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04/06/2021 | FRANCE | N°20PA01918

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 04 juin 2021, 20PA01918


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a saisi le Tribunal administratif de Melun d'une demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 juin 2018 par lequel le préfet de Seine-et-Marne a prononcé son expulsion du territoire français, outre des conclusions à fin d'injonction et des conclusions au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Par un jugement n°1805369 du 15 juillet 2020, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande .

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 2

7 juillet 2020, et un mémoire en réplique, enregistré le 17 mai 2021, M. B..., représenté pa...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a saisi le Tribunal administratif de Melun d'une demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 juin 2018 par lequel le préfet de Seine-et-Marne a prononcé son expulsion du territoire français, outre des conclusions à fin d'injonction et des conclusions au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Par un jugement n°1805369 du 15 juillet 2020, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande .

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 27 juillet 2020, et un mémoire en réplique, enregistré le 17 mai 2021, M. B..., représenté par Me C... , demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 15 juillet 2020 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler l'arrêté mentionné ci-dessus du 22 juin 2018 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté attaqué est entaché d'incompétence ;

- il méconnaît l'article L. 521-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il réside en France depuis plus de vingt ans et qu'il a des contacts réguliers avec ses enfants ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 septembre 2020, le préfet de

Seine-et-Marne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B... sont infondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de M. Baffray, rapporteur public,

- et les observations de Me C... pour M. B....

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 22 juin 2018, le préfet de Seine-et-Marne a prononcé l'expulsion du territoire français de M. B..., de nationalité mauricienne, au motif que son comportement constitue une menace pour l'ordre public, ayant été condamné à une peine d'emprisonnement de quinze années pour des faits de viol et atteintes sexuelles sur mineurs de quinze ans par ascendant ou personne ayant l'autorité et corruption de mineurs de quinze ans. M. B... a alors saisi le Tribunal administratif de Melun d'une demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 22 juin 2018. Il relève appel du jugement du 15 juillet 2020 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande .

2. En premier lieu, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté attaqué doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges au point 2 du jugement attaqué.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 521-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve des dispositions des articles L. 521-2, L. 521-3 et L. 521-4, l'expulsion peut être prononcée si la présence en France d'un étranger constitue une menace grave pour l'ordre public. ". L'article L. 521-3 du même code prévoit que : " Ne (peut) faire l'objet d'une mesure d'expulsion qu'en cas de comportements de nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de l'Etat, ou liés à des activités à caractère terroriste, ou constituant des actes de provocation explicite et délibérée à la discrimination, à la haine ou à la violence contre une personne déterminée ou un groupe de personnes ; (...)2° l'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de vingt;(...)4° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans et qui, ne vivant pas en état de polygamie, est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins un an (...)".

4. D'une part, si M.B... soutient vivre en France depuis plus de vingt ans, il ne produit aucun élément permettant d'attester de sa résidence habituelle sur le territoire français entre 1984, année de son entrée en France, et 1997, année durant laquelle il a obtenu un titre de séjour, renouvelé jusqu'en 2000. S'il est constant qu'il a ensuite obtenu un certificat de residence, valable jusqu'en 2010, il n'établit ainsi qu'une residence régulière en France que pendant douze années, ses années d'incarcération depuis 2009 ne pouvant être prises en compte, comme l'a jugé à juste titre le tribunal. Ainsi, M. B... n'est pas fondé à soutenir que les dispositions du 2° de l'article L. 521-3 feraient obstacle à ce qu'une mesure d'expulsion soit prononcée à son encontre.

5. D'autre part, M. B... soutient avoir des contacts réguliers et fréquents avec ses enfants dont un mineur de nationalité française. Certes, il a obtenu 3 à 4 fois par an des autorisations de sorties qui lui permettaient de voir sa famille mais il n'en fait plus état après le

3 janvier 2016, soit deux ans et six mois avant l'arrêté attaqué. Quant aux visites de ses enfants en prison, elles n'étaient qu'épisodiques. Par ailleurs, il n'a contribué que très faiblement à l'entretien de ses enfants par des versements de 400 euros en 2013, 2014 et 2015 alors même qu'il travaillait en prison. En définitive, même si les liens entre M. B... et ses enfants n'étaient effectivement pas rompus, il ne peut être regardé comme apportant à son enfant mineur français, une contribution effective et régulière à son éducation et entretien depuis sa naissance au depuis au moins un an à la date de la décision attaquée. Ainsi, M. B... n'est pas fondé à soutenir que les dispositions du 4° de l'article L. 521-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile feraient obstacle à ce qu'il soit expulsé du territoire.

6. En dernier lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

7. Si M. B... est père de quatre enfants, dont trois ont la nationalité française, il ne justifie pas, comme il a été exposé au point 5, contribuer de façon effective et régulière à leur éducation et entretien. Par ailleurs si M. B... soutient qu'il ne constitue plus une menace grave pour l'ordre public, l'expertise collégiale de mars 2016 et le rapport d'analyse psychiatrique et médico-psychologique de mars 2018 dont il fait état ne concluent qu'à une diminution de sa dangerosité, le risque de récidive n'étant pas exclu. Dans ces conditions, eu égard à la gravité des faits mentionnés au point 1 et de la menace pour l'ordre public que sa présence sur le territoire constitue, et nonobstant l'avis défavorable à l'expulsion de la commission d'expulsion, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en prenant l'arrêté d'expulsion attaqué, le préfet de Seine-et-Marne aurait porté au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale, garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, une atteinte disproportionnée par rapport aux buts de défense de l'ordre public en vue desquels cette mesure a été prise.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article 37 de la loi du

10 juillet 1991 doivent également être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de Seine et Marne.

Délibéré après l'audience du 21 mai 2021 à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M. Niollet, président assesseur,

- M. A..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 4 juin 2021.

Le rapporteur,

D. PAGES

Le président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

K. PETIT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 20PA01918 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA01918
Date de la décision : 04/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: M. Dominique PAGES
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : CHEVRIER

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-06-04;20pa01918 ?
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