Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...D...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 23 octobre 2015 par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a rejeté sa demande tendant à adjoindre à son nom celui de " A... " afin de se faire désormais appeler " A...-D... ".
Par un jugement n° 1519832 du 13 octobre 2016, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 12 décembre 2016, M. B...D..., représenté par Me E..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1519832 du 13 octobre 2016 du tribunal administratif de Paris ;
2°) de modifier son nom en " D...-A... " ;
3°) d'ordonner la mention de l'arrêt à intervenir en marge de son acte de naissance sur les registres de l'état civil de la mairie de Rennes et dans tous les actes subséquents.
Il soutient que :
- il justifie d'un motif affectif à porter le nom de son père, dont la paternité a été établie par un jugement du tribunal de grande instance de Rennes en date du 24 janvier 1991 et qui l'a élevé conjointement avec sa mère, ce qui fonde son intérêt légitime, au sens de l'article 61 du code civil ;
- il fait un usage constant, public et prolongé du nom de " A...-D... " ;
- il souhaite transmettre le nom de son père à ses enfants ;
- le nom de " A... " est menacé d'extinction car son père n'a que des soeurs.
La requête a été communiquée au garde des sceaux, ministre de la justice, qui n'a pas présenté d'observations en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Diémert,
- les conclusions de M. Romnicianu, rapporteur public,
- les observations de Me Elbaz-Drai, avocate de M.D....
1. Considérant que M. B...D..., né le 19 mai 1990 et dont la filiation paternelle a été établie par un jugement du tribunal de grande instance de Rennes du 24 janvier 1991, a sollicité du garde des sceaux, ministre de la justice, l'autorisation de substituer à son nom, qui est celui de sa mère, le nom composé de " A...-D... " ; que par une décision du 23 octobre 2015, le garde des sceaux, ministre de la justice, a rejeté sa demande au motif qu'il ne dispose pas d'un intérêt légitime au sens de l'article 61 du code civil l'autorisant à déroger au principe de l'immutabilité du nom ; que M. D...ayant demandé l'annulation de cette décision au tribunal administratif de Paris, ce dernier a, par un jugement du 13 octobre 2016 dont M. D... relève appel, rejeté cette demande ;
Sur la portée des conclusions de la requête d'appel :
2. Considérant que les conclusions de la requête qui tendent à ce que la Cour modifie le nom du requérant en " D...-A... " sont en principe irrecevables dès lors que le contentieux des décisions ministérielles rejetant une demande de changement de nom sur le fondement de l'article 61 du code civil relève, non du plein contentieux, mais du contentieux de l'excès de pouvoir ; que, toutefois, compte-tenu de la portée donnée au litige par le jugement attaqué du tribunal administratif de Paris en date du 13 octobre 2016, les conclusions de la requête peuvent être interprétées comme tendant, en réalité, à ce que la Cour annule la décision du 23 octobre 2015 par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a rejeté la demande de changement de nom de M. D...afin de se faire désormais appeler " A...-D... " ;
Sur la légalité de la décision portant refus de changement de nom :
3. Considérant qu'aux termes de l'article 61 du code civil : " Toute personne qui justifie d'un intérêt légitime peut demander à changer de nom. Le changement de nom peut avoir pour objet d'éviter l'extinction du nom porté par un ascendant ou un collatéral du demandeur jusqu'au quatrième degré. Le changement de nom est autorisé par décret " ;
4. Considérant, en premier lieu, que si des motifs d'ordre affectif peuvent, dans des circonstances exceptionnelles, caractériser l'intérêt légitime requis par l'article 61 du code civil pour déroger au principe de fixité du nom établi par la loi, le requérant, qui se borne à invoquer le besoin qui est le sien d'être socialement reconnu en portant le nom de son père et en le transmettant à ses enfants, ainsi que la sérénité qui en résultera pour lui ne justifie ainsi d'aucune circonstance exceptionnelle de nature à caractériser un intérêt légitime au sens des dispositions précitées de l'article 61 du code civil ;
5. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. D... ferait un usage prolongé, constant et public du nom de " A...-D... " ; que M. D... n'est pas fondé à soutenir que le garde des sceaux, ministre de la justice aurait entaché sur ce point la décision attaquée d'une erreur d'appréciation ;
6. Considérant, en troisième lieu, que si M. D...invoque le risque d'extinction du nom de son père, dès lors que la fratrie de ce dernier ne se compose, outre lui-même, que de trois soeurs, il n'apporte à la Cour aucun élément de nature à démontrer le risque d'extinction ainsi allégué, dès lors que les actes de naissance de membres de sa famille portant ce nom ne permettent pas à eux seuls de démontrer qu'aucune branche collatérale de la famille, issue du trisaïeul de son père, ne serait également susceptible de le porter ; que M. D... n'est donc pas fondé à soutenir que le garde des sceaux, ministre de la justice aurait fait une inexacte application du deuxième alinéa de l'article 61 du code civil en refusant de l'autoriser à adjoindre le nom de son père à celui de sa mère ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision litigieuse ; que sa requête ne peut donc qu'être rejetée, en ce comprises ses conclusions à fin d'injonction ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...D...et au garde des sceaux, ministre de la justice.
Délibéré après l'audience du 11 janvier 2018, à laquelle siégeaient :
- Mme Pellissier, présidente de chambre,
- M. Diémert, président-assesseur,
- M. Legeai, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 25 janvier 2018.
Le rapporteur,
S. DIÉMERTLa présidente,
S. PELLISSIERLe greffier,
M. C...
La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16PA03758