérêts de retard ; qu'à la suite de l'admission partielle de sa réclamation préalable, elle a demandé au Tribunal administratif de Paris la décharge de ces rappels de taxe sur la valeur ajoutée ; que, par un jugement du 3 novembre 2015, le tribunal a rejeté sa demande ; que la société Showband demande l'annulation partielle de ce jugement et la réduction desdits rappels de taxe sur la valeur ajoutée ;
Sur la régularité de la notification de l'avis de mise en recouvrement :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 256 du livre des procédures fiscales : " Un avis de mise en recouvrement est adressé par le comptable public compétent à tout redevable des sommes, droits, taxes et redevances de toute nature dont le recouvrement lui incombe lorsque le paiement n'a pas été effectué à la date d'exigibilité (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 256-3 du même livre : " L'avis de mise en recouvrement est rédigé en double exemplaire : a) Le premier, dit "original", est déposé au service compétent de la direction générale des finances publiques ou à la recette des douanes et droits indirects chargé du recouvrement ; b) Le second, dit "ampliation", est destiné à être notifié au redevable ou à son fondé de pouvoir " ; qu'aux termes de l'article R. 256-6 dudit livre : " La notification de l'avis de mise en recouvrement comporte l'envoi au redevable, soit au lieu de son domicile, de sa résidence ou de son siège, soit à l'adresse qu'il a lui-même fait connaître au service compétent de la direction générale des finances publiques ou au service des douanes et droits indirects compétent, de "l' ampliation " prévue à l'article R. 256-3 (...) " ;
3. Considérant que lorsque le mandat donné à un conseil ou à tout autre mandataire par un contribuable pour l'assister dans ses relations avec l'administration ne contient aucune mention expresse habilitant le mandataire à recevoir l'ensemble des actes de la procédure d'imposition, ce mandat n'emporte pas élection de domicile auprès de ce mandataire ; qu'en l'espèce, le gérant de la société Showband a donné un mandat, communiqué à l'administration fiscale, le 6 novembre 2012 à Me A...pour " représenter la société Showband, donner toute pièce et communiquer toutes informations, recevoir exclusivement toute correspondance, lettre, réponse ou email, de la part de l'administration, ainsi que tout échange avec l'administration, présenter toute réclamation, demande, instance, action, gracieuse ou contentieuse (...) dans le cadre ou en relation avec la vérification de comptabilité (...) ayant donné lieu à une proposition de rectification du 7 septembre 2012 (...) de l'établissement et du recouvrement des impositions visées dans cette proposition de rectification et (...) plus généralement dans le cadre de toute demande ou procédure s'y rattachant ou qui en serait la suite " ; qu'ainsi, ce mandat ne comporte aucune mention expresse de la société Showband autorisant son conseil à recevoir l'avis de mise en recouvrement ; que le service n'a dès lors pas commis d'irrégularité de procédure en notifiant l'avis de mise en recouvrement du 23 septembre 2013 à la société Showband qui, au demeurant, ne conteste pas l'avoir reçu ; que le moyen tiré de l'irrégularité de la notification de l'avis de mise en recouvrement doit, par suite, être écarté ;
Sur le bien-fondé des impositions :
4. Considérant qu'aux termes de l'article 259 du code général des impôts : " Le lieu des prestations de services est situé en France : 1° Lorsque le preneur est un assujetti agissant en tant que tel et qu'il a en France : a) Le siège de son activité économique, sauf lorsqu'il dispose d'un établissement stable non situé en France auquel les services sont fournis ; b) Ou un établissement stable auquel les services sont fournis ; c) Ou, à défaut du a ou du b, son domicile ou sa résidence habituelle (...) " ; qu'aux termes du même article, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 : " Le lieu des prestations de services est réputé se situer en France lorsque le prestataire a en France le siège de son activité ou un établissement stable à partir duquel le service est rendu ou, à défaut, son domicile ou sa résidence habituelle " ; qu'aux termes de l'article 259 A dudit code, dans sa rédaction antérieure à la loi du 30 décembre 2009 : " Par dérogation aux dispositions de l'article 259, le lieu des prestations suivantes est réputé se situer en France : (...) 4° Les prestations ci-après lorsqu'elles sont matériellement exécutées en France : a. prestations culturelles, artistiques, sportives, scientifiques, éducatives, récréatives et prestations accessoires ainsi que leur organisation (...) " ; qu'aux termes du même article, dans sa rédaction issue de la loi du 30 décembre 2009 et applicable au litige : " Par dérogation à l'article 259, est situé en France le lieu des prestations de services suivantes : (...) 5° Lorsqu'elles sont matériellement exécutées ou exercées en France : a) Les prestations de services ayant pour objet des activités culturelles, artistiques, sportives, scientifiques, éducatives, de divertissement ou similaires, telles que les foires et les expositions, y compris les prestations de services des organisateurs de telles activités, ainsi que les prestations de services accessoires à ces activités (...) " ;
5. Considérant que le vérificateur a constaté que la société Showband avait comptabilisé dans un compte " prestations services UE / hors UE " des factures qui n'avaient pas été soumises à la taxe sur la valeur ajoutée ; que, faisant application des dispositions de l'article 259 du code général des impôts, il a estimé que ces factures incluaient la taxe sur la valeur ajoutée, exigible en France, compte tenu du siège de l'activité puis du lieu de l'activité économique selon que le fait générateur était antérieur ou postérieur au 1er janvier 2010 ; qu'au stade de la réponse aux observations du contribuable, le service a admis que l'activité de la société Showband relevait de prestations culturelles et artistiques pour l'application des dispositions précitées de l'article 259 A du code général des impôts et maintenu la taxation, en l'absence d'éléments permettant d'établir que le lieu d'exécution matérielle des prestations était situé hors de France ; que la société Showband conteste la taxe sur la valeur ajoutée ainsi mise à sa charge, en ce qui concerne sept factures, au motif que les prestations ont été matériellement réalisées hors de France ; qu'il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle, d'apprécier si la situation du contribuable entre dans le champ de l'assujettissement à l'impôt ou, le cas échéant, s'il remplit les conditions légales d'une exonération ;
6. Considérant que la facture du 23 mai 2009 établie au nom du preneur Ramy Baron pour des prestations de location de mobilier de décoration ne mentionne pas le lieu d'exécution matérielle de la prestation ; que si la société Showband soutient que cette facture concerne des prestations réalisées en Belgique, elle n'apporte aucun élément probant à l'appui de ses allégations, qu'elle seule est en mesure de produire, en se prévalant de simples échanges de messages électroniques qui se bornent à mentionner une adresse du preneur en Belgique, sans même d'ailleurs identifier l'événement au titre duquel les prestations ont été facturées ; que la facture du 16 mai 2009 établie au nom de la société SPRL Ritournelle pour des prestations de location de mobilier de décoration ne mentionne pas plus le lieu d'exécution matérielle de la prestation ; que le message électronique produit par la société Showband ne contient aucun élément probant qui permettrait de le rattacher à la prestation facturée, la requérante se bornant à affirmer que tel est le cas et que la prestation aurait été réalisée en Belgique et qu'aucune autre prestation n'aurait été réalisée à la date du 16 mai 2009, sans fournir les éléments de preuve du lieu d'exécution matérielle de la prestation, qu'elle seule peut apporter ; que la facture du 10 novembre 2008 établie au nom de la société Tony Page et la facture du 6 septembre 2010 établie au nom de " Maman René " pour des prestations de location de matériels divers ne mentionnent pas le lieu d'exécution matérielle de la prestation ; qu'en se bornant à produire un message électronique du 4 avril 2013 et une attestation du 23 octobre 2013 de la société Tony Page, établis plusieurs années après la date du fait générateur de la taxe sur la valeur ajoutée, la société Showband n'apporte aucun élément probant relatif au lieu d'exécution des prestations, les événements au titre desquels ces prestations ont été facturées n'étant même pas identifiés ; que la facture du 25 juin 2010 établie au nom de la société Tony Page pour des prestations de mise à disposition d'un artiste et de transport ne mentionne pas plus le lieu d'exécution matérielle de la prestation ; qu'en se bornant à produire les documents fournis par la société Tony Page en 2013 et des échanges de messages électroniques avec un représentant de cette société qui n'identifient pas l'événement au titre duquel les prestations ont été facturées, la société Showband n'apporte pas les éléments de preuve qu'elle seule peut apporter en ce qui concerne le lieu d'exécution matérielle de cette prestation ; que la facture du 2 mars 2010 établie au nom de la société Tony Page pour des prestations de location de matériel et la facture du 18 septembre 2010 établie au nom de la même société pour des prestations de location et d'installation de matériels d'éclairage et de sonorisation mentionnent la tenue d'événements à Londres et sont appuyées d'un échange de messages électroniques en ce qui concerne la première facture et des attestations précitées de la société Tony Page en ce qui concerne ces deux factures ; que, toutefois, le ministre conteste expressément les mentions relatives au lieu d'exécution des prestations, en faisant valoir qu'aucun élément matériel n'a été produit pour établir ce lieu ; qu'en effet, la société Showband, en réponse à la contestation du ministre, n'a pas produit de documents, tels que des justificatifs de transport, de stationnement, d'hébergement, de restauration ou de dépenses sur place, qu'elle seule est en mesure de produire ; qu'il ne résulte ainsi pas de l'instruction que le lieu d'exécution matérielle des prestations ainsi facturées aurait été situé hors de France ;
7. Considérant que, compte tenu des éléments qui précèdent, il ne résulte pas de l'instruction que les prestations en litige auraient été matériellement exécutées hors de France, pour l'application des dispositions précitées de l'article 259 A du code général des impôts ; que c'est, dès lors, à bon droit que l'administration a estimé que le lieu de ces prestations était réputé se situer en France, en application des dispositions précitées de l'article 259 du même code, et a, par suite, procédé au rappel de taxe sur la valeur ajoutée correspondant ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Showband n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté l'ensemble des conclusions de sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;
10. Considérant que les dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la société Showband demande au titre des frais qu'elle a exposés ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société Showband est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Showband et au ministre de l'économie et des finances.
Copie en sera adressée au directeur de contrôle fiscal Ile-de-France (Division juridique Est).
Délibéré après l'audience du 9 mars 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Formery, président de chambre,
- Mme Coiffet, président assesseur,
- M. Platillero, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 23 mars 2017.
Le rapporteur,
F. PLATILLEROLe président,
S.-L. FORMERY
Le greffier,
N. ADOUANE
La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 16PA00031