Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D...E...B..., veuve A...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler la décision du 11 avril 2016 par laquelle le préfet de Seine-et-Marne a implicitement refusé de lui délivrer une carte de résident sur le fondement du 2° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou, à titre subsidiaire, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ".
Par un jugement n° 1610298 en date du 10 avril 2018, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 11 juin 2018, MmeB..., représentée par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1610298 du 10 avril 2018 du Tribunal administratif de Melun ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision implicite du préfet de Seine-et-Marne du 11 avril 2016 ;
3°) d'enjoindre au préfet de Seine-et-Marne de lui délivrer dès la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de cent euros par jour de retard, la carte de résident qu'elle sollicite ou, à titre subsidiaire, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Mme B...soutient que :
- le refus d'octroi de la carte de résident est illégal, dès lors qu'elle remplit les conditions prévues par les dispositions du 2° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle est mère de deux enfants de nationalité française qui subviennent totalement à ses besoins ; elle n'est plus en capacité de travailler en raison de son âge et de son état de santé et ne dispose d'aucune ressource propre, tandis que ses enfants perçoivent des revenus suffisants pour leur permettre de la prendre en charge ;
- la décision contestée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
La requête de Mme B...a été communiquée au préfet de Seine-et-Marne, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Poupineau a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. MmeA..., de nationalité guinéenne, est entrée en France pour la première fois en 1996 selon ses déclarations. Elle a sollicité auprès du préfet de Seine-et-Marne, le 7 septembre 2015, la délivrance d'une carte de résident sur le fondement du 2° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en qualité d'ascendant à charge d'un ressortissant français ou, à titre subsidiaire, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ". Mme B...fait appel du jugement en date du 10 avril 2018 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet de Seine-et-Marne du 11 avril 2016 refusant implicitement de lui accorder le titre sollicité.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Aux termes de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour : (...) 2° A l'enfant étranger d'un ressortissant de nationalité française si cet enfant est âgé de dix-huit à vingt et un ans ou dans les conditions prévues à l'article L. 311-3 ou s'il est à la charge de ses parents ainsi qu'aux ascendants d'un tel ressortissant et de son conjoint qui sont à sa charge, sous réserve qu'ils produisent un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier que Mme B...est entrée en France sous couvert d'un visa Schengen valable du 14 décembre 2002 au 11 juin 2003. Elle est titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention " visiteur " régulièrement renouvelée depuis le 20 novembre 2014. Elle est mère de deux enfants de nationalité française et réside, depuis l'année 2002, chez sa fille, qui l'a prise en charge. Veuve, âgée de soixante-dix ans à la date de la décision contestée et de santé fragile, elle n'exerce pas d'activité et ne dispose d'aucune ressource. Par ailleurs, des avis d'imposition ainsi que des bulletins de salaire que la requérante a produits, il ressort que ses enfants perçoivent des revenus suffisants pour leur permettre de subvenir aux besoins de leur mère. MmeB..., qui établit ainsi être titulaire d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois et être à la charge de ses enfants de nationalité française, remplit les conditions ouvrant droit à l'octroi d'une carte de résident sur le fondement des dispositions précitées du 2° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dans ces conditions et alors que les éléments de fait ci-dessus relevés ne sont pas contestés par le préfet de Seine-et-Marne, qui n'a pas produit de mémoire tant devant les premiers juges qu'en appel, Mme B...est fondée à soutenir qu'en refusant de lui délivrer le titre de séjour qu'elle sollicitait, le préfet a entaché sa décision d'illégalité.
4. Il résulte ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme B...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Eu égard au motif d'annulation de la décision contestée et alors qu'il ne résulte pas de l'instruction que des éléments de droit ou de fait nouveaux justifieraient que l'autorité administrative oppose une décision de refus d'octroi d'une carte de résident ascendant à charge d'un ressortissant français, le présent arrêt implique nécessairement que cette autorité délivre à Mme B...la carte de résident sollicitée. Il y a lieu, par suite, en vertu de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, d'enjoindre au préfet de Seine-et-Marne de délivrer ce titre, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par MmeB....
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1610298 en date du 10 avril 2018 du Tribunal administratif de Melun et la décision par laquelle le préfet de Seine-et-Marne a implicitement rejeté la demande de carte de résident de Mme B...sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de Seine-et-Marne de délivrer une carte de résident à Mme B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'État versera une somme de 1 000 euros à Mme B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B...est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...E...B...veuveA..., au ministre de l'intérieur et au préfet de Seine-et-Marne.
Délibéré après l'audience du 22 novembre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Formery, président de chambre,
- Mme Poupineau, président assesseur,
- M. Doré, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 6 décembre 2018.
Le rapporteur,
V. POUPINEAULe président,
S.-L. FORMERY
Le greffier,
C. RENÉ-MINE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18PA01960