Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... A...a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011 et des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 1606219/2-3 du 27 juillet 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 25 septembre 2017, Mme A..., représentée par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1606219/2-3 du 27 juillet 2017 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) de prononcer la décharge sollicitée.
Elle soutient que :
- elle a démontré la nécessité et la réalité des prestations litigieuses ayant donné lieu à l'établissement de factures par la SARL MademoiselleB..., à l'origine des déductions de taxe sur la valeur ajoutée litigieuses ;
- l'application des pénalités pour manoeuvres frauduleuses au titre des rappels de taxe sur la valeur ajoutée n'est pas justifiée, les factures mises en cause correspondant à des prestations réelles.
Par un mémoire en défense, enregistré le 11 janvier 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Stoltz-Valette,
- et les conclusions de Mme Mielnik-Meddah, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. MmeA..., qui exerce une activité de numérologue à son domicile privé, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle le service lui a notifié des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011 et des pénalités pour manoeuvres frauduleuses. Mme A...relève appel du jugement du 27 juillet 2017 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces rappels et pénalités.
Sur le bien-fondé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée :
2. Aux termes de l'article 271 du code général des impôts: " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. 2. Le droit à déduction prend naissance lorsque la taxe déductible devient exigible chez le redevable. Toutefois, les personnes qui effectuent des opérations occasionnelles soumises à la taxe sur la valeur ajoutée n'exercent le droit à déduction qu'au moment de la livraison. 3. La déduction de la taxe ayant grevé les biens et les services est opérée par imputation sur la taxe due par le redevable au titre du mois pendant lequel le droit à déduction a pris naissance. II. 1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon le cas : a) Celle qui figure sur les factures établies conformément aux dispositions de l'article 289 et si la taxe pouvait légalement figurer sur lesdites factures ". Aux termes du 4 de l'article 283 du même code: " Lorsque la facture ne correspond pas à la livraison d'une marchandise ou à l'exécution d'une prestation de services, ou fait état d'un prix qui ne doit pas être acquitté effectivement par l'acheteur, la taxe est due par la personne qui l'a facturée. ". Et selon le 2 de l'article 272 du même code: " La taxe sur la valeur ajoutée facturée dans les conditions définies au 4 de l'article 283 ne peut faire l'objet d'aucune déduction par celui qui a reçu la facture ".
3. En vertu des dispositions combinées des articles 271, 272 et 283 du code général des impôts, un contribuable n'est pas en droit de déduire de la taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable à raison de ses propres opérations la taxe mentionnée sur une facture établie à son nom par une personne qui n'est pas le fournisseur réel de la marchandise ou de la prestation effectivement livrée ou exécutée. Dans le cas où l'auteur de la facture est régulièrement inscrit au registre du commerce et des sociétés, assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée et se présente comme tel à ses clients, il appartient à l'administration, si elle entend refuser à celui qui a reçu la facture le droit de déduire la taxe qui y est mentionnée, d'établir qu'il s'agissait d'une facture fictive ou d'une facture de complaisance. Si l'administration apporte des éléments suffisants en ce sens, il appartient alors au contribuable d'apporter toutes justifications utiles sur cette opération, sans qu'il ne puisse être exigé de lui des vérifications qui ne lui incombent pas.
4. Pour remettre en cause le caractère déductible des factures établies au nom de la société MademoiselleB..., l'administration a relevé que le libellé des factures " prestations mois " ou " prestations comptables et financières " ne permet d'établir ni la nature ni l'objet des prestations rendues. Elle a également constaté que la société Mademoiselle B...dont l'activité est la fabrication de vêtements, n'a plus, selon les informations légales, déposé de comptes auprès du tribunal de commerce depuis le 10 septembre 2005, date à laquelle elle a déposé des comptes pour un exercice clos le 31 décembre 2003. Lors des opérations de contrôle, elle a mis en évidence que les factures ont été encaissées non par la société mais sur le compte bancaire personnel de M. E..., gérant de la Sarl MademoiselleB..., sauf pour deux qui ont été encaissées par Mme A... elle-même en 2010. Pour démontrer la réalité des prestations fournies, Mme A...soutient que la Sarl Mademoiselle B...a réalisé des prestations administratives et publicitaires, que son compte bancaire était mouvementé, qu'elle ignorait l'absence de déclaration fiscale de cette société et que M. E...assurait des permanences téléphoniques, l'aidait à élaborer des factures et à coordonner le travail des agences de communication. Toutefois, si M. E...a pu, sans néanmoins mentionner sa qualité de gérant de la Sarl MademoiselleB..., apporter une aide ponctuelle à la requérante, cette dernière n'établit pas l'existence de la prestation alléguée d'agent commercial. MmeA..., par la production de diverses attestations sur l'honneur et copies de courriels, n'établit pas la réalité des prestations administratives, publicitaires et médiatiques qu'aurait assurées la société MademoiselleB.... Compte tenu par ailleurs de ses liens personnels avec M.E..., elle ne pouvait ignorer que la taxe sur la valeur ajoutée déductible n'était pas reversée au Trésor. Dans ces conditions, le service était fondé à refuser la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée sur les factures établies par la société MademoiselleB....
Sur les pénalités :
5. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : 80 % en cas de manoeuvres frauduleuses (...) ". Les pénalités pour manoeuvres frauduleuses ont pour objet de sanctionner des agissements destinés à égarer ou à restreindre le pouvoir de contrôle de l'administration. Le recours à des factures fictives est constitutif par lui-même de manoeuvres frauduleuses, de nature à justifier, par application de l'article 1729 du code général des impôts, une majoration de 80 % à raison de ces factures fictives.
6. Pour appliquer la majoration de 80 % prévue par les dispositions précitées aux redressements litigieux, l'administration s'est fondée sur la circonstance que les factures établies au nom de la société Mademoiselle B...étaient encaissées par M. E...et Mme A...elle-même. Il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 4 que le service établit que Mme A...a recouru à de la facturation fictive lui permettant de déduire de la taxe sur la valeur ajoutée au titre des exercices litigieux. Ainsi, elle a mis en oeuvre un procédé ayant pour but d'égarer l'administration dans l'exercice de son pouvoir de contrôle. Dès lors, l'administration fiscale établit l'existence de manoeuvres frauduleuses de nature à justifier la majoration de 80 % dont ont été assortis les rappels notifiés au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011. Par suite, Mme A...n'est pas fondée à demander la décharge de cette majoration.
7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A...et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris (pôle fiscal parisien 1).
Délibéré après l'audience du 28 février 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Jardin, président de chambre,
- M. Dalle, président assesseur,
- Mme Stoltz-Valette, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 14 mars 2019.
Le rapporteur,
A. STOLTZ-VALETTELe président,
C. JARDIN
Le greffier,
C. MONGISLa République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 17PA03123