Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... A... a demandé au Tribunal administratif de Mayotte, d'une part, d'annuler la décision par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a implicitement refusé de lui verser l'indemnité d'éloignement prévue par le II de l'article 8 du décret n° 2013-865 du 28 octobre 2013 en quatre fractions annuelles à compter de 2014, et, d'autre part, d'enjoindre au ministre de lui verser l'indemnité sollicitée, assortie des intérêts moratoires.
Par un jugement n° 1500591 du 29 juin 2017, le Tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 29 août 2017 au greffe de la Cour administrative d'appel de Bordeaux, dont le jugement a été attribué à la Cour administrative de Paris par ordonnance n° 428220 du 1er mars 2019 du président de la section du contentieux de Conseil d'Etat, sur le fondement des dispositions de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, M. A..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1500591 du 29 juin 2017 du Tribunal administratif de Mayotte ;
2°) d'annuler la décision implicite de refus opposée par le garde des sceaux, ministre de la justice, à sa demande de paiement de l'indemnité d'éloignement à compter de 2014 ;
3°) d'enjoindre au garde des sceaux, ministre de la justice, de procéder au paiement des quatre fractions de l'indemnité qui auraient dû lui être versées en 2014, 2015, 2016 et 2017, assorties des intérêts moratoires, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- en raison du prolongement de son séjour à Mayotte, à compter du 18 janvier 2014, il doit être considéré comme y ayant été de nouveau affecté, de sorte qu'il était éligible au dispositif transitoire de paiement de l'indemnité d'éloignement prévu par le II de l'article 8 du décret n° 2013-965 du 28 octobre 2013 ;
- en lui refusant le bénéfice de ce paiement, le garde des sceaux, ministre de la justice, a méconnu les lignes directrices, invocables devant le juge de l'excès de pouvoir, contenues dans la circulaire publiée du 18 septembre 2014 de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique ;
- en refusant de lui verser l'indemnité sollicitée, le garde des sceaux, ministre de la justice, a méconnu le principe d'égalité, le vice-recteur de Mayotte ayant pour sa part estimé que les fonctionnaires de l'éducation nationale, affectés sur place dans les mêmes conditions que lui, étaient éligibles au versement de l'indemnité en cause.
La requête a été communiquée au garde des sceaux, ministre de la justice, qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le décret n° 96-1028 du 27 novembre 1996 ;
- le décret n° 2013-965 du 28 octobre 2013 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- et les conclusions de Mme Stoltz-Valette, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., surveillant pénitentiaire, a été affecté à Mayotte, à la maison d'arrêt de Majicavo, le 18 janvier 2010, pour une durée initiale de deux ans, renouvelée une fois. Devenu résident permanent de Mayotte, son séjour sur place a été prolongé sans limitation de durée, à compter du 18 janvier 2014. M. A... a alors vainement sollicité de sa hiérarchie, à plusieurs reprises, le versement de l'indemnité d'éloignement servie aux agents de l'Etat exerçant des fonctions outre-mer, selon les modalités prévues par le dispositif transitoire du II de l'article 8 du décret du 28 octobre 2013 portant application de l'indemnité de sujétion géographique aux fonctionnaires de l'Etat titulaires et stagiaires et aux magistrats affectés à Mayotte. Il relève appel du jugement du 29 juin 2017 par lequel le Tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande, regardée comme tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui payer le montant de l'indemnité en cause en quatre fractions annuelles, de 2014 à 2017.
2. En premier lieu, aux termes de l'article 4 du décret du 27 novembre 1996 relatif à l'attribution de l'indemnité d'éloignement servie aux agents de l'Etat en fonctions outre-mer, dans sa version en vigueur avant l'intervention du décret du 28 octobre 2013 : " Le droit à l'indemnité pour les personnels qui sont affectés sans limitation de durée à Mayotte (...) n'est ouvert que pour deux périodes de deux ans (...) / Les intéressés n'acquièrent un nouveau droit à l'indemnité pour une nouvelle affectation à Mayotte (...) qu'après une période de services de deux ans au moins accomplie en dehors de toute collectivité ouvrant droit au bénéfice de l'indemnité. ". L'article 8 du décret du 28 octobre 2013 dispose que : " I. Les dispositions des articles 1er à 6 sont applicables à compter du 1er janvier 2017 aux fonctionnaires titulaires et stagiaires de l'Etat et aux magistrats dont le centre des intérêts matériels et moraux ne se situe pas à Mayotte. / II. A titre transitoire (...) les agents mentionnés au I qui sont affectés à Mayotte entre le 1er janvier 2014 et le 31 décembre 2016 bénéficient de quatre versements annuels au titre de l'indemnité d'éloignement pendant l'année d'installation et pour chacune des trois années suivantes calculés selon les modalités suivantes : / 1° Fraction versée au titre de l'année 2014 : 8,5 mois de traitement indiciaire brut ; / 2° Fraction versée au titre de l'année 2015 : 7,5 mois de traitement indiciaire brut ; / 3° Fraction versée au titre de l'année 2016 : 6 mois de traitement indiciaire brut ; / 4° Fraction versée au titre des années 2017, 2018 et 2019 : 5 mois de traitement indiciaire brut. / III. Les agents mentionnés au I qui sont affectés à Mayotte avant le 1er janvier 2014 conservent, pour les fractions restant dues et non encore échues, le bénéfice de l'indemnité d'éloignement telle que prévue par le décret du 27 novembre 1996 susvisé, dans sa version applicable avant l'entrée en vigueur du présent décret (...) ".
3. M. A... ne conteste pas avoir bénéficié du versement de l'indemnité d'éloignement à l'occasion de ses deux premiers séjours de deux années à Mayotte, du 18 janvier 2010 au 18 janvier 2014, épuisant ainsi son droit au versement de l'indemnité en cause, conformément aux dispositions de l'article 4 du décret n° 96-1028 du 27 novembre 1996. Contrairement à ce qu'il soutient, le prolongement de son séjour administratif à Mayotte, à compter du 18 janvier 2014, ne peut être considéré comme une nouvelle affectation ayant ouvert droit au versement de l'indemnité d'éloignement selon le régime transitoire prévu par le II de l'article 8 du décret du 28 octobre 2013. C'est donc sans erreur de droit que le garde des sceaux, ministre de la justice, a refusé de lui en accorder le bénéfice au titre des années 2014 à 2017.
4. En deuxième lieu, si M. A... se prévaut du 1. du paragraphe 1.1.2. de la circulaire du 18 septembre 2014 de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, référencée RDFF1421498C et relative à la situation indemnitaire et de congés des agents originaires de Mayotte et/ou affectés à Mayotte, celle-ci se borne à exposer des considérations générales relatives à l'application du II de l'article 8 du décret du 28 octobre 2013, qui a défini sans ambiguïté les conditions permettant aux fonctionnaires de l'Etat en fonctions à Mayotte de bénéficier à titre transitoire de l'indemnité d'éloignement dont il sollicite le versement. Le moyen tiré de ce que le garde des sceaux, ministre de la justice, aurait méconnu les lignes directrices contenues dans la circulaire en cause, qui ne sont par suite pas invocables devant le juge de l'excès de pouvoir, doit donc être écarté.
5. En troisième lieu, M. A..., qui n'est en tout état de cause pas placé dans la même situation que les fonctionnaires de l'éducation nationale en poste à Mayotte, n'est pas fondé à se prévaloir d'une éventuelle rupture du principe d'égalité en invoquant la position exprimée par le vice-recteur, dans une notice explicative publiée sous forme dématérialisée, relative aux modalités d'application, dans ses services, du II de l'article 8 du décret du 28 octobre 2013.
6. ll résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées au titre des frais de justice, ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... et à la garde des sceaux, ministre de la justice.
Délibéré après l'audience du 17 septembre 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Jardin, président de chambre,
- Mme Hamon, président assesseur,
- Mme B..., premier conseiller,
Lu en audience publique, le 1er octobre 2019.
Le rapporteur,
C. B...Le président,
C. JARDINLe greffier,
C. MONGIS
La République mande et ordonne à la garde des sceaux, ministre de la justice, en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17PA22956