Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société A.V.P.C Davoust Automobile a demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner l'Etat à lui verser la somme de 690 000 euros en réparation des préjudices subis du fait des fautes commises par les services fiscaux dans le cadre d'opérations d'établissement et de recouvrement de l'impôt.
Par un jugement n° 1705161/1-1 du 12 juin 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 19 août et 2 septembre 2019, la société A.V.P.C Davoust Automobile, représentée par Me A... B... demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 12 juin 2019 ;
2°) de prononcer la condamnation demandée ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est entaché d'irrégularités externes ;
- il n'a pas analysé le mémoire de l'administration ;
- le premier juge ne s'est pas interrogé sur la volonté de l'administration de communiquer des pièces ;
- le jugement est insuffisamment motivé ;
- il est entaché d'ultra petita ;
- elle a dû renoncer à l'activité de vente de véhicules d'occasion ;
- elle a été privée d'encours bancaires ;
- elle a fait face à des frais exceptionnels pour assurer sa défense ;
- l'appréciation de l'administration était fautive.
Par un mémoire en défense enregistré le 25 novembre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 13 juillet 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 31 juillet 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C...,
- et les conclusions de Mme Jimenez, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. A l'issue d'une vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet au titre de la période du 1er septembre 2005 au 30 juin 2008, la société AVPC Davoust Automobile a été assujettie à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée dont le Tribunal administratif de Rouen a prononcé la décharge par un jugement du 15 mai 2012. Par la présente requête, cette société relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'indemnisation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait des fautes commises par l'administration fiscale lors de l'exécution des opérations se rattachant à la procédure d'établissement des rappels de taxe sur la valeur ajoutée dont elle a obtenu le dégrèvement intégral.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Les premiers juges ont statué, par un jugement suffisamment motivé, sur les conclusions et moyens soulevés devant eux par la société requérante, et, ayant rejeté la requête de cette dernière, ne sauraient être regardés comme ayant statué ultra petita. Les erreurs de droit et de fait qu'ils auraient pu commettre dans la motivation du jugement sont sans influence sur sa régularité. Il en est de même de la circonstance que les premiers juges ne se seraient pas interrogés sur la volonté de l'administration de ne pas communiquer des pièces. Enfin, les premiers juges pouvaient, sans méconnaitre les dispositions de l'article R. 741-2 du code de justice administrative, se borner, dans l'analyse du mémoire en défense produit devant eux par l'administration fiscale, à relever que cette dernière faisait valoir que les moyens de la demande de la société requérante n'étaient pas fondés, dès lors que ce mémoire, qui a ainsi été analysé, se limitait à la réfutation des moyens présentés par la société requérante. Le jugement attaqué ne saurait en conséquence être regardé comme irrégulier.
Sur les conclusions à fin d'indemnisation du préjudice subi :
3. Une faute commise par l'administration lors de l'exécution d'opérations se rattachant aux procédures d'établissement et de recouvrement de l'impôt est de nature à engager la responsabilité de l'Etat à l'égard du contribuable ou de toute autre personne si elle leur a directement causé un préjudice. Un tel préjudice, qui ne saurait résulter du seul paiement de l'impôt, peut être constitué des conséquences matérielles des décisions prises par l'administration et, le cas échéant, des troubles dans ses conditions d'existence dont le contribuable justifie. Le préjudice invoqué ne trouve pas sa cause directe et certaine dans la faute de l'administration si celle-ci établit soit qu'elle aurait pris la même décision d'imposition si elle avait respecté les formalités prescrites ou fait reposer son appréciation sur des éléments qu'elle avait omis de prendre en compte, soit qu'une autre base légale que celle initialement retenue justifie l'imposition. Enfin l'administration peut invoquer le fait du contribuable ou, s'il n'est pas le contribuable, du demandeur d'indemnité comme cause d'atténuation ou d'exonération de sa responsabilité.
4. La requérante soutient, en premier lieu, avoir renoncé, en conséquence des rectifications dont elle a fait l'objet et à l'issue de l'épuisement des voies administratives de recours, à l'activité ayant donné lieu aux rehaussements dont elle a finalement obtenu la décharge, et avoir de ce fait supporté une perte de chiffre d'affaires. Toutefois, il ne ressort pas de l'étude comptable produite, laquelle analyse l'évolution du chiffre d'affaires sur les ventes de véhicules d'occasion, en comparant la période de quatre exercices courant du début des opérations de vérification jusqu'au jugement du tribunal administratif et la période de quatre exercices postérieure à ce jugement, que les agissements de l'administration aient entrainé une baisse significative de l'activité dans ce secteur, notamment en ce qui concerne les transactions transnationales ayant donné lieu aux rehaussements litigieux. A cet égard, aucune baisse substantielle du chiffre d'affaires ne peut être constatée à compter du rejet de la réclamation préalable de la société, intervenu le 20 septembre 2010. A supposer même qu'une décision ait été prise par la société requérante de limiter ou d'interrompre son activité dans ce domaine, il ne résulte pas de l'instruction qu'une telle décision trouve son origine dans les rehaussements abandonnés dont elle a fait l'objet.
5. La société requérante soutient, en deuxième lieu, que l'inscription du privilège du Trésor sur sa dette fiscale a eu pour effet de porter atteinte à son image auprès de ses partenaires commerciaux et des établissements bancaires. En se bornant à produire un courrier d'un établissement bancaire en date du 22 août 2012 refusant une demande, dont la nature n'est d'ailleurs pas précisée, en raison de l'existence d'une inscription au privilège du Trésor, et un courrier en date du 21 août 2012 conditionnant la conclusion d'un contrat de fourniture à la radiation de cette inscription, la société requérante n'établit pas l'existence d'un préjudice, dès lors que l'inscription au privilège du Trésor a été radiée le 24 août 2012. Au surplus, aucun élément du dossier ne permet de chiffrer ce préjudice. Les autres documents fournis ne permettent pas de relier les difficultés rencontrées par la société dans ses relations avec les établissements bancaires et de crédit à l'inscription au privilège du Trésor.
6. En troisième lieu, les frais de justice, s'ils ont été exposés en conséquence directe d'une faute de l'administration, sont susceptibles d'être pris en compte dans le préjudice résultant de l'illégalité fautive imputable à cette dernière. Toutefois, lorsque l'administré a fait valoir devant le juge une demande fondée sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le préjudice est intégralement réparé par la décision que prend le juge sur ce fondement. Il n'en va autrement que dans le cas où le demandeur ne pouvait légalement bénéficier de ces dispositions. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que, la société requérante ayant pu bénéficier de ces dispositions durant l'instance engagée devant le Tribunal administratif de Rouen, les frais exposés pour sa défense ont fait l'objet d'une appréciation d'ensemble dans ce cadre, qui exclut toute demande indemnitaire de ce chef sur un autre fondement juridique. La requérante, qui ne justifie pas, au demeurant, le montant des frais exceptionnels qu'elle soutient avoir exposés à hauteur de 20 000 euros pour sa défense, n'est par suite pas fondée à obtenir la réparation du préjudice constitué par lesdits frais.
7. Il résulte de tout ce qui précède que la société A.V.P.C Davoust Automobile n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que la société requérante demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société A.V.P.C Davoust Automobile est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société A.V.P.C Davoust Automobile et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Délibéré après l'audience du 4 novembre 2020, à laquelle siégeaient :
- Mme Brotons, président de chambre,
- M. C..., premier conseiller,
- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller.
Lu en audience publique le 18 novembre 2020.
Le rapporteur,
F. C...Le président,
I. BROTONS
Le greffier,
I. BEDR
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19PA02748