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28/03/2019 | FRANCE | N°18PA00772

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 28 mars 2019, 18PA00772


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F...A...a demandé au Tribunal administratif de Melun :

- sous le n° 1507738/6, d'annuler pour excès de pouvoir la décision n° 15/100 du

21 juillet 2015 par laquelle La Poste a rejeté sa demande de prise en charge, au titre de la législation sur les accidents de service, de son malaise survenu le 6 novembre 2014 et des arrêts de travail y afférents, et d'enjoindre à La Poste de requalifier l'accident du 6 novembre 2014 en accident de service et de régulariser ses congés intervenus depui

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- sous le n° 1610457/6, d'annuler le refus implicite opposé par La Poste à sa...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F...A...a demandé au Tribunal administratif de Melun :

- sous le n° 1507738/6, d'annuler pour excès de pouvoir la décision n° 15/100 du

21 juillet 2015 par laquelle La Poste a rejeté sa demande de prise en charge, au titre de la législation sur les accidents de service, de son malaise survenu le 6 novembre 2014 et des arrêts de travail y afférents, et d'enjoindre à La Poste de requalifier l'accident du 6 novembre 2014 en accident de service et de régulariser ses congés intervenus depuis lors.

- sous le n° 1610457/6, d'annuler le refus implicite opposé par La Poste à sa demande de communication de documents médicaux, réceptionnée le 18 mai 2016.

Par un jugement n°s 1507738/6, 1610457/6 du 29 décembre 2017, le Tribunal administratif de Melun, après avoir constaté qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions dirigées contre le refus implicite de communication de documents, a rejeté le surplus de ces demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et deux mémoires enregistrés respectivement les 6 et 19 mars 2018 et le 27 juillet 2018, M. A..., représenté par Me B...H..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement n°s 1507738/6, 1610457/6 du 29 décembre 2017 du Tribunal administratif de Melun en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande n° 1507738/6 tendant à l'annulation la décision n° 15/100 du 21 juillet 2015 par laquelle La Poste a rejeté sa demande de prise en charge de son malaise survenu le 6 novembre 2014 et des arrêts de travail y afférents au titre de la législation sur les accidents de service ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ladite décision de La Poste ;

3°) d'enjoindre à La Poste de requalifier l'accident du 6 novembre 2014 en accident de service et de régulariser ses congés intervenus depuis lors ;

4°) de mettre à la charge de La Poste le versement de la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement a été rendu à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors que tous les mémoires des parties n'ont pas fait l'objet d'une communication ;

- les premiers juges ont commis une erreur de qualification juridique des faits au regard des dispositions de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 ; alors que la pathologie cardiaque dont il est atteint nécessite l'aménagement de son poste de travail et le rend inapte aux activités dites " partageables ", La Poste n'a pas suivi les préconisations médicales en faveur d'un aménagement de son poste de travail et lui a assigné le 6 novembre 2014 des tâches de tri de courrier et de tournée relevant de ces activités dites " partageables " ; faute d'autre cause, les vertiges ressentis ce jour-là doivent, dans ces conditions, être présumés imputables au service et cela malgré l'existence d'une pathologie cardiaque ;

- c'est à tort que le tribunal a estimé que la décision litigieuse du 21 juillet 2015 n'était pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- cette décision est entachée d'inexactitudes matérielles dès lors que l'aménagement de son poste de travail consistant à lui attribuer un véhicule ne répondait pas à la nécessité d'adapter son poste eu égard à sa pathologie cardiaque mais était consécutif à l'accident de scooter en date du 7 juin 2013, accident de service dont il a été victime.

Par un mémoire en défense enregistré le 28 juin 2018, La Poste représentée par

Me E...G...conclut au rejet de la requête et à la condamnation de M. A...au versement de la somme de 2 500 euros, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La Poste soutient que :

- aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Appèche,

- les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public,

- et les observations de Me Migault, avocat de La Poste.

Considérant ce qui suit :

1. M.A..., facteur à La Poste depuis le 4 juillet 2000, a ressenti des vertiges

le 6 novembre 2014 alors qu'il effectuait sa tournée et a été placé en congé maladie

jusqu'au 31 mars 2015. Par une décision n° 15/100 du 21 juillet 2015, La Poste, après que la commission de réforme eut rendu le 17 juin 2015 un avis défavorable à la prise en charge de ce malaise au titre des accidents de service, a refusé de faire droit à la demande de M. A...tendant au bénéfice des dispositions du 2° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984. Par un jugement

n°s 1507738/6, 1610457/6 en date du 29 décembre 2017, le Tribunal administratif de Melun a notamment rejeté la demande de M. A...tendant à l'annulation de cette décision de La Poste. Par la requête susvisée, M. A...relève, dans cette mesure, appel dudit jugement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " (...) La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes (...). / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux ". Il ressort du dossier de première instance transmis à la Cour à sa demande par le Tribunal administratif de Melun, que contrairement à ce que soutient M.A..., sa demande et les mémoires produits pour lui en première instance ont été communiqués à La Poste et que son conseil a reçu communication, respectivement le 1er juillet 2016 et 11 janvier 2017, des deux mémoires transmis au tribunal par La Poste dans l'instance n° 1507738/6. Ainsi, le moyen tiré de ce que, faute de communication de tous les mémoires, le jugement serait entaché d'irrégularité doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai et selon les sanctions prévus en application de l'article 35. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident ; (...) ".

4. Un accident survenu sur le lieu et dans le temps du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par un fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal présente, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant cet événement du service, le caractère d'un accident de service.

5. Il est constant que M. A...a ressenti des vertiges lors de la tournée qu'il effectuait, le 6 novembre 2014, soit sur le lieu, et dans le temps de service et alors qu'il exerçait ses fonctions.

6. Toutefois, il est également constant que M. A...souffrait notamment d'une pathologie cardiaque présentant une cardiopathie hypertrophique dilatée diagnostiquée en 2012, dont l'origine professionnelle ne ressort d'aucune pièce du dossier et n'est d'ailleurs pas alléguée, et qu'il faisait depuis lors l'objet d'un suivi et d'un traitement médical notamment pour une arythmie.

7. M. A...soutient que le malaise dont il a été victime résultait de ce que La Poste n'avait pas respecté les aménagements de son poste de travail préconisés par le médecin de prévention et consistant, selon ses dires, à ce qu'il soit protégé des situations de stress et exempté des activités dites " partageables " c'est-à-dire des activités destinées à pallier, les samedis et lundis et durant les périodes de vacances scolaires, les absences de collègues en congés.

8. D'une part, s'il ressort des pièces du dossier que le médecin du travail a été saisi par le médecin traitant de M.A..., en novembre 2012, pour avis concernant une éventuelle adaptation du poste de travail de l'intéressé en vue d'éviter une mauvaise évolution de ses pathologies, notamment cardiaque, lesdites pièces et notamment la fiche d'information établie par le service médical d'Ile de France montrent que, suite à une visite en date du

26 novembre 2013, le docteur D...s'est borné à préconiser l'absence de rythme de travail soutenu pendant les périodes partageables, pour une durée d'un an, la situation de M. A...devant être réexaminée à l'expiration de cette période. Le document manuscrit intitulé " fiche intercalaire de contrôle médical " ne peut, quant à lui, être interprété que comme relevant une inaptitude aux activités partageables limitée au mois de décembre 2013. En outre, il ressort également des pièces du dossier qu'à la suite d'arrêts de travail consécutifs à un accident de service, survenu en 2013, alors que M. A...pilotait un véhicule à deux roues, l'intéressé a été reconnu, par le médecin du travail qui a opéré la visite de pré-reprise le 16 septembre 2013, apte à la reprise de ses fonctions de facteur d'équipe, le médecin précisant seulement que l'exercice des fonctions se ferait avec voiture et limitation du port de charge de plus de 10 kg.

9. D'autre part, si le requérant produit un certificat médical établi le 11 février 2015 par le DrC..., médecin généraliste, mentionnant que l'aménagement du poste de M. A...a eu lieu pendant un an mais n'a pas été renouvelé et que l'accident du 6 novembre 2014 a eu lieu pendant une période dite " partageable ", correspondant aux vacances scolaires et aux lundis et samedis toute l'année, ces assertions ne sont corroborées par aucune pièce du dossier, alors d'ailleurs que le 6 novembre 2014 se situait hors des périodes dites " partageables " puisqu'il s'agissait d un jeudi et que la période des vacances scolaires de la Toussaint s'étendait, pour la zone concernée, du 18 octobre au 3 novembre 2014.

10. Par ailleurs, La Poste produit un rapport très circonstancié, établi le 5 mai 2015 concernant l'aménagement de poste du requérant, qui indique notamment que " M. A...ne prépare pas les tournées partageables hors tournée 56 facile à préparer et tournée 57 dont il est attributaire. Les jours dits de partageable, il prépare uniquement sa tournée quand il n'est pas affecté sur le quartier 56. Ainsi M. A...ne travaille pas sous pression de temps (...) ". Ce rapport précise également que le jeudi 6 novembre 2014, M. A...était affecté sur la tournée 57 dont il est attributaire, que le " trafic du jour était de (...) 93,6% de l'attendu moyen. " et que, conformément aux restrictions médicales le concernant, il s'est borné, dans les deux semaines qui ont précédé l'accident, lesquelles correspondaient à des vacances scolaires donc à une période dite partageable, à assurer la préparation de la tournée dont il était attributaire. A supposer que, comme le soutient le requérant, il ait eu à traiter le jour de l'incident quatre-vingts recommandés d'un syndic de copropriétaires en plus des recommandés et du courrier dont il avait la charge, cette circonstance ne saurait suffire à démontrer qu'il aurait été mis dans une situation particulièrement stressante, alors qu'il est constant par ailleurs qu'il a effectué sa tournée en voiture, sans qu'il importe à cet égard que ce véhicule ait été mis à sa disposition à la suite de l'accident de scooter susmentionné, qu'il n'a pas pris en charge de colis et qu'il n'a d'ailleurs pas déclaré avoir réalisé d'effort intense au moment de sa tournée.

11. Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, le malaise dont a été victime M. A...ne peut être considéré comme étant la conséquence ni d'une méconnaissance par La Poste des restrictions médicales définies par le service médical compétent, ni d'une charge de travail excessivement intense dans la quinzaine précédente. Par suite, c'est à bon droit que La Poste, suivant en cela l'avis de la commission de réforme, a estimé que ledit malaise ne pouvait être considéré comme un accident de service et que les congés de maladie dont a bénéficié M. A...postérieurement à cette date, ne rentraient pas dans le champ des dispositions susrappelées du 2° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984.

12. De tout ce qui précède il résulte que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté ses demandes. Ses conclusions à fin d'annulation du jugement et de la décision attaquée doivent, par suite, être rejetées, ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Poste n'ayant pas dans la présente instance la qualité de partie perdante. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par La Poste sur le fondement du même article.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de La Poste présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... A...et à La Poste.

Délibéré après l'audience du 13 mars 2019, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- Mme Appèche, président assesseur,

- M. Magnard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 28 mars 2019.

Le rapporteur,

S. APPECHELe président,

I. BROTONS

Le greffier,

S. DALL'AVA

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18PA00772


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA00772
Date de la décision : 28/03/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Sylvie APPECHE
Rapporteur public ?: M. CHEYLAN
Avocat(s) : BILLEBAULT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-03-28;18pa00772 ?
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