Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2010 et des pénalités correspondantes, et de mettre à la charge de l'État la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1520491 du 7 février 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 7 mars 2017, MmeB..., représentée par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1520491 du Tribunal administratif de Paris du 7 février 2017 ;
2°) de prononcer la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2010 et des pénalités correspondantes ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- il ne pouvait pas être fait application de la procédure de taxation d'office, dès lors qu'elle a déposé une déclaration de revenus et n'a pas perçu de bénéfices non commerciaux ;
- elle n'a pas appréhendé la somme de 620 000 euros ;
- la somme de 150 000 euros correspondait à un prêt et seule la somme de 30 000 euros, qu'elle a remboursée, lui avait été versée ;
- la somme de 470 000 euros a été versée à des tiers ;
- elle était une simple salariée de la société Optima conseil et n'en a jamais assuré la direction effective ;
- les pénalités de 80 % ne sont pas fondées.
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 mai 2017, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Doré,
- et les conclusions de M. Lemaire, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B...a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle au titre des années 2010 et 2011, à la suite duquel une proposition de rectification du 10 décembre 2013 lui a été notifiée. L'administration a considéré qu'elle avait commis à hauteur de 620 000 euros des détournements de fonds imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, suivant la procédure d'évaluation d'office prévue par le 2° de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales. L'administration a en conséquence mis à sa charge des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de l'année 2010, assorties d'une pénalité de 80 % pour activité occulte. Mme B...fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions et pénalités.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. Aux termes de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales : " Peuvent être évalués d'office : (...) 2° Le bénéfice imposable des contribuables qui perçoivent des revenus non commerciaux ou des revenus assimilés lorsque la déclaration annuelle prévue à l'article 97 du code général des impôts n'a pas été déposée dans le délai légal (...) ". Aux termes de l'article 92 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices (...) de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus ".
3. Il résulte de l'instruction, notamment des procès verbaux d'audition de la requérante établis dans le cadre de l'information ouverte à son encontre par le Tribunal de grande instance de Paris et dont l'administration a pris connaissance en faisant usage de l'exercice de son droit de communication, que MmeB..., qui était employée par la société Optima Conseil, s'est vue délivrer, par une cliente âgée et malade, des chèques pour un montant total de 620 000 euros en 2010 et que ces chèques ont été encaissés par la société Optima Conseil ou par Mme B... elle-même.
4. Pour contester avoir appréhendé la somme de 620 000 euros en cause, Mme B... soutient, en premier lieu, que cette cliente avait consenti un prêt de 150 000 euros à la société Optima Conseil. Si elle se prévaut d'un contrat de prêt conclu le 29 novembre 2010, il ne peut, faute d'avoir été enregistré en application des dispositions de l'article 49 B de l'annexe III au même code, être regardé comme ayant date certaine. En outre, le remboursement allégué de la somme de 30 000 euros le 14 février 2011 n'est intervenu que postérieurement au dépôt de plainte de la famille de la victime. Dans ces conditions, Mme B... n'établit pas que le versement de la somme de 150 000 euros au cours de l'année 2010 correspondait à un prêt.
5. En deuxième lieu, Mme B...fait valoir que le surplus des fonds remis par sa cliente, soit la somme de 470 000 euros, a seulement transité sur les comptes de la société Optima Conseil et a permis de régler des prestataires dans le cadre d'un projet d'investissement. Elle ne produit toutefois aucune pièce à l'appui de ces allégations, alors qu'il résulte de la proposition de rectification du 10 décembre 2013 qu'elle n'a reçu un mandat pour la recherche d'investisseurs pour le projet en cause qu'en avril 2011, soit postérieurement aux versements litigieux, qu'elle a donné d'autres explications à la conseillère bancaire de sa cliente pour justifier les versements et que les fonds n'ont pas été déclarés dans le chiffre d'affaires de la société Optima Conseil. Dans ces conditions, Mme B...n'établit pas que la somme de 470 000 euros au cours de l'année 2010 aurait été versée à des tiers.
6. En dernier lieu, il résulte de l'instruction que MmeB..., qui exerçait auparavant la profession d'expert-comptable, a été à l'origine de la création de la société Optima Conseil et que si elle n'en était ni gérante ni associée, les gérants successifs étaient, selon les termes qu'elle a employés lors de son audition, des " gérants de paille ". D'ailleurs, le contrat de prêt du 29 novembre 2010 présente Mme B...comme le " représentant légal " de la société Optima Conseil. Il résulte également de l'instruction qu'elle disposait d'une procuration sur le compte bancaire de la société et utilisait ce compte à des fins personnelles, soit en utilisant les moyens de paiement de la société pour payer des dépenses personnelles, soit en opérant des virements vers son compte personnel. Dans ces conditions, Mme B...peut être regardée comme ayant appréhendé les fonds encaissés par la société Optima Conseil, alors même que celle-ci dispose de la personnalité morale.
7. Dans ces conditions, l'administration établit l'existence d'une activité de détournement de fonds, distincte de l'activité d'expertise-comptable et de conseil exercée par Mme B...et la société Optima Conseil. Si Mme B...fait valoir qu'elle avait déposé, au titre de l'année 2010, une déclaration d'ensemble de ses revenus, il est constant qu'elle n'avait pas établi, en méconnaissance de l'article 97 du code général des impôts, de déclaration de ses bénéfices non commerciaux résultant de cette activité occulte de détournement de fonds. Par suite, l'administration était fondée à évaluer d'office les profits issus de ces détournements sur le fondement des dispositions précitées du 2° de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales.
Sur le bien-fondé des impositions :
8. Les bénéfices non commerciaux tirés par Mme B...de son activité occulte de détournement de fonds ayant été régulièrement évalués d'office, la requérante supporte, en application des articles L. 193 et R. 193-1 du livre des procédures fiscales, la charge de la preuve de l'exagération des impositions mises à sa charge.
9. Il résulte de ce qui a été exposé aux points 3 à 6 que Mme B...n'apporte pas la preuve de l'exagération des bases d'imposition retenues par l'administration qui a, sur le fondement des dispositions précitées de l'article 92 du code général des impôts, regardé la somme de 620 000 euros comme des bénéfices non commerciaux perçus par MmeB....
Sur les pénalités :
10. Aux termes du 1 de l'article 1728 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : " Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de : / (...) c. 80 % en cas de découverte d'une activité occulte ".
11. Il résulte de ce qui précède que l'administration établie l'existence d'une activité occulte exercée par Mme B...et justifie ainsi du bien-fondé de la pénalité de 80 % mis à sa charge sur le fondement des dispositions précitées du c) du 1 de l'article 1728 du code général des impôts. La requérante, qui se borne à soutenir qu'elle n'a pas appréhendé la somme de 620 000 euros en cause, n'est ainsi pas fondée à demander la décharge des pénalités en litige.
12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B...et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée à l'administrateur général en charge de la direction du contrôle fiscal d'Île-de-France.
Délibéré après l'audience du 18 octobre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Formery, président de chambre,
- Mme Poupineau, président assesseur,
- M. Doré, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 8 novembre 2018.
Le rapporteur,
F. DORÉLe président,
S.-L. FORMERYLe greffier,
C. RENÉ-MINE
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17PA00817