Vu les procédures suivantes :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... A... épouse B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 27 octobre 2020 par lequel le préfet de police a rejeté sa demande d'admission au séjour et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.
Par un jugement n° 2020247 du 23 mars 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, des pièces complémentaires et un mémoire en réplique, enregistrés respectivement les 23 avril, 22 et 27 juillet 2021, Mme A... représentée par Me Okpokpo demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2020247 du 23 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 octobre 2020 du préfet de police rejetant sa demande d'admission au séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un récépissé de dépôt d'une demande de titre de séjour en qualité de conjoint de Français ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- l'arrêté est entaché d'une erreur de fait dès lors qu'elle est entrée régulièrement sur le territoire français ;
- l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur de droit en ce qu'il méconnait les dispositions des articles L. 313-10 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense enregistré le 9 juillet 2021 le préfet de police conclut rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 11 octobre 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 26 octobre 2021 à 12 heures.
Des pièces ont été enregistrées le 10 janvier 2022 pour Mme A..., soit postérieurement à la clôture de l'instruction.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention d'application de l'accord de Schengen du 19 juin 1990 ;
- la directive 2003/109/CE du Conseil du 25 novembre 2003 relative au statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté du 10 mai 2010 relatif aux documents et visas exigés pour l'entrée des étrangers sur le territoire européen de la France ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Boizot a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... épouse B..., ressortissante sénégalaise née le 14 juin 1990, a sollicité le 26 juin 2019 l'octroi d'un titre de séjour en qualité d'épouse d'un ressortissant français, sur le fondement du 4° de l'article L. 311-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté en date du 27 octobre 2020, le préfet de police a refusé de faire droit à sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé son pays de renvoi. Mme A... fait appel du jugement en date du 23 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (...) ". Aux termes de l'article L. 313-2 du même code : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, la première délivrance de la carte de séjour temporaire (...) sont subordonnées à la production par l'étranger du visa de long séjour mentionné aux 1° ou 2° de l'article L. 311-1 (...) ". En vertu de l'article L. 211-2-1 du même code : " (...) Lorsque la demande de visa long séjour émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un ressortissant de nationalité française et que le demandeur séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint, la demande de visa de long séjour est présentée à l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour ".
3. D'autre part, en vertu de l'article 21 de la convention signée à Schengen le 19 juin 1990, les étrangers titulaires d'un titre de séjour délivré par une des parties contractantes peuvent, sous couvert de ce titre et d'un document de voyage en cours de validité, circuler librement pendant une période de trois mois au maximum sur le territoire des autres parties contractantes. Selon l'article 22 de cette convention, les étrangers entrés régulièrement sur le territoire d'une des parties contractantes sont tenus de se déclarer dans les conditions fixées par chaque partie contractante, aux autorités compétentes de l'Etat sur le territoire duquel ils pénètrent. L'article R. 211-32 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que la déclaration d'entrée sur le territoire français d'un étranger ressortissant d'un Etat tiers, qui provient directement d'un Etat partie à la convention dite de Schengen, est souscrite à l'entrée sur le territoire métropolitain. L'article R. 211-33 du même code prévoit que cette déclaration est souscrite auprès des services de la police nationale ou, le cas échéant, des services des douanes ou des unités de la gendarmerie nationale. L'article R. 212-6 dispense un étranger ressortissant d'un Etat tiers, soumis à l'obligation de visa, de souscrire la déclaration d'entrée sur le territoire français s'il est titulaire d'un titre de séjour en cours de validité, d'une durée supérieure ou égale à un an, délivré par un Etat partie à la convention dite de Schengen. Il ajoute que " toutefois, la déclaration doit être souscrite par les résidents d'Etats tiers qui sont désignés par arrêté du ministre chargé de l'immigration. ".
4. En vertu de l'article 2.2 de l'arrêté du 10 mai 2010 relatif aux documents et visas exigés pour l'entrée des étrangers sur le territoire européen de la France, " Tout étranger souhaitant entrer en France dans le but d'y séjourner pendant une période d'une durée supérieure à trois mois doit se faire préalablement délivrer par une autorité française sur son document de voyage un visa pour un long séjour, valide pour ce territoire. ". En application de l'annexe A à cet arrêté, à laquelle renvoie son article 2.2, sont seuls dispensés de ce visa, qui conditionne la régularité du franchissement de la frontière, en dehors des ressortissants et résidents de certains Etats dont ne fait pas partie le Sénégal et des membres du personnel de certaines organisations internationales, les titulaires de la carte de résident de longue durée-CE accordée dans un autre Etat membre de l'Union européenne.
5. Enfin, dans la décision n° 91-294 DC du 25 juillet 1991 déclarant que la loi autorisant l'approbation de la convention d'application de l'accord de Schengen n'était pas contraire à la Constitution, le Conseil constitutionnel a jugé que : " la déclaration exigée par l'article 22 constitue une formalité à laquelle sont astreintes les personnes visées par le texte pour pouvoir pénétrer en France ; qu'il appartient aux autorités nationales de fixer les règles qui leur sont applicables et d'en tirer les conséquences appropriées ". Il en a déduit que " l'article 22 n'est en rien contraire à la Constitution " et notamment n'entraîne pas de transfert de souveraineté. Il résulte de cette décision que la souscription de la déclaration prévue par l'article 22 de la convention d'application de l'accord de Schengen et dont l'obligation figure à l'article
L. 531-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est une condition de la régularité de l'entrée en France de l'étranger soumis à l'obligation de visa et en provenance directe d'un Etat partie à cette convention qui l'a admis à entrer ou à séjourner sur son territoire.
6. Pour rejeter la demande de Mme A..., le préfet de police s'est notamment fondé sur la circonstance que l'intéressée, qui n'avait pu justifier la régularité de son entrée en France, ne pouvait présenter sur place une demande de visa de long séjour en vue de l'obtention du titre de séjour mentionné au 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il ressort des pièces du dossier que, Mme A... est entrée en France le 26 décembre 2017, ainsi qu'elle l'a mentionné dans la fiche de salle qu'elle a renseignée dans le cadre de l'instruction de sa demande, munie d'un titre de séjour temporaire délivré par les autorités belges, valable du 28 avril 2017 au 17 juin 2018. Dès lors, ce titre de séjour ne constitue pas une carte de résident de longue durée - CE au sens de la directive du 25 novembre 2003 et du règlement du 13 juin 2002, de sorte que la situation de l'intéressée ne relevait pas de la dispense du visa de long séjour prévue par les dispositions de l'article L. 311-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par ailleurs, Mme A... n'allègue, ni n'établit, avoir accompli les formalités de déclaration d'entrée sur le territoire français prescrites par l'article R. 211-32 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, auxquelles elle était tenue en sa qualité de ressortissant d'un Etat tiers soumis à obligation de visa. En l'absence d'entrée régulière sur le territoire français, Mme A... ne pouvait présenter directement au préfet une demande de visa de long séjour sur place. Ainsi, en refusant de délivrer à Mme A... un titre de séjour en qualité de conjoint de français aux motifs qu'elle ne justifiait pas d'une entrée régulière en France et qu'elle ne pouvait se prévaloir des dispositions de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de police n'a entaché sa décision ni d'erreur de fait, ni d'erreur d'appréciation, sans qu'y fasse obstacle, à la supposer établie, la circonstance qu'elle poursuit une communauté de vie avec son époux.
7. En deuxième lieu, Mme A..., qui n'a pas formé de demande sur le fondement des dispositions des articles L. 313-10 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne peut utilement invoquer la méconnaissance desdites dispositions à l'encontre du refus opposé à sa demande formulée sur le fondement des dispositions de l'article
L. 313-11-4° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 octobre 2020 du préfet de police. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte, ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme C... A... épouse B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... épouse B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 10 janvier 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Carrère, président de chambre,
- M. Simon, premier conseiller,
- Mme Boizot, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 28 janvier 2022.
La rapporteure,
S. BOIZOTLe président,
S. CARRÈRE
La greffière,
C. DABERT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21PA02168