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23/01/2019 | FRANCE | N°18PA00597

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 23 janvier 2019, 18PA00597


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...C...a demandé au Tribunal administratif de Paris la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2012 et 2013.

Par un jugement n° 1603769/1-2 du 15 décembre 2017, le Tribunal administratif de Paris, après avoir prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de sa demande à hauteur de 2 795 euros, a rejeté le surplus de celle-ci.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregi

strés les 20 février et 17 décembre 2018, Mme A...C..., représentée par la Selarl CBA cabinet Ben...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...C...a demandé au Tribunal administratif de Paris la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2012 et 2013.

Par un jugement n° 1603769/1-2 du 15 décembre 2017, le Tribunal administratif de Paris, après avoir prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de sa demande à hauteur de 2 795 euros, a rejeté le surplus de celle-ci.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 20 février et 17 décembre 2018, Mme A...C..., représentée par la Selarl CBA cabinet Benayoun associés, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1603769/1-2 du 15 décembre 2017 du Tribunal administratif de Paris en tant qu'il rejette le surplus de sa demande.

2°) de prononcer la décharge des impositions restant en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens.

Elle soutient que :

- c'est à tort qu'elle a déposé une déclaration de revenus distincte de celle de son époux au titre de l'année 2012 dès lors qu'ils ne vivaient pas séparément ;

- les sommes imposées par l'administration n'ont pas été versées par son époux en exécution d'une décision de justice et ne sont donc pas être imposables.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 juin 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par ordonnance du 30 novembre 2018, la clôture d'instruction a été fixée au

17 décembre 2018 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Appèche,

- les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public,

- et les observations de Me Baghdoyan, avocat de Mme A...C....

Considérant ce qui suit :

1. Mme A...C...relève appel du jugement n° 1603769/1-2 en date du

15 décembre 2017 par lequel le Tribunal administratif de Paris, après avoir constaté un non-lieu partiel à hauteur des dégrèvements prononcés par l'administration en cours d'instance, a rejeté le surplus de sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2012 et 2013.

2. Mme A...C..., qui a déposé au titre des années 2012 et 2013 des déclarations d'impôt sur le revenu distinctes de celles de son époux M.C..., a fait l'objet d'un contrôle sur pièces à l'issue duquel l'administration l'a informée, par une proposition de rectification reçue le 5 mars 2015, des redressements qu'elle envisageait dans la catégorie des traitements, salaires et pensions au titre de chacune de ces années. Mme A...C..., qui avait sollicité et obtenu de l'administration un délai supplémentaire de trente jours pour répondre à cette proposition, a contesté les motifs de rectification dans des observations formulées par courrier du 6 mai 2015.

En ce qui concerne l'imposition séparée des époux au titre de l'année 2012 :

3. Le 4. de l'article 6 du code général des impôts dispose que : " Les époux font l'objet d'impositions distinctes : (...) c. Lorsqu'en cas d'abandon du domicile conjugal par l'un ou l'autre des époux, chacun dispose de revenus distincts ".

4. Mme A...C...soutient que c'est à tort qu'elle a déposé une déclaration de revenus distincte de celle de son époux au titre de l'année 2012 alors qu'elle vivait toujours avec lui et qu'elle ne disposait pas de revenus distincts.

5. Il est constant que Mme A...C...a mentionné, sur la déclaration de revenus établie par elle au titre de l'année 2012, qu'elle et son mari s'étaient séparés le 25 février 2012. Par ailleurs, il ressort des pièces jointes à sa requête qu'elle a déposé une main courante le

21 juin 2012 indiquant que son mari avait pris un appartement séparé au mois de mars 2012. Si l'administration fait valoir que l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 14 novembre 2013, statuant en appel suite à une ordonnance de non conciliation du juge aux affaires familiales, précise que M. C... a déclaré dans ses conclusions avoir quitté le domicile conjugal le 1er juin 2010,

Mme A...C...verse au dossier de la Cour de nombreux documents montrant que le couple continuait à entretenir des relations étroites durant l'année 2011, le couple et leurs enfants étant notamment partis en vacances ensemble à plusieurs reprises. Ainsi, ces éléments sont de nature à remettre en cause la date alléguée par l'époux de rupture de la vie commune et à démontrer que l'époux de la requérante vivait au domicile conjugal durant l'année 2011 et au 1er janvier 2012, l'administration ne faisant pour sa part état d'aucun autre élément de nature à accréditer que M. C... avait quitté le domicile conjugal au 1er janvier 2012. Dans ces conditions, Mme A...C...est fondée à soutenir qu'elle ne devait pas faire l'objet d'une imposition séparée au titre de l'année 2012 et que c'est à tort que les premiers juges ont refusé de faire droit à sa demande tendant à la décharge, en droits et majorations, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu mise à sa charge au titre de ladite année.

En ce qui concerne les sommes imposées comme pensions alimentaires au titre de l'année 2013 :

6. D'une part, l'article 79 du code général des impôts dispose que : " Les traitements, indemnités, émoluments, salaires, pensions et rentes viagères concourent à la formation du revenu global servant de base à l'impôt sur le revenu " et l'article 80 quater du même code précise que : " Sont soumises au même régime fiscal que les pensions alimentaires les versements de sommes d'argent mentionnés à l'article 275 du code civil lorsqu'ils sont effectués sur une période supérieure à douze mois à compter de la date à laquelle le jugement de divorce, que celui-ci résulte ou non d'une demande conjointe, est passé en force de chose jugée et les rentes versées en application des articles 276, 278 ou 279-1 du même code, la rente prévue à l'article 373-2-3 du code civil dans la limite de 2 700 € ainsi que la contribution aux charges du mariage définie à l'article 214 du code civil lorsque son versement résulte d'une décision de justice et que les époux font l'objet d'une imposition distincte ".

7. D'autre part, l'article 156 du même code dispose que : " L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal. Ce revenu net est déterminé eu égard aux propriétés et aux capitaux que possèdent les membres du foyer fiscal désignés aux 1 et 3 de l'article 6, aux professions qu'ils exercent, aux traitements, salaires, pensions et rentes viagères dont ils jouissent ainsi qu'aux bénéfices de toutes opérations lucratives auxquelles ils se livrent, sous déduction : (...) II. Des charges ci-après lorsqu'elles n'entrent pas en compte pour l'évaluation des revenus des différentes catégories : (...) 2° (...) pensions alimentaires répondant aux conditions fixées par les articles 205 à 211, 367 et 767 du code civil (...) ; contribution aux charges du mariage définie à l'article 214 du code civil, lorsque son versement résulte d'une décision de justice et à condition que les époux fassent l'objet d'une imposition séparée ; dans la limite de 2 700 € et, dans les conditions fixées par un décret en Conseil d'Etat, les versements destinés à constituer le capital de la rente prévue à l'article 373-2-3 du code civil ".

8. Il résulte de l'instruction, et notamment des deux ordonnances de non-conciliation en date du 21 mars 2013, que M. C... a été tenu de verser, d'une part, au titre de la période du

1er septembre 2012 au 20 mars 2013, une somme de 2 500 euros par mois, augmentée pour les mois de février et mars 2013 de 6 770 euros par mois s'il ne justifiait pas du paiement de l'indemnité d'occupation de l'appartement sis 27 rue du Cherche-Midi, qui lui avait été attribué à titre de logement de fonction par la société " Fullsix Group " dont il est le président, d'autre part, au titre de la période du 21 mars au 31 juillet 2013, la somme de 10 770 euros jusqu'au départ de Mme A...C...du domicile conjugal et, enfin, à partir du 1er août 2013, une somme de

6 500 euros par mois. Toutefois, à la suite de la contestation desdites ordonnances, la Cour d'appel de Paris, par un arrêt en date du 14 novembre 2013, a estimé que la pension alimentaire due par M. C... à son épouse devait être fixée à 2 000 euros en sus du loyer de 6 770 euros jusqu'au 1er juillet 2013 puis fixée à compter du 1er août 2013 à un montant mensuel de

4 000 euros et que la contribution paternelle à l'entretien des deux enfants devait être fixée à

1 000 euros par enfant et par mois.

9. Par suite, et alors même que la procédure contentieuse n'était pas encore achevée, l'ensemble des sommes perçues par MmeA... C... de son mari au titre de pension alimentaire et de participation aux charges du mariage et au versement desquelles ce dernier était tenu de procéder en exécution des décisions juridictionnelles susmentionnées, doivent être considérées comme une pension alimentaire versée en vertu d'une décision de justice et imposable au sens des articles 79 et 80 quater du code général des impôts. A ce titre, il y a lieu de prendre en compte, la somme de 6 770 euros, correspondant au loyer du logement, mise à la charge de l'époux par le juge aux affaires familiales, et sans qu'il importe que M. C... ait satisfait à cette obligation en acquittant directement auprès de la société Fullsix Group l'indemnité d'occupation de ce logement dans lequel vivait Mme A...C..., mais dont la jouissance ne lui avait pas été attribuée par l'ordonnance susmentionnée du 21 mars 2013. Il ressort toutefois des décisions de justice en cause que celles-ci ne visent pas l'indemnité d'occupation afférente au mois de janvier 2013. En revanche, en vertu de l'arrêt de la Cour d'appel de Paris, le versement de l'indemnité d'occupation mise à la charge de M. C... porte sur la période allant de février à juillet 2013 et la circonstance que Mme A...C...ait quitté l'appartement en cause avant le terme de cette période n'est pas de nature à remettre en cause l'obligation de l'intéressé et la nature de pensions alimentaires imposables entre les mains de la requérante des sommes en cause y compris celles afférentes à la période de mai à juillet 2013.

10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... C...est fondée à obtenir la décharge, en droits et majorations, du supplément d'impôt sur le revenu auquel elle a été assujettie au titre de l'année 2012, et la réduction de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu mise à sa charge au titre de l'année 2013 résultant de la soustraction de ses bases d'imposition d'une somme de 6770 euros avant abattement correspondant au loyer du mois de janvier 2013. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser à Mme A...C...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Mme A...C...est déchargée, en droits et majorations, du supplément d'impôt sur le revenu auquel elle a été assujettie au titre de l'année 2012.

Article 2 : L'assiette rectifiée de l'impôt sur le revenu mis à la charge de Mme A...C...au titre de l'année 2013 est réduite à hauteur d'un montant avant abattement de 6 770 euros correspondant au loyer du mois de janvier 2013.

Article 3 : Mme A...C...est déchargée, en conséquence de la réduction d'assiette prononcée à l'article 2, du supplément d'impôt sur le revenu auquel elle a été assujettie au titre de l'année 2013, en droits et majorations.

Article 4 : L'Etat versera à Mme A...C...une somme de 1 000 euros en application de

l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le jugement n° 1603769/1-2 du 15 décembre 2017 du Tribunal administratif de Paris est réformé en ce qu'il a contraire au présent arrêt.

Article 6 : Le surplus de la requête de Mme A...C...est rejeté.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A...C...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée au chef des services fiscaux chargé de la direction de contrôle fiscal

d'Ile-de-France.

Délibéré après l'audience du 9 janvier 2019, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- Mme Appèche, président assesseur,

- Mme Jimenez, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 23 janvier 2019.

Le rapporteur,

S. APPECHELe président,

I. BROTONS

Le greffier,

S. DALL'AVA

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18PA00597


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA00597
Date de la décision : 23/01/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Sylvie APPECHE
Rapporteur public ?: M. CHEYLAN
Avocat(s) : SELARL CBA CABINET BENAYOUN ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 25/01/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-01-23;18pa00597 ?
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