Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris de condamner l'État à lui verser une indemnité de 50 000 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi du fait de l'atteinte portée à son droit au bénéfice d'une pièce d'identité qu'il souhaitait voir établie avec la mention du titre nobiliaire sollicité et d'annuler la décision implicite du garde des sceaux, ministre de la justice, rejetant sa demande de reconnaissance du titre de baron de Raet.
Par une ordonnance n° 1922121 du 1er avril 2020, la présidente de la 4ème section du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 30 juillet 2020, M. A... B..., représenté par la société civile professionnelle d'avocats au Conseil d'État et à la Cour de cassation Boré, Salve de Bruneton et Mégret, demande à la Cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 1922121 du 1er avril 2020 de la présidente de la 4ème section du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler la décision implicite née du silence gardé par le garde des sceaux, ministre de la justice, sur sa demande de reconnaissance du titre nobiliaire de baron de Raet ;
3°) d'enjoindre au garde des sceaux, ministre de la justice de réexaminer sa demande ;
4°) de mettre à la charge de l'État (ministère de la justice) le versement d'une somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'ordonnance attaquée est irrégulière, pour avoir rejeté l'ensemble de sa demande de première instance, qui s'analysait pour partie comme un recours pour excès de pouvoir, dès lors que, d'une part, les conclusions en excès de pouvoir de cette demande sont dispensées de l'obligation de ministère d'avocat et, d'autre part, dans le cas où sont présentées dans la même instance des conclusions tendant à l'annulation pour excès de pouvoir d'une décision et des conclusions relevant du plein contentieux tendant au versement d'une indemnité pour réparation du préjudice causé par l'illégalité fautive que le requérant estime constituée par cette même décision, cette circonstance n'a pas pour effet de donner à l'ensemble des conclusions le caractère d'une demande de plein contentieux ;
- sa demande, qui tendait à l'obtention de l'autorisation de porter un titre étranger sur le fondement du décret impérial du 5 mars 1859, et non à l'investiture d'un titre nobiliaire français, n'avait pas à être présentée à l'administration par un avocat aux Conseils comme le prescrit le décret-loi du 30 octobre 1935 ;
- en tout état de cause, le garde des sceaux, ministre de la justice ne pouvait rejeter sa demande sans l'inviter à la régulariser ;
- la décision a été rendue par une autorité incompétente, dans la mesure où la demande de M. B... relevait de la compétence exclusive du chef de l'État à qui le ministre de la justice aurait dû transmettre le dossier après instruction, le décret du 5 mars 1859 étant toujours en vigueur, faute d'avoir jamais été abrogé, et est d'ailleurs appliqué, tant par le Président de la République que par les juridictions judiciaires ;
- la circonstance que le titre revendiqué est d'origine étrangère ne saurait faire obstacle à ce qu'il soit porté en France, sauf à méconnaître le droit de l'Union européenne ;
- dès lors qu'il établit l'existence du titre de baron du Saint-Empire conféré à Jan et Hendrick de Raet, anobli en 1416, dont il descend en ligne directe, ainsi qu'en ligne collatérale avec Léopoldus Françiscus de Raet, le garde des sceaux, ministre de la justice devait se limiter à constater cette existence et faire droit à sa demande.
Par un mémoire en défense enregistré le 11 décembre 2020, le garde des sceaux, ministre de la justice, conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- la demande de l'intéressé aurait dû lui être présentée par un avocat aux Conseils, et est donc irrecevable pour ne l'avoir pas été ;
- la circonstance que l'intéressé n'avait pas présenté sa demande avec l'assistance d'un avocat aux Conseils est sans incidence sur la légalité de la décision prise, dès lors que, depuis, le requérant a régularisé sa demande par la constitution d'avocats aux Conseils ;
- le requérant ne justifie pas de la propriété du titre nobiliaire revendiqué ;
- il s'agit d'un titre étranger.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Constitution ;
- le Traité sur l'Union européenne ;
- le code pénal ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- l'ordonnance du Roi du 15 juillet 1814 portant création d'une commission du sceau ;
- l'ordonnance du Roi du 31 octobre 1831 portant suppression de la commission du sceau et réunion de ses attributions aux divisions du ministère de la justice ;
- la loi du 28 mai 1859 qui modifie l'article 259 du code pénal ;
- le décret impérial du 12 janvier 1859 sur le rétablissement du conseil du sceau des titres ;
- le décret impérial du 5 mars 1859 qui dispose que les titres conférés à des Français par des souverains étrangers ne peuvent être portés en France qu'avec l'autorisation de l'Empereur ;
- le décret du 10 janvier 1872 qui supprime le conseil du sceau des titres et attribue ses fonctions au conseil d'administration du ministère de la justice, modifié par le décret
n° 2005-565 du 27 mai 2005 ;
- le décret-loi du 30 octobre 1935 portant suppression des référendaires du sceau de France ;
- le décret n° 2008-689 du 9 juillet 2008 relatif à l'organisation du ministère de la justice ;
- le code de justice administrative ;
- l'ordonnance n° 2020-1402 du 18 novembre 2020 et le décret n° 2020-1406 du même jour portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif, notamment son article 5.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C...,
- et les conclusions de Mme Guilloteau, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :
1. La présidente de la 4ème section du tribunal administratif de Paris a, par l'ordonnance attaquée, rejeté la demande de M. B... au motif qu'il n'est pas représenté par un des mandataires mentionnés à l'article R. 431-2 du code de justice administrative, et que ladite décision est par suite entachée d'une irrecevabilité manifeste permettant son rejet en application des dispositions du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative.
2. L'article R. 431-2 du code de justice administrative prévoit que les requêtes et mémoires doivent être, à peine d'irrecevabilité, présentés par un avocat ou un avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation " lorsque les conclusions de la demande tendent au paiement d'une somme d'argent, à la décharge ou à la réduction de sommes dont le paiement est réclamé au requérant ou à la solution d'un litige né de l'exécution d'un contrat ". Lorsque sont présentées dans la même instance des conclusions tendant à l'annulation pour excès de pouvoir d'une décision et des conclusions relevant du plein contentieux tendant au versement d'une indemnité pour réparation du préjudice causé par l'illégalité fautive que le requérant estime constituée par cette même décision, cette circonstance n'a pas pour effet de donner à l'ensemble des conclusions le caractère d'une demande de plein contentieux.
3. En l'espèce, bien que présentées dans la même instance, les conclusions de M. B... devaient s'analyser de façon distincte au regard des dispositions de l'article
R. 811-7 du code de justice administrative. Si les conclusions indemnitaires devaient être présentées par l'un des mandataires mentionnés à l'article R. 431-2 du code de justice administrative, les conclusions d'excès de pouvoir étaient en revanche dispensées de ministère d'avocat en application des dispositions du 1° de l'article R. 811-7 du code de justice administrative. Par suite, en jugeant que, dans son ensemble, la requête présentée par M. B... n'entrait pas dans la catégorie des litiges dispensés de ministère d'avocat, la présidente de la 4ème section du tribunal administratif de Paris a commis une erreur de droit.
4. M. B... est donc fondé à demander l'annulation de l'ordonnance qu'il attaque en tant qu'elle a rejeté les conclusions de sa requête tendant à l'annulation de la décision du garde des sceaux, ministre de la justice, rejetant sa demande de reconnaissance du titre de baron de Raet. L'affaire étant en état, il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par le requérant devant le tribunal administratif de Paris.
Sur la légalité de la décision attaquée :
5. Dans ses écritures en défense, tant devant le tribunal administratif de Paris que devant la Cour, le garde des sceaux, ministre de la justice, a regardé la demande présentée le 5 avril 2018 par M. B... comme fondée à la fois sur le terrain de la demande de vérification d'un titre nobiliaire et sur celui de la demande d'autorisation de port d'un titre nobiliaire étranger et a exposé les motifs fondant la décision implicite de rejet née du silence par lui gardé sur ladite demande.
6. Lorsque l'administration s'est fondée sur plusieurs motifs pour prendre une décision, il appartient au juge d'apprécier, au vu de l'illégalité de l'un d'entre eux, si l'administration aurait pris la même décision en se fondant uniquement sur les autres motifs retenus par elle.
En ce qui concerne le refus de vérifier un titre nobiliaire :
7. Depuis l'entrée en vigueur des lois constitutionnelles de 1875, nulle autorité de la République ne dispose du pouvoir de collationner, de confirmer ou de reconnaître des titres nobiliaires, qui se transmettent de plein droit et sans intervention de ces autorités. La seule compétence maintenue au garde des sceaux, en application du décret du 10 janvier 1872 qui a supprimé le conseil du sceau des titres et attribué les fonctions de ce conseil " en tout ce qui n'est pas contraire à la législation actuelle " à la direction des affaires civiles et du sceau, est celle de se prononcer sur les demandes de vérification des titres de noblesse, qui le conduisent uniquement à examiner les preuves de la propriété du titre par celui qui en fait la demande.
8. En premier lieu, le requérant soutient que le garde des sceaux, ministre de la justice, ne pouvait légalement rejeter sa demande, au motif qu'elle n'a pas été présentée par un avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, sans lui demander de la régulariser.
9. Aux termes de l'article L. 114-6 du code des relations entre le public et les administrations, codifiant article 19-1 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 loi du
12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations : " Lorsqu'une demande adressée à une administration est affectée par un vice de forme ou de procédure faisant obstacle à son examen et que ce vice est susceptible d'être couvert dans les délais légaux, l'administration invite l'auteur de la demande à la régulariser en lui indiquant le délai imparti pour cette régularisation, les formalités ou les procédures à respecter ainsi que les dispositions légales et réglementaires qui les prévoient./Les délais de recours ne sont pas opposables à l'auteur de la demande lorsque la réponse de l'administration ne comporte pas les indications mentionnées à l'alinéa précédent. " Le défaut de présentation d'une demande adressée à une administration par un avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, lorsqu'une telle obligation est instituée par un texte législatif ou réglementaire en vigueur, constitue un vice de forme au sens et pour l'application des dispositions précitées.
10. L'exigence de présentation d'une demande de vérification de titre nobiliaire par un avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation a été fixée, en dernier lieu, par les dispositions combinées de l'article 6 du décret du 10 janvier 1872 supprimant le conseil du sceau des titres et attribuant ses fonctions au conseil d'administration du ministère de la justice, aux termes duquel : " Les référendaires institués par les ordonnances du
15 juillet 1814, du 11 décembre 1815 et du 31 octobre 1830, continueront d'être seuls chargés de la poursuite des affaires sur lesquelles le conseil du sceau était appelé à délibérer. ", et de l'article 2 du décret-loi du 30 octobre 1935 portant suppression des référendaires du sceau de France, qui dispose que : " Les avocats au Conseil d'État sont substitués au référendaire dans les matières où la représentation des parties est exigée par les règlements en vigueur. "
11. Or, l'article 6 du décret du 10 janvier 1872 a été abrogé par l'article 2 du décret n° 2005-565 du 27 mai 2005, en vertu duquel : " Les articles 3 à 6 de ce décret sont et demeurent abrogés. " Il s'ensuit nécessairement que, du fait de l'abrogation de l'article 6 du décret du 10 janvier 1872, tant les dispositions des ordonnances royales du 15 juillet 1814 et du 31 octobre 1830, relatives au rôle des référendaires du sceau dans l'instruction des affaires ressortissant à la compétence de l'ancienne commission du sceau que celles de l'article 2 du décret-loi du 30 octobre 1935 qui ont supprimé ces référendaires et leur ont substitué, pour ces mêmes affaires, les avocats aux Conseils, sont devenues caduques, sans que s'imposât le prononcé exprès de l'abrogation de ces deux ordonnances et de ce décret-loi, intervenus au demeurant dans une matière relevant du domaine réglementaire en vertu de l'article 37 de la Constitution. Dès lors, aucune disposition législative ou réglementaire en vigueur n'imposait plus, à la date de la décision attaquée, qu'une demande de vérification de titre nobiliaire fût présentée au directeur des affaires civiles et du sceau par un avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation. Cette constatation de la caducité de règles résultant de l'abrogation expresse du texte qui les maintenait en vigueur, au demeurant sollicitée par M. B... dans son mémoire en réplique de première instance enregistré le 31 mars 2020, ressortit au champ d'application de la loi et est ainsi d'ordre public.
12. Il résulte de ce qui précède, d'une part, que le moyen tiré de ce que le garde des sceaux, ministre de la justice, aurait méconnu les dispositions de l'article L. 114-6 du code des relations entre le public et les administrations, est inopérant et doit être écarté et, d'autre part, que le motif exposé par le ministre, tiré de l'absence de présentation de la demande de vérification de titre par un avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation est, en tout état de cause, illégal.
13. En second lieu, la procédure de vérification des titres nobiliaires, telle que décrite au point 7, n'ayant d'autre objet que de permettre au Garde des Sceaux de se prononcer sur la collation des titres produits devant lui et sur leur transmission dans les familles, celui-ci est tenu de refuser d'inscrire sur les registres du Sceau de France une personne qui n'a pas produit les actes sur lesquels elle entendait fonder sa demande.
14. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que M. B... n'a produit, hormis un arbre généalogique établi par lui-même et quelques éléments historiques d'ordre très général afférents à la lignée dont il prétend descendre, aucun élément suffisamment probant qui démontrerait la propriété du titre faisant l'objet de sa demande. Le garde des sceaux, ministre de la justice, était donc, en tout état de cause, tenu de refuser la vérification du titre sollicitée.
15. Il résulte de ce qui précède que les conclusions du requérant en tant qu'elles sont dirigées contre la décision du garde des sceaux, ministre de la justice, rejetant sa demande de vérification d'un titre nobiliaire, doivent être rejetées.
En ce qui concerne le refus d'autorisation de porter en France un titre nobiliaire conféré par un souverain étranger :
16. Aux termes de l'article 1er du décret impérial du 5 mars 1859, qui dispose que les titres conférés à des Français par des souverains étrangers ne peuvent être portés en France qu'avec l'autorisation de l'Empereur : " Aucun Français ne peut porter en France un titre conféré par un souverain étranger, sans y avoir été autorisé par un décret impérial rendu après avis du conseil du sceau des titres. Cette autorisation n'est accordée que pour des motifs graves et exceptionnels. " Il résulte notamment de ces dispositions que l'autorisation qu'elles prévoient est essentiellement personnelle et ne peut s'étendre aux enfants de celui qui l'a obtenue.
17. Les dispositions du décret impérial citées au point précédent, qui ne portent pas sur la collation, la confirmation ou la reconnaissance d'un titre nobiliaire pour lesquelles, comme il a été rappelé au point 8, aucune autorité de la République n'a reçu compétence d'un texte exprès, n'ont jamais été expressément abrogées. Elles ne sont pas devenues caduques du fait de la promulgation des lois constitutionnelles de 1875, de la Constitution du 27 octobre 1946 ou de celle 4 octobre 1958, ni ne sont dépourvues d'objet en raison de leur désuétude, puisqu'elles ont reçu application, non seulement sous l'empire des lois constitutionnelles de 1875, mais aussi sous celui de la Constitution aujourd'hui en vigueur. Alors pris pour l'application de la loi du 28 mai 1859 qui a modifié l'article 259 du code pénal pour réprimer l'usage illégal des titres, l'article 1er du décret impérial du 5 mars 1859 peut désormais être regardé comme légalement fondé sur l'article 433-19 du code pénal qui réprime le fait, " dans un acte public ou authentique ou dans un document administratif destiné à l'autorité publique et hors les cas où la réglementation en vigueur autorise à souscrire ces actes ou documents sous un état civil d'emprunt : / 1° de prendre un nom ou un accessoire du nom autre que celui assigné par l'état civil ; 2° de changer, altérer ou modifier le nom ou l'accessoire du nom assigné par l'état civil. "
18. Sur le fondement des dispositions de l'article 1er précité du décret impérial du 5 mars 1859, le Président de la République peut accorder l'autorisation qu'elles prévoient au vu d'une demande préalablement instruite par le garde des sceaux, ministre de la justice, en vertu de l'article 2 du décret du 10 janvier 1872 modifié par l'article 1er du décret
n° 2005-565 du 27 mai 2005, qui, comme il a été dit au point 7, a attribué les fonctions du conseil du sceau des titres, " en tout ce qui n'est pas contraire à la législation actuelle ", à la direction des affaires civiles et du sceau. L'appréciation à laquelle se livre le Chef de l'État des motifs graves et exceptionnels invoqués au soutien d'une telle demande ne saurait, dès lors qu'elle ne repose pas sur des faits matériellement inexacts et n'est entachée ni d'erreur de droit, ni de détournement de pouvoir, être utilement discutée devant le juge de l'excès de pouvoir. Pour la mise en oeuvre des disposition l'article 1er précité du décret impérial du
5 mars 1859, le garde des sceaux, ministre de la justice, est tenu de rejeter, sans la transmettre au Chef de l'État, la demande d'autorisation présentée par une personne qui n'a pas produit les actes sur lesquels elle entendait fonder sa demande. Par suite, la décision du garde des sceaux, ministre de la justice, refusant de transmettre au Chef de l'État une demande d'autorisation qu'il estime insuffisamment fondée n'est pas, par elle-même, entachée d'incompétence lorsqu'elle est motivée par l'insuffisance des pièces produites.
19. En premier lieu, M. B... soutient que le garde des sceaux, ministre de la justice, a incompétemment rejeté sa demande d'autorisation de porter un titre conféré par un souverain étranger, dès lors qu'une telle décision ressortit à la compétence exclusive du chef de l'État à qui le ministre aurait dû transmettre le dossier après instruction, le décret impérial du 5 mars 1859 étant toujours en vigueur.
20. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier et des écritures en défense du garde des sceaux, ministre de la justice, que ce dernier s'est notamment fondé, pour ne pas transmettre au Chef de l'État, seul habilité à prendre la décision d'accorder ou de rejeter l'autorisation sollicitée, la demande présentée par M. B... au titre du régime de l'autorisation de port en France d'un titre conféré par un souverain étranger, sur l'absence de toute justification probante, par l'intéressé, de la possession du titre en cause. M. B... ne conteste pas sérieusement cette appréciation. Dès lors, le ministre était, en l'espèce, tenu de prendre une telle décision, et le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'elle est entachée d'incompétence ou d'erreur d'appréciation.
21. En second lieu, M. B... soutient que la décision critiquée méconnait le droit de l'Union européenne. Il n'assortit toutefois pas ce moyen des précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé, et n'allègue même pas posséder la nationalité d'un autre État membre, ni être confronté à des difficultés pratiques qui remettraient en cause sa liberté de circulation ou d'établissement sur le territoire de l'Union et ce, alors que, d'une part, l'existence de la réglementation rappelée aux points 16 à 18 est justifiée par des motifs d'ordre public et que, d'autre part et comme il a été déjà dit, l'intéressé n'a pas présenté à l'administration les éléments utiles à l'instruction de sa demande.
22. M. B... n'est ainsi pas fondé à soutenir que c'est à tort que le garde des sceaux, ministre de la justice, a refusé de transmettre au Chef de l'État sa demande d'autorisation de porter en France un titre conféré par un souverain étranger.
23. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... est seulement fondé à soutenir que doit être annulée l'ordonnance du 1er avril 2020 de la présidente de la 4ème section du tribunal administratif de Paris en tant qu'elle a rejeté ses conclusions d'excès de pouvoir dirigées contre la décision du garde des sceaux, ministre de la justice, rejetant sa demande de reconnaissance du titre de baron de Raet. Le surplus de ses conclusions de première instance et celui de ses conclusions d'appel doivent être rejetés, en ce comprises, d'une part, par voie de conséquence, celles tendant à ce qu'il soit enjoint au garde des sceaux, ministre de la justice, de réexaminer sa demande et, d'autre part, celles fondées sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative, dès lors que l'État n'est pas la partie perdante dans la présente instance.
DÉCIDE :
Article 1er : L'ordonnance n° 1922121 du 1er avril 2020 de la présidente de la 4ème section du tribunal administratif de Paris est annulée en tant qu'elle a rejeté les conclusions d'excès de pouvoir de la demande de M. A... B... tendant à la reconnaissance du titre de Baron de Raet.
Article 2 : Le surplus des conclusions présentées par M. A... B... devant le tribunal administratif de Paris et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au garde des sceaux, ministre de la justice.
Délibéré après l'audience du 11 février 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Lapouzade, président de chambre,
- M. C..., président-assesseur,
- M. Gobeill, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 mars 2021.
Le président,
J. LAPOUZADE
La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20PA01990