Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 4 avril 2016 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé son pays de destination.
Par un jugement n° 1607261/1-3 du 21 septembre 2016, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 20 octobre 2016, Mme B..., représentée par
Me Sando, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1607261/1-3 du 21 septembre 2016 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 4 avril 2016 du préfet de police ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé au regard des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ;
- la décision portant refus de titre de séjour a été prise au terme d'une procédure irrégulière dès lors qu'elle n'a pas été précédée d'une saisine de la commission du titre de séjour ;
- le préfet de police a commis une erreur manifeste en retenant la période allant du mois d'août 2005 au mois d'août 2015 comme période de référence pour apprécier le caractère habituel de sa résidence en France ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions du 4° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense, enregistré le 29 mars 2017, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- Mme B...ne justifie pas résider habituellement en France depuis au moins dix ans ;
- il n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, ni commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences du refus de séjour sur la situation personnelle de MmeB... ;
- l'article L. 511-4 4° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne s'oppose pas à ce que Mme B...fasse l'objet d'une mesure d'éloignement ;
- s'agissant des autres moyens soulevés par la requérante en première instance, ils doivent être rejetés par adoption des motifs retenus par le Tribunal.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Dalle,
- et les observations de Me Sando, avocat de Mme B....
1. Considérant que MmeB..., ressortissante camerounaise née le 13 décembre 1957, a sollicité le 24 août 2015 son admission au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté en date du 4 avril 2016, le préfet de police a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que Mme B...relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. " ;
3. Considérant que Mme B...soutient être entrée en France en 1981 et y avoir résidé habituellement depuis lors, soit depuis plus de dix ans à la date de la décision attaquée ; que pour justifier remplir la condition prévue par les dispositions précitées de l'article L. 313-14 à laquelle est subordonnée l'obligation pour l'autorité administrative de consulter la commission du titre de séjour, il appartient à l'intéressée d'établir le caractère habituel de sa résidence sur le territoire national au cours des dix années précédant la date du refus de séjour litigieux, soit, à partir du 4 avril 2006 ; qu'elle doit être regardée en l'espèce comme apportant cette preuve dès lors qu'elle a versé au dossier des pièces telles que des ordonnances médicales, des relevés d'analyse médicales, des récépissés d'envois de fonds de la France vers le Cameroun, des relevés bancaires faisant apparaître des remises de chèques et des retraits, des factures d'achat, des correspondances diverses envoyées à ses deux adresses successives au cours de la période en cause, en nombre suffisant et d'un caractère probant, pour établir qu'elle résidait habituellement en France au cours de cette période ; que, dès lors et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête,
Mme B...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
4. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre une somme de 1 500 euros à la charge de l'Etat, en remboursement des frais exposés par Mme B... ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1607261/1-3 du 21 septembre 2016 du Tribunal administratif de Paris et l'arrêté du 4 avril 2016 du préfet de police sont annulés.
Article 2 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à Mme B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 11 mai 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Jardin, président de chambre,
- M. Dalle, président assesseur,
- Mme Notarianni, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 1er juin 2017.
Le rapporteur,
D. DALLELe président,
C. JARDIN
Le greffier,
C. MONGIS
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16PA03101