Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Créavicab a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler la décision du 5 février 2016 par laquelle le bureau du conseil d'administration de l'Office public de l'habitat de Maisons-Alfort a décidé d'exercer le droit de préemption urbain sur un ensemble immobilier 5-7 rue Charles Martigny à Maisons-Alfort, ainsi que la décision du 25 mai 2016 rejetant son recours gracieux.
Par une ordonnance n° 1607652 du 29 janvier 2018, la présidente de la 4ème chambre du tribunal administratif de Melun a donné acte de son désistement en application de l'article R. 612-5-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 28 mars 2018 et un mémoire en réplique enregistré le 9 octobre 2018, la société Créavicab, représentée par Me Manceau, demande à la cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 1607652 du 29 janvier 2018 de la présidente de la 4èmechambre du tribunal administratif de Melun ;
2°) à titre principal, de renvoyer l'affaire au tribunal administratif de Melun ;
3°) à titre subsidiaire, d'annuler la décision de préemption du 5 février 2016 ainsi que la décision du 25 mai 2016 rejetant son recours gracieux et d'enjoindre à l'OPH de Maisons-Alfort de justifier, dans le délai d'un mois sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, de la situation de l'ensemble immobilier et de lui proposer d'acquérir l'immeuble au prix fixé dans la décision de préemption, dans le même délai et sous la même astreinte ;
4°) de mettre à la charge de Maisons-Alfort Habitat une somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- en raison d'un dysfonctionnement de l'application Télérecours, son conseil n'a pas été en mesure de prendre connaissance de la demande de confirmation de la requête qui lui a été adressée ; ce n'est que postérieurement à l'envoi de l'ordonnance qu'il en a été avisé ; elle n'a jamais entendu se désister de son recours et le jugement de celui-ci doit être renvoyé au tribunal administratif ;
- sa demande était recevable ;
- la décision du 25 mai 2016 de rejet de son recours gracieux est signée par une personne incompétente ;
- la décision du 9 février 2016 par laquelle le président de Maisons-Alfort Habitat a notifié la décision de préemption est irrégulière puisque la délibération du bureau du 5 février a habilité le directeur général de l'office, et non son président, à prendre toutes mesures pour la préemption ; de plus, le président ne tire d'aucun texte, et notamment pas de l'article R. 421-17 du code de la construction et de l'habitation, le pouvoir de notifier une décision de préemption ; cette circonstance prive d'effet la décision de préemption qui n'a pas été régulièrement notifiée dans le délai de deux mois ;
- la décision du bureau du 5 février 2016 a été prise par un organe irrégulièrement composé, car trois des membres du bureau étaient représentés sans qu'il soit justifié de l'existence et de la régularité des pouvoirs dont ils disposaient ;
- le bureau n'avait pas compétence pour prendre la décision de préemption, faute de justification d'une délégation en application de l'article R. 421-16 du code de la construction et de l'habitation ;
- la délégation au bureau du 24 juin 2013 ne concerne que l'acquisition de logements ;
- la décision de préemption ne répond à aucun des objets visés par l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme ; il n'existait aucun projet précis et aucun financement n'est envisagé ; le plan d'urbanisme prévoit que le terrain est affecté à une activité industrielle ;
- la construction envisagée de 220 logements sociaux est en contradiction avec le programme local de l'habitat.
Par un mémoire en défense enregistré le 4 octobre 2018, l'Office public Maisons-Alfort Habitat, représentée par MeA..., demande :
1°) à titre principal, le rejet de la requête ;
2°) à titre subsidiaire, le renvoi de la requête au tribunal administratif de Melun ;
3°) que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la société Créavicab sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'ordonnance attaquée est régulière ;
- en cas d'annulation, le respect de la règle du double degré de juridiction rend opportun un renvoi devant le tribunal ;
- les moyens dirigés contre la décision du 5 février 2016 sont infondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- l'arrêté du 20 janvier 2017 relatif aux caractéristiques techniques de l'application permettant l'utilisation des téléprocédures devant le Conseil d'Etat, les cours administratives d'appel et les tribunaux administratifs ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Pellissier,
- les conclusions de M. Platillero, rapporteur public,
- les observations de Me Manceau, avocat de la société Créavicab, et de Me Roy, avocat de Maisons-Alfort Habitat.
Considérant ce qui suit :
1. L'article R. 612-5-1 du code de justice administrative dispose : " Lorsque l'état du dossier permet de s'interroger sur l'intérêt que la requête conserve pour son auteur, le président de la formation de jugement (...) peut inviter le requérant à confirmer expressément le maintien de ses conclusions. La demande qui lui est adressée mentionne que, à défaut de réception de cette confirmation à l'expiration du délai fixé, qui ne peut être inférieur à un mois, il sera réputé s'être désisté de l'ensemble de ses conclusions ".
2. Par lettre du 14 décembre 2017, la présidente de la quatrième chambre du tribunal administratif de Melun a demandé au conseil de la société Créavicab, par l'intermédiaire de l'application Télérecours, de confirmer dans le délai d'un mois le maintien de sa requête introductive d'instance enregistrée en septembre 2016. Ce courrier mentionnait les conséquences attachées, par application des dispositions de l'article R. 612-5-1 du code de justice administrative, à une absence de réponse dans le délai fixé. En l'absence de toute réponse de la société, la présidente de la quatrième chambre a, par ordonnance du 29 janvier 2018, pris acte du désistement de la société Créavicab. Celle-ci soutient en appel qu'elle n'a pas eu connaissance, préalablement à l'ordonnance, du courrier du 14 décembre 2017 et n'a jamais eu l'intention de se désister.
3. L'article R. 611-8-2 du code de justice administrative, dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce, dispose : " Toute juridiction peut adresser par le moyen de l'application informatique mentionnée à l'article R. 414-1, à une partie ou à un mandataire qui y est inscrit, toutes les communications et notifications prévues par le présent livre pour tout dossier. / Les parties ou leur mandataire sont réputés avoir reçu la communication ou la notification à la date de première consultation du document qui leur a été ainsi adressé, certifiée par l'accusé de réception délivré par l'application informatique, ou, à défaut de consultation dans un délai de huit jours à compter de la date de mise à disposition du document dans l'application, à l'issue de ce délai. Sauf demande contraire de leur part, les parties ou leur mandataire sont alertés de toute nouvelle communication ou notification par un message électronique envoyé à l'adresse choisie par eux (...) ".
4. Il ressort des pièces du dossier que le courrier contenant la demande de maintien de la requête a été mis à la disposition de l'avocat de la société Créavicab dans l'application informatique dénommée Télérecours le 14 décembre 2017. Ce courrier n'ayant pas été consulté dans le délai de huit jours expirant le 23 décembre 2017, la société Créavicab est dès lors, selon les dispositions précitées de l'article R. 611-8-2 du code de justice administrative, réputée l'avoir reçu à cette date. Si elle soutient qu'une erreur d'adresse de messagerie n'a pas permis qu'elle soit avertie de la mise à disposition de ce courrier, l'envoi d'un message électronique aux parties et à leurs mandataires n'est prévu par les dispositions précitées de l'article R. 611-8-2 du code de justice administrative, ainsi que par celles de l'article 5 de l'arrêté du 20 janvier 2017 relatif aux caractéristiques techniques de l'application Télérecours, qu'à titre d'information et reste sans incidence sur les conditions dans lesquelles les communications et notifications sont réputées reçues, conformément aux dispositions du même article.
5. Au surplus, pour invoquer un dysfonctionnement imputable à la juridiction, la société Créavicab se borne à produire un courriel du centre des services informatiques du Conseil d'Etat accusant réception du courriel du 31 janvier 2018 dans lequel le cabinet Manceau se plaint que le changement d'adresse précédemment demandé n'a pas été pris en compte, puis un courriel du 2 février 2018 l'informant que l'incident est résolu et le changement d'adresse électronique effectué. Ces deux courriels sont insuffisants pour établir que le cabinet Manceau avait comme il le soutient déclaré en novembre 2017, ou au moins avant le 14 décembre 2017, un changement d'adresse de courrier électronique et que ce changement d'adresse n'a pas été pris en compte du fait de la juridiction. Les pièces jointes au mémoire en réplique du 9 octobre 2018 se bornent pour leur part à montrer que l'ordonnance litigieuse a, le 30 janvier 2018, été envoyée à une adresse électronique qui serait celle d'une secrétaire du cabinet ayant démissionné en juillet 2017. Mais en prouvant l'existence de cette démission ou en produisant le courrier d'un prestataire informatique indiquant qu'il a créé le 22 novembre 2017 une adresse électronique pour la nouvelle secrétaire du cabinet Manceau, adresse qui n'est d'ailleurs pas celle choisie pour les notifications du système Télérecours, le cabinet Manceau ne démontre pas qu'il a, antérieurement au 14 décembre 2017, procédé à un changement d'adresse électronique qui n'a pas été pris en compte du fait d'un dysfonctionnement imputable à la juridiction.
6. Il résulte de ce qui précède que la présidente de la 4ème chambre du tribunal administratif de Melun pouvait légalement, après l'expiration d'un délai d'un mois à compter du 23 décembre 2017, donner acte du désistement de la société Créavicab en application de l'article R. 612-5-1 du code de justice administrative. Cette société n'est pas fondée à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée du 29 janvier 2018. Sa requête d'appel doit être rejetée, y compris ses conclusions tendant à ce que Maisons-Alfort Habitat, qui n'est pas partie perdante, supporte les frais de procédure sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la société requérante la somme que Maisons-Alfort Habitat demande au titre des mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société Créavicab est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de Maisons-Alfort Habitat tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Créavicab et à Maisons-Alfort Habitat.
Délibéré après l'audience du 11 octobre 2018, à laquelle siégeaient :
- Mme Pellissier, présidente de chambre,
- M. Legeai, premier conseiller,
- Mme Nguyên Duy, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 18 octobre 2018.
L'assesseur le plus ancien,
A. LEGEAILa présidente,
S. PELLISSIERLe greffier,
A. LOUNISLa République mande et ordonne au préfet du Val de Marne en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18PA01067