Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Melun l'annulation, d'une part, de la lettre du 10 janvier 2017 par laquelle la rectrice de l'académie de Créteil l'a informée des conclusions de l'expertise médicale à la suite de l'examen pratiqué le 9 décembre 2016 et de la transmission de ce rapport à la commission de réforme de Seine-et-Marne, ensemble la décision implicite rejetant son recours gracieux et, d'autre part, de la décision du 4 juillet 2017 par laquelle la rectrice de l'académie de Créteil a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de son état de santé, suite aux faits survenus le 30 septembre 2016, et des arrêts et soins subséquents.
Par un jugement n° 1705213, 1707184 du 17 décembre 2019, le tribunal administratif de Melun a rejeté ses demandes.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 21 février 2020, Mme B..., représentée par Me Icard, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1705213, 1707184 du 17 décembre 2019 du tribunal administratif de Melun ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 4 juillet 2017 de la rectrice de l'académie de Créteil ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision du 4 juillet 2017 est insuffisamment motivée dès lors que la rectrice de l'académie de Créteil n'indique pas les raisons pour lesquelles elle a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident survenu le 30 septembre 2016 ;
- la procédure consultative suivie devant la commission de réforme est entachée de vices de procédure dès lors que, d'une part, la lettre du 23 mai 2017 l'informant de la date de la séance de la commission de réforme ne mentionnait pas la possibilité de faire entendre " la personne de son choix " et que, d'autre part, le médecin de prévention n'a pas été informé de la date de réunion de la commission de réforme et n'a pas remis à celle-ci le rapport écrit prévu par les dispositions de l'article 18 du décret du 14 mars 1986 ;
- la décision du 4 juillet 2017 est entachée d'erreur d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 20 mars 2020, le recteur de l'académie de Créteil conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par Mme B... n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Vrignon-Villalba ;
- et les conclusions de Mme Lescaut, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., attachée d'administration d'Etat, a été affectée au collège Monthéty de Pontault-Combault (Seine-et-Marne) à compter du mois de septembre 2015, en qualité de gestionnaire adjointe au chef d'établissement. Le 12 octobre 2016, elle a effectué une déclaration de service à raison d'un choc psychologique survenu le 30 septembre 2016. Elle a été placée en arrêt de maladie ordinaire à compter du 3 octobre 2016. Elle a fait l'objet d'une expertise médicale le 9 décembre 2016, à l'issue de laquelle le médecin agréé a rédigé un rapport dans lequel il a indiqué que les arrêts de travail et les soins depuis le 3 octobre 2016 ne sont pas à prendre en charge au titre des accidents de service. Par lettre du 10 janvier 2017, la rectrice de l'académie de Créteil a informé Mme B... des conclusions de l'expertise médicale et de la transmission du rapport du médecin agréé à la commission de réforme de la Seine-et-Marne. A l'issue de sa séance du 15 juin 2017, la commission de réforme a émis un avis défavorable à la reconnaissance de l'imputabilité au services de l'état de santé de Mme B... suite aux faits survenus le 30 septembre 2016. Par décision du 4 juillet 2017, la rectrice de l'académie de Créteil a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'état de santé de Mme B.... Par jugement du 17 décembre 2019, le tribunal administratif de Melun a rejeté les demandes de Mme B... tendant à l'annulation de la lettre du 10 janvier 2017 et de la décision du 4 juillet 2017 de la rectrice de l'académie de Créteil. La requérante, qui ne soulève aucun moyen à l'encontre du rejet de ses conclusions dirigées contre la lettre du 10 janvier 2017, doit être regardée comme faisant appel de ce jugement en tant seulement qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 4 juillet 2017.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie.
3. Aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) / 2° A des congés de maladie (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite (...) ". Aux termes de l'article 13 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires, dans sa version applicable au présent litige : " La commission de réforme est consultée notamment sur : / 1. L'application des dispositions du deuxième alinéa des 2° et 3° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 (...) ". Aux termes de l'article 18 du même décret, dans sa version applicable au présent litige : " Le médecin chargé de la prévention attaché au service auquel appartient le fonctionnaire dont le cas est soumis au comité médical ou à la commission de réforme est informé de la réunion et de son objet. Il peut obtenir, s'il le demande, communication du dossier de l'intéressé. Il peut présenter des observations écrites ou assister à titre consultatif à la réunion ; il remet obligatoirement un rapport écrit dans les cas prévus aux articles 26, 32, 34 et 43 ci-dessous. / Le fonctionnaire intéressé et l'administration peuvent, en outre, faire entendre le médecin de leur choix par le comité médical ou la commission de réforme. ". Et aux termes de l'article 26 de ce même décret, dans sa version applicable au présent litige : " Sous réserve du deuxième alinéa du présent article, les commissions de réforme prévues aux articles 10 et 12 ci-dessus sont obligatoirement consultées dans tous les cas où un fonctionnaire demande le bénéfice des dispositions de l'article 34 (2°), 2° alinéa, de la loi du 11 janvier 1984 susvisée. Le dossier qui leur est soumis doit comprendre un rapport écrit du médecin chargé de la prévention attaché au service auquel appartient le fonctionnaire concerné. / La commission de réforme n'est toutefois pas consultée lorsque l'imputabilité au service d'une maladie ou d'un accident est reconnue par l'administration. ".
4. Il résulte des dispositions précitées du décret du 14 mars 1986 que la consultation du médecin du service de médecine préventive est constitutive d'une garantie pour le fonctionnaire demandant le bénéfice des dispositions du 2ème alinéa du 2° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984. Dans ce cadre, le médecin de prévention doit remettre à la commission de réforme un rapport écrit et peut, s'il le demande, obtenir communication du dossier de l'intéressé, présenter des observations écrites ou assister à titre consultatif à la réunion.
5. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le médecin de prévention aurait été informé, ainsi que l'exigent les dispositions de l'article 18 précité du décret du 14 mars 1986, de la tenue de la séance du 15 juin 2017 de la commission de réforme. Cette irrégularité a privé Mme B... C... la garantie attachée à la possibilité, pour le médecin de prévention, de demander la communication du dossier de Mme B..., de présenter des observations écrites ou d'assister à titre consultatif à la réunion.
6. En outre, il ressort des pièces du dossier que le médecin de prévention n'a pas remis de rapport écrit à la commission de réforme, en méconnaissance de ces mêmes dispositions. En effet, le rapport remis à l'administration par le médecin de prévention après qu'il a vu Mme B... le 14 décembre 2016, avant l'engagement de la procédure devant la commission de réforme, et dans lequel il indique qu'il ne juge pas opportun de donner un avis qui pourrait être divergent de celui du médecin agréé devant lequel l'intéressée avait été convoqué, ne saurait tenir lieu d'un tel rapport. A défaut d'avoir informé le médecin de prévention de la date de la séance au cours de laquelle la demande de Mme B... serait examinée et d'avoir sollicité de ce dernier la remise d'un rapport écrit en vue de sa transmission à la commission de réforme, l'administration ne peut pas se prévaloir des diligences qu'elle aurait effectuées et de l'impossibilité alléguée dans laquelle elle se serait trouvée d'assurer cette transmission. Cette seconde irrégularité a privé Mme B... C... la garantie attachée à la remise, à la commission de réforme, d'un rapport rédigé par le médecin chargé de la prévention.
7. Les deux irrégularités analysées ci-dessus sont, chacune, de nature à entacher d'illégalité la décision attaquée.
8. Il résulte de tout de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 4 juillet 2017 de la rectrice de l'académie de Créteil.
Sur les frais liés à l'instance :
9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme B... et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1705213, 1707184 du tribunal administratif de Melun du 17 décembre 2019, en tant qu'il rejette la demande de Mme B... tendant à l'annulation de la décision du 4 juillet 2017 de la rectrice de l'académie de Créteil, ainsi que ladite décision, sont annulés.
Article 2 : L'Etat versera à Mme B... la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
Copie en sera adressée au recteur de l'académie de Créteil.
Délibéré après l'audience du 14 octobre 2021, à laquelle siégeaient :
- Mme Vinot, présidente de chambre,
- Mme Vrignon-Villalba, présidente assesseure,
- M. Aggiouri, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 novembre 2021.
La rapporteure,
C. VRIGNON-VILLALBALa présidente,
H. VINOT
La greffière,
F. DUBUY-THIAM
La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 20PA00681 4