Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 1er avril 2021 par lequel le préfet de police a décidé sa remise aux autorités italiennes, responsables de l'examen de sa demande d'asile.
Par un jugement n° 2107583 du 3 mai 2021 le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 2 juin 2021, et un mémoire, enregistré le 9 juillet 2021,
M. B..., représenté par Me Davila, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2107583 du 3 mai 2021 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er avril 2021 par lequel le préfet de police a décidé son transfert vers l'Italie pour l'examen de sa demande d'asile ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, et de condamner l'Etat aux entiers dépens.
M. B... soutient que :
- l'arrêté attaqué est entaché d'insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;
- il méconnaît l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les articles 1er, 4 et 19 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, eu égard, d'une part, au danger pour sa vie au Pakistan où il sera renvoyé par l'Italie dès lors que sa demande d'asile a fait l'objet d'une décision de rejet définitive assortie d'une mesure d'éloignement ;
- il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 25 octobre 2021, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Par un courrier du 5 novembre 2021, la Cour a informé les parties de la possibilité de relever d'office un moyen d'ordre public tiré du non-lieu à statuer sur les conclusions à fin d'annulation de la décision de transfert aux autorités italiennes dès lors qu'il n'a pu être exécuté dans les délais.
Par un mémoire, enregistré le 23 novembre 2021, le préfet de police conclut, dans le dernier état de ses écritures, au non-lieu à statuer sur les conclusions de la requête, la France étant devenue responsable de l'examen de la demande d'asile de M. B..., à l'expiration du délai de transfert faisant suite au prononcé du jugement du tribunal administratif de Paris entrepris.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 25 juin 2021 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention de Genève du 28 juillet 1951 ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Boizot,
- et les observations de Me Davila pour M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., de nationalité pakistanaise, né le 15 mars 1989, entrée en France de manière irrégulière, a déposé une demande d'asile enregistrée à la préfecture de police de Paris le 12 novembre 2020. Le système Eurodac a révélé qu'il avait déposé une demande d'asile en Italie, le 13 août 2020. Les autorités italiennes, saisies d'une demande de prise en charge de M. B... le 14 décembre 2020, ont fait connaître leur accord implicite pour sa réadmission le 14 février 2021. Par un arrêté du 1er avril 2021, le préfet de police a ordonné son transfert aux autorités italiennes, responsables de sa demande d'asile. M. B... relève appel du jugement lu le 3 mai 2021 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision du préfet de police du 1er avril 2021.
Sur les conclusions tendant à l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a rejeté les conclusions dirigées contre l'arrêté de transfert :
2. D'une part, aux termes de l'article 29 du règlement n° 604-2013 du Parlement européen et du Conseil en date du 26 juin 2013 : " Le transfert du demandeur ou d'une autre personne visée à l'article 18, paragraphe 1, point c) ou d), de l'Etat membre requérant vers l'Etat membre responsable s'effectue conformément au droit national de l'Etat membre requérant, après concertation entre les Etats membres concernés, dès qu'il est matériellement possible et, au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l'acceptation par un autre Etat membre de la requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée ou de la décision définitive sur le recours ou la révision lorsque l'effet suspensif est accordé conformément à l'article 27, paragraphe 3. /2. Si le transfert n'est pas exécuté dans le délai de six mois, l'Etat membre responsable est libéré de son obligation de prendre en charge ou de reprendre en charge la personne concernée et la responsabilité est alors transférée à l'Etat membre requérant. Ce délai peut être porté à un an au maximum s'il n'a pas pu être procédé au transfert en raison d'un emprisonnement de la personne concernée ou à dix-huit mois au maximum si la personne concernée prend la fuite. ".
3. D'autre part, l'introduction d'un recours devant le tribunal administratif contre la décision de transfert a pour effet d'interrompre le délai de six mois fixé à l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013, qui courait à compter de l'acceptation du transfert par l'Etat requis, délai qui recommence à courir intégralement à compter de la date à laquelle le tribunal administratif statue au principal sur cette demande, quel que soit le sens de sa décision. Ni un appel, ni d'ailleurs le sursis à exécution du jugement accordé par le juge d'appel sur une demande présentée en application de l'article R. 811-15 du code de justice administrative n'ont pour effet d'interrompre ce nouveau délai. Son expiration a pour conséquence qu'en application des dispositions du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement, l'Etat requérant devient responsable de l'examen de la demande de protection internationale.
4. Le délai initial de six mois dont disposait le préfet de police pour procéder à l'exécution du transfert de M. B... vers l'Italie a été interrompu par la saisine du magistrat désigné du tribunal administratif de Paris. Ce délai a recommencé à courir à compter de la notification à l'administration du jugement du 3 mai 2021 rendu par ce dernier. Il ressort des pièces du dossier que ce délai n'a pas fait l'objet d'une prolongation et que cet arrêté n'a pas reçu exécution pendant leur période de validité. Par suite, la décision de transfert litigieuse est devenue caduque sans avoir reçu de commencement d'exécution à la date du présent arrêt. La France est donc devenue responsable de la demande d'asile sur le fondement des dispositions du 2 de l'article 29 du règlement n° 604/2013 rappelées ci-dessus. Le litige ayant perdu son objet, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. B... tendant à l'annulation du jugement du 3 mai 2021 en tant qu'il rejeté ses conclusions dirigées contre l'arrêté du 1er avril 2021 portant transfert vers l'Italie.
Sur les frais liés au litige :
5. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme sollicitée sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
D E C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions aux fins d'annulation en tant qu'elles se rapportent à l'arrêté de transfert.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M B... est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 17 décembre 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Carrère, président de chambre,
- M. Simon, premier conseiller,
- Mme Boizot, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 14 janvier 2022.
La rapporteure,
S. BOIZOTLe président,
S. CARRÈRE La greffière,
C. DABERT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 21PA03044