Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté en date du 3 octobre 2018 par lequel le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 1817676 en date du 6 octobre 2018, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté en date du 3 octobre 2018 du préfet de police et a rejeté le surplus des conclusions de la demande de M. C....
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 16 novembre 2018, le préfet de police demande à la Cour :
- d'annuler le jugement n° 1817676 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris en date du 6 octobre 2018 ;
- de rejeter la demande présentée par M. C... devant le Tribunal administratif de Paris.
Il soutient que :
- c'est à tort que le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté au motif qu'il avait été pris en méconnaissance des stipulations de
l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- cet arrêté ne méconnaît pas les dispositions du 7 et du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
La requête a été communiquée à M. C..., qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., de nationalité géorgienne, entré en France selon ses déclarations en 2010, a été interpellé par les services de police le 2 octobre 2018 pour des faits de trafic et de détention non autorisée de stupéfiants. Par un arrêté en date du 3 octobre 2018, le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit. Le préfet de police relève appel du jugement du 6 octobre 2018 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris, faisant droit à la demande de M. C..., a annulé cet arrêté.
Sur le moyen d'annulation retenu par le magistrat désigné :
2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
3. Devant le tribunal, M. C... a fait valoir qu'il était entré en France au cours de l'année 2010, qu'il était marié avec une compatriote présente sur le territoire français depuis le 15 juin 2011 avec ses deux enfants, et qu'ils ont eu un enfant, né le 19 novembre 2012. Pour annuler l'arrêté du préfet de police en date du 3 octobre 2018 portant obligation de quitter le territoire français sans délai et fixant le pays de destination, le magistrat désigné a considéré que compte tenu de l'ancienneté de la présence et des attaches familiales de M. C... en France, le préfet de police avait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
4. Toutefois, il ressort du dossier soumis au tribunal que le requérant n'a produit aucune pièce susceptible d'établir la réalité et l'ancienneté de son union avec Mme B..., dont la régularité du séjour en France n'est pas non plus justifiée. Il ne ressort pas davantage des pièces versées aux débats que M. C... contribuerait effectivement à l'entretien et à l'éducation de son enfant. Enfin, il n'apparait pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de 44 ans. Par ailleurs, alors qu'il a fait l'objet de plusieurs interpellations entre le 16 novembre 2010 et le 2 octobre 2018 pour des faits notamment de vol, de recel, de port ou de détentions d'armes prohibées, de détentions de produits stupéfiants et d'acquisition de substances vénéneuses, M. C... ne justifie pas d'une intégration particulière. Dans ces conditions, le préfet de police, en faisant obligation à M. C... de quitter le territoire français, n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels cette décision a été prise. Par suite, c'est à tort que le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du préfet de police en date du 3 octobre 2018 au motif qu'il a été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
5. Il appartient toutefois à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. C... devant le Tribunal administratif de Paris.
Sur les autres moyens soulevés par M. C... :
6. Les moyens soulevés par M. C... tirés de la méconnaissance des dispositions du 7 de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 4.
7. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ".
8. Lorsque la loi prescrit que l'étranger doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français.
9. M. C... soutient être gravement malade et que son état de santé nécessite une surveillance régulière ainsi qu'un traitement spécifique auxquels il ne peut avoir accès en Géorgie. S'il semble ressortir des pièces soumises au tribunal que M. C... souffre d'une hépatite C, les certificats médicaux qu'il a produits ne mentionnent pas le traitement qu'il doit suivre. Rédigés dans des termes généraux plusieurs années avant l'arrêté en litige, ils n'établissent pas que M. C... ne pourrait bénéficier de la surveillance médicale requise par son état de santé. Par suite, le préfet de police n'a pas méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
10. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté en date du 3 octobre 2018.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1817676 du 6 octobre 2018 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. C... devant le Tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. A... C....
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 30 janvier 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Formery, président de chambre,
- Mme D..., président-assesseur,
- Mme Jimenez, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 13 février 2020.
Le rapporteur,
V. D...Le président,
S.-L. FORMERY
Le greffier,
C. DABERT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 18PA03588 4