Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La SARL Ferdinand a demandé au Tribunal administratif de Paris de " constater que la taxe sur la valeur ajoutée mise en recouvrement à hauteur de 88 858 euros a déjà été versée en décembre 2012 " et qu'elle " n'est plus redevable que des pénalités et intérêts de retard à hauteur de 7 211 euros ".
Par un jugement n° 1716806/1-3 du 27 novembre 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 24 janvier 2020, la SARL Ferdinand, représentée par
Me B... C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 27 novembre 2019 ;
2°) de prononcer la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée versée le 19 décembre 2012 ;
3°) de procéder à une compensation entre le trop versé et l'avis de mise en recouvrement résultant du contrôle fiscal ;
4°) de constater que seules restent dues les pénalités et intérêts de retard pour un montant de de 7 211 euros ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que
- la doctrine administrative apprécie la validité des demandes indépendamment du service destinataire de la demande ;
- le délai de réclamation a pour point de départ l'évènement qui motive la réclamation ;
- la doctrine administrative BOI-CTX-PREA-10-30 n° 60 confirme cette règle ;
- l'avis de dégrèvement du 26 septembre 2016 est l'évènement qui motive la réclamation ;
- il permet de calculer la taxe collectée deux fois et la taxe déductible sur les travaux ;
- la double imposition est établie.
La présente requête a été dispensée d'instruction en application des dispositions de l'article R. 611-8 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative,
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- et les conclusions de Mme Jimenez, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La SARL Ferdinand, qui exerce une activité de marchand de biens immobiliers, a fait l'objet, en 2013, d'une vérification de comptabilité ayant porté sur la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2011 en matière de taxe sur la valeur ajoutée. A l'issue de ce contrôle, l'administration a notifié à la société, par une proposition de rectification du 21 mai 2013, son intention de lui réclamer des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de cette période, à raison de défauts de déclaration de droits de taxe sur la valeur ajoutée grevant des ventes réalisées en 2010 et en 2011. Ces droits ont fait l'objet d'un avis de mis en recouvrement le
11 octobre 2013 pour un montant total de 218 192 euros en droits, et de 102 961 euros en pénalités. Par un jugement du 7 juin 2016, le Tribunal administratif de Paris a déchargé la société des rappels qui lui ont été ainsi réclamés, à concurrence de 129 334 euros en droits et de 86 482 euros en pénalités. En exécution de ce jugement, l'administration a prononcé le 26 septembre 2016 le dégrèvement de ces rappels, à hauteur de 129 334 euros en droits et de 95 750 euros en pénalités, et ramené les droits restant dus à 88 858 euros en droits et à 7 211 euros en pénalités. Par la présente requête, la SARL Ferdinand relève appel du jugement du 27 novembre 2019 par lequel le Tribunal administratif de Paris a refusé de tirer les conséquences de ce que la taxe sur la valeur ajoutée mise en recouvrement à hauteur de 88 858 euros aurait déjà été versée au titre de la déclaration CA3 déposée en décembre 2012.
2. D'une part, il résulte des dispositions combinées des articles L. 190, L. 199 et
R. 190-1 du livre des procédures fiscales, que les demandes en décharge ou en restitution d'une imposition ne sont recevables devant le tribunal administratif que si elles ont été précédées d'une réclamation adressée à l'administration des impôts. Aux termes de l'alinéa 2 de l'article R 200-2 du livre des procédures fiscales : "Le demandeur ne peut contester devant le tribunal administratif des impositions différentes de celles qu'il a visées dans sa réclamation à l'administration".
3. D'autre part, aux termes de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales : " Pour être recevables, les réclamations relatives aux impôts autres que les impôts directs locaux et les taxes annexes à ces impôts, doivent être présentées à l'administration au plus tard le
31 décembre de la deuxième année suivant celle, selon le cas : (...) b) Du versement de l'impôt contesté lorsque cet impôt n'a pas donné lieu à l'établissement d'un rôle ou à la notification d'un avis de mise en recouvrement ; c) De la réalisation de l'événement qui motive la réclamation ". Les événements susceptibles de rouvrir le délai de réclamation en application de ces dispositions sont ceux qui sont de nature à exercer une influence sur le bien-fondé de l'imposition, soit dans son principe, soit dans son montant. Lorsque l'administration estime que la taxe sur la valeur ajoutée collectée au titre d'une période donnée n'a été déclarée et versée au Trésor public qu'au titre d'une période postérieure, la mise en recouvrement du rappel de taxe sur la valeur ajoutée procédant de ce rehaussement constitue, au sens de ces dispositions, un événement dont une société peut se prévaloir pour contester l'imposition établie conformément à sa déclaration, déposée avant la date de cette mise en recouvrement, à raison de la période au titre de laquelle elle a déclaré et versé la taxe en cause. En revanche, une décision juridictionnelle statuant sur le bien-fondé du rappel de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période antérieure n'a pas le caractère d'un tel événement.
4. La présente requête ne contient aucune conclusion tendant à la décharge de l'imposition assignée à la société requérante au titre des années 2010 et 2011, ni, en tout état de cause, aucun moyen de nature à remettre en cause la procédure d'établissement ou le
bien-fondé de cette imposition, qui a d'ailleurs fait l'objet d'un jugement devenu définitif du Tribunal administratif de Paris du 7 juin 2016. A supposer que la société requérante puisse être regardée comme demandant à la Cour de prononcer la décharge de la taxe sur la valeur ajoutée déclarée, liquidée et payée par elle en 2012 et d'en tirer les conséquences en limitant les pénalités et intérêts qui lui restent à verser et en réduisant, par voie de compensation, le montant des sommes restant à verser à raison du rappel de taxe sur la valeur ajoutée établi au titre des années précédentes, il résulte de l'instruction que ces conclusions en décharge n'ont été précédées d'aucune réclamation préalable à l'administration, la demande adressée le 28 février 2017 à l'administration fiscale, à la suite de la mise en demeure de payer les sommes restant dues à raison des impositions établies au titre des années 2010 et 2011, ne pouvant être regardée comme contenant de telles conclusions. Au surplus, et en tout état de cause, à supposer même que la demande du 28 février 2017 puisse être regardée comme une réclamation tendant à la décharge et à la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée qui aurait été trop versée au titre de l'année 2012, ni le jugement du 7 juin 2016, ni la décision de dégrèvement intervenue le 26 septembre 2016 ne sauraient être regardés, eu égard à ce qui a été dit au point 3., comme des évènements de nature à rouvrir le délai de réclamation. La taxe en cause ayant été versée en 2012, et le rappel établi, prétendument sur les mêmes bases, au titre des années précédentes, ayant été mis en recouvrement en 2013, la demande présentée le 28 février 2017 était en tout état de cause tardive, tant au regard du b) que du c) de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales. La doctrine administrative BOI-CTX-PREA-10-30 n° 60, qui ne fait pas de la loi fiscale une interprétation différente de celle qui précède, ne peut, à cet égard, être utilement invoquée par la société requérante.
5. Dès lors que ni les impositions établies au titre de l'année 2012, ni les impositions restant à sa charge au titre des années 2010 et 2011 ne peuvent être remises en cause, la SARL Ferdinand ne saurait valablement demander la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée versée le 19 décembre 2012, la compensation entre le trop versé et l'avis de mise en recouvrement résultant du contrôle fiscal et la limitation des pénalités et intérêts de retard mises à sa charge.
6. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Ferdinand n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que la société requérante demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SARL Ferdinand est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Ferdinand.
Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.
Délibéré après l'audience du 10 juin 2020, à laquelle siégeaient :
- Mme Brotons, président,
- M. A..., premier conseiller,
- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 24 juin 2020.
Le président,
I. BROTONS
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20PA00247