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29/12/2017 | FRANCE | N°16PA02247

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 29 décembre 2017, 16PA02247


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Hôtel de Paris a demandé au Tribunal administratif de Paris la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période comprise entre le 1er janvier 2010 et le 31 décembre 2011, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos en 2010 et 2011, des pénalités correspondantes et de l'amende mise à sa charge sur le fondement de l'article 1759 du code général des impôts au titre de ces deux a

nnées.

Par un jugement n° 1502086/2-3 du 9 juin 2016, le Tribunal administratif ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Hôtel de Paris a demandé au Tribunal administratif de Paris la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période comprise entre le 1er janvier 2010 et le 31 décembre 2011, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos en 2010 et 2011, des pénalités correspondantes et de l'amende mise à sa charge sur le fondement de l'article 1759 du code général des impôts au titre de ces deux années.

Par un jugement n° 1502086/2-3 du 9 juin 2016, le Tribunal administratif de Paris a prononcé la décharge des amendes mises à la charge de la société requérante sur le fondement de l'article 1759 du code général des impôts au titre des deux années en litige et rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 12 juillet 2016, le 9 février 2017, le 3 mars 2017, le 10 mars 2017 et le 21 avril 2017, la SARL Hôtel de Paris, représentée par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler " en tous ses chefs lui faisant grief " le jugement n° 1502086/2-3 du 9 juin 2016 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge et le remboursement de ces impositions et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la procédure d'imposition est irrégulière du fait de l'emport irrégulier du journal des ventes et du fait de son absence de restitution avant la clôture de la vérification de comptabilité ; la société ne disposait pas de fichier informatique et a remis les originaux en sa possession sous format papier ; le service ne justifie pas que les documents emportés sous forme papier étaient des copies ;

- elle a été privée des garanties prévues au II de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales dès lors qu'elle n'a pas reçu une information suffisante sur les investigations envisagées pour opter de façon éclairée entre les différentes options de traitement informatisé offertes par ce texte ;

- le service n'était pas en droit de rejeter sa comptabilité dès lors que les rehaussements ont été fondés sur le seul examen des pièces comptables, que le service a donc estimé suffisamment probantes ;

- en ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée regardée comme déduite par anticipation, elle établit leur caractère infondé par la production des factures et justificatifs de paiement correspondants.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 23 janvier 2017, 28 février 2017, 9 mars 2017 et le 4 avril 2017, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- le litige se limite aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée et aux compléments d'impôts sur les sociétés dès lors que l'administration a, en exécution du jugement attaqué, déchargé les amendes pour les montants de 56 744 euros au titre de 2010 et 253 085 euros au titre de 2011 ;

- le moyen pris de la méconnaissance des garanties prévues à l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales est inopérant dès lors que la requérante a remis sa comptabilité au service sous forme de documents papier et format PDF qui n'ont fait l'objet d'aucun traitement informatique ;

- les autres moyens de la société requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Notarianni,

- et les conclusions de M. Platillero, rapporteur public.

1. Considérant que la SARL Hôtel de Paris, qui exploite deux hôtels situés à Paris (9ème), a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période allant du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2011, à l'issue de laquelle l'administration fiscale, après avoir écarté sa comptabilité comme irrégulière et non probante, l'a assujettie selon la procédure de rectification contradictoire à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période comprise entre le 1er janvier 2010 et le 31 décembre 2011 et à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2010, et, selon la procédure de taxation d'office prévue à l'article L. 66-2 du livre des procédures fiscales, à des rehaussements en matière d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2011 ; que ces compléments d'impôts ont été assortis au titre des deux années en litige de l'amende prévue par l'article 1759 du code général des impôts ; que, saisie par la SARL Hôtel de Paris d'une demande de décharge de ces compléments d'imposition et pénalités, le Tribunal administratif de Paris a, par un jugement du 9 juin 2016, prononcé la décharge des amendes prévues à l'article 1759 du code général des impôts et rejeté le surplus de sa demande ; que la SARL Hôtel de Paris, qui relève appel de ce jugement " en tous les chefs lui faisant grief ", doit être regardée comme relevant appel de ce jugement en tant seulement que les premiers juges ont rejeté le surplus de ses conclusions à fin de décharge ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Considérant que les moyens par lesquels la société requérante conteste la régularité de la vérification de comptabilité sont inopérants en ce qui concerne les rehaussements en matière d'impôt sur les sociétés notifiés au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2011, dès lors qu'ils ont fait l'objet d'une taxation d'office sur le fondement des dispositions du 2° de l'article L. 66-2 du livre des procédures fiscales ;

3. Considérant, en premier lieu, que les impressions sur papier de documents numériques n'ont pas la nature de documents comptables originaux ; que, si la société requérante soutient que le vérificateur aurait irrégulièrement emporté sous forme papier son journal des ventes, l'emport de documents comptables originaux est expressément contesté par le service qui fait valoir que la comptabilité de la société requérante était informatisée et que cette société ne lui a remis que des copies sous format papier ou sous format de fichiers " PDF " de cette comptabilité ; qu'il résulte des termes mêmes des lettres formulaires des 3 juin et 2 juillet 2013 dont se prévaut la société requérante, par lesquelles l'administration l'a invitée en application des dispositions précitées de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales à lui indiquer l'option de traitement qu'elle retenait pour le contrôle de sa comptabilité, que ces courriers tendaient expressément à la remise de " copie " des fichiers comptables ; que, par ailleurs, c'est sous l'intitulé " mise à disposition de l'administration de copies de fichiers informatiques - inventaire des copies mises à disposition ", par un document cosigné le 4 juillet 2017 par le vérificateur et le mandataire de la société requérante, que la société requérante a remis au vérificateur le " journal des ventes [de l']hôtel Le Faubourg ", dont il est précisé par ce document qu'il a été remis sous " format papier " ; que, dès lors que ce document ne comporte aucune mention d'un caractère original ou unique du document papier remis, il doit être regardé comme correspondant à la remise au vérificateur d'une simple copie sur papier d'un document numérique ; qu'il s'ensuit que le moyen pris d'un emport irrégulier du journal des ventes doit être écarté comme manquant en fait ;

4. Considérant, par ailleurs, qu'il résulte de ce qui précède qu'en l'absence d'emport de documents comptables originaux, les moyens pris de ce que l'imprimé préétabli utilisé par l'administration pour accuser réception du document qui lui a été remis sous format papier était relatif à la remise de copies de fichiers informatiques dans le cadre de la procédure spécifique de l'article L. 47 A-II du livre des procédures fiscales et que ce document n'a été restitué qu'après la clôture des opérations de contrôle doivent être écartés comme inopérants ;

5. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable : " (...) II -En présence d'une comptabilité tenue au moyen de systèmes informatisés et lorsqu'ils envisagent des traitements informatiques, les agents de l'administration fiscale indiquent par écrit au contribuable la nature des investigations souhaitées. Le contribuable formalise par écrit son choix parmi l'une des options suivantes : a) Les agents de l'administration peuvent effectuer la vérification sur le matériel utilisé par le contribuable ; b) Celui-ci peut effectuer lui-même tout ou partie des traitements informatiques nécessaires à la vérification (...) c) Le contribuable peut également demander que le contrôle ne soit pas effectué sur le matériel de l'entreprise. Il met alors à la disposition de l'administration les copies des documents, données et traitements soumis à contrôle. Ces copies sont produites sur tous supports informatiques, répondant à des normes fixées par arrêté du ministre chargé du budget (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que le vérificateur qui envisage un traitement informatique sur une comptabilité tenue au moyen de systèmes informatisés doit indiquer au contribuable, au plus tard au moment où il décide de procéder au traitement, par écrit et de manière suffisamment précise, la nature des traitements informatiques qu'il souhaite effectuer, eu égard aux investigations envisagées, afin de permettre au contribuable de choisir en toute connaissance de cause entre les trois options offertes par ces dispositions ;

6. Considérant que les garanties prévues à l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales sont susceptibles de s'appliquer en cas de remise par le contribuable de fichiers des écritures comptables sous format PDF, dès lors que des fichiers remis sous ce format peuvent être convertis en fichiers de formats susceptibles de faire l'objet de traitements informatiques tels que des tris, classements et calculs ; qu'il résulte par ailleurs de l'instruction que le vérificateur a accepté la remise des copies de fichiers informatiques sous ce format ; qu'il résulte toutefois de l'instruction, et notamment des termes non utilement contredits de la proposition de rectification relatifs à la motivation des rehaussements litigieux et de la nature des rehaussements, que le vérificateur s'est borné dans les faits à consulter par simple lecture les écritures comptables qui lui avaient été remises sous forme de documents PDF sans procéder à des traitements informatiques au sens de ce texte ; que, dans ces conditions, la société requérante ne soutient pas utilement qu'elle n'aurait pas été mise en mesure de faire un choix suffisamment éclairé entre les différentes options de traitement informatisé offertes par l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales ;

7. Considérant que son moyen est en tout état de cause infondé dès lors que le vérificateur l'avait suffisamment informée sur la nature des investigations souhaitées pour lui permettre d'exercer un choix éclairé entre les différentes options de traitements informatiques prévues par ce texte en lui indiquant par la lettre du 3 juin 2013 qu'il souhaitait " pouvoir mettre en oeuvre conformément aux dispositions de l'article L. 47 A-II du LPF, le traitement visant à vérifier la cohérence entre le chiffre d'affaires réalisé et les prestations effectuées sur l'ensemble de vos établissements " et par la lettre du 2 juillet 2013 qu'il souhaitait que sa comptabilité fasse l'objet d'un " traitement visant à vérifier le montant des prestations encaissées pendant la période vérifiée (...) sur l'ensemble de vos établissements " ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne le rejet de la comptabilité :

8. Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction, et qu'il n'est au demeurant pas contesté, que, lors des opérations de contrôle, le vérificateur a relevé que les recettes de la SARL Hôtel de Paris étaient comptabilisées de manière globale à la fin de chaque mois ; que la société requérante n'a pas été en mesure de justifier du détail de ses recettes journalières au titre des années 2010 et 2011 ; qu'en outre, le service a relevé que le montant des recettes comptabilisées correspondait au montant des encaissements et non pas au montant des prestations effectuées, qu'aucun numéro de pièce justificative de recettes n'apparaissait dans le grand livre, que les paiements en espèce n'apparaissaient pas dans la comptabilité alors que les pièces justificatives de recettes fournies faisaient apparaître de tels paiements, enfin, que des produits financiers n'avaient pas entièrement été comptabilisés ; que, dans ces conditions, l'administration fiscale était en tout état de cause en droit d'écarter la comptabilité de l'entreprise comme irrégulière et non probante ; qu'il est sans incidence à cet égard que le vérificateur a été en mesure de procéder au contrôle de la société requérante sans procéder à la reconstitution de son chiffre d'affaires de la requérante ;

9. Considérant, d'autre part, que la circonstance que la comptabilité d'une société soit regardée comme non probante ne fait pas obstacle à ce que l'administration utilise des éléments tirés de cette comptabilité pour fonder des rehaussements ;

En ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée fondés sur la déduction par anticipation de la taxe afférente à des factures non réglées :

10. Considérant que la société Hôtel de Paris conteste les rappels de taxe sur la valeur ajoutée fondés sur la déduction par anticipation de la taxe sur la valeur ajoutée qu'elle avait comptabilisée au 31 décembre 2011 et qui a été regardée par le service, après rapprochement avec les soldes créditeurs des comptes de fournisseurs, comme afférente à des factures de fournisseurs non réglées ; que la requérante, seule en mesure de justifier du caractère déductible au titre de l'exercice clos au 31 décembre 2011 de la taxe en litige, n'apporte pas la preuve à sa charge par la production, d'une part, de justificatifs de paiements datant de 2011 dont elle ne justifie pas qu'ils correspondent au paiement des factures mentionnant la taxe comptabilisée au 31 décembre 2011, et des factures et de relevés bancaires datant d'exercices antérieurs et particulièrement des années 1999 à 2004 sans justifier en tout état de cause que la taxe sur la valeur ajoutée afférente à ces factures n'avait pas été déduite au titre de périodes antérieures à 2011 ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Hôtel de Paris n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris, après avoir prononcé la décharge des amendes prévues à l'article 1759 du code général des impôts, a rejeté le surplus des conclusions de sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la société Hôtel de Paris est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Hôtel de Paris et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Ile-de-France (division du contentieux est).

Délibéré après l'audience du 14 décembre 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- M. Dalle, président assesseur,

- Mme Notarianni, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 29 décembre 2017.

Le rapporteur,

L. NOTARIANNILe président,

C. JARDIN

Le greffier,

C. BUOT

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16PA02247


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA02247
Date de la décision : 29/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-03-01-02-03 Contributions et taxes. Généralités. Règles générales d'établissement de l'impôt. Contrôle fiscal. Vérification de comptabilité. Garanties accordées au contribuable.


Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: Mme Laurence NOTARIANNI
Rapporteur public ?: M. PLATILLERO
Avocat(s) : SELARL CHANDELLIER-CORBEL

Origine de la décision
Date de l'import : 09/01/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-12-29;16pa02247 ?
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