Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B...D...a demandé au Tribunal administratif de Paris :
1°) d'annuler la décision implicite de rejet de sa demande du 26 juin 2014 de régularisation de son bail ;
2°) d'enjoindre à la ville de Paris de régulariser sa situation locative, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir.
Par un jugement n° 1424672/7-1 du 7 avril 2016, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 4 mai 2016 et un mémoire en réplique, enregistré le 2 juin 2016, MmeD..., représentée par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 7 avril 2016 ;
2°) d'annuler la décision implicite de rejet mentionnée ci-dessus ;
3°) de dire que le site des Frigos appartient au domaine privé de la ville de Paris, et de renvoyer l'affaire devant le Tribunal de grande instance de Paris afin qu'il soit statué sur sa demande tendant à obtenir la régularisation de sa situation locative par la conclusion d'un bail écrit de droit privé ;
4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre à la ville de Paris de régulariser sa situation locative, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir ;
5°) de mettre à la charge de la ville de Paris le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'immeuble des Frigos appartient au domaine privé de la ville de Paris ;
- la convention d'occupation qu'elle a conclue avec la SNCF est devenue obsolète car le bailleur n'est plus la SNCF et car le bien ne fait plus partie du domaine public ; elle doit être remplacée par un bail écrit de droit privé ;
- l'affaire doit être renvoyée devant le Tribunal de grande instance de Paris.
Par un mémoire en défense, enregistré le 22 mai 2017, la ville de Paris, représentée par MeA..., demande à la Cour :
1°) de rejeter la requête ;
2°) de mettre à la charge de Mme D...le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les conclusions de Mme D...tendant au renvoi devant le tribunal de grande instance sont irrecevables ;
- les moyens soulevés par Mme D...ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 6 juin 2017, la clôture de l'instruction a été fixée au 23 juin 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général de la propriété des personnes publiques ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Niollet,
- les conclusions de M. Baffray, rapporteur public,
- et les observations de MeA..., pour la ville de Paris.
1. Considérant que, par acte de vente du 5 août 2003, le conseil de Paris a procédé à l'acquisition d'un ensemble immobilier situé 19 rue des Frigos, anciennement 91 quai de la Gare, appartenant au domaine privé de Réseau ferré de France et abritant des ateliers d'artistes ; que, par délibération du 17 décembre 2008, le conseil de Paris a classé cet ensemble immobilier dans le domaine public, compte tenu, selon l'exposé des motifs de la délibération, de son " affectation au développement des activités culturelles et artistiques " et des " aménagements adaptés " dont il avait fait l'objet ; que cette délibération a été annulée par un arrêt de la Cour du 10 décembre 2013, confirmé par un arrêt du Conseil d'Etat du 21 janvier 2016, en raison d'une irrégularité dans la consultation du conseil d'arrondissement ; que Mme B...D..., titulaire d'une autorisation d'occupation d'un local situé dans cet ensemble immobilier depuis le 1er janvier 1991, a demandé à la ville de Paris de " régulariser sa situation locative en lui accordant un bail de droit privé " ; qu'elle fait appel du jugement du 7 avril 2016, par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de refus, née du silence conservé par la ville de Paris sur sa demande ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2111-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Sous réserve de dispositions législatives spéciales, le domaine public d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1 est constitué des biens lui appartenant qui sont soit affectés à l'usage direct du public, soit affectés à un service public pourvu qu'en ce cas ils fassent l'objet d'un aménagement indispensable à l'exécution des missions de ce service public " ; qu'aux termes de l'article L. 2111-3 du même code : " S'il n'en est disposé autrement par la loi, tout acte de classement ou d'incorporation d'un bien dans le domaine public n'a d'autre effet que de constater l'appartenance de ce bien au domaine public (...) " ;
3. Considérant qu'il est constant que les locaux en cause, à l'origine à usage d'entrepôts frigorifiques et aujourdui à usage d'ateliers, présentent des caractéristiques, des dimensions et des volumes adaptés à l'exercice d'activités artistiques et culturelles, et ont fait l'objet d'aménagements indispensables à cet effet ; que l'accueil de ces activités doit être regardé comme relevant d'une mission de service public ; que Mme D...ne saurait utilement se prévaloir de ce que les aménagements dont les locaux ont fait l'objet résulteraient de travaux réalisés par les anciens occupants et non par la ville de Paris, de ce qu'une délibération du conseil de Paris des 26, 27 et 28 septembre 2016, postérieure à la décision attaquée, a approuvé un protocole d'accord avec le SEMAEST sur la conclusion, après déclassement du domaine public, d'un bail emphytéotique, ni faire état de la présence dans certains de ces locaux, d'activités étrangères à l'art ou à la culture, pour en déduire que les locaux en cause appartiennent au domaine privé de la ville ; que l'annulation par l'arrêt de la Cour du 10 décembre 2013 mentionné ci-dessus, de la délibération du conseil de Paris du 17 décembre 2008, classant l'ensemble immobilier dans le domaine public de la ville de Paris, en raison d'une irrégularité de procédure, ne saurait davantage avoir pour effet, contrairement à ce que soutient MmeD..., de faire relever cet immeuble du domaine privé de la ville, l'absence de classement formel étant en l'espèce sans incidence ; que dans ces conditions, l'immeuble en cause dans le présent litige remplissant les critères mentionnés par les dispositions précitées, appartient au domaine public de la ville de Paris ; que Mme D... n'est donc pas fondée à soutenir que ces locaux relèveraient du domaine privé de la ville de Paris, ni, en tout état de cause, à soutenir que la ville devait conclure avec elle un bail de droit privé ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par la ville de Paris, que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande, ni en tout état de cause à demander le renvoi de l'affaire devant le Tribunal de grande instance Paris ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
5. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la ville de Paris qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que Mme D...demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche de mettre à la charge de Mme D...une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la ville de Paris, sur le fondement des mêmes dispositions ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.
Article 2 : Mme D...versera à la ville de Paris une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...D...et à la ville de Paris.
Délibéré après l'audience du 12 septembre 2017, à laquelle siégeaient :
- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,
- M. Niollet, président-assesseur,
- M. Pagès, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 26 septembre 2017.
Le rapporteur,
J-C. NIOLLETLe président,
O. FUCHS TAUGOURDEAU
Le greffier,
T. ROBERT
La République mande et ordonne au préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16PA01540